jeudi 23 mai 2019

ROCKETMAN



Biopic/Comédie musicale/Un film hommage enthousiasmant et une superbe performance de Taron Egerton dans le rôle principal

Réalisé par Dexter Fletcher
Avec Taron Egerton, Jamie Bell, Richard Madden, Gemma Jones, Bryce Dallas Howard, Steven Mackintosh, Gemma Jones, Kamil Lemieszewski, Alison Ball...

Long-métrage Britannique  
Durée : 02h01mn
Année de production : 2019
Distributeur : Paramount Pictures France 

Date de sortie sur les écrans britanniques : 22 mai 2019
Date de sortie sur nos écrans : 29 mai 2019

L'affiche du film est signée David LaChapelle

Résumé : biopic spectaculaire et odyssée humaine vibrante, ROCKETMAN s’attache à la période qui a vu Elton John percer. C’est ainsi qu’on assiste à la métamorphose d’un pianiste prodige – mais timide – du nom de Reginald Dwight en superstar mondiale rebaptisée Elton John.

Cette histoire exaltante, sur fond des plus belles chansons de l’artiste interprétées par Taron Egerton, raconte le parcours d’une des figures les plus emblématiques de la pop-culture.

Bande-annonce (VOSTFR)



Extrait (VOSTFR)


Featurette -  Taron chante Elton (VOSTFR)



Les costumes du film (VOSTFR)



Dans les coulisses avec Elton John et Taron Egerton (VOSTFR)


Ce que j'en ai penséle réalisateur Dexter Fletcher nous invite dans une tranche de vie d’une rock star mondiale dont le panache égale le talent : Sir Elton John. Le film nous raconte un personnage musicalement brillant, showman charismatique, haut en couleur et sensible, transpercé par un manque d’amour et un succès instantané exacerbant un mal-être prégnant.

Le réalisateur fait brillamment ressortir les tourments de l’âme dans une mise en scène métaphorique sous forme de comédie musicale en utilisant les chansons d’Elton John pour magnifier le ressenti du moment. Il parsème ainsi sa mise en scène de belles envolées lyriques et allégoriques. Il construit son long-métrage entre scènes folles totalement enthousiasmantes et narration mettant en place les relations ainsi que les étapes phares ayant mené le jeune garçon timide au statut de superstar internationale.



Les costumes exubérants sont un plaisir visuel. Ils affirment l’originalité qui fait partie intégrante de la marque de fabrique de cet artiste.




Le réalisateur respecte son sujet en abordant les moments difficiles sans fard. Il montre également avec une grande acuité le tourbillon du travail incessant qui met en évidence la gestion de la double identité de la personne versus la star attendue par tous. Sous le strass, il y a des blessures et le talent immense n’empêche pas les fêlures.

De nombreuses thématiques sont traitées dans ce long-métrage, depuis l’amitié indéfectible, donnant d’ailleurs lieu à une sublime déclaration d’amour platonique, en passant par les relations amoureuses toxiques, les dégâts occasionnés par des obligations professionnelles écrasantes ou encore la façon dont la richesse monétaire ostensible isole et ne fait pas le bonheur. Certains arcs narratifs auraient pu être un peu raccourcis sur des aspects qui se répètent parfois pour permettre à d'autres d'être plus exploités. Cependant, on ne s’ennuie pas.

On a un véritable attachement pour Elton John qui, au-delà de la mise en scène très réussie, est aussi dû à la superbe performance de Taron Egerton, qui incarne le chanteur/compositeur/pianiste avec une sensibilité à fleur de peau. Il est totalement convaincant et attachant dans tous les aspects du rôle tout en livrant une performance criante de vérité, étonnante et impeccable.





Les deux acteurs qui interprètent Elton John à un plus jeune âge sont parfaits et, eux-aussi, sont talentueux. Ils créent une continuité à la fois dans le physique et la personnalité qui donne la sensation de suivre le même personnage à travers le temps.

Jamie Bell interprète Bernie Taupin, un ami, pierre angulaire de la vie de l'artiste d’abord par l’écriture des paroles des plus grands succès du chanteur et surtout par sa fidélité envers Elton John. L’interprétation de l’acteur, toute en finesse et en douceur, vient contrebalancer les excès de la personnalité de la star et équilibre ainsi les échanges.



Richard Madden livre une performance marquante dans le rôle de John Reid, un manager au charme ravageur, mais au cœur froid.


Copyright photos @ Paramount Pictures France 

ROCKETMAN est un beau film hommage à un artiste hors du commun. C’est une comédie musicale dotée d’une belle énergie qui raconte une histoire humaine prise en étau dans un contexte un peu fou. L’émotion est présente, le rire aussi par moments et la musique, toujours, entraînante et vivante. Si on aime Elton John, alors ROCKETMAN est un fuel performant pour un très bon moment de cinéma.

L'AVANT-PREMIÈRE

Le 19 mai 2019, à Paris, au cinéma le Grand Rex, a eu lieu l'avant-première du film ROCKETMAN. Avant la projection, des jeux et animations étaient proposés.



Il y a également eu une session d'Open Piano pour jouer des musiques d'Elton John, qui a été inaugurée par l'animateur de la soirée. Puis des spectateurs dans la salle sont, tour à tour, venus partager leur talent sur scène.



Nous avons ensuite pu reprendre en cœur deux chansons d'Elton John, YOUR SONG et ROCKETMAN, en mode karaoké.








Puis nous avons fini sous une pluie de confettis, juste avant le lancement du film.


Un grand merci à Paramount Pictures France pour l'organisation de cette superbe soirée.

NOTES DE PRODUCTION
(À ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers !)

LES ORIGINES DU PROJET
La naissance d’une épopée musicale 
BIENVENUE DANS L'UNIVERS DE ROCKETMAN
Ce film retrace les débuts de ma célébrité. C’était un moment extraordinaire, irréel, et c’est ce à quoi je voulais que le film ressemble”. Elton John
Ce n’est une surprise pour personne : pour raconter la vie d’Elton John, impossible de se contenter d’un film conventionnel, qui ne saurait y rendre hommage. La transformation de Reginald Dwight – timide prodige du piano issu d'un milieu populaire – en Elton John – superstar internationale – est aussi orageuse, scandaleuse et dangereuse qu'exemplaire et courageuse. Un banal biopic n’aurait jamais pu restituer conter fidèlement un tel parcours.

Bienvenue dans l’univers de ROCKETMAN, une épopée musicale qui brouille les frontières entre fiction et réalité, qui mêle le monde de la musique avec ceux de la célébrité et de la mode, et qui n’hésite pas à envoyer balader d’un coup de chaussure à paillettes les conventions cinématographiques. ROCKETMAN plonge les spectateurs dans un périple sans filtre à travers la vie d’une icône, au rythme des plus grands tubes d’Elton, revisités et mis au goût du jour par les performances musicales surprenantes des tout jeunes comédiens.

“Le principe”, raconte le réalisateur Dexter Fletcher, “c’était de signer une œuvre explosive, une course-poursuite imaginaire résolument loufoque et transgressive, qui oscillerait entre fête et tragédie”.

Dans ROCKETMAN, Elton John est incarné par Taron Egerton, dans une prestation stupéfiante qui l’a amené à enregistrer de nouvelles versions des plus grands tubes du chanteur. Tandis que le film s'attache à Elton depuis sa ville natale de Pinner, en Angleterre, puis tout au long de la "route de briques jaunes", métaphore de la célébrité, de l’addiction et des blessures sentimentales, les spectateurs rencontrent également sa mère, avec laquelle il a entretenu une relation compliquée (Bryce Dallas Howard), son manager et amant John Reid (Richard Madden), ainsi que son parolier légendaire, Bernie Taupin (Jamie Bell), ami et partenaire artistique pendant plus de 50 ans sans lequel John n’aurait sans doute pas survécu. Comme le dit Elton, qui a donné carte blanche à l’équipe et aux acteurs de ROCKETMAN : “J’ai eu une vie plutôt dingue. Il y avait des hauts, très hauts, et des bas, très bas. Et malheureusement, pas beaucoup d’équilibre entre ces deux extrêmes”.

Le producteur David Furnish savait dès le début qu’Elton John serait intéressé par une relecture fantasmatique de sa vie, qui en restituerait la dimension extraordinaire, et qui ne chercherait pas à raconter avec exactitude les événements passés, mais qui en présenterait une vision fantasque. “Et ç’a été le point de départ de ce film”.
Pour le producteur Matthew Vaughn, il était important de trouver le ton juste afin de raconter un parcours qui n’a rien d’ordinaire. Et ce ton, il l’a trouvé en découvrant le scénario de Lee Hall. “Lee a fait un travail magnifique”, raconte Vaughn, “qui amène le film entre la comédie musicale, le biopic, une rêverie inspirée de la réalité et une réalité inspirée du rêve”.

Tandis que le jeune Elton se débat entre son image privée, sa sexualité, son enfance difficile et les addictions qui ponctuent sa vie d’adulte, c’est au vu et au su de tous qu’il trouve une échappatoire  : sa musique, qui fait de lui un phénomène mondial. C'est sur scène qu'il se révèle grâce à un personnage extravagant qu'il s'est créé, vêtu de costumes toujours plus flamboyants et de lunettes colorées qui lui font voir le monde d’un œil différent. Pour reprendre les termes de Giles Martin, directeur musical plébiscité de ROCKETMAN, “Elton frappe les touches de son clavier comme pour rendre à la vie les coups qu’elle lui a mis”.

Le résultat est un film, qui a mis plus de dix ans à voir le jour, aussi extraordinaire que son sujet. “Ce que l'équipe a fait de mon histoire est juste incroyable”, déclare John. “C’est un film d’une honnêteté frontale, qui ne retient pas ses coups, mais je n’ai qu’une hâte : que les spectateurs découvrent ce film et, je l’espère, qu’ils l’aiment autant que moi”.

Le seul moyen de raconter son histoire, c’est de vivre son rêve
LE PREMIER ENVOL DE ROCKETMAN

Les premiers germes du projet sont nés il y a plus de dix ans, en coulisses, à Las Vegas. John s’y trouvait avec son mari, également producteur de ROCKETMAN, David Furnish (réalisateur du documentaire TANTRUMS AND TIARAS et producteur exécutif de la comédie musicale à succès "Billy Elliot The Musical"), pour sa série de concertsspectacles ‘Red Piano Show’ qui venait tout juste de démarrer. Ce spectacle était une immersion dans l’univers visuel d’Elton John, véritable fantasmagorie de costumes et d'imagerie musicale prenant vie sur scène.

“Ce spectacle a fait naître quelque chose en Elton”, se rappelle Furnish. “Il m’a dit, ‘ce serait génial de faire un film sur ma vie qui pourrait transposer cet esprit-là’. Il ne voulait pas d’un biopic classique – il n’a jamais vraiment aimé ça – mais il m’a dit, ‘Tu sais, ma vie a été tellement peu banale que la raconter telle qu’elle s'est déroulée ne serait finalement pas fidèle à la réalité’”.

L’étape suivante a été de trouver un scénariste : le duo savait déjà quel homme serait à la hauteur de la tâche. Le projet est né d'une série de coïncidences, et parmi celles-ci, un petit film britannique sans prétention qui allait finir par devenir un événement majeur  : BILLY ELLIOT. Elton John et David Furnish assistent par hasard à la projection du film au festival de Cannes en 2000. (Jamie Bell, qui joue Billy dans le film, se souvient très bien du moment où Elton John est venu le voir, lors de la fête qui a suivi la projection, en larmes, profondément bouleversé par la relation entre le jeune Billy et son père.) C'est en repensant à ce moment marquant que John et Furnish ont souhaité collaborer avec le scénariste de BILLY ELLIOT, Lee Hall, sur une adaptation du film pour la scène, montée cinq ans après.

Ainsi, quand s'est posée la question de savoir qui serait en mesure d’écrire cette version fantasmatique de la vie de John et de collaborer à la l'écriture de cette histoire, le duo n'a pas hésité une seconde. “Lee est britannique  : il a une connaissance innée et intuitive de la classe ouvrière britannique des années 1960, de l’émergence du rock’n’roll dans les années 1960-1970, de la façon dont les gens parlaient à l'époque, du quotidien des Anglais…”, raconte Furnish. “On voulait qu’il puise dans tout cela et qu’il soit capable de dresser un portrait très authentique de cette époque. Mais on lui a aussi dit, ‘Les numéros musicaux doivent être hors du commun, impressionnants, fantastiques’”. Ils ont également donné carte blanche à Hall quant au déroulé chronologique de la trajectoire musicale d’Elton John : plutôt que d’être intégrés par ordre de création, les morceaux soulignent les moments de "vérité émotionnelle" de l’histoire.

“Cette histoire parle de ma vie et commence avant 1960, pendant mon enfance, et va jusqu’en 1990, lorsque je suis entré en cure de désintoxication”, raconte John. “Ce film retrace les débuts de ma célébrité. C’était un moment extraordinaire mais aussi totalement irréel, et je voulais que le film le restitue. Je voulais que ce soit un film drôle, qui ne se prenne pas trop au sérieux, mais qui n’ait pas peur de se confronter à des problématiques plus graves, comme ma toxicomanie ou mon enfance. Il a fallu trouver le juste équilibre. Et pour moi, le plus important, c’était que ce film soit un film musical, car la musique, c’est toute ma vie”.

C’était écrit dans les étoiles
LE DÉBUT D'UNE COLLABORATION DE RÊVE

Une fois le scénario écrit, Elton John et David Furnish ont passé presque dix ans à développer le projet, mais il fallait encore que celui-ci voie le jour. Heureusement, ils connaissaient un spécialiste des grosses productions à succès  : le réalisateur et producteur Matthew Vaughn. Ils étaient devenus amis sur le tournage de KINGSMAN : LE CERCLE D’OR, où Elton John fait une apparition inoubliable. Dans le film, l’icône de la musique s’amuse à s'auto-parodier de manière déjantée : “Elton donnait de lui une image outrancière”, reconnait Matthew Vaughn. “Je me suis rendu compte que c’était quelqu’un de brillant, mais aussi de très bienveillant et courtois, avec un vrai talent d’acteur”.

Un jour, autour d’un café, dans un de ces coups du destin propres à la genèse de ROCKETMAN, Matthew Vaughn a raconté qu’il avait toujours rêvé de tourner un film musical. “Je savais qu’il adorait Elton John et sa musique”, se souvient David Furnish.
“Du coup, j’ai dit ‘Écoute, on a un scénario. J’aimerais beaucoup que tu y jettes un œil et que tu nous dises ce que tu en penses’”. Matthew Vaughn est connu pour repérer le potentiel d’un film au premier coup d’œil, et pour avoir les moyens de lui donner toutes ses chances : à peine avaitil lu le script qu'il était conquis.

