Thriller/Horrible avec des touches d'humour, le film fait mouche
Réalisé par Jordan Peele
Avec Daniel Kaluuya, Allison Williams, Catherine Keener, Bradley Whitford, Caleb Landry Jones, Marcus Henderson, Betty Gabriel, Lakeith Stanfield, Stephen Root...
Long-métrage Américain
Durée: 01h44mn
Année de production: 2017
Distributeur: Universal Pictures International France
Interdit aux moins de 12 ans
Date de sortie sur les écrans américains : 24 février 2017
Date de sortie sur nos écrans : 3 mai 2017
Résumé : Couple mixte, Chris et sa petite amie Rose filent le parfait amour. Le moment est donc venu de rencontrer la belle famille, Missy et Dean lors d’un week-end sur leur domaine dans le nord de l’État. Chris commence par penser que l’atmosphère tendue est liée à leur différence de couleur de peau, mais très vite une série d’incidents de plus en plus inquiétants lui permet de découvrir l’inimaginable.
Bande annonce (VOSTFR)
Extrait - "Georgina" (VOSTFR)
Extrait - "Quelque chose ne tourne pas rond" (VOSTFR)
Extrait - "Qu'il est beau" (VOSTFR)
Extrait - "Rencontre avec les Beaux parents" (VOSTFR)
Extrait - "Vos Papiers" (VOSTFR)
Ce que j'en ai pensé : Jordan Peele, le réalisateur de GET OUT (c'est son premier long-métrage en tant que réalisateur) est inconnu en France, mais aux Etats-Unis, c'est un humoriste célèbre notamment grâce, notamment, à une série tv humoristique à base de sketchs.
Avec ce petit film horrifique, il met à profit son esprit satirique pour explorer une situation monstrueuse de façon jusqu’au-boutiste avec ce scénario dont il est l'auteur. Son intrigue part sur la volonté de tordre le cou aux idées reçues de tous côtés et au racisme ordinaire, puis nous entraîne sur un registre très glauque qu'il traite avec efficacité. Il maîtrise très bien la construction de son atmosphère inquiétante, qu'il étaye de petits moments d'humour. C'est d'autant plus réussi qu'on se met à la place du personnage principal et qu'on ressent son malaise, ainsi que son inquiétude grandissante. Certains moments sont vraiment angoissants.
Même si à un moment la mise en place de la situation de fond est un peu longue puisqu'on la comprend assez vite et qu'il la fait durer, en tout cas, on reste toujours sur nos gardes parce qu'il réussit à nous surprendre.
Sa mise en scène est vraiment intéressante, il nous permet de visualiser le ressenti de son héros, Chris, impeccablement interprété par Daniel Kaluuya, ce qui nous rapproche de lui parce qu'on comprend ce qu'il vit.
Les acteurs sont tous supers. Allison Williams est très convaincante dans le rôle de Rose Armitage.
Jordan Peele, le réalisateur |
Même si à un moment la mise en place de la situation de fond est un peu longue puisqu'on la comprend assez vite et qu'il la fait durer, en tout cas, on reste toujours sur nos gardes parce qu'il réussit à nous surprendre.
Sa mise en scène est vraiment intéressante, il nous permet de visualiser le ressenti de son héros, Chris, impeccablement interprété par Daniel Kaluuya, ce qui nous rapproche de lui parce qu'on comprend ce qu'il vit.
Catherine Keener et Bradley Whitford interprètent respectivement Missy et Dean Armitage, ils savent parfaitement jouer sur tous les registres.
Caleb Landry Jones interprète un très inquiétant et effrayant Jeremy Armitage.
Lakeith Stanfield interprète Andrew Logan King et il est tout de suite attachant.
Lil Rel Howery interprète pour sa part le sympathique et drôle Rod, un très bon ami.
GET OUT atteint son but. Il dénonce des idées préconçues et nous fait flipper autour d'une intrigue monstrueuse. Dans son genre, il est tout à fait réussi.
Caleb Landry Jones interprète un très inquiétant et effrayant Jeremy Armitage.
Betty Gabriel nous fait dresser les cheveux sur la tête avec son interprétation de Georgina et Marcus Henderson n'est pas moins inquiétant dans son interprétation de Walter.
Crédit photos : Justin Lubin & Universal Pictures
NOTES DE PRODUCTION
(Á ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers !)
