Drame/Action/Une réalisation claire, des personnages attachants, des combats prenants, mais un scénario très convenu
Réalisé par Steven Caple Jr.
Avec Michael B. Jordan, Sylvester Stallone, Tessa Thompson, Phylicia Rashad, Dolph Lundgren, Florian Munteanu, Russell Hornsby, Wood Harris, Milo Ventimiglia, Robbie Johns...
Long-métrage Américain
Durée: 02h10mn
Année de production: 2018
Distributeur: Warner Bros. France
Date de sortie sur les écrans américains : 21 novembre 2018
Date de sortie sur nos écrans : 9 janvier 2019
Résumé : La vie est devenue un numéro d'équilibriste pour Adonis Creed. Entre ses obligations personnelles et son entraînement pour son prochain grand match, il est à la croisée des chemins. Et l'enjeu du combat est d'autant plus élevé que son rival est lié au passé de sa famille. Mais il peut compter sur la présence de Rocky Balboa à ses côtés : avec lui, il comprendra ce qui vaut la peine de se battre et découvrira qu'il n'y a rien de plus important que les valeurs familiales.
Bande annonce (VOSTFR)
Ce que j'en ai pensé : CREED II referme la boucle débutée avec les ROCKY. Il fait notamment écho point par point à ROCKY IV. On retrouve avec plaisir l'attachant duo Adonis Creed / Rocky Balboa.
Le réalisateur Steven Caple Jr. nous propose une réalisation claire, bien maîtrisée qui met en valeur les instants intimes comme les moments spectaculaires. Il gère les ambiances en fonction des lieux et rend agréable le passage de l'une à l'autre. On rentre dans les combats et on s'intéresse au devenir de Creed à chaque uppercut.
Cependant, le principal défaut du film est son scénario, non pas parce qu'il est mauvais, mais parce qu'il est hyper convenu. Le déroulement est sans surprise et on voit venir les faits longtemps avant qu'ils commencent à se produire, cela a tendance à jouer un peu sur le rythme.
Néanmoins, le réalisateur réussit à nous entraîner dans son histoire notamment grâce aux personnages principaux qui sont joués avec crédibilité et justesse. Michael B. Jordan reprend les gants pour interpréter Adonis Creed. Il livre une performance physique impressionnante. Il est aussi à l'aise pour exprimer les sentiments que la force déterminée.
À ses côtés, Sylvester Stallone interprète le légendaire Rocky Balboa qui dans ces vieux jours sait toujours faire preuve d'une intelligence aigue quand on en vient à ce qu'il se passe sur le ring. L'acteur est touchant. Les échanges entre Adonis et Rocky sont le principal atout du film.
Tessa Thompson est très sympathique dans le rôle de Bianca. Elle apporte une touche moderne et exprime l'inquiétude ainsi que la détermination d'une femme dont le compagnon pratique une profession prenante à haut risque.
Bien qu'il manque d'originalité par son histoire, CREED II répond aux attentes du film de boxe avec le cœur et les poings.
Le réalisateur Steven Caple Jr. nous propose une réalisation claire, bien maîtrisée qui met en valeur les instants intimes comme les moments spectaculaires. Il gère les ambiances en fonction des lieux et rend agréable le passage de l'une à l'autre. On rentre dans les combats et on s'intéresse au devenir de Creed à chaque uppercut.
Cependant, le principal défaut du film est son scénario, non pas parce qu'il est mauvais, mais parce qu'il est hyper convenu. Le déroulement est sans surprise et on voit venir les faits longtemps avant qu'ils commencent à se produire, cela a tendance à jouer un peu sur le rythme.
Néanmoins, le réalisateur réussit à nous entraîner dans son histoire notamment grâce aux personnages principaux qui sont joués avec crédibilité et justesse. Michael B. Jordan reprend les gants pour interpréter Adonis Creed. Il livre une performance physique impressionnante. Il est aussi à l'aise pour exprimer les sentiments que la force déterminée.
Photos credit: Barry Wetcher
Copyright photos @ METRO-GOLDWYN-MAYER PICTURES INC. AND WARNER BROS. ENTERTAINMENT INC
Bien qu'il manque d'originalité par son histoire, CREED II répond aux attentes du film de boxe avec le cœur et les poings.
NOTES DE PRODUCTION
(A ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers !)
ROCKY :
"Il faut que tu te demandes si tu es là pour prouver quelque chose aux autres ou à toi-même".
Avec CREED – L'HÉRITAGE DE
ROCKY BALBOA (2015), immense succès critique et public, la production avait
relevé un défi quasi insurmontable : rester fidèle à l'esprit et au style de la
saga ROCKY, tout en y apposant sa patte. À l'image de son jeune protagoniste,
Adonis "Donnie" Creed, qui cherchait à créer sa propre légende, tout
en marchant dans les brisées de son père, champion du monde poids-lourd, qu'il
n'a jamais connu.
Grâce au personnage
d'Adonis – fils illégitime d'Apollo Creed, adversaire de Rocky devenu par la
suite son coach et ami–, le film a donné un nouveau souffle à la saga ROCKY en
revenant à ses origines : s'attacher à la trajectoire d'un outsider. Le
portrait sans concession d'un jeune boxeur cherchant à réaliser son rêve, mais
aussi en pleine quête d'identité, a séduit toute une nouvelle génération. Un
public qui n'était sans doute pas né quand ROCKY, en 1976, s'est révélé le film
le plus lucratif de l'année, a raflé trois Oscars (dont celui du meilleur film)
sur dix nominations, et a lancé la carrière de Sylvester Stallone.
Après six longs métrages
sortis entre 1976 et 2006, sans oublier CREED en 2015, c'est la thématique de
la renaissance – et la force émotionnelle du rapport père-fils – qui a poussé
la production à imaginer une suite. "C'était
une idée magnifique d'imaginer le personnage d'Adonis Creed, merveilleusement
campé par Michael B. Jordan", s'enthousiasme Irwin Winkler, qui a
produit l'ensemble des films de la saga. "Il
était donc logique que la prochaine étape consiste à projeter le protagoniste
dans l'avenir, à fouiller ses rapports avec Rocky, Bianca –la femme de sa vie –
et sa mère adoptive Mary Anne, et à montrer comment il s'en sort une fois
devenu une star montante de la boxe".
Dans CREED II, Adonis, qui
cherche à s'approprier l'héritage d'un père qu'il n'a jamais connu, affronte
celui-là même qui a tué Apollo… et les propres traumatismes de Rocky, plus de
trente ans après. Tandis qu'Adonis décroche le titre de champion poids lourd, à
la suite de son père et de son mentor Rocky, il s'interroge sur le sens de
cette réussite. Se bat-il pour lui-même ou pour ce père qu'il n'a jamais
rencontré ? Entretemps, un homme, venu d'Ukraine, oblige notre héros à revenir
sur son passé : Ivan Drago, qui a tué Apollo Creed sur le ring avant de perdre
face à Rocky au cours d'un match légendaire entre les États-Unis et l'Union
soviétique. En perdant ce match, il a tout perdu – et son fils Viktor a été
élevé à la dure et a grandi dans la haine, tout en s'initiant à la boxe.
Lorsqu'Adonis remporte le titre de poids lourd, Ivan et Viktor Drago y voient
une opportunité : ils sont résolus à le vaincre pour racheter l'honneur de leur
famille.
Rocky met en garde Adonis
contre les dangers qu'il court, mais ce dernier doit affronter les traumatismes
du passé s'il veut aller de l'avant et être à la hauteur aux yeux de ceux qu'il
aime – et à ses propres yeux. "Je
crois vraiment que la vie est cyclique, et que la roue tourne",
déclare Stallone. Il avait autrefois envisagé de s'attacher au parcours de
Drago dans l'ex-Union soviétique, après sa défaite cuisante face à Rocky. Quand
la saga a commencé à explorer les thématiques de la paternité, de la maternité
et des rapports père-fils, évoqués dans le premier CREED, Stallone a repensé à
Drago. "En m'attelant à l'intrigue
de CREED II, je me suis dit que ce nouvel opus parlerait des fautes du père, et
qu'Adonis ne serait pas le seul fils à porter le poids d'une hérédité", poursuit-il. "Du coup, je me suis posé les
questions suivantes : et si Ivan Drago avait un fils ? Quelle hérédité l'aurait-elle
marqué ?"
"Dans CREED II, le passé de Rocky le rattrape, tout comme Adonis qui
s'y retrouve mêlé puisqu'il s'agit de l'homme qui a tué son père", ajoute la star. "C'est aussi l'épisode le plus terrible de la vie de Rocky
puisqu'Apollo l'a remplacé dans le match-exhibition face à Ivan et qu'il en est
mort. Par conséquent, Adonis estime qu'il doit affronter Viktor, le fils
d'Ivan, pour venger son père. Quant à Ivan, après avoir été défait face à Rocky,
il a tout perdu et n'a eu de cesse d'attiser la haine et la vengeance chez son
fils. Ivan veut désormais prouver au monde qu'il n'est pas un minable et
n'hésite pas à se servir de son père pour y parvenir, alors que Rocky craint
que l'histoire ne se répète".
La volonté d'Adonis de
venger la mort de son père sur le ring en affrontant le fils d'Ivan Drago
semblait une progression évidente, voire inévitable, dans le parcours de ce
personnage complexe. C'était aussi une manière pour lui de se poser les bonnes
questions sur sa vie, son identité et ses motivations pour se battre sur le
ring. "Je me suis dit que c'était
une thématique intéressante, presque shakespearienne", reprend
Stallone. "C'était aussi la
possibilité de faire se croiser deux générations différentes et deux
personnages légendaires".
Dans le film, Adonis est à
l'aube d'une nouvelle vie puisqu'il fonde une famille avec Bianca. Pour Adonis,
qui a grandi sans figure paternelle, le match qui l'oppose à Viktor Drago est
comme la pièce manquante d'un puzzle émotionnel. "Tout s'est mis en place dès lors que Sly a eu l'idée d'introduire
le personnage de Drago", note Jordan, également producteur exécutif de
CREED II. "Il était logique
qu'Adonis devienne boxeur comme Apollo, et que Viktor se batte à la manière de
son père à lui. Dans le milieu de la boxe, les fils de boxeurs passent une
grande partie de leur enfance dans la salle d'entraînement en train d'observer
leurs pères, et deviennent souvent boxeurs à leur tour. C'était une idée
géniale". Une idée qui par ailleurs permet de réunir plusieurs
éléments dramaturgiques et personnages de la saga ROCKY.
