jeudi 17 octobre 2019

5 EST LE NUMÉRO PARFAIT















Policier/Thriller/Drame/Un film qui impose une belle personnalité visuelle, malgré des faiblesses dans le scénario

Réalisé par Igort
Avec Toni Servillo, Valeria Golino, Carlo Buccirosso, Iaia Forte...

Long-métrage Italien/Belge/Français
Titre original : 5 è il numero perfetto
Durée : 01h40mn
Année de production : 2019
Distributeur : Nour Films

Date de sortie sur nos écrans : 23 octobre 2019



Résumé : Peppino Lo Cicero, ex-tueur à gages de la Camorra est fier de son fils qui gravit les échelons du crime organisé. Mais quand celui-ci est froidement tué dans un guet-apens, il reprend du service accompagné de son ami Toto le boucher. Leur quête de vérité va déclencher une spirale de vengeances et de trahisons dans les clans mafieux du Naples des années 70.

Bande annonce (VOSTFR)


film annonce 5 EST LE NUMERO PARFAIT - sortie le 16 octobre from Nour Films on Vimeo.

Ce que j'en ai pensé5 EST LE NUMÉRO PARFAIT est un film qui se révèle être une intéressante découverte, car son réalisateur, Igort, est également le scénariste et le dessinateur du roman graphique éponyme. Il maîtrise donc parfaitement ce qu’il veut nous montrer et avec quel style. 

Son long-métrage a une esthétique très travaillée qui rend hommage aux films de gangster des années 70, tout en conservant une patine de bande dessinée moderne. Il raconte cette histoire d’un point de vue de criminels uniquement ce qui renforce encore cet aspect. Il est difficile de savoir si c’est volontaire, mais certaines scènes de son film évoquent SIN CITY (2005). En tout cas, l’ambiance est très réussie à la fois dans l’atmosphère établie ou encore dans les angles de prises de vue qu’il adopte. Il impose sa patte et cela est agréable. Les décors sont également très travaillés et précis. On a vraiment l’impression qu’il ne laisse rien au hasard avec les lieux choisis. 




Cependant, le scénario reste sur un développement classique et comme il n’y a pas de surprise particulière, l’histoire tire un peu en longueur, malgré une narration qui entremêle le présent et des souvenirs, la violence et les émotions, ce qui la rend plutôt originale. 

Les acteurs ont les gueules qu’il faut pour rendre leurs personnages crédibles. Toni Servillo interprète le ‘héros’, Peppino Lo Cicero, gangster de la vieille école à la retraite, qu’un drame personnel va faire sortir de sa veille. L’acteur a le charisme et la personnalité pour personnifier ce protagoniste, meurtrier au grand cœur. 




Valeria Golino interprète Rita, l’amie de Peppino. Cette très belle actrice a une sensibilité parfaite pour le rôle. 



Carlo Buccirosso interprète Totò, le meilleur ami de Peppino, celui que le connaît le mieux.


Copyright photos @ Nour Films

5 EST LE NUMÉRO PARFAIT impressionne plus par son esthétique visuelle que par l’histoire qu’il dépeint. Dans l’ensemble, c’est un film qui impose sa personnalité et nous permet de rentrer dans un univers original.

NOTES DE PRODUCTION
(À ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers !)

ENTRETIEN AVEC IGORT

Quand, pour la première fois, a-t-il été question d’adapter 5 est le numéro parfait au cinéma ?

Cela remonte à plus de quinze ans… Plusieurs cinéastes m’avaient envoyé des petits mots : « J’aimerais bien le faire  ». Certains étaient napolitains. Des producteurs européens, américains ou asiatiques s’y sont intéressés. L’un des premiers a été Marco Müller, l’ancien directeur des Festivals de Venise et de Rome  : Marco est un intellectuel de culture internationale, il parle couramment chinois et il avait remarqué que la façon dont j’avais écrit et dessiné cette histoire correspondait bien au cinéma asiatique. Il m’avait proposé de coréaliser le film avec le cinéaste chinois Johnnie To.
Le projet a pris corps : je suis parti pour Hong-Kong, j’ai commencé à travailler au cœur de la machine à rêves hong-kongaise, qui est très impressionnante. Comme Johnnie To tourne parfois trois ou quatre films par an, tout doit être minutieusement préparé : dans le grand atelier de sa société, Milky Way, trônait un panneau de sept mètres de long avec mon livre, découpé en séquences et traduit en chinois. Nous avons discuté presque un an, et puis Johnnie To a choisi d’autres projets. Je crois que Vengeance, le film qu’il a tourné avec Johnny Hallyday, était trop proche de cette histoire…

Vous aviez toujours eu envie de participer à la réalisation du film ?

Non, j’avais d’ailleurs refusé plusieurs fois et après l’hypothèse Johnnie To, pour qui j’avais tout de même fait des repérages à Naples, je m’étais résolu à simplement écrire le scénario. Mais souvent, quand je parlais à un producteur ou à un metteur en scène intéressé, j’avais le sentiment qu’ils passaient à côté de choses importantes. Un producteur lors de nos nombreux échanges m'avait dit que nous pourrions tourner le film à Londres. «  À Londres ? », lui ai-je demandé, et il a répondu que comme il y pleuvait beaucoup, cela lui semblait la ville idéale. Mais qu'est-ce que la Camorra ou le sens profond de la religiosité typique de la mafia italienne ont à voir avec Londres ? Un autre m’avait dit qu’on pourrait faire appel à des acteurs américains. « Ah bon », avais-je répondu, « mais un personnage jamais sorti de Naples qui parle américain, ça sera bizarre, non ? ». « Oh, on s’arrangera ! ». Mais ce n’est pas un détail que Peppino n’ait jamais quitté sa ville, c’est structurel à l’histoire. Il a même été question d'une collaboration avec Takeshi Kitano, que j'ai rencontré au Festival de Venise. Mais la présence d'un acteur japonais dans un film napolitain n'avait aucune justification narrative. Alors, je me suis dit que ça suffisait. Quand l’option sur les droits m’est revenue, j’ai appelé Elda Ferri, la productrice de Roberto Benigni, de Roberto Faenza, etc., et je lui ai dit que je m’étais décidé à réaliser le film. Quelqu’un avait toujours pensé que j’étais la bonne personne, c’est Toni Servillo. Il voulait jouer Peppino. Pour lui, qui est napolitain, j’avais les idées claires : l’envie d’une Naples métaphysique, très différente des clichés entourant la ville. Une Naples déserte, nocturne, sous une pluie diluvienne.