UNE TARE AMÉRICAINE : LA GENÈSE DE
GET OUT
La plupart des spectateurs associent le
nom de Jordan Peele au célèbre duo d’humoristes « Key and Peele
», et à la vedette du film KEANU. Connu tout autant pour les
sketchs qu’il écrit que pour ses talents de comédien au cinéma
comme à la télévision, Peele a également fait ses preuves dans le
domaine du doublage et des imitations. Mais ce que la plupart des
gens ignorent, c’est que ce génie de l’humour lauréat d’un
Emmy Award est friand d’expériences radicalement différentes.
Il
fait aujourd’hui ses débuts de réalisateur avec Universal
Pictures, studio qui a réinventé le cinéma d’épouvante, et
Blumhouse Productions, société de Jason Blum, spécialiste de films
d’horreur. Jordan Peele, qui a fait ses débuts d’acteur et de
scénariste sur MADtv, a toujours été amateur de ce genre de
films : il est convaincu que l’humour et l’épouvante
puisent dans la même source d’inspiration… et sont ancrés dans
notre besoin d’appréhender l’absurdité de la condition humaine.
Il considère que nous faisons face à nos problèmes et à nos peurs
par le biais de l’expérience cathartique viscérale du rire ou de
l’abandon à la peur. En somme, en maîtrisant nos émotions, nous
sommes capables de surmonter n’importe quel traumatisme.
Le
cinéaste suggère que cette tension et ce lâcher-prise sont
profondément satisfaisants pour le spectateur : «Dans un cas
on essaye de faire rire, dans l’autre de faire peur. C’était un
défi passionnant pour moi que de mettre tout ce que j’ai appris en
tant qu’humoriste au profit de mon domaine de prédilection :
le thriller », dit-il.
Habitué à explorer la dimension absurde de
l’existence, Jordan Peele a commencé par esquisser une histoire
qui ménage autant de place à l’épouvante qu’à la critique
sociale. Résultat : GET OUT, thriller audacieux qui mêle humour,
satire, et horreur… et qui n’hésite pas à aborder de front
l’état des relations inter-communautaires aux États-Unis à l’heure
actuelle.
« L’idée m’est venue parce que je voulais faire
quelque chose à mi-chemin entre thriller et film d’horreur, mais
qui me soit propre », explique-t-il. « Lorsque je parle de
relations interraciales, ça me ramène à un domaine que je connais
bien : l’humour. C’est un film qui reflète certaines de mes
peurs, et certains problèmes auxquels j’ai été confronté ».
Jordan Peele a imaginé un personnage du nom de Chris, photographe et
artiste noir vivant à New York, qui passe à l’étape supérieure
de sa relation avec sa petite amie blanche : en effet, il s’apprête
à rencontrer ses parents à l’occasion d’un week-end prolongé.
Dès son arrivée dans la maison familiale isolée du nord de l’État
de New York, il commence à se douter qu’il se trame quelque chose.
Lorsqu’il apprend qu’un certain nombre de jeunes hommes noirs ont
disparu dans les environs, ses soupçons s’avèrent être bien plus
que de la paranoïa. Ce qui s’annonçait comme un banal week-end de
rigueur dégénère peu à peu pour culminer en un dénouement
totalement inattendu, atroce, palpitant, terrifiant, mais aussi très
drôle.
Le réalisateur reconnaît qu’il aime jouer avec les
attentes des spectateurs en proposant un renversement de situation
radical. « Le point de départ de GET OUT, c’est cette jeune fille
blanche qui ramène son petit ami noir à la maison sans avoir
réfléchi à tous les tenants et aboutissants de la situation »,
suggère Peele. « Elle imagine que ses parents n’y trouveront rien
à redire. Et c’est bien le cas, sauf qu’il se trame quelque
chose de plus complexe dont on commence à entrevoir quelques aspects
bien plus alarmants ».
Toute une série d’événements un peu
étranges lui mettent la puce à l’oreille. Le jeune homme s’étonne
du comportement curieux des employés de la famille Armitage, et a
l’impression d’être entré dans un monde parallèle lors de la
commémoration annuelle du décès du grand-père. Mais il se rend
compte que ce n’est pas lui qui perd la raison. « Le plus
important, c’était de faire en sorte qu’il ne se passe rien de
trop surprenant trop vite, sinon il deviendrait absurde que les
personnages acceptent la situation telle qu’elle est », explique
Peele. « Le premier élément qui commence à inquiéter Chris,
c’est sa rencontre avec les employés, qui ont l’air un peu à
côté de la plaque. Il n’a jamais rencontré des gens comme eux ».