"C'était non seulement la possibilité de raconter une histoire
exaltante, émouvante et captivante, mais c'était aussi le prolongement naturel
de la trajectoire d'Adonis Creed et Rocky Balboa", intervient le producteur William Chartoff, bercé
dans son enfance par la saga ROCKY produite par Robert Chartoff, aujourd'hui
disparu. William a également collaboré à ROCKY IV et ROCKY BALBOA (2006) qu'il
a produit, tout comme CREED. "Désormais
champion du monde en titre, Adonis doit soudain faire face à l'auteur de la
mort de son père, puis monter sur le ring pour affronter son fils, une brute
sanguinaire, incarné avec talent par Florian Munteanu. On savait que ces matchs
qui pouvaient être d'une force hallucinante revêtaient une importance majeure
aux yeux de nos personnages et dans la mythologie de la saga".
CREED II fait monter les
enchères pour les protagonistes, tout en offrant aux spectateurs les scènes
d'entraînement et de combat dignes de la saga sportive la plus populaire de
l'histoire du cinéma. On découvrira ainsi le match de championnat opposant
Adonis à Viktor au Stade olympique de Moscou, et un camp d'entraînement rudimentaire
situé dans la Vallée de la Mort (Californie) où Rocky emmène Adonis.
"On cherche toujours à renouveler le genre et à explorer de nouvelles pistes,
si bien qu'on a veillé à ne pas reprendre les mêmes idées qu'on avait abordées
avec – je crois – une certaine réussite dans le premier CREED", note le producteur Charles Winkler, lui aussi
marqué dans son enfance par la saga ROCKY. L'homme a d'ailleurs été producteur
exécutif et réalisateur 2ème équipe de ROCKY BALBOA et producteur de
CREED. "La plupart des spectateurs
connaissent ces personnages, si bien qu'ils n'ignorent rien de leur tragédie et
de l'animosité qui les a divisés autrefois, et c'est un atout. Dans ce nouvel
opus, on fouille davantage les personnages, et on en ajoute de nouveaux grâce
auxquels on peut aborder de nouvelles thématiques".
Derrière la caméra, la
production a su passer le flambeau à un homme qui apporte une dimension
supplémentaire au film. En effet, avant de signer la mise en scène de CREED II,
Steven Caple, cinéaste indépendant, a écrit le scénario d'une minisérie autour
de la vie et de la mort d'Emmett Till et a réalisé la série documentaire
RAPTURE. Son premier long métrage, THE LAND, a été présenté au festival de
Sundance en 2016 et lui a valu d'être classé parmi les "30 personnes de
moins de 30 ans qui comptent à Hollywood" selon le magazine Forbes.
Réunissant un mélange
détonant de personnages, THE LAND a été tourné à Cleveland, la ville natale de
Caple. Le film a été tourné dans le style réaliste et sans concession qui
caractérise CREED et le premier ROCKY. S'il partageait la même vision du projet
que ses auteurs, Jordan raconte que la créativité et la personnalité de Caple
l'imposaient pour réaliser CREED II. "Ryan
Coogler et moi sommes très proches, si bien que lorsqu'il s'est avéré qu'il
n'était pas disponible pour reprendre du service et qu'il a proposé le nom de
Steven – en qui il a confiance et qui appartient à notre génération –, j'étais
très heureux", précise Jordan. "C'était
un bonheur de tourner sous sa direction. Il est extrêmement intelligent et a un
vrai sens du travail d'équipe. Il cherche toujours à nuancer les choses, et a
insufflé son approche naturaliste, émotionnelle et pragmatique au film".
"Si nous avions dû inventer un réalisateur pour reprendre la suite de
Ryan Coogler, tout en s'appropriant totalement le projet, ç'aurait été Steven
Caple Jr", signale Chartoff. "Steven n'a pas tout à fait la même
sensibilité que Ryan. Et Steven sait voir ce qui se passe dans la tête de ses
personnages, à chaque étape de l'intrigue. Il a une formidable capacité de
concentration et il est très doué. On a une chance folle qu'il ait eu envie de
réaliser ce film".
Caple était lui-même un
grand fan de la saga ROCKY. "J'ai
découvert ROCKY quand j'étais gamin, et en le revoyant récemment, je me suis
dit qu'il est toujours d'actualité", dit-il. "On peut toujours se projeter facilement dans
l'histoire d'un outsider, et on peut s'identifier sans mal à un personnage qui
s'engage dans un combat qui le passionne. Tous les épisodes de la saga ROCKY
abordent ces thématiques, et je me suis senti encore plus proche de l'histoire
d'Adonis Creed". Il s'est senti inspiré par le nouveau souffle donné à
la célèbre saga et désireux d'explorer les thèmes et les personnages découverts
dans le chapitre précédent. "Le plus
difficile quand on reprend le flambeau des mains de deux grands artistes, c'est
de rester fidèle à l'héritage de la saga tout en y apposant sa griffe", ajoute
Caple. "Sly est un vrai cinéaste et
un formidable collaborateur, tout comme Ryan, et ils m'ont tous les deux
encouragé à m'approprier le scénario".
Dans CREED II, Caple avait
une autre perspective tout aussi exaltante : creuser un personnage crucial de
la saga, Ivan Dragon, et faire découvrir celui de Viktor Drago. Dans ROCKY IV,
lorsque le boxeur russe de plus d'1m90 se penchait sur Apollo Creed, couvert de
sang et mortellement blessé, et déclarait sans l'ombre d'un remords "S'il meurt, eh bien qu'il meure",
Drago est devenu le salaud le plus marquant de la saga ROCKY – et s'est taillé
une place dans l'histoire du cinéma. Malgré la rivalité entre Creed et Apollo,
Caple tenait particulièrement à éviter de réaliser un "film de vengeance",
en s'attachant à ce qui compte le plus pour Adonis et Viktor : deux fils qui
ont leurs propres rêves, même s'ils sont rattrapés par l'hérédité de leurs
pères… et qu'ils sont liés par la même tragédie.
Au début du film, Ivan et
Viktor habitent en Ukraine. Ils sont affamés et obsédés par la gloire passée
d'Ivan – une gloire dont celui-ci s'est senti spolié et dont son fils a
seulement entendu parler. Car il s'agit du vestige d'une époque qu'il n'a
jamais connue. "Je voulais vraiment
fouiller ces deux personnages", indique Caple. "D'une certaine façon, je remontais aux origines de toute cette
histoire : on revient sur ce qui s'est passé après le match de 1985, sur les
motivations de ces personnages et la souffrance qu'ils ont subie en vivant
comme des parias après la défaite d'Ivan face à Rocky. On n'a pas revu Ivan
depuis de nombreuses années : qu'est-ce qui lui est arrivé ? Qu'est-ce qu'il
cherche au fond ? Je voulais découvrir comment ils ont vécu. C'était vraiment
génial de se plonger dans le passé de Drago et de le revivre sous un angle
inédit".
Le réalisateur était
conscient que si les enjeux de l'affrontement entre Creed et Drago étaient très
élevés, la force dramaturgique du film provenait surtout de la trajectoire
émotionnelle des deux jeunes boxeurs et de leur entourage.
"Il faut toujours se poser cette question fondamentale : de quoi parle
cette saga ?", indique
Caple. "Car tout le monde sait qu'au
fond, le vrai sujet n'est pas la boxe. Il ne s'agit pas de savoir si tel boxeur
assène un crochet gauche ou si tel autre balance un petit coup sec. En
revanche, on s'intéresse aux rapports entre nos deux sportifs et ceux qui se
trouvent à leurs côtés, et même la foule et les médias, et ce qu'ils
représentent. Dans quelle mesure leur état d'esprit est-il marqué par ce
contexte ? En quoi le combat se déroulant sur le ring affecte-t-il les êtres
chers qui les regardent ? On dépasse systématiquement le seul cadre du ring
pour s'attacher à ce qui compte vraiment : le parcours des personnages".
Pour Lundgren, nous sommes
toujours touchés par la plupart des métaphores de la saga ROCKY car on peut
tous s'y reconnaître et qu'elles sont profondément humaines. "Dans cette histoire, c'est assez
magique de voir ces personnages tenter leur chance et se pencher ensuite sur leur
passé", dit-il. "On n'a pas
besoin de s'intéresser à la boxe pour aimer l'un de ces films. En fin de
compte, la boxe n'est pas le vrai sujet : cette saga parle de la vie. Elle
permet aux gens de réfléchir à leur parcours et à leurs rêves. Dans CREED II,
Steven Caple Jr. s'est parfaitement inscrit dans cette tradition. Et son film
va plus loin encore".
LA FAMILLE, LA PATERNITÉ ET LE COMBAT D'UNE VIE
ADONIS :
Tu auras du mal à te regarder en face si tu ne fais pas ce que tu aimes, si tu ne fais plus de musique.Et je ne pourrai plus me regarder en face si je fais pas ça proprement. Je ne suis plus tout seul, maintenant. Et toi non plus.
Je vais le battre !
BIANCA:
Tu as plutôt intérêt !
Adonis et Bianca doivent désormais trouver leur équilibre entre les exigences de leur carrière et de leur notoriété toute nouvelle et leur vie privée. Quand ils se fiancent et décident de fonder une famille, les obstacles qu'ils tentent de surmonter ensemble deviennent l'enjeu du film. "La famille est le sujet principal de ce nouveau chapitre, et de la saga ROCKY dans son ensemble", précise le réalisateur. Rocky a entamé l'entraînement d'Adonis en lui disant que son plus redoutable adversaire n'est pas le type en face de lui sur le ring, mais celui qu'il aperçoit dans le miroir. Dans CREED II, malgré sa réussite, Adonis est toujours en prise avec ces questionnements.
"Je crois qu'Adonis se sent comme un outsider depuis qu'il est
champion", indique Jordan. "Je ne pense pas qu'il ait jamais eu
l'impression d'être un champion, ou qu'il se soit dit que la victoire était
acquise. C'est un sentiment intéressant à jouer. Il a toujours estimé qu'il
avait quelque chose à prouver. Il se demande pourquoi il éprouve un tel
sentiment de vacuité". Avant de pouvoir répondre à cette question et
aller de l'avant, il doit d'abord se pencher sur son passé. La présence de son
père, disparu depuis longtemps, a toujours été celle d'un fantôme. Incapable de
savoir dans quelle mesure il ressemble à Apollo, Adonis ne peut se comparer à
lui qu'à travers la légende, les anecdotes et les symboles. Même Rocky et Mary
Anne ne peuvent guère venir en aide au jeune homme dont le passé comporte de
tels méandres qu'il est difficile de savoir précisément d'où il vient.