“J’ai découvert la musique d’Elton John dans les années 1970 quand j’étais petit, mais je me souviens encore de la première fois où j’ai entendu ‘Your Song’”, déclare Matthew Vaughn. “Cette voix était incomparable, et j’ai retenu les paroles presque instantanément. Cela m’a beaucoup marqué. J’adore la musique, j’aurais adoré être musicien. Et si je fais ce film, c’est parce que je rêvais de tourner une comédie musicale. Tous les films que j’ai réalisés sont fortement influencés par la musique. Mais je voulais faire les choses bien : quitte à faire un film musical, il fallait que la musique soit au centre du film. Quand je me suis lancé dans ROCKETMAN, j’ai su que c’était le cas”.

Matthew Vaughn ne s’est pas contenté de lire et d’aimer le scénario. Il a décelé le potentiel du film. Mieux encore, il a presque tout de suite su qui allait jouer Elton John. Matthew Vaughn, qui a offert à Taron Egerton son premier grand rôle avec le diptyque KINGSMAN, connaissait bien son talent. Comme il l’avait ensuite mis en relation avec le réalisateur Dexter Fletcher pour EDDIE THE EAGLE, autour d'une autre icône britannique, il avait tout à fait conscience de la créativité du jeune comédien. Il savait que Dexter Fletcher, qui a fait ses débuts comme acteur dans DU RIFIFI CHEZ LES MÔMES en 1976 avant de se tourner à nouveau vers la comédie musicale avec son deuxième film comme réalisateur, SUNSHINE ON LEITH en 2013, était le bon choix. Il savait aussi que Taron Egerton avait une ressemblance troublante avec le jeune Elton John, et mieux encore qu’il savait chanter.

Matthew Vaughn a contacté David Furnish  : “Si ça ne tenait qu’à moi, je prendrais Taron et Dexter”, lui a-t-il dit. David Furnish a répliqué  : “Et si on le faisait ensemble ?” "Ça tombait sous le sens”, insiste Matthew Vaughn. “Je cherchais mon prochain projet avec Dexter. Je savais que Taron était un excellent chanteur et qu’il avait interprété ‘Your Song’ pour son audition à la Royal Academy of Dramatic Arts, il y avait donc une vraie logique”. David Furnish reconnaît : “Les pièces du puzzle s’assemblaient petit à petit. J’étais d’accord avec Matthew pour dire que le duo Taron-Dexter était exactement ce dont le film avait besoin”.

Il restait une personne à convaincre  : Elton John. “Elton me disait toujours ‘Je ne suis pas cinéaste, ce n’est pas mon univers. En plus, je suis trop impliqué dans l’histoire si bien que je n’ai peut-être pas l’objectivité nécessaire pour la raconter comme il faut’”, se souvient David Furnish. L’univers qu’il connaît, en revanche, c’est la musique. Restait donc à savoir si Taron Egerton aurait l’étoffe pour plonger dans cet univers pendant deux ans.

“Et puis, j'ai entendu sa voix”, raconte Elton John en souriant. "Ça s’est passé en une seconde. Je voulais que la personne qui joue mon rôle sache chanter. Je voulais que l’interprétation ne passe pas uniquement par le jeu mais aussi par la musique. Ce n’est pas facile, mais Taron Egerton est vraiment exceptionnel. C’était la seule personne capable de relever le défi”.

Trouver la bonne harmonie
QUAND LA MUSIQUE RENCONTRE LE CINÉMA
Elton nous a donné la liberté de ne pas suivre à la lettre sa propre façon d’interpréter ses tubes. Il m’a dit ‘Fais ce que tu veux, c’est à toi' ”. 
Giles Martin
La chance a continué à sourire au projet quand il a fallu trouver quelqu’un de suffisamment doué pour faire découvrir l’extraordinaire répertoire d’Elton John à un nouveau public. Le producteur musical et compositeur Giles Martin était un ami d’enfance de Matthew Vaughn, mais il s’est trouvé être également proche de David Furnish et d’Elton John. Au cours de sa carrière aussi longue que mouvementée, ce dernier avait souvent collaboré avec le père de Giles Martin, le légendaire George Martin dont la notoriété était liée à celle des Beatles.

“Je savais que Giles allait respecter la musique d’Elton, mais aussi le film et le travail de Dexter et Taron”, affirme Matthew Vaughn. “Je savais aussi que Giles est quelqu’un de très sensible, capable de répondre à toutes les attentes tout en restant brillant sur le plan musical. J’en ai parlé à Elton et j’ai découvert qu’il avait vécu chez George Martin dans les Caraïbes et qu’il y avait enregistré des morceaux quand Giles était encore tout petit. Il l’adorait et a tout de suite été convaincu qu’il serait un collaborateur idéal. Les choses continuaient à se mettre en place pour former une formidable équipe artistique”.

Giles Martin se souvenait très bien de l’époque où Elton John passait du temps dans le studio de son père à Montserrat. Pendant sa jeunesse, il voyait souvent le chanteur. Quand il a fait ses débuts aux Air Studios de Londres en 1989, Elton John y enregistrait avec son père. Ils ont ensuite travaillé ensemble sur une nouvelle version de "Candle in the Wind" en 1997. “Il a toujours été extraordinairement gentil avec moi”, souligne Giles Martin. “Il a toujours été généreux avec les musiciens, et il s’est toujours particulièrement intéressé aux jeunes musiciens”.

Une générosité qu'on retrouve dans la liberté créative qu’Elton John a accordée à Giles Martin, en l’autorisant à jouer avec sa musique pour en proposer une toute nouvelle réinterprétation. “Elton nous a donné la liberté de ne pas suivre à la lettre sa propre façon d’interpréter ses tubes”, s’émerveille Giles Martin. “Il veut que son œuvre et ses interprétations évoluent. Il m’a dit ‘Fais ce que tu veux, c’est à toi’. Il avait toujours hâte d’entendre le résultat. Ça faisait un bien fou car cela voulait dire qu’on avait le droit d’utiliser sa musique pour raconter son histoire d’une manière inédite et non linéaire. C’est ce qui caractérise la musique d’Elton  : elle est unique. C’était un travail sans fin  : quand je pensais avoir fini, je me disais ‘Ce sera peut-être encore mieux si je fais juste ça…’. Ce n’est pas seulement la technique mais aussi l’âme de cette musique qui est unique. Elton John a eu une formation musicale classique, c’est vrai, mais ça n’explique pas tout. Vous pourriez enfermer un gamin dans une pièce et lui apprendre le piano à l’infini, il ne deviendrait jamais Elton John”.

La prouesse accomplie par Giles Martin pour ROCKETMAN est sans doute celle qui le remplit le plus de fierté. Ce qui n’est pas peu dire dans la mesure où c’est lui qui a adapté le répertoire des Beatles pour un spectacle de Las Vegas. “Je me souviens qu’Elton était venu assister à une répétition des premières chorégraphies. Je lui ai dit ‘Écoute, j’ai à peine commencé à retravailler les morceaux pour les chorégraphies…’, je ne voulais pas lui faire entendre des versions inachevées de ses propres chansons ! Mais à nouveau il m’a dit ‘Si c’est toi qui t'en occupes, Giles, je suis parfaitement rassuré. C’était juste incroyable”, raconte Giles Martin.

C’est cette grande souplesse qui a permis à ROCKETMAN de se concrétiser, de renverser les conventions et de détourner toutes nos idées reçues pour proposer un portrait décoiffant, inattendu et audacieux d'Elton John. "Le message qu'on a souhaité glisser au spectateur se résume ainsi", reprend Fletcher, "Vous pensez que vous connaissez son parcours ? Eh bien, pas du tout ! Il n'a rien à voir avec l'idée que vous vous en êtes faite'. C'est à mon avis beaucoup plus captivant et intéressant. Dès le premier plan du film, Elton est présenté comme un narrateur de sa propre histoire en qui on ne peut pas avoir confiance".

Ce dispositif nous offre une plongée fascinante dans un ensemble de morceaux cultes, chers au cœur de milliers de fans de tous horizons. La productrice exécutive de ROCKETMAN Claudia Schiffer affirme  : “La musique d’Elton a bercé mon enfance dans les années 1980, j’ai travaillé en écoutant Elton John pendant les shootings photos et je l’écoute encore aujourd’hui. Ses chansons sont intemporelles et c’est formidable de découvrir enfin ce qui se cache derrière les paroles”.

Comme le signale David Furnish, Elton John est un homme exigeant. On peut donc apprécier la qualité des arrangements de ROCKETMAN quand on sait que Captain Fantastic lui-même a été ravi du résultat. Taron Egerton s’est entrainé au chant et au piano pendant cinq mois pour se préparer au rôle. Non seulement l'acteur a enregistré sa propre version de ces chansons adorées du public, mais il a pu le faire au studio Abbey Road de Londres. Un moment qu'il qualifie de “c’est-paspossible-pincez-moi-je-rêve”.

“Ce qui m’a toujours plu dans ce projet”, précise Taron Egerton, “audelà de l’honneur insigne de jouer Elton John, c’est qu’on avait la possibilité de réinterpréter les morceaux et de raconter l’histoire de façon innovante et différente. En outre, c’est un film musical dans lequel les chansons ne sont pas seulement des scènes de spectacle mais également des moments d’introspection. C’est ce qui le rend unique. J’ai adoré chaque instant de ce tournage. Je ne peux pas vous dire à quel point je suis fier qu’Elton John m’ait permis d’interpréter ses chansons de cette façon”.

Elton John se réjouit de l’enthousiasme de cette équipe qui a porté sa vie et sa musique à l’écran avec passion et détermination. Il est enchanté du résultat : “J’ai donné toute liberté à Taron. Je l’ai laissé entre les mains de Giles Martin en qui j’ai toute confiance parce qu’il est brillant comme son père, et je les ai laissés faire leur travail. Je ne voulais pas être sur leur dos à écouter chaque chanson. D’ailleurs, je n’ai assisté à aucun enregistrement, je ne suis pas comme ça. Si je fais confiance à quelqu’un sur le plan artistique, je lui laisse carte blanche pour faire ce qu’il veut. Et quand j’ai écouté ce qu’ils avaient fait, j’ai été sidéré”.

Lunettes, drogue et rock'n'roll
À LA RECHERCHE DE L’AUTHENTICITÉ ET DE LA VÉRITÉ
Ma vie a été assez dingue. Les moments tragiques ont été terribles et les moments de bonheur exaltants. Malheureusement il n’y a pas vraiment eu d’entre-deux”. Elton John
“Je n'ai pas eu une vie ennuyeuse”, affirme Elton John. Un bel euphémisme ! “Ce que je voulais transmettre à travers le film, c’est le prix exorbitant de la célébrité et le sentiment de solitude qu’on peut ressentir, les séquelles que nous laisse notre éducation, et aussi ce qui arrive si on ne se ressaisit pas très vite pour mettre un terme à ses addictions et à ses mauvaises habitudes. Mais je voulais bien sûr que tout ça soit présenté avec un certain humour”.

C'est ce mélange qui a intéressé Bryce Dallas Howard, qui joue la mère d’Elton John, Sheila Farebrother. “Quand j’ai lu le scénario, ça m’a émue mais ça m’a aussi beaucoup amusée”, raconte-t-elle. “J’ai été transportée. J’aimais l’idée de renouveler le genre du biopic pour créer un univers fantasque qui reflète très bien la philosophie de vie d’Elton John. Le génie de ce film, c’est qu’il représente Elton sous de très nombreux aspects. Le film est intelligent, drôle et sophistiqué : c’est Elton tout craché”.

Pour Elton John et David Furnish, c’était la seule manière de raconter l’histoire : s’ils passaient sous silence les moments plus sombres, les passages joyeux n’auraient pas la même saveur. S’ils ne racontaient pas toute la vérité, à quoi bon raconter cette histoire ?
“Il fallait que je sois transparent et que le film dise toute la vérité”, insiste Elton John. “J’ai fait plus de choses au cours des vingt ans qu'évoque le film que font la plupart des gens en une vie. Je me suis parfois comporté comme un monstre et j’ai fait des choses irrationnelles – c’est comme ça que fonctionne un artiste. Je préfère raconter les choses avec honnêteté plutôt que les gens ne se disent ‘Oh, il était formidable, il était fantastique’. Oui, j’ai parfois fait des choses fantastiques, mais il y a aussi eu le revers de la médaille et c’est important de le montrer. Il faut prendre ce qui est bon et ce qui est mauvais  : les addictions ont révélé ce qu’il y a de pire en moi, j'ai détesté cette période de ma vie et c’est pour ça que j’ai décidé de me désintoxiquer. Si j'ai eu un comportement irrationnel et lunatique, si j'ai été dépressif et que je me suis haï, c'est parce que je n’avais pas d’équilibre dans ma vie. J'avais une vraie dépendance à la cocaïne, à l’alcool, à la nourriture et au sexe, et on voit tout ça dans le film. Je ne voulais pas enjoliver les choses, je suis quelqu’un de très honnête, parfois trop honnête pour mon propre bien”.

ROCKETMAN raconte l’histoire d’Elton John à travers le prisme de ses addictions. Au début du film, il est en cure de désintoxication et repense aux excès dont il a bien failli ne pas se relever. Taron Egerton remarque : “Elton John est une icône de la musique, mais on oublie parfois que c’est aussi un être humain”. Selon Dexter Fletcher, c’est l’histoire d’un homme qui n'a cessé de fuir : Reggie a essayé d’échapper à son milieu familial, puis il a cherché à fuir derrière un personnage qu'il s'est inventé “La musique m'a soutenu dans les moments de conflit et d’angoisse mais aussi dans les plus grands moments de bonheur”, confie Elton John. “La musique a toujours été là pour moi, j’ai toujours pu compter sur elle, même dans les heures les plus sombres de dépression et d’addiction. Même pendant ces moments-là, la musique m’a tenu compagnie et m’a apporté énormément de joie”.

Pour Jamie Bell, qui campe Bernie Taupin, l’homme qui a toujours su ramener Elton John vers la lumière, ce message est important  : “Ce film dit en substance  : ‘Il faut se connaître soi-même et être honnête envers soi. Sinon, on peut en mourir. Il faut oser s’affirmer et assumer qui on est vraiment. C’est un message très fort, raconté d’une manière courageuse et téméraire”.

