Drame/Un film sensible
Réalisé par Danielle Lessovitz
Avec Fionn Whitehead, Leyna Bloom, McCaul Lombardi, Louisa Krause, Eddie Plaza, Drew Leary, Rao Rampilla, William Dufault...
Long-métrage Américain
Durée: 01h42mn
Année de production: 2018
Distributeur: ARP Sélection
Date de sortie sur nos écrans : 25 septembre 2019
Résumé : c’est l’histoire d’une rencontre, entre un jeune homme blanc qu’on prend pour un loser et qui tente de survivre dans un New York qui ne veut pas de lui, et une « famille » de danseurs noirs et queer de Harlem adeptes du « voguing ». Parmi eux, il y a une fille superbe. Mais voilà, elle n’est pas seulement une fille superbe.
Bande annonce (VOSTFR)
Ce que j'en ai pensé : présenté en compétition lors du 45ème Festival du film américain de Deauville, PORT AUTHORITY est un film indépendant, à petit budget, qui explore une tranche de vie sur fond de misère sociale.
Le personnage principal, Paul, se galère au milieu d'un tas d'autres galériens qui forment le portrait d'une jeunesse désargentée livrée à elle-même dans les rues de New York et qui se regroupent par affinité pour survivre. L'intérêt est que la réalisatrice, Danielle Lessovitz, explore le grand écart entre deux de ces groupes. D'un côté des mecs aux gros bras qui détestent tout ceux qui ne leur ressemblent pas en laissant transparaître une peur sous-jacente de révéler quelque chose d'eux-mêmes. De l'autre côté, des jeunes gens qui forment une famille appartenant à la ball culture, sous-culture de la communauté LGBT, vivante, solidaire, vibrante et colorée (c'est d'ailleurs également le thème de la série POSE). Bien qu'ils se côtoient, ils s'ignorent.
La réalisatrice explique les règles de chaque groupe et, par le biais de Paul, nous fait sentir les dangers qui viennent peser sur un éventuel télescopage. Elle construit sa narration sur cette tension palpable autour d'une histoire d'amour entre deux êtres qui n'étaient pas destinés à se rencontrer. Et elle le fait avec de la sensibilité, sans imposer un point de vue, tout en laissant les spectateurs constater les sentiments forts qui prennent leur envol. Il n'y a pas besoin de se poser en juge, il faut juste se laisser porter par ce que vivent les personnages et le ressenti qu'ils nous transmettent.
Fionn Whitehead interprète Paul, ce jeune homme qui va découvrir tout un univers avec ses codes spécifiques et rencontrer Wye qui va bousculer sa vision du monde. L'acteur sait nous transmettre le désarroi de son protagoniste, il joue très bien sur cette nuance qui oscille entre fragilité et résilience.
Leyna Bloom interprète Wye, une femme transgenre, une belle personne dans tous les sens du terme. L'actrice a une présence impressionnante et une forte personnalité.
Port Authority est le plus important terminal de bus de Manhattan, à New York. Le film, à l'image de son titre, nous fait rencontrer des passagers de cette ville qui se croisent et se décroisent parfois dans la violence, parfois dans l'amour, pour nous raconter une histoire touchante qui sonne juste.
Le personnage principal, Paul, se galère au milieu d'un tas d'autres galériens qui forment le portrait d'une jeunesse désargentée livrée à elle-même dans les rues de New York et qui se regroupent par affinité pour survivre. L'intérêt est que la réalisatrice, Danielle Lessovitz, explore le grand écart entre deux de ces groupes. D'un côté des mecs aux gros bras qui détestent tout ceux qui ne leur ressemblent pas en laissant transparaître une peur sous-jacente de révéler quelque chose d'eux-mêmes. De l'autre côté, des jeunes gens qui forment une famille appartenant à la ball culture, sous-culture de la communauté LGBT, vivante, solidaire, vibrante et colorée (c'est d'ailleurs également le thème de la série POSE). Bien qu'ils se côtoient, ils s'ignorent.