"Soudain, une véritable tornade du passé débarque dans sa vie et
l'oblige à s'engager sur une voie périlleuse, à réfléchir à sa passion et aux
raisons précises pour lesquelles il fait de la boxe, et se demander s'il a
vraiment l'étoffe des grands champions", déclare Jordan. "Le film montre qu'il faut parfois affronter les ténèbres et la
violence pour prendre conscience de ce qui compte le plus. Il faut s'attaquer à
ses peurs et accepter de souffrir". Tessa Thompson était ravie de
retrouver le rôle de la chanteuse Bianca car ni elle, ni Jordan, n'avait tourné
dans une suite, et les deux jeunes gens étaient enchantés de poursuivre la
trajectoire de leurs personnages.
"Michael et moi adorons camper ces personnages, et on avait noué une
vraie complicité à l'occasion du premier film", indique Tessa Thompson. "Depuis, on est restés amis et on s'est revus régulièrement. Je
n'ai pas l'impression que le temps ait passé, mais plutôt qu'on a mûri
ensemble". Jordan reprend : "Avec
Tessa, on se dit toujours qu'Adonis et Bianca sont en train de devenir adultes.
Bien évidemment, on était déjà adultes sur le tournage de CREED, mais trois ans
plus tard, on se sent plus mûrs. On a des responsabilités d'adultes".
Il faut dire que Jordan et sa partenaire ont les mêmes problématiques dans leur
vie personnelle que celles de leurs personnages. "Dans ce nouveau chapitre, Donnie et Bianca doivent affronter les
conséquences de la célébrité et du succès", souligne Tessa Thompson. "Et il nous est arrivé pas mal de
choses, à Mike et moi, depuis trois ans. On doit aussi trouver le difficile
équilibre entre notre vie personnelle et notre carrière. C'est intéressant que
ce film s'en fasse l'écho".
Dans CREED II, Adonis et
Bianca découvrent qu'un engagement ne rend pas forcément l'équilibre entre la
sphère personnelle et la sphère professionnelle plus facile à trouver. Surtout
lorsqu'ils apprennent que Bianca est enceinte. "Étant donné qu'ils s'apprêtent à avoir un bébé, les enjeux sont
encore plus importants", signale l'actrice. "Il faut vraiment qu'ils soient sur la même longueur d'ondes".
La musique occupe toujours
une place majeure dans l'existence de la jeune femme. Depuis le premier opus,
elle a conquis un vaste public à Philadelphie, sa ville natale, et commence à
susciter l'intérêt de maisons de disques. Quand elle est engagée par un label
et qu'elle doit se rendre à Los Angeles pour enregistrer un disque, Adonis est
tiraillé : il hésite à quitter son coach et mentor Rocky, surtout à un moment où
il se demande comment défendre son titre de champion, mais il tient aussi à soutenir
Bianca. Et comme celle-ci perd progressivement de son acuité auditive, elle
sait que le temps lui est compté.
"Elle doit prendre une décision rapide si elle veut que sa carrière
décolle", affirme la
comédienne. "Elle est déterminée à
faire de la musique tant qu'elle en est capable". Alors qu'elle a peu
à peu accepté son handicap, elle souhaite s'initier – comme le fait remarquer
Tessa Thompson – à la langue des signes américaine (ASL). Dans le premier opus,
l'actrice a travaillé avec Zinzi Evan – alors fiancée à Coogler et devenue sa
femme depuis – qui a étudié les troubles de la communication et est interprète
en langue des signes américaine. Dans CREED II, Bianca et Adonis se servent de
la langue des signes comme moyen de communication intime. "On s'y intéresse un peu plus dans ce nouveau chapitre car les
personnages se sont appropriés cet outil de communication", reprend
Tessa Thompson. En outre, celle-ci a collaboré à l'écriture des chansons,
retrouvant ainsi le compositeur et producteur Ludwig Göransson qui, de son
côté, a fait appel aux auteurs-interprètes Bibi Bourelly et James Fauntleroy
afin d'explorer les nouvelles sonorités de l'œuvre de Bianca.
"On voulait vraiment que le style et la voix de Bianca prennent de
l'ampleur et touchent un public plus large", analyse l'actrice. "Ce que j'adore chez elle, c'est qu'elle a une vraie force et que
son univers est très riche. Son style a évolué et elle a envie de nouvelles
sonorités. Sa musique reflète désormais sa propre nature. J'adore personnellement
la musique, et celle qu'on a composée est typiquement le genre de musique que
je ferais si j'étais musicienne. C'était formidable parce que j'ai pu endosser
la personnalité de Bianca pour explorer cette forme artistique".
Tessa Thompson, qui vient
d'une famille de musiciens et s'est produite dans un groupe, interprète trois
chansons dans le film. Elle entonne notamment "I Would Go to War" en
précédant Adonis et Rocky qui, eux, se dirigent vers le ring du Stade olympique
de Moscou afin d'affronter Viktor Drago.
"Ce que j'ai aimé dans ce passage, c'est qu'à travers cette chanson,
Bianca dit à Adonis : 'Je sais ce que ce combat représente pour toi, et je suis
avec toi'. Quand elle ne se consacre pas à son métier, mais qu'elle est là pour
soutenir Adonis et s'occuper de leur bébé, elle se demande si ses rêves ne sont
pas inaccessibles. Du coup, quand on la voit chanter, on est heureux pour
elle".
Si Adonis est épaulé par
son père de substitution, Rocky, pour s'entraîner au combat et surmonter les
difficultés de l'existence, Bianca trouve réconfort et conseils éclairés auprès
de Mary Anne. "Je trouve que c'était
très important que le personnage de Mary Anne soit plus présent dans ce film et
que la famille soit plus soudée que jamais", intervient Jordan. "Mary Anne occupe une place cruciale
dans la vie d'Adonis, et Bianca et Mary Anne nouent désormais une vraie complicité.
C'était magnifique. Ce sont des scènes extrêmement émouvantes".
En retrouvant Phylicia
Rashad, Tessa Thompson et Jordan ont eu le sentiment de reformer une famille :
la connivence et l'affection qui unissent les comédiens n'ont fait qu'enrichir
leur jeu. "Quand on se sent à
l'aise, on a davantage de liberté pour prendre des risques", note
Tessa Thompson. "C'était génial de
retrouver Phylicia. Avant même que je devienne comédienne, je l'admirais
beaucoup comme femme et comme actrice. On a passé plusieurs jours dans les
premiers rangs, à proximité du ring, et on a simplement discuté pour apprendre
à se connaître. Je crois que l'affection qu'on se porte mutuellement se
retrouve à l'écran – voilà encore un cas où la vie imite l'art !" Tessa
Thompson et Jordan racontent que la scène du dîner où Phylicia Rashad devine
que Bianca est enceinte avant même les principaux intéressés a été l'un des
temps forts du tournage. "J'ai adoré
voir l'intuition maternelle de Mary Anne à l'œuvre et me plonger dans cette
atmosphère familiale", reprend Jordan. "Car une mère sent ce genre de choses".
"Phylicia est tellement magnifique et élégante à ce moment-là et elle
comprend immédiatement que Bianca et Adonis vont avoir un bébé", ajoute Tessa Thompson. La jeune actrice précise
qu'elle a beaucoup appris en la matière en écoutant et en observant Tiffany
Ward, épouse du boxeur professionnel Andre Ward. Tiffany a confié à Tessa
Thompson et à la production de précieuses informations sur les rapports entre
les boxeurs et leurs conjointes (On la voit brièvement à l'image avec Andre et
leurs deux enfants). "Elle nous a
raconté que lorsqu'Andre affronte son adversaire, elle a le sentiment d'être à
ses côtés sur le ring", dit Tessa Thompson. "Elle a parlé en ces termes à Steven Caple Jr : 'Nous observons
nos adversaires' ou 'Nous nous préparons'. Elle disait constamment 'nous'.C'est
un élément qu'on a pris en compte dans le film – Bianca et Adonis forment
désormais une équipe. Bianca, elle aussi, est sur le ring avec lui".
Quand Bianca demande conseil à Mary Anne pour savoir comment obtenir d'Adonis
le soutien dont elle a besoin dans ses choix de carrière – alors qu'il livre
lui-même un combat physique et affectif –, elle lui répond aussitôt qu'un
couple, ou une équipe, fonctionne dans les deux sens : "Tu a été à ses côtés à chaque étape. Donne-lui l'occasion à son
tour d'être à tes côtés. Vous formez une équipe, et n'oublie jamais que ça doit
fonctionner dans les deux sens", lui dit-elle.
LE COMBAT D'UN PÈRE ET DE SON FILS POUR RÉTABLIR L'HONNEUR DE LA FAMILLE
IVAN
DRAGO :
À cause
de toi, j'ai tout perdu – mon pays, ma dignité, ma femme… Mon fils va anéantir
ton garçon.
Tandis qu'Adonis se débat
avec l'hérédité léguée par son père, à l'autre bout du monde, un jeune boxeur nourrissant
des rêves de grandeur doit assumer le lourd passé de son propre père. Depuis
que le champion olympique Ivan Drago a subi une défaite humiliante dans son
propre pays face à Rocky Balboa, père et fils mènent une vie difficile. Ivan a
perdu bien plus qu'un simple match ce soir-là : il a perdu sa femme, sa maison,
ses privilèges et sa réputation. Vanté par les Soviétiques comme un exemple de
leur supériorité, Ivan s'est ensuite retrouvé comme un paria en Ukraine :
autrefois symbole de l'invincibilité soviétique, il est devenu un homme amer et
brisé.
En revanche, il a toujours
son fils, Viktor. Au fil des années, il a vu chez lui la possibilité de se
venger et de retrouver son honneur. "Ivan
était un champion olympique invaincu, un héros de l'Union soviétique, un homme
très célèbre quand il a affronté Rocky il y a très longtemps", raconte
Lundgren. "Mais il a plongé au point
de travailler comme videur dans un club ukrainien. Il pense que son fils pourra
lui permettre de renouer avec la gloire passée".
Lundgren souligne que
l'identité d'Ivan, sa fierté et son obsession pour Rocky Balboa façonnent sa
vision du monde depuis 33 ans. "C'est
intéressant, à mon avis, de mettre en scène un homme marqué par une telle
souffrance et une telle colère, qui se sent incompris par ses compatriotes, et
qui considère Rocky comme le responsable de son malheur", reprend
Lundgren. "Même si Ivan, bien
entendu, tire des conclusions délirantes, il en veut à la Terre entière. J'ai
joué ce personnage comme un type aveuglé par sa colère et son besoin de
rédemption et conscient que l'affrontement avec Adonis ne le concerne pas
directement, mais concerne son fils. C'est ce qui m'a semblé si complexe, et si
beau, dans cette histoire".