Un pari fou
L’ACCORD PARFAIT ENTRE UN REALISATEUR ET SON FILM
"J’ai déclaré à David Furnish : 'Je me demande parfois si j’étais destiné à faire ce film'". 
Dexter Fletcher
"Dexter Fletcher s’est totalement investi dans le projet dès que j’ai commencé à travailler sur ce film", note Bell. "Il savait exactement ce qui convenait au film : son atmosphère, son ampleur, sa palette de couleurs. Il savait à quel point ce devait être un film hors du commun, audacieux et fou, car il connaît toutes les facettes du personnage d’Elton. Dexter n’a pas peur de s'engager dans une voie qui pourrait sembler provocante ou excessive : il ne fait pas de concessions. Il a pris énormément de risques pour ce film".
Certes, on peut penser que ROCKETMAN est le film que Dexter Fletcher était destiné à réaliser. Il s’agit après tout de l’acteur qui a débuté en 1976 dans la comédie musicale DU RIFIFI CHEZ LES MÔMES sous la direction d’Alan Parker, qui reste l’une de ses principales sources d’admiration et d’inspiration. Trente-sept ans après, il met en scène sa propre comédie musicale à succès, SUNSHINE ON LEITH. Sans compter qu’il avait déjà dirigé Taron Egerton dans EDDIE THE EAGLE, portrait percutant d’une autre personnalité britannique de légende en 2015. C’est à se demander si toute sa carrière ne s’est pas échafaudée dans l’attente de ce moment…

"C’est vrai que j’ai récemment fait cette remarque à Furnish", plaisante Fletcher. "En ce qui me concerne, ce film est très personnel, je m'y retrouve totalement. Je suis très fier de ce film et j’espère que les gens auront beaucoup de plaisir à le voir. Quand j’ai lu le scénario de Lee Hall, j’ai su que je devais absolument le mettre en scène. La narration me permettait également de laisser complètement libre cours à mon audace : c’était une opportunité extraordinaire pour exprimer sans frein ma créativité".

Le fait que l'ensemble des acteurs aient adoré participer à ce film n’est pas une surprise pour Vaughn, qui savait dès le départ que Fletcher était l'homme de la situation : "Dexter a instauré une atmosphère rassurante pour Taron. C’est comme ça qu’il travaille. Du coup, on a tous pu pousser Taron encore plus loin dans son jeu d’acteur. Grâce à Dexter, Taron s’est libéré de tout ce qui aurait pu le freiner et il en est sorti grandi".

Fletcher est bien conscient de l’opportunité exceptionnelle qu'offrait ce projet. "Je sais que ces occasions sont rares. De tels films ne se présentent pas souvent, voire jamais. J’ai la chance de me sentir absolument libre de toute contrainte, car dès le départ, on m’a donné carte blanche et on m'a encouragé à mettre en scène ma propre vision du sujet. C’est l’idéal pour tout artiste d’avoir la possibilité d'explorer toutes sortes de pistes. Je me suis inspiré de tout ce que je trouvais exaltant, intéressant, beau, amusant, piquant, imaginatif et galvanisant, et je l’ai intégré à ce film. Ça a été une joie et un privilège immenses. Et désormais, j'ai hâte de redécouvrir le film avec le public autour de moi", reconnaît-il.

Individualité et unité
LE MESSAGE DE ROCKETMAN AU MONDE
"C’est une histoire humaine, sans concession. Mais c’est aussi une manière de rendre hommage à un grand homme et à ses enseignements". 
Taron Egerton
"Dès le départ, on a voulu être un peu irrévérencieux et faire en sorte que le public sente bien qu’il a un accès privilégié à un homme qui, on le sait bien, a traversé des périodes extrêmement chaotiques", déclare Egerton. "Mais il est tout aussi important que les fans soient satisfaits et il fallait rendre Elton attachant. Cette histoire est vraiment humaine et sans concession mais c’est aussi une manière de rendre hommage à un grand homme et à ses enseignements".

Parmi toutes les prouesses du film, c’est sans doute la plus significative : parvenir à ce que sa dimension fantasque soit ancrée dans une réalité à vocation universelle. "Je pense que c’est vrai en effet", déclare Furnish. "Le message du film, c'est que si on ne s’aime pas, si on continue à ne pas affronter ses problèmes, le passé finit par nous rattraper. On ne peut lui échapper. C’est ce qui s’est produit pour Elton et ça peut arriver à tout le monde. On peut changer l'image qu'on donne de soi aux autres, mais si on ne travaille pas sur soi de l’intérieur et si on ne finit pas par s’accepter, on ne trouvera jamais le bonheur".

Cette mise en valeur de notre humanité – de ce qui fait de chacun de nous un être singulier et néanmoins semblable aux autres – est un message on ne peut plus essentiel dans le monde clivé où nous vivons. Comme Taupin l’a dit, la vie d’Elton John n’a jamais été "banale" et ROCKETMAN est un moyen de rappeler aux gens qu’il faut accepter nos différences et non les combattre.

 "Si ce message est perçu dans le film, le pari est gagné", affirme Elton John. "Je me suis voilé la face à mon propre sujet pendant longtemps. C’est ce dont se nourrit l’addiction – le fait d’être malhonnête, de se mentir à soi-même et de le dissimuler aux autres. Mais si on agit ainsi, on finit par se détester, parce qu’on devient quelqu’un qu’on ne reconnaît plus". Peut-être ce film parviendra-t-il à créer un sentiment d’unité entre les gens, comme la musique du chanteur le fait depuis si longtemps ?

"Quand j’ai pris conscience que c’est la sincérité qui compte le plus, je n’ai plus jamais souffert, car c’était merveilleux de ne plus avoir à se mentir tout le temps. Pouvoir se lever le matin, promener mon chien, rencontrer des gens qui avaient les mêmes problèmes que moi et même les partager – c'était un vrai bonheur. Je n’ai jamais été très bon pour communiquer avec les autres, je pensais bêtement que la cocaïne était le genre de drogue qui me permettrait de m'ouvrir aux autres. Mais je racontais vraiment n’importe quoi et ça n’avait aucun sens. L’honnêteté est la clé de tout : il faut se libérer de ses secrets les plus sombres, se débarrasser du poids du passé, de tout ce qu’on a emmagasiné depuis l’enfance. Il faut tout déballer, en parler. Je ne serais pas là si je ne l’avais pas fait", confie-t-il encore.

ROCKETMAN évoque cette philosophie de vie en explorant avec transparence les souffrances de John, et le film privilégie toujours la vérité, au lieu de dissimuler la part d'ombre du protagoniste. Et pour l'ensemble des producteurs, il s’agit là d’un vrai parti-pris.

"J’espère que les gens, en découvrant la vie d’Elton, ce qu’il a traversé et ce qu’il est parvenu à accomplir, vont prendre conscience que la vie est un long voyage. Ce n’est jamais simple, ni évident et on se sent parfois étranger à soi-même mais on peut toujours arriver à changer. Je pense que ça peut servir d'exemple", déclare Furnish. Ou, comme le signale encore Howard : "Elton John est sans aucun doute une immense star pour des millions de gens et s’il a une qualité qu’on perçoit avant tout, c’est son authenticité. Et son courage. Le courage d’être authentique. C’est quelqu’un qui s’est exprimé franchement, de manière décomplexée. Je pense qu’il a permis à beaucoup de gens de s’accepter. C’est quelqu’un de précieux pour nous tous, car il nous offre la possibilité de se réjouir sans réprimer sa part de folie, d'excès et d'imperfection, sauvage, extrême et imparfaite de soi-même", commente-t-il.

LES ACTEURS
Ses chansons, leur interprétation
A LA RENCONTRE DES ACTEURS DE ROCKETMAN
"On n’avait pas besoin d’acteurs pour ce film. On avait besoin de gens qui pouvaient tout faire". Dexter Fletcher
Taron Egerton dans le rôle d’Elton John
 Que se passe-t-il quand on est choisi pour incarner l’une des plus grandes stars au monde  ? Et mieux encore, une personnalité dont le monde entier a déjà une image très précise  ? Comment, en d’autres termes, révéler l'être humain sous les paillettes, les caprices et les déguisements ?

"C’est bien évidemment une question que je me suis posée", signale Taron Egerton, sur qui repose le film. "Et j’ai fini par la poser au principal intéressé".

Tout d’abord, John a invité l’acteur chez lui pour discuter autour d’un curry. Peu de temps après, il lui a remis ses mémoires, qui n’ont pas été publiés. Puis, il lui a montré tous ses costumes. Et finalement, il lui a tout raconté.

"Il n’y a rien qui soit tabou", raconte Elton John. "C'est ce qui s'appelle être dans la transparence et être sobre. Il n’y a rien qu’on ne puisse aborder et la communication est fondamentale. Je savais que si Taron allait incarner mon rôle à l’écran, il devait tout savoir de moi. Et il avait envie de tout savoir. On a discuté comme de vieux amis, ce n’était pas intrusif et je pense que c’est pour cette raison que Taron a été aussi génial dans ce rôle, car une belle amitié est née de notre travail".

Pour l’acteur, ces échanges ont été doublement bénéfiques  : "Tout d’abord, j’ai pu tout lui demander", dit-il. "Et de plus, j’ai vite senti qu’il voulait me connaître et qu'on devienne proches. Du coup, mon interprétation d'Elton est devenue assez rapidement une affaire personnelle. Et il y aussi des similitudes entre nous. Ce qui me frappe le plus, c’est qu’il peut témoigner d'une incroyable personnalité qui en impose à tout le monde tout en étant aussi parfois l’être le plus vulnérable que j’aie jamais rencontré – et c’est quelque chose que je perçois chez moi aussi. J’ai l’impression que je suis quelqu’un d'assez vulnérable et qui ressent les choses très à cœur. Je pense avoir la même force de caractère que lui mais je passe aussi par les mêmes montagnes russes émotionnelles et les mêmes moments de fragilité".

John acquiesce : "C’est propre au manque de confiance en soi. C'est ce sentiment de manque de confiance en soi et cette volonté de prouver quelque chose qui nourrissent la créativité, et je pense que la plupart des gens créatifs – pas seulement les acteurs, mais également les musiciens, les peintres, tous les artistes – connaissent ça. C’est très positif, car avoir des incertitudes veut dire que nous ne sommes pas imbus de nous-mêmes. Quand on n'a pas de doutes, on ne peut pas avancer".

Et des doutes, celui qui a fait se rencontrer les deux hommes n'en a eu aucun. John et Furnish ont pris contact avec le producteur Matthew Vaughn pour évoquer la manière de porter à l'écran ce scénario qu'ils avaient entre les mains depuis dix ans. Et quand Vaughn a lu le script, il n’a eu aucune hésitation.

Taron Egerton, que Vaughn a découvert et dirigé en 2014 dans le film KINGSMAN : SERVICES SECRETS, puis de nouveau dans KINGSMAN  : LE CERCLE D’OR, a montré qu’il est tout simplement Elton John. De cela, Vaughn n’a jamais douté.

"Tout d’abord, pour jouer Elton John, il faut savoir chanter et Taron est un chanteur incroyable", déclare Vaughn. "Mais, et c’est important, il est également vulnérable et sensible, tout comme Elton. Il est déterminé, dans le bon sens du terme, comme Elton. Il possédait donc toutes les qualités requises. Je suis assez instinctif en matière de casting et quand j’ai lu le scénario, j’ai tout de suite envisagé Taron".

Pour être honnête, c’est être bien en-dessous de la vérité que d'affirmer que c’était une bonne idée. Disons simplement que Taron Egerton ne joue pas Elton John, il se métamorphose en Elton John : "La grande force de Taron en tant qu’acteur, c’est sa vulnérabilité, quelque chose qu’on ressent vraiment et qu’il n’a pas besoin de jouer", constate Fletcher. "Et c’est essentiel quand on joue quelqu’un qui renvoie cette image un peu dure. Ce que je veux dire par là, c’est que Taron peut jouer des situations et des personnages très complexes, et parvenir néanmoins à maintenir un sentiment de solitude – le sentiment d’avoir besoin des autres. Quand Taron joue de telles scènes, il ne semble pas cynique, égocentré ou simplement désagréable. On a toujours l’impression que ça vient d’un manque. Et quand on donne la possibilité au spectateur de comprendre que cette personne, quelle que soit son attitude, se comporte ainsi parce qu’elle a besoin de quelqu’un ou de quelque chose, c’est un plus inespéré. Et puis, bien sûr, n’oublions pas le fait qu’il chante comme un dieu"…

Le talent de chanteur de l’acteur était déjà connu : son interprétation de "I’m Still Standing" dans le film d’animation TOUS EN SCÈNE n'est pas passée inaperçue. Mais rien ne pouvait laisser présager de son talent exceptionnel dans ROCKETMAN, Elton John l'ayant encouragé non pas à l'imiter mais à s’approprier ses tubes. Egerton a donné une nouvelle vie à ces chansons aimées depuis plusieurs générations, enregistrant ses propres versions avant d’en envoyer les enregistrements à John pour validation. Approbation que ce dernier s’est empressé de donner !

Son exploit est extraordinaire, même pour un spectateur non averti. Mais pour ses partenaires de jeu et son réalisateur, son interprétation est époustouflante. "Ça a été une expérience particulièrement éprouvante pour Taron", commente Jamie Bell. "Il est dans toutes les scènes. C’est un rôle très intimidant, car il fallait jouer toute la dimension dramatique du personnage – ses souffrances, ses tendances autodestructrices –, mais il fallait en plus chanter et danser. Ce qu’il a réussi à faire est miraculeux. Quand il chante, sa voix est démente. Il était déjà bon avant mais sa puissance vocale est désormais hallucinante. C’est une vraie transformation et pas un travail d'imitation. La distinction est essentielle. Il s’agit de sa propre interprétation, de sa propre compréhension de cet homme. Il donne vie à des pans entiers de l’existence de John qui n’avaient pas été révélés jusque-là et il transmet tout cela à travers ses chansons. C’est vraiment très impressionnant !"