La réalisatrice explique les règles de chaque groupe et, par le biais de Paul, nous fait sentir les dangers qui viennent peser sur un éventuel télescopage. Elle construit sa narration sur cette tension palpable autour d'une histoire d'amour entre deux êtres qui n'étaient pas destinés à se rencontrer. Et elle le fait avec de la sensibilité, sans imposer un point de vue, tout en laissant les spectateurs constater les sentiments forts qui prennent leur envol. Il n'y a pas besoin de se poser en juge, il faut juste se laisser porter par ce que vivent les personnages et le ressenti qu'ils nous transmettent.
Fionn Whitehead interprète Paul, ce jeune homme qui va découvrir tout un univers avec ses codes spécifiques et rencontrer Wye qui va bousculer sa vision du monde. L'acteur sait nous transmettre le désarroi de son protagoniste, il joue très bien sur cette nuance qui oscille entre fragilité et résilience.
Copyright photos @ ARP Sélection
Port Authority est le plus important terminal de bus de Manhattan, à New York. Le film, à l'image de son titre, nous fait rencontrer des passagers de cette ville qui se croisent et se décroisent parfois dans la violence, parfois dans l'amour, pour nous raconter une histoire touchante qui sonne juste.
NOTES DE PRODUCTION
(À ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers !)
Interview de Danielle Lessovitz - Réalisatrice et scénariste du film PORT AUTHORITY
Vous avez commencé par écrire pour d’autres cinéastes.
Qu’avez-vous retenu de cette expérience ?
Mon travail sur « Mobile Homes » (2017) m’a appris à ne pas
avoir peur de l’histoire. J’ai appris à laisser l’histoire prendre forme, sans
trop essayer de la contrôler. En termes de savoir-faire, plus vous écrivez,
meilleur vous devenez. L’expérience permet de s’améliorer, d’aller chercher
plus loin, et de gagner en précision.
Comment vous est venue l’idée de « Port Authority » ?
Cela s’est fait de manière progressive. Je pense que chaque
artiste exploite son subconscient, dans une certaine mesure. Je réfléchis
beaucoup sur les sujets du genre et de la famille. Il y a environ dix ans,
Antony and the Johnsons a interprété une chanson de Leonard Cohen intitulée «
If it be your Will ». Cette idée d’une personne qui s’abandonne à un amour
romantique indéfini et noble m’a vraiment marquée. Peu de temps après, j’ai
déménagé à New York pour y faire une école de cinéma, et j’ai fini par accepter
mon homosexualité. À la même époque, j’ai été confrontée au suicide de mon
père, ce qui était infiniment douloureux. Peu de temps après, ma petite amie et
moi avons été invitées à un « Kiki ball », un ballroom de voguing LGBT. J’ai
été fascinée par les danseurs, par leur façon de s’exprimer, avec énormément de
force, mais aussi de vulnérabilité. Cela m’a vraiment secouée. C’était comme si
leur esprit avait transcendé leur corps. J’ai découvert ces familles qui se
sont choisies. J’ai trouvé ça très puissant. Comme si soudain quelqu’un m’avait
montré une façon totalement différente de voir les choses. En rentrant à pied
de cette soirée, j’ai raconté à mon amie comment je verrais la structure de
l’histoire qui allait devenir « Port Authority » et cela lui a beaucoup plu. Il
m’a fallu encore un an avant que j’essaye de l’écrire. Puis environ deux ans
d’écriture et de recherche.
Pourquoi avez-vous choisi de démarrer le film à Port
Authority, cette station de bus de New York ?
Port Authority, pour moi, c’est un symbole de New York.
C’est un lieu sans racines, où des gens de différentes cultures se croisent.
C’est aussi un lieu de rassemblement pour la communauté LGBTQ. Les gens y
viennent pour essayer d’avoir une vie meilleure.
Vous montrez New York de façon intime, sans tomber dans les
clichés visuels habituels. Comment avez-vous pensé votre manière de filmer la
ville ?
Il n’y a qu’un seul plan qui soit un panorama de la ville,
sur le pont Kosciuszko. Le pont est en construction et on entrevoit l’horizon à
peine une seconde. New York est une ville en constante mutation. Je trouve que
ce sont les quartiers et leurs différentes textures qui sont pertinents à
montrer, notamment Bushwick, Sunset Park, East Harlem et le Bronx, des lieux
qui changent avec le temps. C’est cela qu’on ressent quand on vit à New York.