Viktor, de son côté, n'a
jamais rien connu d'autre qu'une existence misérable, entre l'appartement
minable où il habite, les deux boulots qu'il mène de front et son entraînement
quotidien. Grâce à son père, qui le coache, il a remporté quatorze combats
poids lourd par K.O. Mais il est hanté par le passé d'Ivan. "Viktor se bat pour une vie meilleure,
mais il aspire surtout à une famille et à l'amour, qu'il n'a jamais
connus", signale Munteanu. "Sa
mère Ludmilla n'est plus là. Son père a ses propres problèmes qui remontent à
plus de trente ans. Viktor ne se sent pas aimé comme fils, et c'est ce qui le
tourmente le plus". Avec le personnage d'Ivan Drago, Caple souhaitait
révéler des facettes inédites d'un salaud bien connu des fans de la saga. "C'était formidable de le réintroduire
sous un jour nouveau", dit-il. "Dolph
m'a permis de jouer avec ces éléments, et a lâché prise pour camper le rôle,
plongeant dans les profondeurs de son âme – ce qu'il n'aurait pas pu faire à
l'époque de ROCKY IV car le personnage avait alors une autre fonction".
En 1985, le rôle d'Ivan
Drago a été décisif dans la carrière de Lundgren. "Quand j'ai assisté à l'avant-première de ROCKY IV, personne ne
savait qui j'étais", relate l'acteur d'origine suédoise. "Mais quand je suis ressorti de la
projection, tout le monde était au courant !" Pourtant, même s'il est
devenu depuis un comédien et réalisateur reconnu, Lundgren ne se doutait pas
qu'il camperait à nouveau le personnage. "Je
n'aurais jamais imaginé que je me retrouverais, environ 70 films plus tard, à
incarner de nouveau Ivan Drago !" Sa proximité avec le personnage est
palpable à l'écran : "Dans CREED II,
je redécouvre ce personnage 33 ans plus tard, et je dévoile un aspect de sa
personnalité qu'il aurait souhaité révéler à l'époque, mais qu'il n'a pas pu
faire", dit-il. "On
découvre un peu de moi derrière le masque d'Ivan Drago".
Depuis qu'il a tourné
ROCKY IV, on lui mentionne le nom d'Ivan Drago presque tous les jours. "C'est un phénomène qui se produit où
que je me trouve dans le monde", ajoute-t-il. "À croire qu'il fait partie de ces personnages qui deviennent
légendaires au fil des années. Le passage du temps est l'un des thèmes majeurs
du film. Dans la plupart de ses films, Stallone a un don inné pour transposer
la réalité. Il y a des détails sur sa vie qui se rapprochent de celle de Rocky,
et des détails sur la mienne qui me rapprochent d'Ivan Drago. Dans notre
première scène ensemble, Rocky s'exclame 'ça doit faire un million d'années' et
Ivan lui répond 'j'ai l'impression que c'était hier'. Il y a des échos d'une
époque à l'autre, d'un personnage à l'autre".
En 2010, Lundgren, sous
les traits de Gunner Jensen, donnait la réplique à Stallone dans EXPENDABLES :
UNITÉ SPÉCIALE, mais il était loin de s'imaginer qu'il endosserait un jour son
rôle le plus sombre. Jusqu'à ce qu'il reçoive un SMS de Stallone : "C'était un message assez court qui
disait : 'accepterais-tu de jouer Ivan Drago à nouveau ? J'ai une idée qui part
des fautes commises par les pères'", se rappelle Lundgren. "Je me suis dit que c'était
franchement tentant !"
"Même quand les gens prennent de l'âge, ils ne renoncent pas à leurs
rêves, et Drago n'a pas réalisé tous ses rêves", explique Stallone. "Mais je crois que pas mal de gens qui ont connu la gloire ont
ensuite plongé. Ivan et son fils estiment que la vie a été injuste avec eux et
leur a infligé des coups bas. Tout s'est déréglé en un seul moment et leur vie
entière a été anéantie. Ivan considère que Rocky est le seul auteur de son
autodestruction – sa femme et sa famille l'ont quitté, son pays l'a abandonné et il vit dans la pauvreté… Il est
malheureux et veut se venger. C'est ce qu'il fait dans CREED II".
Lundgren s'est senti plus
enthousiaste encore après sa rencontre avec Steven Caple Jr. : il a travaillé
avec le réalisateur pour donner de l'envergure et de l'humanité à Ivan Drago. "Steven Caple est un réalisateur de
très grand talent", affirme Lundgren. "Je l'ai apprécié dès que je l'ai rencontré. J'ai tout de suite senti
qu'il allait faire un boulot formidable. Sa vision des personnages et sa
compréhension des êtres en souffrance et vivant dans le dénuement sont
extraordinaires. C'est impressionnant de voir un si jeune artiste posséder un
tel recul".
Par ailleurs, le parallèle
entre ses propres difficultés relationnelles avec son père et les rapports
entre Ivan et Viktor était très riche à ses yeux. "Je n'ai jamais été très proche de mon père, qui a grandi pendant
la Dépression et a vécu une enfance très dure", détaille Lundgren. "Bien évidemment, quand j'étais gamin,
je ne pensais pas que ce contexte puisse l'avoir marqué et expliquer son
comportement. Au contraire, je me sentais parfois très maltraité. Mon père
était officier dans l'armée et me frappait parfois. C'est assez proche des
relations entre Viktor et Ivan. Je pouvais donc m'inspirer de ma propre
expérience".
"Ce qui est magnifique dans ce film, c'est qu'il parle de la nécessité
d'enrayer le cycle de la violence et de convaincre les pères et les fils de cet
impératif", dit-il. "J'ai pardonné mon père pour tout ce
qu'il m'a fait, mais quand j'étais plus jeune, c'était difficile à vivre. Au
cinéma, ce genre d'histoire me touche toujours".
Ivan parle russe, ce qui
s'est révélé difficile pour le comédien pourtant polyglotte. "J'avais une quarantaine de lignes de
dialogue en russe pour ce film", ajoute-t-il. "On a dû se dire que comme je suis suédois, je pouvais aussi
parler russe ! Mais ce n'est pas le cas. On a fait appel à un coach. Steven
voulait que le résultat soit réaliste, mais ça a été très dur".
Lundgren a également
collaboré avec le réalisateur pour modifier son physique et vieillir le
personnage afin de traduire visuellement la pauvreté et les souffrances
endurées. "Quand j'ai suggéré à
Steven de me jaunir les dents, de m'ajouter des cheveux gris, de me faire un
teint plus pâle et d'avoir l'air amaigri, il était un peu contre au départ,
mais il a ensuite décidé d'aller encore plus loin", relate Lundgren. "Du coup, en plus du reste, je porte
des vêtements très amples, comme s'ils étaient trois tailles trop grands. Par
conséquent, même si je me suis entraîné pour être à la hauteur des scènes de
coaching avec Florian, j'avais toujours l'air maigre".
COMMENT RAFLER LE TITRE
ROCKY :
Écoute, ce garçon a été élevé dans la haine. Ce n'est pas ton cas.Ce type… pourrait être dangereux.
Pour le fils de Drago, Viktor, la production recherchait un acteur qui
ressemble physiquement à ce personnage imposant, mais qui sache aussi jouer et
boxer. Il leur fallait aussi un comédien capable d'incarner un antagoniste, à
la fois redoutable force de la nature sur le ring et fils blessé en quête de
reconnaissance. Les recherches ont duré plusieurs mois et se sont déroulées
dans le monde entier. La production a rencontré des comédiens et des sportifs
de diverses disciplines – arts martiaux, kick-boxing, boxe, et football
américain. Après avoir passé plusieurs mois à consulter des centaines de
photos, vidéos et d'enregistrements d'auditions, Stallone a déniché le boxeur
allemand Florian "Big Nasty" Munteanu, de 106 kg et mesurant 1m95.
"J'ai eu une intuition
concernant Florian", note Stallone. "C'est très difficile d'obtenir tout ce qu'on recherche chez la
même personne dans ce genre de casting. On voyait des types baraqués capables
de boxer mais pas de jouer. Ou des types qui avaient fière allure mais qui
étaient incapables de boxer. Florian est unique en son genre". Munteanu,
poids lourd amateur ayant remporté 68 matchs et perdu 10 autres (avec 6 matchs
nuls), a été informé par son coach que les producteurs de CREED II l'avaient
repéré grâce à ses photos et vidéos, et souhaitaient savoir s'il accepterait de
passer une audition. Peu après, le boxeur d'origine germano-roumaine âgé de 27
ans – bercé, dans son enfance, par la saga ROCKY découverte avec son père,
lui-même fervent boxeur – s'est vu confirmer que "Sylvester Stallone [souhaitait] s'entretenir avec lui via
Skype".
"C'était totalement surréaliste
de passer une audition via Skype avec Stallone, qui était l'un de mes héros
quand j'étais gamin", confie l'athlète. "Surtout pour décrocher le rôle d'un boxeur, moi qui ai grandi en
voyant et en revoyant les films de la saga ROCKY. Je ne pourrais pas pu décrire
ce que j'ai ressenti quand l'écran d'ordinateur s'est allumé, que j'ai vu Stallone
devant moi et pris conscience que ce qui se passait était réel". Suite
à cette audition très positive, Munteanu a eu rendez-vous avec le réalisateur
qui s'est révélé fructueux et la nouvelle de son engagement lui est parvenue
sur un mode très cinématographique ! "J'ai
passé ma dernière audition à Los Angeles, juste avant Noël, et je suis reparti
ensuite chez moi à Munich", se souvient-il. "J'ai reçu un appel de mon agent le 23 décembre au soir, mais mes
parents dormaient déjà. Du coup, le lendemain, j'avais un super cadeau de Noël
pour mes parents : je leur ai appris que j'avais décroché le rôle ! On ne
pourrait pas imaginer un scénario pareil".
Stallone explique que la phase de casting et d'auditions, qui a duré
plusieurs mois, pour dénicher Viktor Drago lui a rappelé les recherches
entreprises, plus de trente ans auparavant, pour trouver un comédien capable
d'incarner Ivan Drago. "Ça nous
avait pris neuf mois, et nous avions consulté des milliers de photos,
d'enregistrements et d'auditions avant de tomber sur Dolph Lundgren",
se remémore Stallone. "Dolph était
incomparable. Il était beau, grand, blond, et il savait boxer ! Il avait été
champion du monde de karaté pendant très longtemps en Suède et en Europe, si
bien qu'il était conscient de ce que nécessitait le rôle. Florian est comme
lui. Il sait vraiment se battre. Et en plus, il est formidablement baraqué et
musclé. Quand je l'ai rencontré, je me suis dit 'Waouh !' Et ensuite, on s'est
rendu compte qu'il savait jouer".