Pour Fletcher, Egerton n'est pas seulement l’acteur idéal mais le seul capable de jouer ce rôle. "Il possède cet incroyable instrument – sa voix –, et il adore s’en servir", explique le réalisateur. "Mais je ne vois pas qui d’autre aurait pu accomplir une telle transformation physique. C’est très effrayant pour un acteur de se jeter dans le vide, de se confronter à ses peurs et de jouer. Et Taron a réussi bien au-delà de tout ce qu’on pouvait espérer".
"C’est difficile de mettre des mots sur tout ce que cette aventure signifie pour moi", confie Egerton. "Jouer Elton a été, en toute sincérité, la meilleure expérience de ma vie. Et en plus, j’ai appris à le connaître. Je me sens tellement privilégié. Il ne m’a pas donné de conseils sur la façon de l’incarner mais il m'a encouragé et il a été présent – pas comme quelqu’un qui voulait m’influencer ou me guider. Il sait, justement à cause de ce qu’il a traversé, qu’on doit laisser de la latitude aux gens pour obtenir le meilleur d’eux-mêmes. Il m’a donné une vraie liberté et je lui en suis extrêmement reconnaissant. Je suis fier de pouvoir affirmer que grâce au film, Elton est devenu un ami".

Jamie Bell dans le rôle de Bernie Taupin
Parmi toutes les chansons d'Elton John qu'on entend dans ROCKETMAN, la plus importante est sans doute inédite. Il s'agit d'un tout nouveau titre, "I'm Gonna Love Me Again", écrit par l'un des tandems les plus extraordinaires de l'histoire de la musique.

La chanson est interprétée par Elton John et Taron Egerton – et si ce duo est certes remarquable, c'est l'association les deux auteurs de "I'm Gonna Love Me Again" que célèbre ROCKETMAN. Au bout de cinquante ans d’une collaboration qui n'a cessé de se renforcer, Elton John et son parolier Bernie Taupin viennent ainsi de signer une nouvelle chanson.
"Il règne une harmonie extraordinaire entre eux", explique Bell. "Dans le film, on assiste à leur rencontre et on comprend que ce sont deux solitaires qui nouent une amitié solide qui durera toute la vie".

Or, cette amitié a bien failli ne jamais voir le jour. Comme le montre ROCKETMAN, la rencontre entre ces deux hommes qui caracolent en tête des meilleures ventes de disques depuis un demi-siècle a eu lieu totalement par hasard.

"Ils se sont connus par le plus grand des hasard en 1967, dans un bureau où Elton venait pour écrire", indique Furnish. "Elton réussissait à écrire la musique, mais pas les paroles et un jour, un certain Ray Williams a ramassé une enveloppe non décachetée sur la table (Taupin, tout comme John, avait répondu à une annonce dans le New Musical Express pour une offre d'auteur de chansons chez Liberty Records) et l'a donnée à Elton en lui disant : 'Tu devrais t'inspirer de ce texte pour écrire ta musique'. C'était le destin ! Un moment magique. C'est dans ces moments-là que les planètes s'alignent pour donner lieu à une œuvre vraiment hors du commun".

À cette époque, les deux garçons aspiraient à faire décoller leur carrière. John se produisait dans des restaurants avec le groupe Bluesology. "Je me disais que la musique ne pouvait pas se résumer à chanter devant des gens qui n'en avaient rien à faire et qui étaient en train de se gaver de poulet et de frites", se souvient-il. Quant à Taupin, il avait abandonné l'école à 15 ans et rêvait de pouvoir quitter la ferme d'élevage de poulet où il travaillait dans le nord de l'Angleterre. "Bernie n'avait que 17 ou 18 ans quand il a rencontré Elton", précise Bell.

"Bernie était presque devenu un délinquant : il avait fini par travailler dans une ferme d'élevage de poulets et ne voyait pas d'issue. Il se sentait coincé. Il a vu cette annonce et y a répondu en écrivant : 'Je suis poète et j'ai déjà écrit quelques chansons, au cas où vous pourriez être intéressé'. Certains racontent même qu'il n'a pas envoyé sa lettre, qu'il l'aurait jetée à la poubelle, que sa mère l'aurait retrouvée et mise au courrier. Ou encore qu'il l'aurait laissée sur le manteau de la cheminée et que sa mère l'aurait envoyée. Mais le plus important, c'est que la chance a souri à Bernie et Elton et que chacun a trouvé chez l'autre quelqu'un qui le comprenait".

Cette complicité, comme l'explique Fletcher, n'a pas seulement soudé les deux hommes – elle a aussi sauvé la vie à l'un d'entre eux. "Bernie est un véritable ancrage qui a empêché Elton de se désintégrer en plein vol", note le réalisateur. Bell ajoute : "Bernie a toujours été un roc pour Elton car il savait exactement qui il était. À l'inverse, Elton se cherchait en permanence – il était en quête d'identité, d'une relation amoureuse, d'une carrière, de drogue… Il se réfugiait derrière des masques. Bernie, lui, incarnait la constance. 'Je sais qui je suis et je suis ton ami', lui faisait-il savoir".

Fletcher a aussitôt songé à Bell pour le rôle de Bernie. "J'ai été convaincu par son grand capital de sympathie, par sa sincérité et son côté rassurant", dit-il. Un choix qui a enchanté John et Furnish qui avaient rencontré le jeune acteur à l'âge de 13 ans à Cannes, alors qu'il tenait son premier rôle dans BILLY ELLIOT.

"À la fête qui a eu lieu après la projection, Elton est venu nous voir, le réalisateur et moi", se souvient Bell. "Il était encore bouleversé et en larmes parce que le film l'avait vraiment touché. C'était la première superstar que je rencontrais. Et comme il a lui-même dû affronter la notoriété et le succès très jeune, il s'intéresse à tous ceux qui sont confrontés à cette même problématique. C'est le sujet de ROCKETMAN. Elton John est un survivant. Son parcours est exceptionnel".

 Pour se préparer au rôle, Bell a commencé par téléphoner au véritable Taupin pour se présenter. Celui-ci l'a invité chez lui à dîner. "C'est ce qu'il faut faire quand on incarne un personnage réel – il faut prendre contact avec lui et lui expliquer comment on compte l'interpréter", dit-il. "Je suis allé le voir chez lui, à Santa Barbara. Il a été très généreux de son temps. À l'époque, Elton et lui enchaînaient les tubes et je crois même qu'ils ont écrit trois albums d'affilée qui ont été en tête des meilleures ventes et que c'était totalement inédit. Bernie était hanté par ses propres démons intérieurs, mais à mon avis, c'est plus facile de les affronter quand on sait qui on est, intimement. Bernie avait l'habitude de dire qu'Elton était son meilleur ami et le type le plus adorable au monde, mais qu'il pouvait parfois se révéler le diable en personne".

Bell s'est appuyé sur cette compréhension intime de leur relation tout au long du tournage, d'autant qu'il n'était jamais allé aussi loin pour un film. Tout comme Egerton, il ne se contente pas de jouer le rôle, mais il chante aussi, interprétant ainsi "Goodbye Yellow Brick Road" – chanson qu'il a enregistrée à Abbey Road – dans une scène où le tandem a bien failli éclater.

"Elton a tellement été tourmenté toute sa vie que c'était très difficile à vivre pour lui", constate Bell. "Du coup, avoir un garçon comme Bernie à ses côtés, qui est toujours là pour lui, est fondamental. La manière dont Elton parle de Bernie est extrêmement touchante. Leurs liens sont très forts. On sait qu'Elton a fait des avances à Bernie et que celui-ci a réagi en lui disant : 'je t'adore, mais ça n'arrivera pas'. Ce que j'aime chez Bernie, c'est qu'il ne juge pas les autres. Il accepte Elton tel qu'il est. Et même quand Elton part de plus en plus dans son délire, avec ses costumes et ses masques, il lui dit qu'il n'a pas besoin de ça. Il a vraiment foi dans le talent d'Elton. Et quand ce dernier se met à chanter au piano, il procure un très grand bonheur aux gens et Bernie y est sensible. Dans le film, Bernie tente constamment de ramener Elton à la simplicité. C'est pour cette raison qu'il a toujours joué un rôle important dans sa vie".

Richard Madden dans le rôle de John Reid
"Si Bernie incarne le cœur du rapport d'Elton à la musique", indique Fletcher, "alors sa part d'ombre est John Reid – un type machiavélique et diabolique qui n'a du tout pas les mêmes intentions que Bernie".

 Dans la vraie vie, Reid a été le premier petit ami sérieux de John et son manager pendant 28 années émaillées de tensions. Dans ROCKETMAN, il est campé par Richard Madden, acteur écossais de 32 ans qui s'est fait connaître sous les traits de Robb Stark dans GAME OF THRONES et la série BODYGUARD. "On a engagé Richard juste avant la diffusion de BODYGUARD", souligne Furnish. "Mais quand je l'ai vu dans la série, j'ai trouvé que son jeu était fascinant et puissant. Il y avait cette sensualité propre aux Écossais qui me semblait parfaitement correspondre à l'interprétation qu'on voulait donner de John Reid".

Reid et John ont fait connaissance lors d'une soirée chez Mama Cass, peu de temps après que le chanteur se soit produit pour la première fois à Los Angeles à la célèbre boîte de nuit le Troubadour. "Ils ont eu un vrai coup de foudre", note Madden. "C'était important à mes yeux qu'ils tombent vraiment amoureux parce que, sinon, la facilité aurait été de faire de John Reid un pur salaud qui n'est là que pour manipuler Elton. J'ai essayé de montrer qu'il a beaucoup d'admiration et de respect pour lui et qu'il est stupéfait par son talent dès le début. C'est de là que naît son coup de foudre. À mesure qu'avance l'histoire, leurs rapports deviennent plus professionnels et John se révèle moins sympathique. En tout cas, c'est comme ça que je l'ai joué. Mais on tenait à ce que, au départ, leurs sentiments soient sincères et j'espère qu'on a réussi à l'exprimer dans le film. On est parti du principe que John Reid permet à Elton de gagner en confiance, de s'assumer et d'assumer sa relation avec un homme".

Furnish, à la fois producteur du film et mari d'Elton à la ville, est parfaitement conscient de l'importance de cette relation à l'époque. "John Reid a beaucoup compté dans la vie d'Elton", témoignet-il. "C'était la toute première grande relation amoureuse d'Elton. Quand il a rencontré John Reid, il était encore puceau. John est le premier homme dont il soit tombé amoureux et avec qui il ait eu une relation. Il est devenu le nouveau manager d'Elton et, ensemble, ils ont connu un immense succès. Leur relation amoureuse s'est détériorée, mais leurs rapports professionnels ont perduré. Ils ont rencontré pas mal de difficultés et le film l'évoque sans concession".

Comme Elton John lui-même le dit : "On a eu beaucoup de chance avec Richard. John Reid était un Écossais très charismatique et déterminé. Richard est également déterminé et charismatique… et écossais ! Ils sont nés au même endroit en Écosse. Je crois beaucoup au destin et à la manière dont l'univers fait en sorte de mettre les gens sur leur bonne trajectoire. J'adore les Écossais – ils ont beaucoup de charme et ils sont très sexy, et c'est ce qui m'a séduit chez John. Mais il avait le côté brutal des habitants de Glasgow. Dans l'interprétation que Richard en a donnée, il peut être à la fois tendre et un vrai salaud".

C'est exactement ce type de personnage complexe qui donne envie à un acteur de se lever le matin pour aller sur le plateau. Ce qui n'a pas échappé à Madden, ravi d'exprimer la dualité de Reid. "C'est assez difficile de cerner John Reid car les gens qui l'ont connu, et avec qui j'ai discuté, ne pensent pas du tout la même chose de lui", raconte-t-il. "Certains m'ont dit qu'il était le type le plus terrifiant du monde. Et d'autres qu'il était très drôle et qu'on avait envie de sortir avec lui tous les soirs. Mais tous s'accordent à dire que c'était un homme d'affaires très malin. La presse a largement relaté leurs procès, les problèmes qu'ils ont rencontrés et la manière dont leur relation s'est terminée, mais quand on est acteur, on a instinctivement envie de rendre le personnage attachant et de mettre l'accent sur la beauté de ses rapports aux autres. Même s'il y a une part importante du bonhomme qui n'est pas très sympathique. C'était intéressant de jouer sur ces contradictions".

Pendant la prépa, Fletcher a rencontré Reid et découvert que "le plus extraordinaire chez ces trois garçons – Elton, Bernie et John –, c'est qu'ils ont tellement de métier qu'ils ont très bien compris ce qu'on voulait faire dans cette réinterprétation de la vie d'Elton. Il ne s'agit pas d'un documentaire mais d'une fiction romancée. Et ils sont suffisamment intelligents pour l'avoir compris".

Madden a dû acquérir de nouvelles compétences. Une expérience qui au départ l'a terrorisé, mais qui l'a rapidement ravi. En effet, dès la première lecture du script, il a compris qu'il s'agissait davantage de raconter l'histoire à travers les chansons et les numéros de danse qu'à travers les scènes dialoguées. Il a donc dû s'initier à un nouveau rythme de jeu avec le réalisateur et apprendre à raconter une histoire différemment.

"Je n'avais jamais rien fait de semblable", relate Madden. "C'était très intimidant. Je tournais ces scènes très intenses, intimes et fortes avec Taron, et puis tout à coup, on claquait des doigts et on se lançait dans une séquence dansée et chantée. C'est difficile de passer d'un registre à l'autre, mais j'ai travaillé avec Dexter et Adam Murray, formidable chorégraphe, et j'ai essayé d'effectuer ces pas de danse correctement si bien que lorsqu'on chante et qu'on danse, je ne pense à la chorégraphie mais je me concentre uniquement sur mon jeu d'acteur".

Madden repense au tournage de ROCKETMAN avec fierté, et tout particulièrement à la scène du "Honky Cat" entre lui et Egerton qui "retrace trois ans de leur relation en chanson" et qui a exigé de Madden d'être plus agile que jamais. "Il y avait un sacré boulot à faire pour trouver le rythme et jouer toute cette palette d'émotions", dit-il.

Mais ce sont sans doute les passages intimes qui auront le plus marqué Madden. "Je crois que nous avons tous une vision extravagante d'Elton John", reprendil. "Pourtant, en jouant John Reid, j'ai découvert, à travers l'interprétation de Taron, un type normal. Il y a une scène formidable entre John et Elton chez eux.

On les voit d'abord dans leur chambre, puis ils traversent la maison, mettent le nez dehors, et on découvre un vrai couple qui se parle, se dispute et se chamaille. Ils ne sont pas couverts de plumes et de paillettes – ce sont juste deux mecs. Et on se fait une idée plus humaine d'Elton".