Pourtant, le scénariste et réalisateur fait remarquer qu’il était
crucial que le héros n’entreprenne rien que le spectateur ne
ferait lui-même dans pareille situation. « C’est tout ce que je
déteste dans un film », déclare Peele en riant. « En particulier
dans un thriller, quand on se demande pourquoi le personnage
n’appelle pas tout simplement les flics avant de décamper. C’est
la raison pour laquelle j’ai fait de Chris un type
intelligent et réfléchi : c’est beaucoup plus intéressant ».
Comme dans les films d’horreur les plus ambitieux (de ZOMBIE de
George Romero, qui s’attache à la période de la guerre du
Vietnam, ou encore LA DERNIÈRE MAISON SUR LA GAUCHE de Wes Craven
qui explore la nature foncièrement violente de l’être humain),
GET OUT fait preuve d’une audace qui dépasse le simple
divertissement. « Le film aborde beaucoup de sujets », relève
Jordan Peele.
« Il parle de la façon dont les États-Unis
envisagent les relations interraciales, et de l’idée que le
racisme est un phénomène abject, une plaie pour l’Amérique. Il
parle aussi d’indifférence, et du fait que si on manque de
vigilance, on peut laisser des atrocités se produire sans réagir ».
Il s’est dit qu’il était grand temps d’innover dans ce domaine
et d’évoquer l’impact de l’appartenance ethnique sur le film
d’horreur. « C’est un aspect essentiel du débat ».
Si la
plupart s’attendaient sans doute à ce que l’homme aux multiples
casquettes fasse ses débuts au cinéma avec une comédie légère,
Peele savait qu’il voulait se lancer dans la réalisation avec GET
OUT. « Il est plus simple d’être à la fois scénariste et
réalisateur, que de se contenter d’un des deux rôles »,
explique-t-il. « Comme ce sont deux étapes successives, on n’assume
jamais les deux en même temps. Le grand avantage, c’est qu’on
peut se permettre de changer des choses au cours du tournage sans
avoir l’impression de trahir le scénario ».
Afin de porter
l’histoire à l’écran, Peele et les producteurs chevronnés Sean
McKittrick et Edward H. Hamm Jr. – qui ont accompagné plusieurs
acteurs faisant leurs débuts de réalisateurs, comme Jason Bateman
et son ingénieux BAD WORDS – ont sollicité Jason Blum, le maître
de la production qui a réinventé le film d’horreur depuis qu’il
a pris les commandes de PARANORMAL ACTIVITY et en a assuré le succès
retentissant. Son dernier projet en date, SPLIT, de l’auteur,
réalisateur et producteur M. Night Shyamalan, est resté en tête du
box-office pendant trois semaines, et c’est le contrat de Jason
Blum avec Universal qui a permis au film de Peele d’être
distribué.
Blum revient sur les raisons de sa collaboration avec
Peele : «Jordan est quelqu’un d’à la fois extrêmement
talentueux et qui sait travailler en équipe. Je vais voir tous les
films d’épouvante, je lis tous les scénarios, et pourtant je n’ai
jamais rien vu de pareil. Quant au changement de direction dans la
carrière de Jordan, je me dis qu’il y a en fait beaucoup de points
communs entre l’humour et l’épouvante : ce sont les deux
genres qui provoquent des réactions physiques dans la salle. Le
timing d’une blague ou d’un moment effrayant, et la façon dont
ils se construisent dans un film, sont très semblables. J’étais
prêt à parier sur ce film rien qu’à la façon dont Jordan en
parlait.
Sean McKittrick est entré en contact avec le scénariste et
réalisateur par l’intermédiaire d’un ami commun : «Je
remercie Keegan-Michael Key qui m’a présenté Jordan en raison de
sa grande passion pour les films d’horreur. Il m’a résumé
l’histoire de GET OUT, et ça m’a semblé tout à fait original.
Que ce soit LES FEMMES DE STEPFORD ou ROSEMARY’S BABY, les meilleurs films
d’horreur révèlent une satire de notre société. Je me suis tout
de suite dit : ‘Il faut absolument qu’on fasse ce film’».