Lundgren a, lui aussi, été frappé par les nombreux points communs entre
Munteanu et lui-même. "Nous avons
beaucoup de choses en commun", dit-il. "Il a le même âge que j'avais quand j'ai incarné Ivan. Je suis
européen, tout comme lui. On a tous les deux commencé à nous entraîner physiquement
et à pratiquer des sports de combat à l'âge de 10 ans. Je me suis dirigé vers
le karaté, et lui vers le kick-boxing et la boxe. Je crois que Michael et
Stallone font à peu près la même taille, et Florian est de la même taille que
moi, si bien que le contraste physique est comparable".
D'après Chartoff, "Si Sly a l'intuition qu'on devrait prendre telle ou telle
décision dans un film de la saga, ou qu'on devrait engager tel acteur ou
imaginer tel personnage, il faut l'écouter, car personne ne connaît ROCKY aussi
bien que lui. Du coup, quand Sly nous a parlé de Florian, on s'est tous
intéressés à ce qu'il avait fait avant, et on a compris qu'il était notre
homme". Très vite, Munteanu était de retour à Los Angeles, puis à
Philadelphie, pour entamer ses trois mois d'entraînement et de préparation à la
chorégraphie nécessaires au tournage des longues scènes de boxe du film.
Lundgren
indique qu'il a passé beaucoup de temps avec Munteanu à Los Angeles après que
ce dernier ait été engagé, ce qui a rendu le tournage plus simple par la suite. "On avait vraiment le sentiment
d'avoir une relation de père à fils, parce qu'il m'a laissé entrer dans son
monde", souligne Lundgren.
"On s'est entraînés, on a dîné ensemble, et on a parlé pendant des heures
des personnages et du film. À l'écran, on ressent notre très grande
proximité".
Jordan,
qui a lui-même passé des mois à s'entraîner et à s'initier à la chorégraphie des
combats avec Munteanu, a également été impressionné par ses talents de boxeur
et d'acteur. "Florian est d'une
grande humilité, il a envie de travailler et d'apprendre, et on a rapidement
noué une vraie complicité sur le ring grâce à cet entraînement", intervient
Jordan. "Il insuffle beaucoup
d'émotion au personnage, et lui donne une vraie envergure. Son jeu est d'une
grande richesse". Pour Munteanu, l'occasion de tourner avec Jordan et
ses "mentors", Lundgren et Stallone, a fait de lui "un meilleur acteur et une personne
meilleure". Il déclare : "On
ne progresse que si l'on s'entoure de gens qui peuvent vous apprendre des
choses – des gens qui sont meilleurs ou plus expérimentés que vous. J'ai
énormément appris au contact de Michael, Sly et Dolph. Je les ai écoutés et
j'ai tâché de m'imprégner de leur expérience".
Munteanu
salue aussi le réalisateur d'avoir su l'emmener dans des directions inattendues.
"Sly m'a trouvé et Steven Caple m'a
fait travailler mon jeu, et a consacré beaucoup de temps à m'accompagner",
ajoute-t-il. "Il m'a toujours
encouragé à être naturel devant la caméra. Je discutais systématiquement avec
lui juste avant la prise pour me mettre dans la bonne ambiance".
L'amitié de Jordan n'a fait qu'accroître l'aisance du jeune boxeur dans ce
nouvel univers. "Avec Michael, on a
presque le même âge, et on attache de l'importance aux mêmes valeurs",
poursuit-il. "À ses yeux, la
famille, c'est sacré et il aime s'entourer de gens loyaux et honnêtes. On s'est
aussitôt très bien entendus, et au bout de quelques semaines, on est devenus
amis. C'était formidable pour moi car, outre le fait que j'étais le petit
nouveau sur le plateau, je n'avais ni famille, ni amis à mes côtés, pendant le
tournage. Michael m'a dit que si j'avais besoin de quoi que ce soit, je pouvais
aller le voir, et j'y vraiment été sensible".
DÉCISIONS PARTAGÉES
ROCKY :
C'est dingue comme ceux que tu aimes le plus sont ceux qui te font le plus souffrir, sans même que tu t'en rendes compte.
L'absence d'un père ou d'une mère peut provoquer une terrible souffrance affective chez un enfant – et cette absence, ou la séparation entre parent et enfant – est un thème central dans CREED II. Le vide laissé par l'absence de son père a été un moteur chez Adonis, avant même que Mary Anne Creed ne le découvre dans un centre de détention pour mineurs, ne l'adopte et ne l'élève comme son propre fils. Et pourtant, la présence de son père lui a toujours manqué. C'est aussi l'absence d'une mère qui a profondément marqué Viktor. Après la défaite cuisante de son père face à Rocky, Ludmilla, mère de Viktor, est partie et a laissé le soin à son mari, homme profondément meurtri et en colère, d'élever leur jeune fils. "Ivan et Viktor ont toujours eu le sentiment d'être seuls et d'avoir le monde entier contre eux", note Lundgren. "Ils étaient pauvres et devaient trimer pour survivre. Très tôt, Ivan a compris que Viktor avait une chance de devenir bon boxeur. Au fil des années, Ivan a constaté que son fils progressait sur le ring et qu'il pouvait se servir de son fils pour en finir avec la pauvreté et renouer avec la gloire".
Quand le deuxième match de
l'histoire opposant Creed à Drago se concrétise, les deux hommes se retrouvent
sous les feux des projecteurs : invités à revenir en Russie, ils font de
nouveau la fierté du pays et sont montrés comme des exemples de la force et de
la résilience russes. "Viktor
souhaite affronter son adversaire car, pour lui, c'est la chance de sa
vie", indique Munteanu. "C'est
son moyen de s'en sortir, et il se bat pour de bonnes raisons. Pour lui, Adonis
Creed n'est pas le problème. Adonis n'est qu'un obstacle dressé sur son chemin.
À ce moment-là, Adonis est au sommet – il est détenteur du titre, il a de
l'argent, et il est respecté. Ce n'est pas le cas de Viktor. Du coup, Viktor
est plus affamé que lui. Les enjeux émotionnels sont très forts, pour Adonis
comme pour Viktor. On sait ce qu'ils ont enduré tous les deux".
LE RÉGLAGE DU COMBAT
ROCKY :
Pourquoi tu veux l'affronter ?Je comprends pourquoi eux ont envie que tu l'affrontes.Et toi ? Qu'est-ce que tu cherches ?
Pour un film de boxe, les
acteurs doivent s'entraîner plusieurs mois pour être en mesure de monter sur le
ring. Pour être en forme et s'initier à la chorégraphie des combats, ils
doivent se soumettre à une discipline de fer, à une grande concentration et à
plusieurs heures de travail exténuant dépassant de loin les exigences
habituelles d'un tournage. À la fois interprète du rôle-titre et producteur
exécutif, Jordan s'est beaucoup investi dans le développement du projet : il
s'agissait d'offrir aux spectateurs les scènes de boxe réalistes et hors du
commun auxquelles la saga ROCKY les a habitués.
Le chef-cascadeur Danny
Hernandez et son équipe ont travaillé avec Caple et Jordan pour pouvoir
surprendre les fans. Comme le dit Hernandez, "Comment s'y prendre pour faire encore monter d'un cran les scènes
d'action ? Surtout face à un boxeur comme Drago, comment faire pour renouveler
le style de combat d'Adonis Creed ?" Étant donné que Jordan savait à
quoi s'attendre pendant l'entraînement, lui qui était passé par là pour le
premier opus, il était conscient qu'il allait devoir se surpasser, y compris
physiquement. "Pour le premier film,
je n'aurais jamais pu m'imaginer ce que je m'apprêtais à faire – mais la
deuxième fois, c'était pire", plaisante Jordan.
Pour le premier chapitre,
le boxeur Andre Ward, qui campe à nouveau le rival poids lourd Danny
"Stuntman" Wheeler, a entraîné Jordan, mais cette fois-ci, comme il
l'exprime lui-même, l'acteur savait comment s'y prendre. "C'est bien de constater qu'il connaît le sport", dit-il.
"Tout se passe beaucoup mieux quand
on est sur le plateau, car il est déjà aguerri. Il sait jouer, mais il sait
aussi boxer avec conviction parce qu'il s'est entraîné très dur".
Jordan était conscient que
le réalisme était décisif. "Il
fallait absolument que je me glisse dans la peau d'un boxeur quand je monte sur
le ring", affirme le comédien. "Il
fallait que je le sente au fond de moi. Je me suis entraîné tous les jours
jusqu'à l'épuisement. Parfois, je m'entraînais deux fois par jour, et je
rentrais chez moi avec les mains enflées. Quand on a confiance en soi et dans
ce qu'on fait, c'est plus facile de se sentir en pleine possession de ses
moyens face à la caméra". Pour y parvenir, Jordan a notamment
travaillé avec l'entraîneur de boxe Patrice "Boogie" Harris qui
déclare : "Jordan a été surnommé 'Monsieur
Pattes d'ours' parce que je travaille pas mal avec ces protections".
Harris, qui dirige un club de boxe dans la région de Washington et de
Baltimore, pratique la discipline depuis 33 ans et a été repéré par Jordan sur
Instagram.
"Je poste des vidéos sur ma page Instagram et un jour mon fils me dit
: 'Il y a Michael B. Jordan qui te suit'", raconte le sportif. "Je lui ai répondu : 'Qui me suit ?' Et du coup, je me suis mis à
le suivre à mon tour. Deux semaines plus tard environ, quelqu'un m'a envoyé un
message privé pour me demander si la perspective de participer à un projet de
film pouvait m'intéresser, et puis on m'a appelé pour savoir si j'accepterais
de travailler sur le plateau de CREED II, car Michael B. Jordan souhaitait
travailler avec moi".
"La collaboration avec Boogie a été décisive dans ma
préparation", indique
Jordan. "Il m'a appris des tas de
choses, y compris des petits détails à connaître sur le ring et dans les coins
auxquels on ne pensait pas, ou des gestes qu'un vrai boxeur ferait dans un tel
contexte. Grâce à Boogie, ma prestation a été aussi réaliste que
possible". Le travail avec les pattes d'ours fait partie intégrante du
conditionnement cardiaque d'un boxeur. Celui-ci doit aussi pratiquer sans
relâche l'entraînement au sac de frappe et au saut à la corde. Les boxeurs font
ainsi des rounds avec des mitaines et s'entraînent à la corde à sauter. Jordan
tenait à ce que Harris le fasse travailler comme un authentique boxeur et le
surprenne par des tactiques inattendues auxquelles il puisse parer afin de
développer sa rapidité et sa coordination.