Bryce Dallas Howard dans le rôle de Sheila Farebrother
La séquence d'ouverture de ROCKETMAN devrait faire date. "Voici le petit Reggie Dwight qui se met à chanter, et le spectateur plonge dans l'enfance d'Elton John à Pinner, en Angleterre, dans les années 50", rapporte Bryce Dallas Howard qui campe la mère du garçon, Sheila Farebrother. "C'est une scène musicale, le petit Reggie chante 'The Bitch is Back' [la garce est de retour, NdT] et j'arrive. Et c'est moi la garce".

À 38 ans, la comédienne s'est surtout fait connaître pour avoir combattu des tyrannosaures dans la saga JURASSIC WORLD, mais selon Vaughn, elle trouve ici son rôle le plus marquant.

"La mère est un personnage central", analyse Vaughn en évoquant Sheila Farebrother qui est malheureusement décédée en 2017. "C'était très difficile d'exprimer l'amour maternel de cette femme qui certes aimait son fils mais lui faisait aussi du mal. Les comédiennes qu'on a vues pendant les auditions n'arrivaient pas à jouer ces deux facettes. C'est un équilibre assez délicat : soit elles étaient trop maternelles, soit elles étaient trop méchantes. Mais Bryce est une formidable comédienne et elle a trouvé le bon dosage".

Si la chanson qui accompagne la première scène du personnage peut sembler sévère, elle est parfaitement adaptée selon l'actrice. "Elle résume très bien le caractère de Sheila", dit-elle. "On découvre Elton, enfant, et ses relations avec ses parents – et on comprend qu'elles ont marqué sa personnalité et sa musique. Sheila entretenait des rapports extrêmement toxiques avec le père d'Elton. Reggie était un enfant naturel – c'était un sujet de conflit – et quand ils ont enfin décidé de se marier, Elton avait six ans. Quand on pense à Elton John, on a le chanteur de légende en tête, mais il a vécu dans un milieu modeste et connu des moments difficiles dans son enfance. Il a été élevé par sa mère et sa grand-mère à Pinner, et quand son père a emménagé avec eux, les liens étaient très distendus".

En matière d'authenticité, il faut parfois accepter les choses comme elles viennent. "Sheila ressemble à Liz Taylor si bien qu'elle porte une nouvelle tenue magnifique à chaque scène", déclare l'actrice. "C'est formidable de se glisser dans chaque situation grâce aux vêtements, de s'amuser avec la mode de l'époque, et de pouvoir explorer le personnage à travers des costumes parfois extravagants – d'autant que le film ne s'attache pas à reproduire fidèlement la réalité en s'inspirant de telle ou telle photo. Ce n'était pas l'objectif. Le but était d'obtenir un résultat spectaculaire".

Selon Fletcher, "de toute évidence les femmes – la mère et la grand-mère – de la vie d'Elton ont beaucoup compté pour lui. C'est bien connu qu'il s'agissait de femmes fortes qui ont joué un rôle important dans ces années décisives de son parcours. Il me fallait une actrice forte, qu'on n'attend pas, et dès qu'on aperçoit Bryce, on sait à qui on a affaire et on perçoit la richesse de sa personnalité".

Comme l'indique Bryce Dallas Howard, "Sheila était incroyablement charismatique et convaincante et savait se rendre attachante. Elle pouvait être absolument terrifiante, très égocentrée, très égoïste, et se révéler une mère extrêmement narcissique obsédée par ce qu'elle n'avait pas ou plutôt par ce dont, à ses yeux, elle était privée. Les rapports entre Elton et Sheila n'étaient pas excellents et Elton faisait vraiment des efforts, même s'il disait qu'elle l'avait toujours encouragé à faire de la musique".

Tout comme les relations d'Elton John et sa mère étaient fluctuantes, et passaient de l'affection à l'hostilité, de l'amour à la distance, la comédienne éprouvait des sentiments mitigés à l'égard de son personnage, trouvant parfois difficile de la comprendre et de la jouer. "Ceci dit", reprend la comédienne qui rêvait de jouer dans un film d'époque, "je me suis éclatée à porter tous ces costumes et je ne laisserai personne m'enlever ce plaisir !"

Gemma Jones dans le rôle de Grandmère Ivy
Gemma Jones a souvent joué les mères de stars britanniques. Mais au fil des années, les rôles qu'on lui propose ont changé. Avec ROCKETMAN, celle qui s'est surtout fait connaître pour avoir incarné Madame Pomfresh dans HARRY POTTER et la mère de Bridget Jones dans la saga éponyme, trouve sans doute son rôle le plus fort.

"Elton adorait sa grand-mère plus que quiconque", explique Vaughn. "C'était le genre de grand-mère qui aurait fait n'importe quoi pour son petit-fils".

Tous les fans de la musique d'Elton John peuvent lui être reconnaissants car elle encouragé le petit Reggie, qui venait d'un milieu familial difficile, à suivre sa voie.

"Je pense qu'Ivy a bien compris que Reggie n'était pas comme les autres", note Gemma Jones. "Elle savait qu'il avait une grande sensibilité et que, très tôt, il s'était révélé très doué pour la musique. Il a reçu une formation de musique classique et aurait pu continuer dans cette voie, mais Ivy lui a offert des cours de piano et contribué à son éducation musicale".

L'actrice n'a pas évoqué avec Elton John ses relations avec sa mère avant de camper sa grand-mère : "Il était très proche d'Ivy", ajoute-t-elle. "D'ailleurs, c'est elle qui l'a en grande partie élevé. Il avait des rapports très conflictuels avec sa mère, tout comme sa grand-mère avec sa propre fille".

En revanche, Gemma Jones avait une proximité immédiate avec le réalisateur. "J'ai connu Dexter Fletcher quand, très jeune, il était comédien", dit-elle. "Nous étions dans la Royal Shakespeare Company tous les deux lorsqu'il avait 14 ou 15 ans. C'était un sacré petit coquin à l'époque et, franchement, il n'a pas changé ! Il est drôle, dynamique et enthousiaste. C'était le metteur en scène idéal pour ce projet d'autant qu'Elton passe par des phases très sombres".

LA MUSIQUE
Une bande-originale mythique
LES CHANSONS DE ROCKETMAN

Elton John évoque sa collaboration avec Bernie Taupin et les auteurs du film expliquent comment ils ont su donner une tonalité nouvelle aux tubes de la star.

"Quand je me penche sur ma vie, je me dis que certains événements ont eu lieu grâce à l'intervention de Dieu", sourit Elton John. "Tout d'abord, il y a eu ma décision de quitter le groupe avec lequel je me produisais (Bluesology) pour tenter une nouvelle aventure. J'étais un peu rondouillard, pas très sûr de moi, mais j'en avais franchement assez de jouer dans des boîtes de nuit devant des gens qui ne s'intéressaient pas à la musique. Du coup, j'ai répondu à cette annonce dans le New Musical Express. Avec le recul, je me demande comment j'ai eu le courage de franchir le pas. J'étais tellement timide que cela reste un grand mystère".

Comme on le sait depuis, il s'agit de la même annonce, publiée par Liberty Records, à laquelle un jeune homme – Bernie Taupin – qui travaillait dans une ferme d'élevage de poulets a répondu. La maison de disque a d'abord rappelé John qui eu un rendez-vous avec un certain Ray Williams. John a expliqué à celui-ci qu'il pouvait composer mais qu'il n'avait pas d'inspiration pour les paroles. "C'est alors que Ray Williams prend une enveloppe, encore cachetée, sur son bureau", se souvient John. "Cela aurait pu être n'importe qui. Mais il me l'a donnée pour que je voie si les textes des chansons qui s'y trouvaient pouvaient me convenir. Tout excité, j'ai repris le train pour Pinner, j'ai ouvert l'enveloppe et j'ai été emballé. Il aurait pu me donner n'importe quelle enveloppe, mais il s'agissait du courrier de Bernie. C'est mon meilleur ami et on se connaît depuis cinquante ans. Quand je pense que ça aurait pu être la lettre de quelqu'un d'autre dont les paroles étaient merdiques ! Qu'est-ce que j'ai eu comme chance !"

La suite, tout le monde la connaît. John et Taupin forment un tandem – le premier à la composition, le second à l'écriture des paroles – qui domine la scène musicale depuis une cinquantaine d'années. À une époque, les ventes de leurs disques ont même représenté 4% du marché mondial. ROCKETMAN, qui reprend 23 de leurs chansons, en propose une réinterprétation pour le public d'aujourd'hui.

"Je suis toujours surpris par Bernie car je ne sais jamais à quoi m'attendre", signale John. "On ne parle pas vraiment du genre de chanson qu'on va écrire. Du coup, quand il me fait lire ce qu'il a écrit, je suis systématiquement enthousiaste. On a toujours fonctionné comme ça, depuis notre toute première collaboration. En général, il jette ses idées par écrit et j'y apporte la touche finale. On écrit nos chansons très rapidement. Je ne sais pas en combien de temps il écrit ses textes parce que je ne lui pose pas la question. Mais quand il me remet les paroles qu'il a écrites – et si j'accroche tout de suite et que je me mets au clavier – ça ne prend pas longtemps. Il écrit parfois des textes que j'adore et sur lesquels j'essaie de composer de la musique, mais je n'y arrive pas. Je ne sais pas pourquoi. Mais je m'y résous. J'ai déjà la chance d'avoir les textes sur lesquels j'ai composé nos chansons. Je ne sais pas comment tout cela fonctionne. C'est extraordinaire. C'est la même chose quand je suis sur scène. Mes mains se déplacent toutes seules sans que j'aie besoin d'y penser".

Étant l'un des producteurs exécutifs de ROCKETMAN, John a participé au casting de son propre rôle et de celui de Taupin – et il a été enchanté par les choix finaux. "Taron [Egerton] est une très belle personne", dit-il. "Un type franchement épatant. Ce qu'il a accompli dans ce film est tout simplement incroyable. Le fait que Jamie Bell nous ait donné son accord est tout aussi génial. Il y a plusieurs années, alors que j'étais venu découvrir BILLY ELLIOT à Cannes, j'avais été bouleversé. La scène finale où Billy, devenu adulte, se produit dans 'Le lac des cygnes' et où son père vient le voir… Mon père n'est jamais venu me voir en concert. Mais il ne faudrait pas se méprendre. Je me suis réconcilié avec mon père et tout va bien, mais à ce moment-là, la prestation de Jamie m'a vraiment chaviré. Et à présent, il me bouleverse à nouveau en jouant mon meilleur ami ! C'est extraordinaire".

Bien entendu, une tâche immense attendait les acteurs engagés pour ROCKETMAN : interpréter des tubes planétaires. "J'ai compris que Taron savait chanter dès l'instant où je l'ai rencontré", signale producteur musical du film Giles Martin. "J'ai fait sa connaissance grâce à Matthew (Vaughn), avant même que Dexter ne s'engage dans l'aventure. On s'est installés dans le studio et on s'est mis au travail tout simplement. C'est un type merveilleux. Je n'ai jamais rencontré de chanteur qui s'investisse autant dans son travail et qui comprenne qu'il fallait insuffler de l'émotion dans son interprétation des chansons. Les Gallois sont vraiment des chanteurs sensationnels !"

Martin, accompagné des comédiens, du réalisateur et des producteurs, a disposé les chansons dans le film de sorte qu'elles soient en adéquation avec l'intrigue – la métamorphose du jeune Reginald Dwight en Elton John et ses conséquences, bonnes et moins bonnes – et qu'elles résonnent différemment.

"À mon avis, les vrais fans vont être surpris en redécouvrant ces tubes qui, à l'origine, racontent une histoire, et n'ont plus la même portée dans le film", avertit Furnish. "Pas mal de gens vont se dire 'Je n'avais jamais compris que cette chanson pouvait vouloir dire ça'".

Dès que Martin s'est mis au travail avec Vaughn, puis avec Fletcher, une totale liberté de création a prévalu entre eux. "Dexter m'a dit : 'À partir du moment où la musique démarre, on doit être transporté'", rapporte Martin. "'Il faut qu'on s'envole. Les chansons ne doivent en aucun cas nous plomber'". Et c'est ainsi qu'un film musical d'un genre inédit est né.

"On s'est dit qu'on allait faire un musical", reprend Fletcher. "On voulait aborder le projet dans cette optique en se servant de la voix magnifique de Taron et des chansons pour donner à la narration une vraie fluidité. Du coup, on redécouvre les chansons sous un jour radicalement différent. On pouvait les utiliser de la manière qu'on voulait. Elles étaient à notre disposition, tout comme les décors, les costumes et les éclairages. Et Giles, qui connaît très bien le pouvoir évocateur de ces chansons, nous a permis d'aller très loin".

"C'était un parti-pris très séduisant parce qu'il offrait une très grande marge de manœuvre pour jouer avec les chansons et qu'il me stimulait sur le plan musical", ajoute Martin. "Dans un tel contexte, on a envie de s'amuser avec la musique d'Elton. Les chansons sont comme la force motrice des événements du film. On a le sentiment qu'un autre monde s'ouvre à nous. On enregistrait d'abord une maquette de la chanson. Puis, Taron ou Richard ou Jamie enregistrait une première version de la chanson dont on se servait sur le plateau. Puis, soit on remplaçait cette version par leur interprétation en live, soit les acteurs chantaient en play-back. Par la suite, je réorchestrais les chansons en fonction de ce qu'ils avaient fait. C'était comme si on travaillait en commençant par la fin".

Le résultat est stupéfiant. Mais rien n'aurait été possible si les auteurs de ces chansons – Elton John et Bernie Taupin – n'avaient pas donné carte blanche à la production.

"C'était le plus extraordinaire", remarque Martin. "Pour certains, ces chansons sont si mythiques qu'elles sont presque des objets sacrés. Mais on n'a pas fait de changements de manière gratuite. Et le plus génial chez Elton, c'est qu'on a affaire à un pur artiste. Il est heureux qu'on donne une nouvelle ampleur à ses créations. Il a chanté ces chansons un nombre incalculable de fois et les a entendues très souvent aussi ! C'est un vrai bonheur pour lui d'entendre ces nouvelles interprétations – et je crois que le résultat est proprement magique".