Le producteur, qui a fait ses débuts dans le milieu avec le grand
classique DONNIE DARKO, a été très impressionné par le talent de
l’apprenti réalisateur. Sean McKittrick confie : «Ça a été
l’une de mes meilleures expériences. Jordan travaille
d’arrache-pied et sait exactement où il va. La frontière entre
humour et épouvante est si poreuse qu’il maîtrisait parfaitement
le sujet avant même de s’y mettre. C’est comme s’il avait
passé sa vie à l’étudier ».
Blum reconnaît volontiers qu’il
est attiré par les films proposant autre chose qu’un itinéraire
linéaire. « GET OUT maîtrise tous les rouages du film d’horreur,
mais apporte aussi quelque chose de nouveau », note-t-il. « Ça m’a
rappelé ce qu’on a fait avec AMERICAN NIGHTMARE, une saga de
thrillers d’action et d’épouvante, mais qui disent quelque chose
de notre société. GET OUT fonctionne de la même façon, parce
qu’il propose tout ce qu’on attend d’un très bon film
d’horreur, mais aussi une véritable critique sociale. Jordan a
trouvé un excellent moyen de parler d’appartenance ethnique… et
de pousser la question jusqu’au grotesque. L’histoire est
particulièrement déconcertante parce qu’on est convaincu de
savoir comment la situation va évoluer alors qu’il se produit
exactement le contraire ».
« TU AS ÉTÉ CHOISI » LE CASTING
Pour que le choc culturel à l’œuvre
dans GET OUT soit palpable, le réalisateur a effectué un très
large casting. Qu’il s’agisse de comédiens plébiscités par la
critique ou de jeunes talents à peine débutants, il a engagé des
interprètes venant d’horizons extrêmement différents.
D’ailleurs, Peele considère que sa propre expérience de comédien
lui a été particulièrement utile dans sa direction d’acteur.
«
Il tourne dans les films des autres depuis si longtemps qu’il sait
très bien ce que vivent les comédiens », estime McKittrick. « Il
a réussi à les mettre tous à l’aise. Il maîtrise parfaitement
le fonctionnement de chacun de ses personnages parce que c’est lui
qui les a écrits. Chaque acteur a pu enrichir son personnage de son
propre point de vue, démarche qu’encourage Jordan ».
Protagoniste
du film, Chris Washington est photographe en herbe et Rose est tombée
amoureuse de lui. Peele explique que le personnage a un lourd passé
: « Chris est un garçon extrêmement intelligent qui a subi un
traumatisme affectif et qui exorcise sa souffrance à travers ses
œuvres ». Pour le réalisateur, il était essentiel de choisir un
comédien capable d’exprimer le trouble du personnage, qui craint
l’accueil qu’une famille blanche risque de lui réserver.
« Ce
qui inquiète le plus Chris, c’est que Rose n’a pas prévenu ses
parents qu’il était noir », relève Peele. « Il appréhende une
situation des plus gênantes. À mes yeux, Chris a l’esprit
particulièrement affûté. Il est amoureux mais il reste sur ses
gardes ». Il fallait aussi que le personnage puisse apparaître
comme un nouveau venu au visage affable qui demeure malgré tout un
étranger dans cette famille.
La production a
confié le rôle à l’acteur anglais Daniel Kaluuya. « Daniel est
une véritable star », indique Peele. « Il est extrêmement
attachant et sa capacité à se glisser dans la peau de son
personnage est sidérante. Je l’avais adoré dans BLACK MIRROR et
SICARIO. Il porte le film sur ses épaules ».
Si Chris tâche de
lâcher prise et de profiter de son week-end, il commence pourtant à
se dire qu’il devrait sans doute se fier à son intuition à
l’égard des Armitage. Surtout en ce qui concerne la mère de Rose,
Missy. Psychiatre, elle insiste auprès de Chris pour qu’il se
prête à sa nouvelle méthode de thérapie. Bien que le jeune homme
compte arrêter de fumer, il n’est pas pressé. Pour autant, Missy
ne se montre pas moins insistante. « Chris voit bien que la mère de
Rose est spéciale », explique Kaluuya, « et qu’il s’agit d’une
femme du genre agressif qui obtient ce qu’elle veut sans même s’en
donner la peine. Il se retrouve donc en pleine nuit, sous hypnose,
dans son bureau ».
Rose n’a pas choisi ce week-end au hasard pour
présenter son nouveau petit ami à ses parents. En effet, c’est à
cette date qu’a lieu la traditionnelle garden-party annuelle de son
grand-père aujourd’hui disparu. Au départ, Chris trouve
l’ambiance de cette fête réunissant amis et proches chaleureuse,
d’autant plus qu’il a perdu sa mère très jeune et qu’il a dû
se débrouiller seul presque toute sa vie.