"Boogie est très doué et maîtrise parfaitement la rapidité et la
technique et il vous fait vraiment progresser", reprend Jordan. "Si Adonis doit être plus rapide et plus fort, et capable de battre
et de surpasser le redoutable Viktor, c'est grâce à Boogie qu'il peut y
arriver". Harris comprend désormais pourquoi Jordan lui a demandé, au
début de son entraînement, de le traiter comme un vrai boxeur. "Et c'est ce que j'ai fait",
assure Harris. "Il a fait preuve de
concentration, comme un authentique athlète. Lui et ses partenaires devaient
être capables de se déplacer comme des boxeurs. Je les ai vus basculer dans un
autre monde en entendant 'Action !' Avec ce simple mot, tout bascule".
Harris a été particulièrement impressionné de voir que les qualités et
compétences des boxeurs – courage, détermination, endurance, volonté,
concentration, force – sont les mêmes que celles des acteurs les interprétant
dans CREED II. Jordan et Munteanu pouvaient certes faire semblant de s'envoyer
des coups pour les besoins du film, mais Harris, malgré sa longue expérience, s'est
dit bluffé par les heures d'entraînement et les efforts déployés par les
acteurs pour parvenir à un tel résultat. "S'envoyer
des coups, les esquiver et se souvenir des combinaisons d'attaques, répéter ces
gestes, encore et encore, sans relâcher la pression – c'est un sacré
boulot", dit-il. "Et il
faut vraiment s'y consacrer totalement pour que le rendu soit réaliste à
l'image".
LE MATCH DU SIÈCLE
VIKTOR :
Et si tu dois y laisser ta peau…
ADONIS :
… j'y laisserai ma peau.
Jordan explique que
lorsqu'il a découvert son partenaire, ennemi juré et adversaire Florian
"Big Natsty" Munteanu, il s'est exclamé : "Dans quelle catégorie est-ce qu'on va se battre ? Il est
gigantesque !" Pendant la pesée, Munteanu se souvient qu'ils
étaient tous les deux conscients qu'ils allaient devoir travailler pour espérer
se battre dans la catégorie poids lourd. "Je
crois bien que Mike pesait environ 86 kg et qu'il faut peser au moins 90 kg
pour être poids lourd", se rappelle Munteanu. "Il pesait 22 kg de moins que moi". Pour surmonter cet
écart, Munteanu a dû perdre du poids et Jordan s'étoffer.
"Je n'ai sans doute jamais été aussi baraqué", note Jordan. "Je
suis plus imposant que dans le premier CREED et BLACK PANTHER. Tout est affaire
d'entraînement. Un boxeur doit avoir une certaine allure et peser un certain
poids. Pour être à la hauteur, on a intensifié les exercices de cardio, en
parallèle de l'entraînement à la boxe, ce qui représente un gros effort
physique – sur un rythme de deux fois par jour, tous les jours pendant six
semaines". Selon Hernandez, Jordan "était
gonflé à bloc et tenait à s'entraîner comme un véritable athlète. Il a fait
preuve d'un engagement total, en se soumettant à un entraînement délirant. On
s'entraînait et on répétait les scènes de combat, côte à côte, jusqu'à ce que
je lui dise : 'tu as besoin de faire une pause', et il se mettait alors à
frapper dans un sac. Il travaillait sans cesse. Il ne s'arrêtait jamais".
Tout comme Jordan,
Munteanu souhaitait, pendant la prépa, acquérir la force et l'endurance dont il
aurait besoin pour les longues de tournage des scènes de boxe. "Il fallait que je sois baraqué, mais
que je fasse fondre aussi ma graisse", note Munteanu. "Je campe le fils de Drago, si bien que
je devais être intimidant physiquement, plus grand et plus imposant qu'Adonis.
Je remplissais parfaitement ces critères. Je ne me suis jamais senti autant en
forme". Boxeur professionnel, il ajoute que la capacité de
concentration et l'éthique professionnelle qu'il a acquises étaient un atout. "Quand on est un sportif
professionnel, il faut toujours de la détermination, de la concentration et
beaucoup de travail. Chacun est responsable de son niveau, en fonction des
efforts et de la concentration qu'il est prêt à consentir. Et pour un film
comme celui-ci, il faut une sacrée concentration ! Je n'avais jamais vécu une
expérience d'une telle intensité sur une aussi longue période auparavant. Il
faut se souvenir des gestes, mais aussi exprimer toute une gamme
d'émotions".
Pour un boxeur
professionnel, habitué à asséner des coups et non à les retenir,
l'apprentissage de la chorégraphie combats pour les besoins d'un tournage n'a
rien d'évident. "Il s'agit de ne pas
faire mal et d'esquiver les coups", indique Munteanu. "C'est différent d'un match de
boxe". Jordan et Munteanu ont travaillé avec Hernandez et son équipe,
dont Daniel Bernhardt et Don Theerathada faisaient partie. Ils ont ainsi progressé
étape par étape, s'engageant dans ce que Jordan appelle un "ballet violent, une sorte de danse brutale que nous répétions
jour après jour. C'était un entraînement extrêmement intensif, mais qui s'est
avéré efficace".
S'il s'agit d'abord
d'esquiver les coups, un match de cinéma se démarque d'un authentique
affrontement sur le ring dans la mesure où il faut tendre les bras et asséner
des frappes plus amples et plus longues – à l'inverse des gestes serrés et
lents des vrais boxeurs. "Tout est
une question de distance", précise Munteanu. "Bien évidemment, la distance pour un film est différente de celle
requise pour un vrai match puisqu'il faut se positionner de sorte à éviter le
contact avec l'adversaire. Il faut donc adapter son style".
Est-il un attaquant ? Ou
est-il plutôt sur la défensive ? Comment bouge-t-il la tête ? Hernandez signale
que grâce à son expérience, Munteanu était constamment prêt à l'attaque, si
bien qu'il fallait faire en sorte d'atténuer ses coups et s'assurer que ses
frappes ne blessent pas son adversaire. "Florian
a très vite compris et a fait preuve d'une grande capacité d'écoute et de
travail", note Hernandez. "Il
n'avait pas d'ego et ne se la jouait pas parce qu'il était lui-même boxeur. Il
est très ouvert et réceptif aux conseils qu'on lui donne, et il s'efforce de
faire les choses bien". Le style de combat est ensuite une étape
essentielle. Car c'est lui qui définit la "personnalité" du boxeur.
Hernandez a fourni à Caple et aux comédiens de la documentation et leur a
montré des images de son équipe pour qu'ils cernent bien les différentes phases
d'un match.
Le chef-cascadeur indique
que sa collaboration avec le réalisateur s'est révélée formidable dans la
mesure où ils ont imaginé seize rounds différents. Caple tenait à ce que chacun
d'entre eux ait sa propre "marque de fabrique" et s'intègre dans
l'histoire, mêlant tactiques de combat et événements et entraînant le
spectateur au cœur de l'action. "C'est
un ballet violent, comme une sorte de chanson ou de chorégraphie",
explique le réalisateur. "Il y a un
début, puis l'action va crescendo jusqu'au point d'orgue, et redescend jusqu'à
la fin. On a imaginé cet enchaînement pour chaque round et inscrit ce schéma au
sein de la chorégraphie des combats".
Hernandez a travaillé avec
chaque comédien, s'inspirant de ses propres talents et forces pour concevoir
son style de boxe. Les acteurs ont également visionné des matchs de boxe et
observé les techniques de boxeurs, puis regardé les films précédents de la saga
afin d'étudier des styles de combat existants, à commencer par CREED afin de se
pencher sur le style mis au point par Jordan. Après avoir travaillé séparément
avec les deux principaux comédiens pour définir le rythme de la chorégraphie,
Hernandez les a réunis afin qu'ils puissent élaborer ensemble le combat. Ils
ont commencé par un round à six mouvements différents. "On a démarré très lentement, afin qu'ils puissent se connaître et
se faire confiance, ce qui permet d'affiner le rythme et la cadence de la
chorégraphie", rapporte le chef-cascadeur. "Au bout d'un moment, le mouvement devient très fluide. À partir
de là, on peut prendre de la vitesse".
"La dimension psychologique et l'attitude à adopter viennent
ensuite", reprend Jordan. "Au départ, il faut apprendre à se
connaître, à nouer une certaine complicité, à se faire confiance sur le ring
pour pouvoir envoyer des coups en étant très proches l'un de l'autre – et il
faut avoir suffisamment confiance en l'autre pour savoir que ses coups sont
assénés en fonction de ses propres mouvements et esquives, eux-mêmes en
réaction aux frappes qu'on reçoit". Son partenaire renchérit : "C'est pour cela qu'il nous a fallu
trois mois de préparation avant d'échafauder cette confiance entre nous. On
voulait que le résultat soit réaliste. Il y avait beaucoup de choses à garder
en tête, et il fallait constamment évaluer les distances. Et pour avoir l'air
crédible, il fallait que je frappe de toutes mes forces – en frappant dans le
vide, pas Michael". Munteanu a très bien su éviter son partenaire,
sauf au cours du dernier round du match opposant Creed et Drago en Russie.
Après que Munteanu ait
discuté avec Caple pour "se mettre
dans le bon état d'esprit" en vue d'une scène très éprouvante
psychologiquement, il est monté sur le ring et le coup qu'il était censé
asséner – un redoutable crochet gauche – a atteint Jordan. "J'ai plongé mon regard dans celui de Florian", raconte
Jordan, "et je me suis dit : 'Il
n'est plus là ! Bon Dieu, ce n'est plus lui !' Je hurlais intérieurement :
'Florian, c'est moi, c'est Mike ! Mais le coup est parti et je l'ai contré. Peu
importe que je le contre ou pas car il est très fort et – Boum ! – je me le
suis pris et je l'ai senti ! Ça m'a rappelé quelque chose. Je savais que
c'était un moment très fort pour Florian : c'est un acteur débutant et il
puisait dans des émotions dans lesquelles il n'avait jamais puisé auparavant.
Je sais ce que c'est. J'étais très fier de lui, parce que je savais qu'il était
naturel. C'est très jouissif pour un acteur de jouer une scène en lâchant prise
comme ça".
Mais pour faire partie de
ce club très fermé, ce sacrifice en valait la peine. "Personne ne sait ce que c'est avant d'avoir vécu une telle
expérience", note Jordan. "Je
ne parle pas seulement de la scène en tant que telle. Je parle aussi de tout le
dispositif : l'entraînement, les longues journées de tournage où on boxe sans
arrêt, la répétition de la chorégraphie, les coups qu'on se prend tous les
jours. Très peu de gens vivent ça. C'est un club très fermé. Et Flo est
maintenant comme mon frère".
D'UNE GÉNÉRATION À L'AUTRE
DRAGO :
Tout a changé ce soir-là.
ROCKY :
C'était il y a très longtemps…
DRAGO :
…Pour moi, c'était hier.