Le répertoire
DÉCRYPTAGE DES SCÈNES MUSICALES MAJEURES DE ROCKETMAN

Acteurs et techniciens révèlent le rôle joué par quelques chansons parmi les plus célèbres d'Elton John et Bernie Taupin au cours de leur légendaire odyssée musicale 

"The Bitch is Back"
Le premier morceau d'Elton John que l'on entend dans ROCKETMAN n'est pas seulement audacieux dans ce qu'il raconte, mais il donne le ton sur la fonction de la musique dans le récit de la métamorphose du jeune Reggie en icône planétaire. "'The Bitch is Back' est vraiment ce qui accroche les spectateurs et leur fait comprendre que la musique va avoir une place centrale tout au long du film", déclare Furnish. "C'est un début décapant pour un film, le genre de morceau qui vous donne envie de danser, mais il est aussi très important dans la mesure où il fait avancer l'histoire : ROCKETMAN est bien plus qu'un film sur la musique comportant des scènes dansées et chantées, c'est un film dans lequel réalité et imaginaire se confondent à plusieurs reprises. Dans ROCKETMAN, la musique sert souvent de passerelle entre ces univers aux frontières extrêmement floues et offre aux personnages la possibilité d'exprimer et de révéler des pans d'eux-mêmes à travers une chanson".

La chanson nous transporte dans les années 1950, et plus précisément chez le petit Reginald Dwight âgé de sept ans. On y découvre une famille où l'amour n'a presque pas sa place. ("Chaque membre de cette famille a sa propre façon de trouver l'amour", note Furnish.) Le cadre est charmant, "une ambiance en apparence parfaite", évoque Fletcher, typique d'un décor très britannique des années 1950, avec laitier, facteur et camion à glaces. "Mais tout y est un peu trop parfait", ajoute Fletcher. "Je voulais que tous les danseurs aient l’air de poupées, avec un sourire figé comme un rictus. Les voisins arborent tous un air très jovial et tout le monde salue Reggie d'un signe de la main. Puis, il se met à chanter qu'il est 'une garce' ("bitch") et il se transforme en ce personnage qui se veut dangereux et qui montre qu’il en veut. Surgit alors Elton, plus âgé, dans son costume qui évoque un être diabolique et qui tente de mettre fin à toute cette mascarade. Il va même jusqu'à dire Arrête, arrête, arrête ! Ça ne s’est pas passé comme ça ! Ce n'est pas lui la garce, c'est moi".

Il s'agit bien d'une scène des plus audacieuses. Fletcher a mis cartes sur table d'entrée de jeu et on est à des années-lumière du biopic convenu ou de la comédie musicale traditionnelle. "Surtout avec le jeune Reggie qui chante 'The Bitch is Back', je savais que ça allait clairement nous propulser loin des sentiers battus grâce à cette ouverture inattendue", confirme le réalisateur. "Avec un peu de chance, les spectateurs comprendront que malgré notre façon de nous jouer des conventions, l'histoire a un côté léger, fantasque et presque quotidien, mais qu'au fond le film revendique aussi fièrement cette phrase 'Je suis une garce'".

En ouverture, "The Bitch is Back" sert d'introduction idéale à l'univers de ROCKETMAN grâce à son alliance d'authenticité et de surréalisme. "C'est justement l'idée", reprend Fletcher. "Ça n'a rien de traditionnel. On est dans une comédie musicale mais le ton est étrange et décalé, car Elton se sent comme ça à ce moment-là du film. Il n'est plus tout à fait lui-même. Le fait que le début du film se déroule chez lui à Pinner, là où plongent ses racines, est crucial. Par la suite, Elton en arrive à croire qu'il a toujours été de la mauvaise graine mais en vérité ce n'est pas le cas. Il a simplement été un enfant innocent et merveilleux, comme on l'a tous été à une époque. Et il a besoin de ça pour se retrouver".

"Saturday Night’s Alright for Fighting"
 L'un des passages les plus audacieux de ROCKETMAN se déroule, avec à-propos, sur l’un des airs les plus rock d’Elton John. Au début de la scène, Reggie, âgé de dix ans, est en train de jouer au piano dans un pub londonien, avant qu'il n'en sorte pour se rendre à une fête foraine animée, où il se transforme de jeune garçon (joué par Kit Connor) en adolescent casse-cou (interprété par Taron Egerton).

Cette scène est stupéfiante  : elle a été filmée en une seule prise, en s'attachant au personnage du jeune Elton à travers la fête foraine au milieu de plus de 300 figurants, 50 danseurs, 4 caméras, 3 grues, 10 autos-tamponneuses et une grande roue. Il a fallu 12 semaines de travail pour chorégraphier la séquence de danse qui propulse les spectateurs dans le temps, passant des années 1950 aux années 1960. "Et ce saut dans le temps signifie qu'on pouvait aussi montrer les diverses cultures et influences du Londres de l'époque", souligne le chorégraphe Adam Murray. "Chaque groupe (de danseurs dans la scène) commence par reproduire les mouvements des autres, les Mods [Modernistes, NdT.] empruntent un peu au bhangra [danse indienne, NdT.] et il y a aussi des Teddies [dans les années 1950, les Teddies portent des costumes comme au XIXe siècle, veulent être pris pour des durs et forment des bandes, NdT.], des rockers et des adeptes du ska, pour venir former une unité".

Ce mode de narration, comme le choix des chansons, sont "une brillante métaphore pour illustrer la manière dont Elton a dû surmonter les difficultés liées au milieu ouvrier et sclérosant où il a grandi, pour devenir cette force de la nature qui a quitté l'enfance pour entrer très tôt dans le monde adulte", poursuit Furnish. "C'est un passage merveilleux et très festif".

Fletcher se souvient avec fierté du tournage de cette scène, de loin la plus importante de sa carrière. "'Saturday Night’s Alright for Fighting' donne toujours le sourire aux gens", dit-il. "J'espère que le public sortira de la projection en se disant 'Et bien, c'était génial !' Il se passe énormément de choses dans cette scène. Elton découvre alors ses futures sources d'inspiration. On y montre comment Elton John rend hommage aux autres et à leurs différences, car ça fait partie de lui et c'est sa philosophie de vie. Les gens fêtent maintenant la différence et la diversité, et c'est exactement ce que fait Elton. Sur le plan musical, il y a constamment du mouvement, célébrant la jeunesse dans tout ce qu’elle peut avoir de plus brutal et de plus viscéral. J'ai dit au directeur de la photographie, George Richmond, Tournons cette scène ça en une seule prise qui unisse tous les personnages afin qu'il y ait toujours du mouvement, que ce soit fluide et sans raccord'. Et George était l'homme de la situation. C'est pour ça que c'est un moment crucial, parce qu'il s'agit surtout d'Elton qui s'apprête à franchir une étape décisive".

"Your Song"
"Your Song" restera une chanson clé pour Taron Egerton. On peut même dire que ce morceau a bouleversé sa vie à tout jamais. L’acteur a en effet choisi cette chanson pour son audition d’admission à la Royal Academy of Dramatic Arts. À deux reprises. "La première fois, je n’ai pas été pris !", lâche-t-il à présent en riant. "Mais je savais que je tenais quelque chose et j’ai réussi la seconde fois. Je l’avais choisie, car ça raconte l’histoire d’un homme. Elle est destinée à quelqu’un et elle peut être déclamée comme un discours. Et dans ROCKETMAN, c’est vraiment un beau moment qui fait partie intégrante de l’histoire de la merveilleuse collaboration entre Elton et Bernie".

Pour Bell, il ne s’agit pas seulement de l’une des chansons les plus emblématiques qu’ils aient écrite, mais d'un titre idéal pour l’histoire. "Ce morceau a été écrit de manière très visuelle et cinématographique", indiquet-il. "La façon dont cette chanson est mise en scène dans le film est vraiment magnifique".

Et pour l’un de ses deux auteurs, "Your Song" reste à ce jour l’une des chansons qu’il préfère interpréter, près de 50  ans après l’avoir chantée pour la première fois. "Je ne me lasse pas de la chanter", confirme John. "C’est la chanson la pus belle et la plus romantique qui soit. Elle touche les gens. C’est pour ça qu'on écrit des chansons : pour émouvoir les gens. On écrit d’abord pour se faire plaisir mais si par la même occasion des gens y sont sensibles – et je pense que les paroles de 'Your Song' et les émotions qui l’ont suscitée le prouvent –, alors elle continuera à être chantée. Ces paroles sont extraordinaires et ont été écrites par un poète de 18 ans (Bernie Taupin). Et c’est compliqué, car je l’ai écrite en mi bémol et aussi rapidement qu’on le voit dans le film. C’est vraiment ainsi que ça s’est passé. L’écriture de cette chanson a été un moment magique dans notre vie".

Cette scène dans ROCKETMAN, alors que l’une des chansons d’amour les plus célèbres de tous les temps s’écrit sous nos yeux, est, d’après le réalisateur, l’un des moments les plus époustouflants du film qui en compte pourtant beaucoup. "Ce que j’ai voulu faire, c’est utiliser les chansons d’une manière originale.

La notoriété de ce titre nous permet d'apprécier vraiment ce moment et ce passage est à vous donner la chair de poule", dit Fletcher.

"Crocodile Rock"
"L’une des choses dont je suis le plus fier dans notre film, c’est le concert exceptionnel au Troubadour qui a lancé la carrière d’Elton", raconte Egerton en évoquant le moment où Elton John a été propulsé sur la scène musicale internationale. "Il avait 23  ans et c’est l’une de ses performances sur scène dont il a le secret, l’une de ces merveilleuses soirées au Troubadour qui a fait de lui cet artiste reconnu dans le monde entier".

La production a fait construire une réplique à l’acoustique parfaite de la légendaire salle de concert de Los Angeles pour la scène dans laquelle Egerton, sous les traits d'Elton John, passe de la terreur –  se cachant dans les toilettes en coulisses et refusant d’en sortir  – au triomphe. "  'Crocodile Rock' est l’une des chansons qui rassemble le plus de spectateurs, et ça a donc été un choix tout trouvé pour cette scène", poursuit Furnish. "C’est un air entraînant, si facile à suivre que les gens se mettent immédiatement à chanter en chœur. Dans le film, Dexter a imaginé le concert au Troubadour avec beaucoup de délicatesse et de légèreté. Elton a toujours été connu pour sa façon de projeter ses jambes en l’air quand il joue du piano, tenant en équilibre sur les mains en prenant appui sur le clavier. Pendant cette chanson, où l'on ressent toute l’énergie qui se dégage du concert, ses jambes s’élèvent en l’air et le public l'accompagne dans le même élan. On sent que ce n’est pas un concert habituel : c’est un moment totalement à part où toute la salle a ressenti qu'il se passait quelque chose d'extraordinaire et de presque surnaturel. Cette chanson restitue tout ça merveilleusement".

Bien entendu, la métamorphose du chanteur n'a pas été perçue ainsi à l’époque. "Les gens étaient interloqués, 'Qu’est-ce que c’est que ça  ?'", raconte John en riant au souvenir de cette nuit mémorable. "Je sautais en l’air et tout le tralala, et ils ne s’y attendaient pas. Mais il s'agissait surtout d’être au bon endroit au bon moment. Quand Dick James (le producteur de musique britannique) m’a lancé, 'Je veux que tu joues au Troubadour', je lui ai répondu, 'Je rêve d’aller en Amérique mais je ne pense pas que ce soit le moment'. Il m’a dit que je devais y aller. Ça montre bien qu’on ne sait jamais ce qui peut se passer. Je me suis dit, 'C’est vrai que je veux aller chez un disquaire américain et acheter des disques'. Du coup, j’y suis allé. On ne sait jamais ce que la vie vous réserve !"

"Tiny Dancer"
Cette soirée inoubliable au Troubadour, qui a bouleversé le cours de leurs vies, est devenue d’autant plus marquante à la lumière de à ce qui s’est passé juste après : John et Taupin ont en effet été invités dans la foulée à une fête chez la légendaire Mama Cass. C’est là qu’Elton rencontre John Reid pour la première fois.

"Dans le film, on est vraiment témoin de la complicité immédiate entre les deux hommes", raconte Madden. "Leur relation va devenir beaucoup plus complexe et ils vont tous les deux connaître des moments difficiles, mais il était important de montrer l’intensité de ce coup de foudre".

Et quelle meilleure chanson pour illustrer ce coup de foudre que "Tiny Dancer", l’une des chansons de John les plus aimées ? "Absolument", confirme Fletcher. "Quand on a commencé à faire le film, on a évidemment commencé à réfléchir aux chansons dont on allait se servir. Il y a énormément de titres d’Elton John parmi lesquels choisir et, pour être honnêtes, on a choisi ceux qui fonctionnaient avec l’histoire que l’on voulait raconter. Mais quand on se met à y repenser, 'Tiny Dancer' se classe tout simplement en tête de liste".

"Honky Cat"
Tout comme la séquence "Night’s Alright for Fighting", le numéro de "Honky Cat" est volontairement mis en scène comme une comédie musicale dans la tradition de la MGM, et pas seulement pour son éclat. "Ce bref passage illustre parfaitement le succès naissant et la notoriété et richesse croissantes d’Elton à cette époque", explique Egerton.

C’est un moment bref et touchant mais révélateur du film, qui a l’air à la fois classique et moderne. "  'Singing in the Rain' est l’un de mes films préférés, quand Gene Kelly et Cyd Charisse s’évadent dans l’une de ces escapades imaginaires", explique Fletcher. "Pour moi, la question était de savoir comment transposer une séquence aussi iconique de façon inédite, pour parler d'un flambeur qui passe de l'opulence à la décadence – autrement dit, d'un comportement peu reluisant".

Et de l’argent, il y en avait. À l’époque de la scène de "Honky Cat" dans ROCKETMAN, Elton John touchait pas moins de 4 % sur toutes les ventes d’albums dans le monde. "Ça représente une énorme somme d’argent", poursuit Fletcher. "Du coup, la chanson devait y faire allusion. Qu’on approuve ou pas son comportement, c'était le quotidien d’Elton à ce moment-là de sa vie et même si ça semble fantasque, voire indécent, 'Honky Cat' restituait parfaitement cette réalité : 'Ce doit être merveilleux d’être riche et de se baigner dans du champagne'. Ça explore non seulement cet aspect mais aussi le revers de la médaille. C’est là qu’il commence à perdre pied avec la réalité".

L’un des tous premiers crédos de ROCKETMAN a toujours été de célébrer la vie d’Elton John mais également de ne pas faire l’impasse sur les périodes plus sombres de sa vie. Et cette scène autour de "Honky Cat" en est le tout premier exemple : John tenait à rester fidèle à la vérité, aussi désagréable soit-elle. "Ça a toujours été notre priorité", admet Furnish. "Cette chanson est utilisée au moment où Elton devient célèbre mais aussi où il commence à dérailler. Ça montre quelle influence John Reid exerçait sur sa vie et ce qu’il a fait découvrir à Elton. On découvre comment ils se rapprochent jusqu’à devenir un couple et à travailler ensemble, apprenant ensemble et grandissant ensemble. C’est à partir de là qu'Elton commet toutes sortes d'excès et qu’il s’ouvre à de nouvelles expériences, ce qui est une bonne chose mais s’avère très, très dangereux. 'Honky Cat' est un passage très séduisant du film".