« Pour l’essentiel, ce
film parle d’un garçon qui appréhende ce qui risque de se passer
», commente Kaluuya. « Chris remarque que cette fête est un peu
bizarre et il ressent un fort racisme sous-jacent à son égard. Il a
un échange avec quelqu’un qui lui prouve qu’il n’est pas à sa
place et il veut s’en aller. Il se sent comme un intrus, ce qui le
met mal à l’aise ».
Peele a écrit le personnage de Rose comme la
petite amie idéale du protagoniste. D’ailleurs, elle est tout
aussi mortifiée par l’attitude de sa famille vis-à-vis de Chris
que lui en est gêné. « Il était crucial que ce film reste avant
tout une histoire d’amour », dit-il. « On s’inquiète
constamment pour ce couple. Elle n’est pas parfaite, puisqu’elle
n’a pas anticipé les difficultés liées à une relation avec un
garçon noir, mais elle tente de comprendre ce que Chris doit subir.
C’est une jeune femme compréhensive, drôle, et intelligente qui
soutient son compagnon ».
Pour camper Rose, la production a
sollicité Allison Williams, repérée dans la série GIRLS et dans
des comédies musicales. C’était aussi l’occasion pour Jason
Blum de travailler avec une amie très proche. « Nous nous
connaissons depuis très longtemps », racontet-il. « C’était
donc une formidable opportunité de collaborer avec elle ». «
Allison nous met en confiance et exprime tout l’amour qui, au fond,
est au cœur du film », poursuit-il. « Grâce à elle, on s’attache
à ce couple ». « Rose est une jeune fille accessible, progressiste
et tendre », ajoute McKittrick. « Elle n’est pas forcément
d’accord avec l’opinion de ses parents sur son petit ami noir, et
on n’a jamais le sentiment qu’elle approuve les
dysfonctionnements de sa famille. On croit vraiment qu’elle est du
côté de Chris et qu’elle est sincèrement amoureuse de lui ».
La
comédienne a apprécié d’incarner une jeune femme dont les
véritables intentions sont insoupçonnées. « Rose présente son petit copain noir à ses parents et on
sent bien qu’il y a comme un malaise dès qu’ils arrivent »,
signale-t-elle. « Rose est déchirée entre sa loyauté envers sa
famille et son nouvel amoureux mais elle sait que sa place est aux
côtés de Chris. Elle est prête à ruer dans les brancards pour
sauver son couple ».
Allison Williams a été sensible au fait que
le réalisateur ne se contente pas des conventions du film d’horreur
: « Lorsque le metteur en scène est aussi le scénariste, c’est
un véritable atout », affirmet-elle. « Il y a alors une vraie
cohérence dans la vision du film, les intentions artistiques et le
message ». Les deux jeunes interprètes sont de presque toutes les
scènes de GET OUT et les producteurs ont été séduits par
l’alchimie qu’ils dégagent. « Allison a été la première à
s’engager dans l’aventure, même si Daniel avait répondu au
casting depuis longtemps », intervient McKittrick.
« Ce sont les
deux piliers du film. Allison est une comédienne exceptionnelle. Et
c’est un être merveilleux sur le plateau et dans la vie. Daniel,
lui, est un acteur épatant qui travaille avec tout son corps. Je
n’avais jamais rien vu de pareil. Il s’est tellement investi dans
le rôle qu’il était épuisé entre les prises. La densité de son
jeu a donné un véritable ancrage au film et c’était d’autant
plus important que le spectateur a besoin de s’identifier à un
protagoniste qui est un homme ordinaire ».
S’agissant des parents
de Rose – Dean, chirurgien à la retraite, et Missy, psychiatre –,
la production a engagé deux comédiens aguerris. En choisissant
Catherine Keener, deux fois citée à l’Oscar, aussi captivante
dans DANS LA PEAU DE JOHN MALKOVICH et CAPITAINE PHILLIPS que dans 40
ANS, TOUJOURS PUCEAU, et Bradley Whitford, trois fois nommé au
Golden Globe, aussi fascinant dans À LA MAISON BLANCHE et
TRANSPARENT que dans LA CABANE DANS LES BOIS, la production savait
qu’elle avait affaire à deux comédiens capables de camper des
antagonistes qui n’avaient rien de caricatural.