Ce qui compte, c’est la façon dont les gens influencent la ville.
« Port Authority » suit le schéma classique « Un garçon
rencontre une fille ». Pourquoi avoir choisi cette structure narrative ?
À bien des égards, il s’agit d’une histoire d’amour
classique, qui inclut simplement les spécificités de ce que les gens vivent
actuellement. Cela dit, le scénario était un peu plus complexe que ce que le
film est devenu. Lors du montage, nous avons compris que nous devions gagner en
simplicité. Nous voulions être le plus possible avec nos personnages
principaux, quand ils tombent amoureux, quand la vie de Paul se désagrège, etc.
J’ai compris que, plus nous simplifierions le récit, plus nous nous rapprocherions
d’eux.
La famille est un thème central du film. Paul est éloigné de
la sienne tandis que celle de Wye est très soudée. Qu’est-ce qui vous
intéressait dans cette opposition ?
Nous voyons souvent des histoires de personnes issues d’une
culture minoritaire qui souhaitent intégrer la culture dominante. Moi je
voulais montrer le contraire. La culture des salles de ballroom est une réponse
magnifique à la culture dominante aux États-Unis. Cette culture protège de la
marginalisation, mais aussi de l’anonymat. Aux États-Unis, si vous ne venez pas
d’une famille qui vous soutienne, comment établissez-vous une connexion avec
d’autres, comment se crée votre identité ? La culture américaine peut être
déshumanisante pour ceux qu’elle rejette et aussi pour ceux qui devraient en bénéficier. Je voulais montrer
que, même si vous venez d’un milieu privilégié, vous ne savez pas forcément
toujours qui vous êtes et comment vous épanouir. Je voulais faire honneur à
cette communauté qui a réussi à ne prendre que les bons côtés de la famille et
à l’incarner d’une manière différente.
Comment avez-vous découvert l’existence de la culture du
ballroom, et comment est née la relation entre vous et cette communauté ?
Le film « Paris is Burning » fut ma première introduction,
mais je n’avais pas compris que cette scène était toujours active et
florissante, jusqu’à ce que je sois invitée à un « kiki ball ». Ensuite, j’ai
assisté à de plus petits événements et j’ai commencé à rencontrer des gens, à
les fréquenter en dehors de ces événements. Des relations se sont développées
de façon organique. Nombre d’entre eux sont désormais des amis. Ils ont
beaucoup de talent, dans les domaines de la mode et de la musique et nous avons
souvent travaillé ensemble sur des vidéos.
Comment avez-vous rencontré Leyna Bloom, qui est aujourd’hui
une icône de la culture LGBTQ ?
Notre directeur de casting, Damian Bao, est très impliqué
dans la communauté et connaît Leyna depuis longtemps. J’ai d’abord parlé avec
elle – elle était à l’étranger – puis elle est venue à une audition et ce fut
une évidence. Je lui donnais la réplique en jouant le rôle de Paul et le fait
d’être avec elle à cet instant précis était très puissant. Je cherchais une
personne avec qui je puisse collaborer mais aussi quelqu’un qui pourrait
assumer le rôle et le façonner, et c’est exactement ce qu’elle a fait. On a
travaillé sur les dialogues ensemble, elle a improvisé dans certaines scènes.
Son histoire est assez proche de celle de Paul, en ce qui concerne sa propre
arrivée à New York et le mal qu’elle a eu à trouver un logement stable. Donc
elle comprenait bien les deux personnages.
Pourquoi avez-vous choisi Fionn Whitehead ?
Fionn a beaucoup vécu pour son âge. Nous avons commencé par
skyper, nous avons parlé des contraintes de la masculinité et de nos enfances
respectives. Il semblait comprendre instinctivement d’où venait Paul et ce
qu’il cherchait. Il était enthousiasmé par le sujet. Nous cherchions Paul
depuis un an. Fionn s’est imposé tout de suite.
Pourquoi avoir choisi de nous faire découvrir la communauté
du ballroom à travers le personnage de Paul ?