"Bennie and the Jets"
Pour le producteur de musique de ROCKETMAN, Giles Martin, "Bennie and the Jets" est peut-être la plus audacieuse des nombreuses réinterprétations musicales que le film propose en revisitant les tubes d’Elton John.

C’est une approche audacieuse pour caractériser une époque qui ne l’était pas moins. "On est transportés dans une réalité de l’ordre de la bacchanale : le jet privé atterrit dans un New York féerique", note Fletcher. "Suivant votre façon de voir les choses, c’est soit le temps fort de l’histoire, soit son plus tragique. Dans ROCKETMAN, il fallait qu’à un moment donné, Egerton se perde totalement, et perde ses repères. Puis il va en désintox pour essayer de se retrouver. On ne peut pas être sans concession sans montrer ses mauvais côtés. C’est vraiment ce qu’on a essayé de faire. On s’est posé la question de savoir jusqu'où on pouvait aller. Je n’avais pas envie de montrer Elton coucher avec plein de partenaires différents dans le film, mais j’avais besoin que les gens comprennent ce qui a motivé son comportement. Il y a des scènes d’amour sincères entre Richard et Taron, merveilleusement filmées, comme n’importe quelle scène d’amour le serait. Mais Bennie and the Jets' est totalement à l’opposé de tout ça : à ce moment-là, il mène une vie dissolue et centrée autour de l'argent. Le film se doit d’explorer cette phase de sa vie. Et si je ne le faisais pas, je ne pourrais pas le montrer en désintox : il n’aurait aucune raison de vouloir se désintoxiquer".

La chanson, interprétée par Egerton, se déroule dans une boîte de nuit, et pas n'importe laquelle. "Dans les années 70, le Studio 54 était le club le plus branché", indique Fletcher. "C'était un lieu incroyable, pour des gens exceptionnels qui avaient une très grande créativité, mais c'était une époque particulièrement sombre. C'est l'époque où le Sida a commencé à se répandre. Il y avait comme une sourde angoisse qui régnait. Elton était dominé par ses addictions. Du coup, dans la scène très sombre de 'Bennie and the Jets', on découvre les sept niveaux de l'enfer à mesure qu'on pénètre dans le club. Le film délivre un message responsable par rapport à la drogue puisqu'il dit : 'Venez au Studio 54. En descendant les marches qui y mènent, vous allez découvrir un univers extraordinaire, mais une fois que vous arriverez tout en bas, ce que vous y verrez est épouvantable : les gens que vous allez y croiser sont perdus'. Visuellement, la séquence dégage donc une atmosphère fascinante. L'univers qui est dépeint est séduisant. Mais ensuite on a le sentiment de plonger dans les ténèbres – et je pense que c'était la bonne manière de s'y prendre, sans rendre cette ambiance glamour. Beaucoup de gens à l'époque ont payé le prix fort, sur un plan humain, affectif et personnel".

Comme le dit le chef-costumier Julian Day : "Si 'Honky Cat' sème la graine des excès en tout genre, 'Bennie and the Jets' en est le fruit". En d'autres termes, le sexe et la drogue étaient au rendezvous, mais le rock'n'roll avait disparu. "C'est à ce moment-là que tout est parti en vrille", reprend Furnish. "À partir de 'Bennie and the Jets', Elton commence à sombrer. Il est dans l'excès permanent. Il ne contrôle plus ses addictions et elles l'entraînent vers le fond. La chanson est un cri de désespoir. La manière dont elle est utilisée dans le film est d'une grande force".

‘Goodbye Yellow Brick Road’
À la fois tube planétaire et moment-clé dans l'intrigue du film, "Goodybe Yellow Brick Road" témoigne également de la finesse des créations du chef-costumier Julian Day. Le costume qu'il a conçu pour accompagner la chanson s'inspire, bien évidemment, du "Magicien d'Oz". Son sens du détail ravira les aficionados de ce grand classique de la littérature enfantine.

"C'est l'une de mes tenues préférées du film", confie Day. "J'ai donné à Taron un costume bleu pourvu de revers couleur rubis pour évoquer Dorothy. La chemise est en tissu argenté pour l'Homme de fer-blanc, il porte un chapeau de paille pour l'Épouvantail et un grand manteau en fausse fourrure pour le Lion. Il a même une petite boucle en émeraude à la ceinture et Tom a porté une petite boucle d'oreille en émeraude en hommage à la Cité d'Émeraude".

Mais si c'est Egerton qui porte le costume, c'est Bell qui interprète la chanson. "Je chante 'Goodbye Yellow Brick Road' au moment où Bernie et Elton sont séparés depuis quelque temps, et Bernie est venu prendre des nouvelles d'Elton", raconte Bell. "Elton plane totalement. Il boit beaucoup et il est devenu méchant. Il s'est vraiment perdu et il n'est plus du tout la personne qu'il était. Même lorsque Bernie est à ses côtés, il n'arrive plus à discerner l'ami qui a toujours été là pour lui".

Dans cette scène, les deux hommes dînent ensemble dans un restaurant chic, mais le repas se termine de manière catastrophique. "C'est à ce moment-là que démarre la musique", reprend Bell, "et on entend les paroles : 'Quand estce que tu vas redescendre sur Terre ? Quand est-ce que tu vas atterrir ?' En gros, Bernie demande à Elton quand il compte arrêter de partir dans ses délires : 'à quel moment vas-tu assumer le fait que tu as des problèmes et qu'il faut t'y attaquer avant qu'ils ne te tuent ?' Bernie quitte le restaurant précipitamment en chantant et c'est le moment où on a compris que c'était la fin de leur relation. Et c'est très triste. Bernie monte dans un taxi et s'éloigne et la chanson donne une dimension tragique à la scène. C'est le moment où Bernie se dit : 'J'ai essayé de sauver mon ami et je ne crois pas être capable d'y arriver'. Dans une certaine mesure, il exprime son échec à travers cette chanson".

Qu'est-ce que la "Yellow Brick Road" – la route de briques jaunes ? Que représente-t-elle ? S'agit-il de l'industrie du divertissement dans son ensemble ou des trajectoires de Taupin et John ? "Elle peut revêtir des significations différentes en fonction de chacun", analyse Bell. "À ce moment-là de leur histoire, Elton et Bernie voulaient tous les deux faire quelque chose de leur vie et changer le cours du destin. On peut tous se reconnaître dans cette détermination. Et quand on obtient ce qu'on veut, cela peut se révéler très compliqué. La manière dont on gère un tel sentiment de réussite peut être, elle aussi, compliquée. Et si, par malheur, on perd la seule chose qui vous permettait de garder les pieds sur terre, alors tout est possible…"

‘Rocket Man’
Étant donné que cette chanson a donné son titre au film, la scène où on l’entend est particulièrement mythique. Comme l'indique Martin, "'Rocket Man' démarre au fond d'une piscine et s'achève sur un stade. Je pense que c'est un parcours assez vertigineux".

"On n'imagine pas 'Rocket Man' comme une chanson faite pour être chantée sur un stade", poursuit-il. "Mais on a vraiment mis le paquet pour cette scène. Il y a 50 choristes et un orchestre composé d'une centaine de musiciens. C'est devenu un dispositif gigantesque. Et on ne l'a pas fait gratuitement, mais parce qu'on voulait que la scène soit captivante, agréable à entendre et belle à regarder. Au bout du compte, je ne crois pas qu'on marque des points parce qu'on fait preuve de témérité, mais parce qu'on réalise un film divertissant".

Fletcher se souvient de la séquence avec émotion. Dans le film, il s'agit d'un passage où John, déprimé et en overdose, plonge dans une piscine au cours d'une soirée. Si la scène était formidable dans le scénario, elle présentait certaines difficultés sur le plateau. "Je suis très fier que Taron ait réussi à chanter sur le dos, au fond d'un réservoir d'eau d'une quinzaine de mètres de hauteur. Franchement, c'est une vraie prouesse", affirme le réalisateur.

Pour Furnish, "Rocket Man" incarne la métaphore parfaite d'un homme au sommet de la gloire qui ne s'est jamais senti aussi seul. "À cette période de sa vie, Elton était la plus grande star au monde", note le producteur. "Sa fusée, pour ainsi dire, était en pleine ascension et il était sur orbite à travers l'univers, mais il se sentait aussi de plus en plus isolé, de plus en plus seul, et de plus en plus détaché du quotidien. Il avait de plus en plus de mal à s'attacher aux autres et à aimer. Cette chanson transcrit formidablement ce sentiment, à travers la musique et les paroles. Elle possède le lyrisme qui correspond à ce moment important de sa vie, mais elle exprime aussi l'isolement terrible dont il souffrait, malgré ses innombrables succès. En gros, c'est la rencontre idéale entre musique et cinéma. J'ai hâte que le public la découvre".

L’EQUIPE TECHNIQUE
La conception de Captain Fantastic
COMMENT RÉINVENTER UNE ICONE
La mise en scène du légendaire Elton John : Costumes, chorégraphies, coiffures, maquillage et décors dans ROCKETMAN
Julian Day, chef-costumier
Comme tout le monde, les costumiers ont de bons et de mauvais jours. Et il y aussi les jours où, comme l’a vécu Julian Day, on reçoit un coup de téléphone et on s’entend demander si on est intéressé par la création des costumes d’un film sur Elton John, réputé pour avoir porté les costumes de scène les plus excentriques, extravagants et littéralement scintillants jamais conçus.

 "C’est l’un de ces moments où on se pincerait presque pour y croire", se souvient Julian Day. "C'était impossible de refuser".

Day est un vétéran du cinéma, avec 58 films à son actif, mais il n’est pas étranger aux icônes de la musique, puisqu’il a collaboré à BOHEMIAN RHAPSODY, autour de Freddie Mercury, NOWHERE BOY, qui parle de John Lennon, et CONTROL, sur le chanteur de Joy Division Ian Curtis. ROCKETMAN présentait un tout autre défi  : "Avec ce film, Dexter voulait que je pousse le côté fantaisie musicale au maximum afin qu’il puisse l’atténuer au besoin par la suite. Il ne s’agissait pas de reproduire les costumes de scène d’Elton mais plutôt de mon interprétation de ces derniers. Il ne fallait surtout pas faire les choses à moitié. On allait voir jusqu’où on pouvait aller en matière d’extravagance vestimentaire sur scène. Il s’agit vraiment d’un film musical qui captive le spectateur en le plongeant dans de grandes scènes chantées et dansées et dans des moments dramatiques qui couvrent plusieurs décennies de la vie des personnages. J’espère que les gens vont sortir du cinéma le sourire aux lèvres. Ce film, c’est comme monter dans des montagnes russes : on n’a pas un instant pour reprendre son souffle", raconte Day.

Pour se préparer au film, le costumier a même été invité à consulter les archives personnelles de la star, expérience surréaliste qui lui a permis de rendre hommage à l’un de ses chanteurs préférés, et qu’il décrit comme une visite dans l’entrepôt gigantesque à la fin des AVENTURIERS DE L’ARCHE PERDU, "mais avec un peu plus de paillettes".

 "Le simple fait d’être là était incroyable, bien évidemment. Mais j’ai surtout été stupéfait par les détails des costumes", raconte Day. Après cette visite, il est retourné au studio et s'est attelé à ses propres réinterprétations des tenues emblématiques de John. "Puis, Elton est venu au studio et sur le plateau", poursuit-il en souriant, "je lui ai présenté tous les croquis des costumes et il a adoré, ça a été un grand soulagement ! Si Sir Elton John aimait mes costumes, et bien personne n’allait les remettre en cause. Son vêtement préféré a été le costume élisabéthain qu’on utilise dans le film pour un concert en Australie. En réalité, il n’a jamais porté de costume de cette époque mais il est déjà apparu en Louis XIV. C’est comme ça qu'on a conçu ce film : il comporte une part de féerie. On ne voulait pas refaire ce qui avait été déjà vu, ça devait s’intégrer au film. On a voulu créer notre propre esthétique, et pas forcément brosser le portrait d'un Elton différent, mais tout simplement de notre Elton".

Le talent de Day n'a pas échappé à l'interprète d'Elton  : "Ce que Julian a réussi à faire, c’est garder à l’esprit les vrais costumes d’Elton tout en y glissant sa touche personnelle", déclare Egerton. "En tant qu’acteur, et comme il fallait s’approprier ce personnage plus grand que nature, ça a été d’une aide inestimable. Si on regarde attentivement ces costumes, ils représentent tous un moment particulier de la vie d’Elton et un moment que Julian a contribué à évoquer".

Certains, comme celui que John a porté au célèbre concert de 1975 au Dodger Stadium, ont été simplement revisités  : dans ce cas, Day a remplacé les paillettes par de vrais cristaux pour que le vêtement soit encore plus scintillant. D’autres comme celui du Diable, un costume orange vif moulant qui comprend à la fois des cornes et des ailes d’ange, sont des créations originales.

Le chef-costumier a rencontré certaines difficultés, notamment dans le cas du costume porté pour le premier concert du chanteur au Troubadour, non pas parce que Day a pris une grande liberté par rapport à l’original mais parce qu'Egerton répétait sans cesse qu’il lui faisait "un gros derrière" ! Et puis comme il l’ajoute lui-même : "Je me sens toujours plus à l’aise avec moins de vêtements. Même si pour devenir Elton, il a fallu accumuler pas mal d’épaisseurs, c’était agréable de trouver un langage visuel qui le représente vraiment mais qui ne soit pas aussi encombrant ou qui ne semble pas aussi lourd. Pour les vêtements de tous les jours d’Elton, c’était bien d'être un peu à l'aise, de pouvoir respirer, et de porter quelque chose dans lequel je me sente sexy. On m’a fait porter quelques shorts mais Dexter a dû vraiment me convaincre pour les caleçons moulants. Mais ça a marché ! C’est quelque chose qui relève de la confiance en soi, quand on ne cache plus grand-chose. Comme si on se débarrassait de ses conceptions les plus conservatrices. Je suis toujours favorable à être le plus dénudé possible".

L’un des costumes préférés de l’acteur est celui qui évoque un oiseau : il l'arbore au Royal Albert Hall, quand John commence à sentir que tout ne va pas pour le mieux dans sa vie. "C’est un bon exemple d’un moment précis de l’intrigue", explique Day. "J’ai demandé à connaître la taille du couloir parce que le costume devait être trop volumineux pour l’espace, afin de donner le sentiment qu’Elton commence à se sentir confiné et trop grand pour cet espace".