Pour Blum, les
parents de Rose incarnent l’élite bien-pensante de gauche que
Peele fustige dans son scénario. Si Rose n’a pas raconté à ses
parents que Chris était noir, elle est pourtant certaine qu’ils
n’y verront pas d’objection. Chris découvre que la réalité est
tout autre. « Les parents de Rose commencent à tenir un discours à
la limite du racisme », souligne le producteur. « Ils lui demandent
s’il aime le golf… et puis, ils lui disent qu’ils sont très
fans de Tiger Woods. Ils semblent appartenir typiquement à cette
élite de bourgeois blancs progressistes, très sensibles à la
problématique du racisme. En réalité, ils sont tout l’inverse ».
Tout comme Allison Williams, Whitford était ravi de participer au
film : « J’aime tellement ce que fait Jordan que j’aurais
accepté de faire du ménage pour lui », plaisante le comédien. Il
ajoute : « Je pense que le public va être déstabilisé par la
révélation finale. Elle bouscule totalement les idées les plus
répandues sur le genre ». Peele évoque les personnages et le
travail des comédiens : « Bradley campe Dean Armitage, le prototype
du père sympa et rigolo. Mais dans son cas, mieux vaut se méfier
des apparences. Catherine est formidable dans le rôle de Missy, qui
hypnotise Chris et le déstabilise totalement. Elle incarne la
parfaite belle-mère en théorie, et puis à mesure qu’avance
l’intrigue, on se dit qu’elle n’est pas claire ».
Ultime
membre de la famille de Rose : son frère cadet Jeremy qui cherche
autant à provoquer Chris qu’à apprendre à le connaître. Il est
interprété par Caleb Landry Jones, qui s’est fait connaître avec
la série FRIDAY NIGHT LIGHTS, puis qui s’est imposé auprès du
grand public sous les traits de l’inoubliable Banshee dans X-MEN :
LE COMMENCEMENT. Grâce à l’acteur, Jeremy suscite un sentiment
d’effroi inexplicable qui décontenance Chris dès l’instant où
il fait sa connaissance. « Caleb réussit à se montrer
véritablement inquiétant, même si c’est un vrai bonheur de
l’observer au travail », s’enthousiasme le réalisateur. « Il
donne le ton du film d’une certaine façon ».
S’agissant des
employés des Armitage, Betty Gabriel (AMERICAN NIGHTMARE 3 :
ELECTIONS, GOOD GIRLS REVOLT) campe Georgina, gouvernante de la
famille, et Marcus Henderson (DJANGO UNCHAINED, PETER ET ELLIOTT LE
DRAGON) interprète Walter, le gardien de la propriété. Lorsque
Chris les croise la première fois, il considère qu’ils sont
emblématiques de l’attitude étrange des gens vivant à la
campagne à l’égard des Noirs. Qu’il s’agisse du regard morne
de Walter lors de sa course en pleine nuit ou de l’air hagard de
Georgina s’observant dans un miroir, les deux employés de maison
semblent étrangement absents. Tous les Noirs que Chris croise au
cours du week-end déjouent totalement ses attentes. La situation
dans laquelle le jeune homme se retrouve est tout aussi inconfortable
pour lui que pour le spectateur. C’est en tout cas l’effet que
Peele a souhaité obtenir dans le scénario : « Ce sont des
domestiques noirs comme on en voit traditionnellement dans ce genre
de contexte, et Chris débarque là comme s’il faisait partie de la
famille », dit-il. « Avec Georgina et Walter, Chris ne réussit pas
à instaurer le type de complicité entre Noirs qu’il recherche
chez eux, ce qui l’aliène et l’isole de plus en plus ».
Alors que l’atmosphère semble
parfaitement normale pour la famille Armitage, elle met leur hôte
extrêmement mal à l’aise. « Chris trouve l’ambiance
franchement bizarre », explique Kaluuya. « Les parents et le frère
de Rose sont blancs et les employés sont noirs. C’est juste un peu
étrange pour lui qui vit à New York, l’une des métropoles
culturelles les plus modernes au monde ». Le charmant Chris constate
souvent que Georgina le fusille du regard… ou qu’elle se dévisage
dans la glace. « Georgina s’adore », affirme Betty Gabriel. «
Elle aime son allure, si bien qu’elle se regarde dans la glace
aussi souvent que possible ». La jeune femme commence à révéler
son vrai visage lors de la réception annuelle chez les Armitage. «
Cette fête est une tradition familiale destinée à rendre hommage
aux grandsparents de Rose et à faire en sorte qu’on ne les oublie
pas », note la comédienne. « C’est traumatisant pour Chris et
tous les convives s’intéressent à sa présence… sans doute d’un
peu trop près ». Chris a l’impression que le gardien veille aussi
jalousement sur le secret des Armitage que Georgina. « Walter est le
gardien des Armitage et il est très attaché à cette famille »,
ajoute Henderson. « Il y a quelque chose d’étrange chez lui et il
semble venir d’une autre planète ».