Stallone explique que pendant
que Lundgren et lui observaient Jordan et Munteanu se préparer au combat, le comédien
suédois lui a rappelé l'entraînement qu'ils avaient suivi pour le tournage du
match spectaculaire de ROCKY IV. "Je
ne me rendais pas compte que cette scène, qu'on répétait plusieurs fois par
jour, était aussi extraordinaire", relate Stallone. "On s'est entraînés pendant six mois, à
raison de deux fois par jour, pour notre match. J'avais oublié, mais comme
Dolph est un petit génie des maths" – Lundgren a un Master en
ingénierie chimique et a obtenu une bourse Fullbright pour intégrer le MIT –"il m'a rappelé toutes les heures qu'on
y a consacrées, et les mois de préparation et de répétitions. On faisait une
heure de muscu et une heure de boxe le matin, puis de nouveau l'après-midi.
C'était un vrai challenge. Je lui ai demandé comment on avait bien pu réussir
un truc pareil. Du coup, c'était fantastique de voir Adonis et Viktor Drago,
qui incarnent la nouvelle génération, reprendre le flambeau. Ce match-là a la
même intensité que celui qu'on disputait à l'époque – il est peut-être plus
spectaculaire encore".
Et l'intensité était bien
au rendez-vous quand on sait que Stallone a fini en unité de soins intensifs en
tournant ROCKY IV, après avoir dirigé Lundgren pour qu'il l'affronte
réellement. Ce dernier, qui venait de disputer plusieurs championnats de karaté
en Australie et en Suède, a envoyé un uppercut dans la poitrine de Stallone
avec une telle force que son cœur a été comprimé contre sa cage thoracique.
Transporté par avion depuis le plateau de Vancouver, Stallone a été hospitalisé
à Los Angeles pendant huit jours.
Dans CREED II, les deux
vieux adversaires sont dans les coins, pas au milieu du ring – même s'ils
continuent de se jauger. Et ce n'est pas parce qu'ils sont sur la ligne de
touche que Stallone, 72 ans, et Lundgren, 61 ans, sont trop vieux pour
s'affronter. "Si on demandait à Sly
de monter sur le ring avec Dolph, ils seraient sans doute capables de boxer
pendant une douzaine de rounds, sans problème", signale Hernandez. "Ils n'ont jamais perdu leur éthique
professionnelle. Ils ont toujours été en grande forme, ont travaillé dur, et ça
se voit".
AU CŒUR DE L'ENFER
ROCKY :
Tu veux retourner en enfer, alors autant t'y habituer tout de suite.
Tandis que l'effervescence
s'intensifie autour d'un nouveau match entre Creed et Drago et qu'Adonis ressent
une pression de plus en plus forte, Rocky sait qu'il est temps de revenir à
l'essentiel : il ne faut plus se laisser distraire par le superflu et se rendre
là où Adonis peut affronter et vaincre ses démons intérieurs. Un endroit où "les gens meurent pour mieux
renaître" : il s'agit de Purgatoria El Box, un camp d'entraînement des
plus rudimentaires pour que les boxeurs se retrouvent face à eux-mêmes dans le
cadre aride et désertique de la Vallée de la Mort.
C'est là qu'Adonis,
débarrassé de ses gants et contraint de puiser au fond de lui-même pour trouver
le boxeur qui sommeille en lui, doit taper dans des pneus et des sacs tachés de
sang, frapper le sol avec une masse, et courir le long d'une route à l'asphalte
brûlant. Au bout de dix semaines de tournage à Philadelphie, Caple, Jordan,
Stallone et l'équipe technique se sont rendus à Deming, au Nouveau-Mexique (qui
a campé la Vallée de la Mort) pour tourner les scènes se déroulant dans le
désert. "Quand on a quitté
Philadelphie et qu'on a débarqué en plein désert du Nouveau-Mexique, on avait
le sentiment de plonger au cœur des ténèbres", raconte le directeur de
la photo Kramer Morgenthau, en riant. "Dans
le scénario, on est censés terminer le tournage dans un lieu appelé
'purgatoire'. Rocky emmène Adonis dans ce campement rudimentaire, dans un trou
totalement paumé, afin qu'il soit fin prêt pour son match contre Viktor".
Autant dire qu'il
s'agissait d'un bouleversement majeur pour une équipe qui venait de passer six
mois, depuis janvier 2018, à tourner en extérieurs sous des températures
glaciales, ou dans des salles de sport, des hôpitaux, des appartements et les
studios de SunCenter à Aston, en Pennsylvanie. Situé à deux heures de route
d'El Paso, au Texas, sur l'autoroute I-10 bordant la frontière américano-mexicaine,
la ville de Deming était le site idéal pour le campement de Purgatoria El Box
et sa région digne de l'enfer.
Le passage des espaces
urbains et des salles de sport encombrées aux paysages désertiques du sud-ouest
américain distingue CREED II des précédents films de la saga. "Les séquences de montage
d'entraînement font partie de la légende de ROCKY", affirme Caple. "Il est important qu'elles soient
filmées d'une certaine manière. Dans la boxe, on est confronté à son
adversaire, mais en réalité, on est surtout confronté à soi-même. On y fait
allusion dans la séquence de montage".
Le paysage désolé et la
solitude d'Adonis renforcent non seulement l'isolement total d'Adonis, qui fait
partie de la trajectoire d'un boxeur, mais ils enrichissent encore à
l'iconographie de la saga. "C'est
génial de trouver de nouveaux moyens de renouveler cette iconographie",
indique le chef-opérateur. "C'est, à
mon avis, le rêve de tout directeur de la photo de collaborer à un film de boxe
car il s'agit d'un sport très visuel". L'image d'Adonis en train de
boxer contre un adversaire imaginaire au clair de lune, éclairé par les flammes
vacillant derrière lui, illustre les propos de Morgenthau. "Parfois, il faut affronter le feu avant de voir ce qui compte
vraiment", signale Jordan. "Adonis
a besoin de passer par là. C'est celui qui en veut le plus qui gagne".
LE STYLE VISUEL
ROCKY :
Il faut parfois revenir à l'essentiel.
Pour l'esthétique du film,
Steven Caple a été marqué par l'atmosphère visuelle du premier opus. Le style
réaliste et sans concession de CREED était en soi un hommage au ROCKY de 1976.
Pour ce nouveau chapitre, le réalisateur a collaboré avec le directeur de la
photo Kramer Morgenthau, le chef-décorateur Franco-Giacomo Carbone, le
directeur artistique Jesse Rosenthal et la chef-costumière Lizz Wolf afin de
mettre au point une esthétique alliant des clairs obscurs et des ombres aux
éclairages contrastés des matchs-exhibitions.
"Avec Steven, on voulait vraiment trouver notre propre style tout en restant
fidèle à l'esthétique imaginée par Ryan et Maryse", indique le chef-opérateur. "Steven vient du cinéma indépendant et souhaitait que le film soit
réaliste, avec de la matière, des premiers plans très riches, et une grande
proximité avec les personnages". Caple tenait à multiplier les
mouvements de caméra et les cadrages et à utiliser toute la gamme chromatique
pour définir la tonalité d'ensemble et mettre en valeur les scènes d'action. Il
a abordé l'esthétique de chaque plan, comme il a l'a fait s'agissant de la
chorégraphie des combats avec les acteurs et Hernandez : il a mis à profit les
angles de caméra, le cadre, le rythme et les mouvements d'appareil pour
rehausser l'impact dramaturgique ou ajouter du sens à une scène. Dans son
approche pragmatique, Caple utilise le jeu des matières, la variété des points
de vue et le son pour plonger le spectateur au cœur des événements vécus par
les spectateurs.
Par exemple, on voit
Bianca, à proximité du ring, observer Adonis qui encaisse coup retentissant
après coup retentissant. Quand elle éteint son appareil auditif qui fonctionne
mal, Caple adopte le point de vue de Bianca et le bruit assourdissant cesse
soudain : la plongée brutale dans le silence ne fait que souligner la violence
de chaque coup du combat auquel elle assiste.
L'intrigue de CREED II se
déroule aux quatre coins du monde, de Philadelphie à New York, de Los Angeles à
Las Vegas, de Moscou à l'Ukraine, en passant par la Vallée de la Mort. L'une
des plus grandes difficultés pour une équipe de production s'attelant à un film
se déroulant dans plusieurs lieux consiste à trouver la plupart des décors à
proximité du studio ou de la ville où se concentre l'action. En ce qui concerne
la saga ROCKY, la ville en question est Philadelphie, en Pennsylvanie. "On a eu la chance de trouver des
décors qui nous ont permis de rester essentiellement au même endroit – à
Philadelphie, ville natale de Rocky", précise Morgenthau. "Les habitants de Philadelphie sont
adorables et sont fous de leur fils spirituel, Rocky Balboa".
Les spectateurs
reconnaîtront plusieurs sites – qu'il s'agisse de maisons, bâtiments, magasins,
monuments et autres lieux. "On s'est
servi de pas mal de lieux du premier ROCKY, et de certains découverts dans
ROCKY BALBOA et CREED", indique la régisseuse d'extérieurs Patricia
Taggart. "Il y a pas mal de sites
emblématiques dans ce film, devenus reconnaissables du public et des touristes
qui viennent les voir. Je pense à des endroits comme le Victor Café, la maison
de Rocky à South Philly [au sud de la ville, NdT], le marché italien et, bien
entendu, les célèbres marches du Philadelphia Museum of Art. Je ne vois pas
d'autre personnage aussi étroitement associé à une ville que Rocky Balboa avec
Philadelphie". Pendant le tournage du premier opus, le jeune acteur et
l'équipe technique étaient sidérés par les réactions suscitées par le passage
de Stallone. "Ils criaient 'Rocky',
plus encore que 'Sly'", raconte Jordan. "C'est totalement surréaliste ! Il y a même une statue –
représentant un homme dans le rôle d'un personnage de fiction – érigée devant
le musée, et les visiteurs du monde entier se prennent en photo avec
elle". La statue de Rocky, représentant Rocky Balboa les bras levés en
signe de triomphe, est devenue l'un des sites touristiques de Philadelphie les
plus populaires. Elle avait d'abord été utilisée dans ROCKY III, comme
accessoire au sommet des 72 marches de l'escalier du musée. En 1982, Stallone a
confié au sculpteur A. Thomas Schomberg la mission de créer, pour les besoins
du film, la fameuse statue en bronze : par la suite, celle-ci a été offerte à
la ville. La statue de Rocky a d'abord été posée en haut de l'escalier – les
"Rocky Steps", comme on les appelle dans le monde entier –, puis elle
a été déplacée à l'entrée du Spectrum où elle restée jusqu'en 2002. Elle
revient au musée en 2006 où elle fixée sur un piédestal à droite de l'escalier,
sur Benjamin Franklin Parkway, à proximité de Logan Square.