 Ces costumes excentriques se méritent toutefois. Day estime en effet qu'Egerton a effectué plus de trente essayages, avec à chaque fois dix costumes au moins à passer. Mais sans eux, l’acteur n’aurait pas pu entrer complètement dans la peau de son personnage. "Les costumes d’Elton sont bien évidemment extraordinairement extravagants", confie l’acteur. "Ils sont en totale contradiction avec les angoisses et le manque de confiance en soi qu'éprouve l'artiste. Je pense que c’est touchant de voir quelqu’un adopter un look aussi stylé et avant-gardiste, et y insuffler une touche d’absurde tout en étant dans la plus grande détresse émotionnelle. C’est vraiment émouvant. C’est faire preuve d'autodérision alors qu’on souffre. Je voulais me jeter là-dedans à fond. J’adore le style d’Elton, son aspect outrancier et qui semble tout droit venu d’une autre planète. Incarner Elton revenait à m' investir totalement dans le personnage".

Le costume du diable n’était que le premier de la soixantaine de tenues que Day a conçues pour le film. Il en a rêvé une nuit par hasard et son impact, quand il en a montré des croquis à ses collègues, a été immédiat. "Ce costume représente la lutte entre la lumière et les ténèbres dans la vie d’Elton", explique Egerton. "Je passe beaucoup de temps dans le film avec ce costume quand Elton se remémore sa vie pendant qu’il est en cure de désintoxication. C’est comme une armure pour qu’Elton puisse entamer sa guérison, mais plus il se sent à l’aise, plus il en retire des éléments et elle finit par disparaître. À la fin, il ne porte plus qu’un peignoir bien moelleux et ses lunettes, ce qui symbolise sa renaissance".

"Le plus important dans ce costume, c’est le détail", ajoute encore l’acteur. "Au début du tournage, Julian m’a dit que je devais avoir l’oreille percée pour les besoins du film. Et quand Elton a appris que je l’avais fait, il m’a fait cadeau de sa première boucle d’oreille en diamant. J’ai demandé à Julian si je pouvais la porter habillé comme ça. Je trouvais que c'était pertinent parce que le diamant est en forme de cœur et il a gentiment accepté".

"C’est parce que la forme de cœur du diamant est importante dans ce costume. Cette scène aborde le fait qu’Elton cherche à rencontrer l’amour", commente Day. "Julian ne se préoccupait pas vraiment de savoir ce qu’on allait bien pouvoir me mettre à l’oreille. Et c’est venu du grand homme lui-même et tout s’est donc parfaitement mis en place", se souvient Egerton en souriant. "Ça semblait prédestiné qu’Elton me donne cette boucle et qu’elle devienne un élément essentiel du costume que je porte le plus souvent dans le film".

Mais c'est sans doute la caution apportée par Elton John qui s'est révélée la plus significative. "Je suis ravi du travail de Julian sur les costumes", déclare John. "À l’origine, porter ces tenues était pour moi libérateur. Je n’avais pas le droit de porter des vêtements à la mode quand j’étais enfant. Du coup, quand j’ai quitté la maison et que j’ai emménagé avec Bernie et qu’on a pris un appartement ensemble, j’ai commencé à porter des vêtements plus osés. Mais ça vient, je pense, du désir de me donner en spectacle. C’est quelque chose de très britannique. Je ne sais pas si les groupes américains ressentent le besoin de faire ça. Les Rolling Stones, les Beatles, les Kinks, les Who, David Bowie, T. Rex, Rod Stewart – ils ont tous été inspirés par l’héritage des comédies musicales et des vaudevilles anglais, et l’idée de faire un spectacle et de s’exhiber. Mick Jagger a toujours porté de beaux vêtements, Marc Bolan a été le premier que j’ai connu qui ait porté du mascara. Moi, par contre, je m’asseyais au piano, je ne me déplaçais pas sur la scène. Pendant des années, ça m'a rendu jaloux et je voulais être libre. Je suis petit et je voulais avant tout qu’on me remarque. Et j’ai adoré faire ça. Quand j’ai commencé à porter plus de costumes, Bernie n’a pas trop aimé, et quand c’est devenu très extravagant, je pense qu’il a encore moins apprécié. Mais pour moi, ça faisait partie intégrante du rituel. Quand je fais un spectacle, même maintenant, je choisis mon costume vingt minutes avant le début. Et quand je l’enfile, ça y est, je suis dedans. C’est comme se préparer au combat".

Lizzie Georgiou, chef coiffeuse et maquilleuse
Il ne peut y avoir de meilleur compliment pour une coiffeuse et maquilleuse que celui reçu par Lizzie Georgiou le jour où les premières photos de Taron Egerton, qu’elle a mis de nombreux mois à transformer progressivement en Elton John, ont été mises en ligne. Quelques minutes après, elle a reçu un message. Il provenait d’Elton, "disant qu’il pensait que c’était lui sur les photos", se souvientelle en souriant.

Bien évidemment, ce n’était pas le cas, mais Lizzie Georgiou et les membres de son équipe sont tellement talentueux que lui-même a été bluffé. Ce processus n’a cependant pas été de tout repos : elle a en effet dû persuader Egerton de raser son front à la naissance des cheveux, pour des raisons surtout d’ordre pratique. "J’ai dû raser ses cheveux assez haut. Au départ, il était absolument contre mais quand il a compris combien de temps il allait passer au maquillage tous les jours s’il ne le faisait pas, il a été courageux et il a accepté !" Elle lui a aussi changé sa dentition pour les besoins du film.

"On a réalisé une prothèse dentaire en y intégrant les petits espaces qui, pour Taron, font partie intégrante du personnage mais Dexter s’inquiétait que ça le fasse zozoter, que ça lui donne du mal à chanter en direct. Mais Taron tenait absolument à conserver ces espaces et finalement on a fini par les peindre, retirer la prothèse, et on a utilisé pour ça de l’encre de tatouage conçue spécifiquement pour les dents. On a l'impression que les dents ne sont pas alignées mais ce n’est qu’un peu de peinture", explique-t-elle.

"Les chorégraphies contribuent à révéler l’émotion d’Elton, et les coiffures, le maquillage et les costumes y participent aussi", poursuit-elle. "Le tout permet d'exprimer ses émotions. Chaque chorégraphie permet à Elton d’évoluer ou de passer à une autre étape de sa vie, et les évolutions progressives du maquillage nous permettent de le vieillir de cinq ans sans qu’il y ait de transitions abruptes à l’écran".

Une fois Egerton remis de son rasage de crâne, il est devenu un Elton John plus vrai que nature. "Taron s’est jeté corps et âme dans cette transformation. Il venait dans la caravane de maquillage, s’installait dans son fauteuil, s’échauffait la voix et faisait ses exercices de chant. Quand il se levait, on chantait tous avec lui", confie Lizzie Georgiou.
L’équipe n’a pas seulement dû créer un seul Elton, mais plusieurs : "Taron a mis des prothèses, est devenu de plus en plus chauve et de moins en moins soigné au fur et à mesure de la descente aux enfers de son personnage. Il y a l'Elton élégant, l'Elton jeune, sexy et à la mode, l'Elton complètement toxico et qui s’effondre, puis celui qui va en désintoxication. Et enfin, celui qui se remet de tout ça".

Si les autres acteurs du film ont demandé moins de travail ("Richard Madden reste beau et élégant du début à la fin", plaisante-t-elle), elle reste admirative de la manière dont l’acteur principal du film a réussi à adopter de si nombreux changements. "Ça a été une sacrée aventure. Et Taron a tenu à tout faire à fond. Il a confié une fois qu’il trouvait incroyable de ressembler à ce point à Elton. Quand on le regarde de près, c’est bien Taron mais quand il se met devant la caméra, il devient tout simplement Elton".

Adam Murray, chorégraphe
En collaboration avec le producteur musical Giles Martin, le chorégraphe Adam Murray a mis en scène les séquences dansées et chantées qui impriment leur rythme trépidant à ROCKETMAN. "Les scènes dialoguées ancrent le film dans la réalité", témoigne Murray. "Mais les passages musicaux sont là pour rehausser l'émotion portée par les chansons".

En la matière, peu d'artistes sont aussi qualifiés que celui qui a supervisé la bande-originale très eighties de READY PLAYER ONE de Steven Spielberg.

Pour ROCKETMAN, Murray a conçu quelques numéros spectaculaires à faire pâlir d'envie les grandes comédies musicales de la MGM. L'un d'entre eux, chorégraphié sur la chanson "Saturday Night’s Alright for Fighting", a mobilisé 300 figurants et 50 danseurs et demandé 12 semaines de répétitions. "Et puis, après l'avoir répétée à la perfection, se souvient Murray, "la séquence a été mise en suspens alors que l'essentiel du tournage était terminé. Quand le moment est venu de la filmer, on n'avait qu'une seule journée pour faire de nouvelles répétitions avant de la mettre en boîte".

Pour ajouter encore à la difficulté, la séquence en question comportait non seulement des centaines d'éléments mobiles, mais elle devait être filmée en un seul plan sans aucun raccord. "Tout le monde devait être au bon endroit, au bon moment et trouver le bon rythme, ou la scène était fichue", reprend Muray. Le fait que la production se soit limitée à 19 prises est le gage de la préparation et du professionnalisme du chorégraphe.

Murray s'est engagé dans le projet très en amont, si bien qu'il a pu concevoir les numéros de A à Z et utiliser la musique d'Elton John hors contexte afin de coller au mieux à un récit qui comporte ses moments de bonheur et de tragédie. "C'était un vrai travail d'équipe", signale Murray. "On a échangé des idées et, du coup, le résultat est d'une grande fluidité. Les scènes dansées font partie intégrante de la construction du scénario. Ce ne sont pas des pièces rapportées. Bien au contraire, elles se fondent dans le film. On ne sait pas exactement à quel moment elles démarrent et à quel moment elles se terminent. Quand on entend la musique, on ne se rend parfois même pas compte de quoi il s'agit jusqu'au moment où on est à la moitié de la chanson et où on se dit 'Ah, ça alors, il s'agit de 'Your Song' ou 'Saturday Night’s Alright for Fighting’".

"On a dû donner une ampleur inédite aux chansons", précise Murray qui a cherché à jeter un nouvel éclairage sur une star mondiale que le public ne connaît peutêtre pas aussi bien qu'il le pense. "On est resté fidèle à l'esprit de toutes ces chansons qu'on connaît et qu'on aime. Elles vous transportent émotionnellement et vous chavirent. Mais comme on a eu toute latitude pour les retravailler, on a pu leur donner un nouvel élan".

Et si l'on s'attend à voir un film sur la vie d'Elton John, on risque malgré tout d'être surpris et de découvrir l'homme sous un nouveau jour.

"C'est assez rare pour être signalé", note encore le chorégraphe. "Car on raconte l'histoire d'un homme toujours en vie, toujours en activité et en pleine possession de ses moyens. On rend hommage à un artiste qui va assister à l'histoire de sa vie. Alors, on a essayé de faire en sorte qu'il soit aussi époustouflé que n'importe quel spectateur".

Marcus Rowland, chef-décorateur
Le chef-décorateur Marcus Rowland était l'homme de la situation. Fidèle collaborateur d'Edgar Wright, de la série télé LES ALLUMÉS à SHAUN OF THE DEAD, HOT FUZZ et LE DERNIER PUB AVANT LA FIN DU MONDE, il apporte une touche british à plusieurs films distribués dans le monde entier depuis une vingtaine d'années. Mais c'est surtout BABY DRIVER, sa toute dernière collaboration avec Wright, qui a convaincu la production de ROCKETMAN de lui confier la réalisation des décors.

"BABY DRIVER m'a vraiment permis de cerner la dimension musicale propre à ROCKETMAN", explique Rowland. "Cela m'a été extrêmement utile quand je me suis attelé aux décors : j'ai beaucoup mieux compris la fluidité et l'authenticité dont on avait besoin sur ce projet".

Le chef-décorateur a aussi apprécié la formidable liberté de création dont il a bénéficié. En effet, le film devait être à la fois réaliste et en léger décalage par rapport à la réalité. "D'après le cahier des charges qu'on m'a remis, je devais imaginer des décors qui ne donnent pas trop l'impression d'être patinés par le temps ou d'appartenir à une autre époque", ditil. "Il fallait que je fasse preuve d'invention et que je m'inspire du style très singulier d'Elton John et que je crée un univers féerique à partir de sa musique et de ce qu'elle suggère. On a cherché à sublimer la réalité. L'univers du film est exubérant parce qu'il s'agit du regard d'Elton sur sa vie. On est donc dans ses souvenirs si bien qu'on s'est laissé guider, pour ainsi dire, par son imaginaire et qu'on a opté pour une atmosphère pleine de vitalité et d'excès".

Pour Fletcher, les décors de Rowland sont féeriques. "Marcus a conçu un écrin magnifique pour les événements de la vie d'Elton", s'enthousiasme-t-il. "C'est une vraie prouesse. Aucun décor ne ressemble vraiment à un décor de film. Et quand on pense qu'on traverse quatre décennies, des années 50 aux années 80, c'est étourdissant. Je mets quiconque au défi de distinguer entre ce qui est un décor et ce qui ne l'est pas dans ROCKETMAN".

Avec humilité, Rowland explique que "certaines scènes sont plus fidèles à la réalité que d'autres, mais dans l'ensemble, il s'agit essentiellement d'une évocation de sa vie". Mais ses propos sont bien réducteurs. Pour ROCKETMAN, Rowland et son équipe ont en effet reconstitué le pub londonien où Reginald Dwight se produit, la maison de Mama Cass, la boîte de Los Angeles The Troubadour, le stade Dodger et un night-club newyorkais propice à tous les excès où Elton John, dans les années 70, plonge dans les cercles de l'enfer.

"C'était une vraie volonté de construire des décors exaltants qui traduisent l'état d'esprit du protagoniste à tel ou tel moment de son parcours", ajoute Rowland. "Dexter nous a donné une grande marge de manœuvre. Il voulait que les décors soient avant-gardistes et fascinants et qu'ils expriment le panache d'Elton. Et un peu d'extravagance n'était pas pour lui déplaire". Il rit. "Et je pense que sur ce point on a été franchement à la hauteur".

Source et copyright des textes des notes de production @ Paramount Pictures France

  
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