L’acteur a apprécié le
fait que l’intrigue comporte de nombreuses zones d’ombre…
jusqu’à l’explosion finale. « Mon personnage cache un énorme
secret. Jordan m’a remis une note sur le plateau qui disait "Tu
dissimules un secret que tu as vraiment envie de révéler mais tu ne
peux pas le faire", et c’est ce qui a réveillé mon âme
d’enfant de 5 ans ».
Georgina et Walter ne sont pas les
seuls Noirs que Chris rencontre dans la propriété des parents de
Rose essentiellement fréquentée par des Blancs. Lakeith Stanfield,
remarqué pour son interprétation de Snoop Dogg dans N.W.A. –
STRAIGHT OUTTA COMPTON, campe Logan King, jeune homme qui frappe par
son accoutrement d’un autre âge, son discours et ses mimiques.
Seul autre convive noir, Logan ne semble pas dans son élément au
bras de son épouse blanche et âgée. « Logan connaît extrêmement
bien la famille de Rose », détaille l›acteur. « Il les connaît
depuis des années et il est heureux de participer à cet événement
festif à leurs côtés ». Tout comme les autres, Logan cache bien
son jeu. On s’en rend compte lorsqu’un flash du téléphone
portable de Chris se déclenche et provoque chez lui une –
apparente – crise d’épilepsie. Une crise qui le pousse à saisir
Chris et à lui hurler de quitter la maison. « Il subit un
changement terrifiant au cours du film », note Stanfield. « Au
cours de cette transition, il devient un individu socialement
différent de l’homme que tout le monde connaît ».
McKittrick
explique cette métamorphose soudaine : « Au moment où Chris prend
une photo de Logan, le flash de son téléphone déclenche une
pulsion chez le garçon et le pousse à agresser Chris. Il se met à
saigner du nez et on comprend alors qu’il se passe quelque chose de
grave. C’est Missy qui, en qualité de psychiatre, réussit à
ramener Logan à son état antérieur ». Peele se déclare très
fier des seconds rôles. « Betty est formidable dans le rôle de
Georgina, tout comme Marcus dans celui de Walter », s’enthousiasme
le réalisateur. « Lakeith campe un personnage hors du commun : son
registre de jeu est impressionnant et il s’est investi à 100% dans
son personnage ».
Dernier convive de la garden-party :
Jim Hudson, interprété par l’inimitable Stephen Root. L’acteur
s’est fait connaître pour ses nombreux doublages, ses rôles
comiques (MÊME PAS MAL (DODGEBALL) ou 35 HEURES, C’EST DÉJÀ
TROP) et dramatiques (BOARDWALK EMPIRE et DALTON TRUMBO). Il note : «
Mon personnage est aveugle. Selon le point de vue qu’on adopte,il
peut se révéler le genre d’homme avec lequel on n’a pas
franchement envie de se fâcher ou un chic type qui vit en ville ».
Il est crucial pour les comédiens, comme pour Peele et les
producteurs, que le dénouement de GET OUT ne soit surtout pas
dévoilé au spectateur.
« Chris est un jeune homme charmant et tout
le monde a envie de le rencontrer – mais pas forcément pour les
mêmes raisons », précise le réalisateur. « Il faut constamment
se méfier des apparences, y compris pendant la réception et parmi
les convives. Le spectateur ne comprend ce qui se passe vraiment que
tard dans le film ».
L’ange-gardien du récit est ici un agent de
la TSA (l’agence fédérale de sécurité dans les transports) qui
n’est autre que le meilleur ami de Chris, Rod Williams. Interprété
par Milton « Lil Rel » Howery, humoriste qui s’est illustré dans
des émissions comme le « Carmichael Show », Rod incarne le point
de vue du spectateur. Il précise : « C’est à travers lui que le
public assistant à un film d’horreur a envie de crier "Sors
de la maison ! Ne te retourne pas ! N’entre pas dans le placard !"