Je voulais que le public se sente, comme lui, extérieur à ce
mouvement. On voit beaucoup de films où l’accès immédiat à une communauté
marginalisée est considéré comme normal, alors je voulais fixer des limites,
pour moi comme pour le spectateur. Je veux que le public découvre ce monde du
point de vue de Paul et comprenne qu’il est important de demander la permission
avant de l’approcher.
Que pensez-vous de la représentation transgenre à l’écran ?
Je pense qu’il n’y a pas encore assez de films qui
permettent de représenter l’éventail des expériences trans. Mais chaque film y
contribue et j’espère qu’il y en aura davantage.
Que pensez-vous des rôles trans qui sont joués par les
personnes cisgenres ?
Dans un monde idéal, tout acteur pourrait jouer n’importe
quel rôle. Cela étant dit, tant que les acteurs transgenres sont uniquement
employés dans des rôles transgenres, je ne pense pas que les cisgenres
devraient les interpréter.
Les spécificités de la transition de Wye ne sont pas
mentionnées. Pourquoi ?
Pour moi et pour cette histoire, les circonstances de la
transition de Wye sont hors sujet. Elle vit de manière authentique et c’est la
seule chose qui compte. Paul pose la question, mais la réponse n’est jamais
donnée au spectateur car elle ne regarde que Wye et Paul.
Comment avez-vous décidé de représenter des corps queer et
trans sans les fétichiser, en particulier dans les scènes de danse ?
Nous avons choisi des objectifs et une façon de filmer qui
nous lient au mouvement du corps plutôt que d’essayer de voir le corps en
entier. Nous voulions être dans le corps, avec le corps plutôt qu’en dehors de
celui-ci.
« Port Authority » est très réaliste, tant par la façon de
filmer que par les dialogues.
C’était important pour vous d’être fidèle à la
réalité que vous montrez ?
Thématiquement, le film traite du rapport entre le réel et
la fiction et de la difficulté à les distinguer. À première vue, il s’agit
d’une fiction, mais c’est une fiction qui peut soit masquer soit révéler une
vérité plus profonde. Je ne voulais pas que le public soit trop absorbé par les
aspects fictionnels. Dans l’histoire, Paul se sent obligé d’assumer une
identité qui n’est pas la sienne pour être aimé. Il veut paraître plus riche,
plus stable qu’il ne l’est réellement. Pour saisir cela de façon
cinématographique, je voulais simplement laisser la caméra être et ne pas
chercher à trop styliser.
Comment avez-vous conçu la scène de la « réalité du garçon
blanc » ?
Nous avons travaillé sur le scénario avec des membres de la
communauté. Quand je leur ai demandé : « Quelqu’un comme Paul pourrait-il être
accepté dans la communauté ? », ils ont spontanément dit : « Oui ! ». Alors
j’ai demandé : « Est-ce qu’il défilerait ? ». Quelqu’un a dit : « Oui, dans la
catégorie “ la réalité du garçon blanc ” » et tout le monde s’est mis à rire,
parce que ce n’est pas une catégorie qui existe.
Vous avez ces catégories où l’idée est d’être assez proche
de la culture dominante, ou du moins d’être aussi proche que possible de
l’idéal du statut cis ou hétérosexuel. En ce sens, ce concept de « la réalité
du garçon blanc » était un concept intéressant pour le personnage de Paul.
Pensez-vous qu’il existe aujourd’hui un mouvement collectif
contre le patriarcat et d’autres formes de discrimination ?
J’ai l’impression que quelque chose s’ouvre. Les gens sont
de plus en plus vigilants face aux distorsions de pouvoir dans la société. Je
pense que ce film suggère que ces structures et ces normes peuvent être
destructives pour ceux qu’elles servent et pour ceux qui y sont soumises. C’est
important de le reconnaître. Pour être honnête, je ne sais pas si j’aurais pu
réaliser ce film il y a quatre ans, simplement parce que les réalisatrices
n’avaient pas autant de possibilités qu’aujourd’hui. J’ai de la chance d’être
cinéaste aujourd’hui. Et j’espère que
que ça va continuer, parce que c’est bon pour tout le monde.
Source et copyright des textes des notes de production @ ARP Sélection
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