Entretemps, les
"Rocky Steps" ont continué d'attirer les touristes, avec ou sans
l'effigie de Rocky au sommet. Tous les jours, quelle que soit la météo, des
dizaines de gens arpentent l'escalier, en marchant, en courant ou en piquant un
sprint, et lèvent les bras une fois parvenus au sommet.
"Philadelphie est une ville totalement à part – c'est là que tout a
commencé", précise Stallone.
"Je joue aussi le personnage de
Rambo depuis des années, et on m'associe avec lui, mais en ce qui concerne
Rocky, c'est encore autre chose. Il représente monsieur tout-le-monde,
l'outsider qui tente de relever un défi, et les habitants de Philadelphie l'ont
adopté d'une manière incroyable. Je crois même que si Rocky Balboa se
présentait aux municipales, il serait élu maire de Philadelphie".
Dans CREED II, on aperçoit
à quelques reprises la statue de Rocky et l'escalier, notamment lorsque Ivan et
Viktor Drago, qui viennent de débarquer, surveillent le célèbre site consacré à
leur adversaire. Quand Rocky refuse d'entraîner son protégé pour le match,
Adonis et Bianca s'installent à Los Angeles où celle-ci peut enregistrer son
disque. Au volant, Adonis jette un œil à la ville qui défile, et aperçoit les
"Rocky Steps" et la statue. "Ces
sites emblématiques orientent largement le style du film et possèdent leur
propre langage visuel", déclare Morgenthau. "Par moments, on en a
repris les codes visuels, et à d'autres moments, on s'en est éloignés".
Le Victor Café, restaurant
italien situé sur Dickinson Street à South Philly, n'a pas nécessité
d'importants aménagements pour devenir Adrian's, bar et restaurant de Rocky,
d'abord aperçu dans ROCKY BALBOA. Max's Cheesesteaks, sur Germantown Avenue
(également à South Philly), est un lieu chargé de symboles pour Bianca et
Adonis car leur premier rendez-vous amoureux a eu lieu à l'Eagle Bar, jouxtant
le restaurant. Dans CREED II, c'est aussi là qu'ils aperçoivent, à la
télévision du bar, Drago et l'entendent défier Adonis. Quant à la maison de
Rocky, au 2504 Federal Street, à South Philadelphia, elle est aussi devenue un
site touristique pour les fans de la saga.
Certains spectateurs
reconnaîtront deux salles de sports. À commencer par Little Duke's Gym, où
Apollo Creed s'entraînait autrefois et où Adonis, dans le premier opus, fait la
connaissance de Danny "Stuntman" Wheeler et doit lui céder sa Mustang
adorée suite à un pari impulsif… puis la gagne à nouveau – avec son titre de
champion poids lourd – au début de CREED II. On aperçoit aussi le Front Street
Gym dans le quartier de Kensington, à North Philly [au nord de la ville, NdT],
où Rocky entraîne Adonis. C'est un autre site emblématique pour tous ceux qui
recherchent authenticité et cachet. De vieux pots de peinture sont suspendus au
plafond pour colmater les fuites d'eau, d'énormes sacs de frappe sont réunis
par du chatterton et se balancent le long de chaînes rouillées, elles-mêmes
fixées à des planches qui parcourent le plafond. Et la salle n'a guère changé
depuis longtemps…
La production a été ravie
de dénicher de nombreux décors, très différents, dans la région de
Philadelphie, permettant d'y tourner des scènes se déroulant en Russie, en
Ukraine, à Las Vegas et à Los Angeles.
La production a souvent
utilisé un motif visuel récurrent dans la saga : la silhouette de Rocky ou
d'Adonis, évocatrice d'émotions diverses, en fonction de la scène. "L'iconographie de la silhouette de
Rocky est très identifiable pour les gens", reprend le chef-opérateur.
Celui-ci a d'ailleurs souvent utilisé des silhouettes, des projecteurs, et des
clairs obscurs pour souligner l'état d'esprit des personnages.
"On s'est servi des silhouettes pour montrer la solitude de Rocky et
le sentiment d'isolement d'Adonis", poursuit-il. "Concernant
Adonis, on tenait à évoquer sa vulnérabilité et le fait qu'il vive dans l'ombre
de son père, si bien qu'on l'a filmé, en silhouette, sur de vastes
arrière-plans et des fresques murales d'Apollo. C'est ce qui nous a permis
d'indiquer visuellement le poids de l'hérédité qui pèse sur ses épaules, et la
pression qu'il ressent – lui, le fils d'une légende de la boxe – pour être à la
hauteur des attentes".
"Tous les jours, Steven et Kramer tournaient au moins un ou deux plans
qui me laissaient bouche bée d'admiration", signale Chartoff. "Ils en disaient bien plus que ce que les personnages exprimaient
à l'image". Comme dans cette scène où Adonis se gare devant chez
Little Duke's, descend de sa voiture et entre dans la salle. Mais le sous-texte
est ici très éloquent : Adonis vient de battre Wheeler, entraîné par Little
Duke, pour remporter le titre de champion poids lourd ; il est venu à
Philadelphie pour s'entraîner avec Rocky, et non Little Duke, lui-même fils de
l'ancien coach d'Apollo, Duke, qui fait partie de la "famille" du
champion décédé… et désormais, Adonis a besoin de l'aide de Little Duke puisque
Rocky lui a refusé la sienne.
C'est ainsi que Caple et
Morgenthau filment cette scène qui pourrait sembler inutile, mais qui permet de
camper le parcours d'Adonis en images. Une fois que celui-ci s'est garé, il
reste dans la voiture et la caméra s'introduit dans l'habitacle, juste derrière
lui. Hésitant à pousser la porte de la salle de sport, Adonis regarde autour de
lui et on aperçoit alors ses yeux – cadrés dans le rétroviseur – qui regardent
fixement à travers le pare-brises : il s'agit d'une immense fresque murale
d'Apollo Creed que distingue le spectateur à son tour.
Le style visuel des scènes
familiales – réunissant Adonis, Bianca et leur bébé – possède une tonalité
différente. "C'était fondamental
pour Steven de cerner la proximité de cette petite famille, de montrer leurs
moments d'intimité et de faire en sorte que la caméra soit aussi discrète que
possible", analyse le chef-opérateur. "La palette de couleurs est plus chaleureuse et la caméra est
immobile, comme si le spectateur était dans la pièce et observait ces moments
d'intimité, et ces jeunes parents découvrant leur nouveau-né". Pour
Caple, ces passages cadrés en plans fixes offrent un instant de répit et
tranchent avec les scènes riches en émotions, captées par une caméra
extrêmement mobile. Par conséquent, on ressent, tout comme Adonis et les autres
personnages, l'alternance entre des pics d'angoisse et de stress et des moments
plus doux et plus sereins.
À l'inverse, le
réalisateur souhaitait multiplier les angles de prises de vue
"subjectifs" pour les scènes d'action et de suspense, à l'instar des
séquences de boxes, afin de plonger le spectateur au cœur de l'action. "Pour ces scènes-là, on a utilisé tous
les dispositifs de prises de vue imaginables", précise Morgenthau. "On a eu recours à une grue
télescopique, un cardan, des Dollys… On a même utilisé des drones et des caméras
spéciales pour filmer le ring en plongée. On a aussi beaucoup filmé caméra à
l'épaule. Bref, je crois bien qu'on a fait appel à toutes les options de prises
de vue ! On est vraiment allés dans toutes les directions possibles pour ce
film".
Le réalisateur souhaitait
ralentir l'action à certains moments des matchs pour souligner les coups
physiques et affectifs de ce "ballet violent". Morgenthau s'est alors
servi de la caméra Arriflex Arri Alexa, équipée d'objectifs Panavision, mais
aussi de la Phantom à haute vitesse permettant de filmer à 1000 images par
seconde. De nombreuses scènes ont par ailleurs été tournées à 120 images par
seconde. Les scènes de boxe ont été soigneusement préparées à l'avance : les
différentes phases qui les composent ont chacune leur propre style, mais se
fondent harmonieusement dans la palette de couleurs associée à telle ou telle
ambiance.
"Tout d'abord, les sorties de ring des boxeurs étaient très
importantes aux yeux de Steven, si bien que nous avons fait pas mal de
recherches pour savoir à quoi ressemblaient les vrais matchs, et on a conçu ces
sorties de ring en fonction de la personnalité des personnages", ajoute le directeur de la photo. "Quand ils sont au tapis, outre
l'éclairage du ring, on a travaillé sur les éclairages autour du ring qui
permettent d'obtenir l'atmosphère recherchée".
Caple souhaitait que les
éclairages dynamiques utilisés pour les matchs traduisent les émotions de la
scène, si bien qu'il s'est lancé dans des recherches avec son chef-opérateur. Quand
le réalisateur a découvert, au cours d'un match disputé par Klitschko, un ring transformé
en cage et traversé de rayons de lumière, il a souhaité un dispositif
similaire. Il a soumis l'idée au concepteur éclairages John Duncan Jr.,
habitant Philadelphie, et celui-ci a imaginé les éclairages utilisés autour du
ring et au sol de l'arène pendant les matchs. "On s'est inspiré de ce que j'avais vu et on a conçu notre propre
éclairage : on a le sentiment que les rayons de lumière encerclent le ring en
tombant du plafond comme des colonnes", signale le réalisateur. "On dirait une cage et j'ai été surpris
par la force et la dimension spectaculaire du résultat, et par la manière dont
ce dispositif souligne l'émotion de la scène à plusieurs égards".
"C'est très impressionnant d'observer deux individus qui s'affrontent
de manière bestiale, mais avec un sens artistique indéniable – et cela résume
très bien la boxe", affirme
Chartoff. "C'est un spectacle
fascinant". Lundgren intervient : "Quand
on a deux types sur un ring, on a l'impression de remonter à la Rome antique et
aux combats se déroulant au Colisée. Il s'agit d'une forme de combat à la vie à
la mort qu'on encadre par des règles, puis qu'on laisse se dérouler. On peut
tous se reconnaître dans une lutte pour la survie et la volonté de trouver sa
place dans le monde. La boxe est une métaphore de la survie".
Mais comme le précise
Jordan, CREED II aborde cette thématique, mais aussi les trajectoires de Rocky,
Adonis, Bianca et Mary Anne qui sont si chères aux spectateurs du monde entier.
"On retrouve une histoire d'amour,
l'importance de la famille, les scènes d'action, les matchs de boxe et, au
fond, l'itinéraire d'un outsider", conclut l'acteur. "Adonis est encore en train d'apprendre
et de mûrir, si bien qu'il s'agit d'un film crucial pour son personnage. C'est
assez exaltant".
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