Il discute souvent au téléphone avec Chris pendant le fameux
week-end. Dans le même temps, Rod comprend ce qui se passe, tout en
tirant de mauvaises conclusions. Il apporte un peu d’humour et de
légèreté et incarne la voix de la raison ».
« QUELQUE CHOSE NE TOURNE PAS ROND »
- LIEUX DE TOURNAGE ET DÉCORS
GET OUT a été tourné à Mobile, dans
l’Alabama, et Peele a réuni le chef-décorateur Rusty Smith, le
chef-opérateur Toby Oliver, le chef-monteur Gregory Plotkin, la
chef-costumière Nadine Haders, le superviseur musical Christopher
Mollere et le compositeur Michael Abels. La météo a alterné entre
soleil et averses et la volonté de réaliser un film ambitieux a
joué favorablement sur l’atmosphère générale.
Si l’équipe a dû relever de
nombreux défis – comme celui de tourner dans les recoins les plus
sombres de la propriété des Armitage en pleine nuit –, la scène
la plus difficile a sans doute été celle de l’agression de Chris
par Logan. Whitford s’explique : « Cette vente aux enchères est
un événement très important. Il y a beaucoup de ventes de charité
destinées à financer des traitements contre des maladies ou à
secourir des victimes de tragédies, mais dans le cas du film, nous
finançons une cause qui dépasse la maladie ». Nadine Haders a
habillé les convives de la garden-party avec des costumes sur mesure
très chics correspondant à l’élite du nord de l’État de New
York. Smith a conçu un décor destiné à mettre chacun des invités
à l’aise… à l’exception du convive qui est bien convaincu
qu’il n’est pas à sa place. Chaque angle de prise de vue élaboré
par Oliver était censé décupler cette impression éprouvée par le
protagoniste. Bien que l’ensemble des convives se montrent affables
et gentiment condescendants à son égard, le moindre plan laisse
planer un sentiment de sourde menace – sans oublier les gros plans
des invités fixant d’un œil méchant Chris lorsqu’ils pensent
qu’il n’y prête pas attention. « Cette scène est très
emblématique du film », note le réalisateur. « C’est une
séquence à la fois terrifiante et drôle. En voyant l’expression
sur le visage de Chris, on comprend bien son sentiment de grande
solitude d’être le seul noir présent à la fête. Tous ceux qui
discutent avec Rose et Chris évoquent leurs propres liens avec la
communauté afro-américaine ». Ce passage du film a eu une forte
résonance chez de nombreux acteurs. « Cela se passe souvent dans la
vraie vie », souligne Peele.
« Aux yeux de tous, Chris est réduit
à n’être que le bon Noir de service. Cette scène est
représentative des événements horrifiques qui se déroulent de
manière souterraine. À un moment donné, Chris aperçoit Logan. Il
est soulagé de croiser un autre Noir mais quand Chris va le saluer,
il est évident que le garçon n’est pas du tout dans le même
esprit que lui. Il est totalement dans son élément parmi ces gens
très lisses et il se sent plus proche des convives que de Chris ».
Après le tournage, la production
évoque ses espoirs pour GET OUT. « Tout d’abord, j’aimerais que
le spectateur ait le sentiment de s’embarquer dans une aventure
pleine de péripéties », souligne McKittrick. « Ensuite, je
souhaiterais qu’il discute du message sociétal du film sur les
préjugés qu’on se forge dès la naissance en fonction du milieu
dans lequel on grandit ». Pour Blum, GET OUT a remarquablement su
mêler les genres. « S’il s’agit bien d’un film terrifiant, et
pas d’une comédie horrifique, il est important que le cinéma
d’horreur ménage des passages drôles », conclut-il. « Les
moments de pure horreur sont d’autant plus efficaces lorsque le
spectateur peut aussi rire de temps en temps. Cela le déstabilise et
quand on cherche ensuite à le terrifier, il réagit d’autant mieux
aux effets horrifiques ». Le mot de la fin revient au réalisateur :
« Mon objectif premier, c’est de divertir le spectateur et
j’espère donc que c’est ce qu’il ressentira pendant la
projection. GET OUT est un film terrifiant, drôle et insolent – et
j’ai vraiment envie que le public se marre ! Au-delà de ces
objectifs, j’espère qu’il parlera du racisme et du cinéma
d’horreur d’une manière inédite ».
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