Vous avez publié une vingtaine de romans graphiques depuis 5 est le numéro parfait. Cela faisait quoi de se replonger à nouveau dans ce récit ?

Mais le travail n’a jamais vraiment cessé, j’ai écrit dix versions du scénario ! Je suis quelqu’un d’assez prolifique : j’écris et je dessine des BD, j’écris pour le théâtre, j’ai rédigé des scénarios pour d’autres cinéastes. Je me suis donc remis à l’adaptation : la vengeance est une trame extrêmement classique, mais ce qui compte, ce n’est pas l’emballage, c’est le gâteau que vous mettez à l’intérieur. Pour moi, une question de regard…
J’aime le cinéma des Italo-américains, Scorsese, Coppola, De Palma, Tarantino, etc., mais leur vision me semble parfois moralement discutable. Quand je regarde Le Parrain, je m’identifie aux Corleone, à leur façon de considérer le monde. Moi, je voulais faire un film profondément européen  : ce n’est pas l’histoire d’un boss, mais celle de deux « gregari », comme on dit en italien, de simples soldats, des « camorristes » de seconde catégorie.
J’ai mis dans leur bouche des répliques qui peuvent paraître ironiques, pleines d’humour noir, qui rendent compte de leur vision paradoxale : ils ne se rendent pas bien compte à quel stade d’inhumanité leur vie est parvenue. Ce sont deux vieux chevaliers qui croient respecter des codes d’honneur. Peppino ne reconnaît plus la Camorra de jadis, il juge qu’elle est au bord de la décadence…

A-t-il raison ?

D’un point de vue historique, son impression est juste. L’action du film se situe en 1972, et bientôt apparaîtra ce qu’on a appelé la NCO, la Nuova Camorra Organizzata. C’est la mafia des « cols blancs », avocats, gestionnaires financiers : ils commenceront à trafiquer de la drogue, à l’échelle internationale. Mon histoire est crépusculaire, c’est la fin d’une époque, vécue à travers un fantasme romantique. C’est l’irruption d’une seconde chance offerte au personnage principal, à travers la grande souffrance qu’est la mort de son fils. Il comprend qu’il a vécu toute son existence avec des valeurs affreuses, de violence et de mort, mais qu’il y a une possibilité de refaire sa vie. Et c’est aussi une longue histoire d’amitié, qui se passe principalement dans la nuit napolitaine et s’achève par beaucoup de lumière dans un univers un peu paradisiaque.

Cela passait par une quête plastique, graphique… ?

C’est une quête de cinéma. J’ai été nourri, dès l’enfance, par les grands cinéastes italiens des années 70. Ils ont inventé le cinéma moderne en transformant la réalité, depuis les fantasmes de Fellini, sa mer en plastique, ses visions de Rimini, Rome ou Venise, une réinvention sur le fil des souvenirs et d’une imagination visionnaire, jusqu’à la précision coloriste d’Antonioni qui a fait repeindre les bâtiments, les machines industrielles, même l'herbe, les arbres et les pommes pour Le Désert rouge. Dans leur vision globale du cinéma, la forme influence même la structure de la narration.
Mes références pour ma Naples métaphysique ne se trouvaient pas du côté de la bande dessinée, plutôt dans les peintures de De Chirico ou les murs délabrés de Stalker de Tarkovski. J’ai cherché un directeur de la photo qui pouvait travailler comme Aleksandr Kniajinski avec Tarkovski ou Christopher Doyle avec Wong Kar Wai. Quelqu’un qui joue avec la lumière pour créer des compositions picturales. Je l’ai trouvé en la personne du Danois Nicolaj Brüel, qui a notamment éclairé Dogman de Matteo Garrone. Notre complicité a été totale. Nous cherchions les mêmes choses : une certaine profondeur de champ pour montrer la solitude des personnages ; une dimension expressionniste de la ville, un peu comme les cinéastes allemands et autrichiens ont inventé la New York du cinéma noir.

Vous avez dit  : «  le réalisme n’est pas la vérité, la vérité se trouve dans une représentation symbolique ». Cette Naples symbolique, c’est tout de même la vraie Naples ?

Je ne suis pas sûr d’avoir la vérité dans ma poche. Je viens de cette famille d’artistes qui cherche la vérité à travers l’artificiel. Pessoa a écrit: "Le poète est un simulateur. / Simulant si complètement / Qu'il en vient à simuler qu'est douleur / La douleur qu'il ressent vraiment." J’ai commencé à partir de ça. De l'essence de ce drame intérieur. 5 est le numéro parfait est un film sur la renaissance, sur la deuxième opportunité que la vie nous sert, parfois, sur un plateau brillant de douleur.
Nous avons essayé de restituer la vérité d'un homme qui se sent vieux et qui découvre que la vie peut encore lui réserver des surprises. Raconter l'histoire de Peppino Lo Cicero, qui, dans un moment de difficulté, appelle son vieil ami, c’était le déclic pour montrer deux petits hommes, deux vieux chevaliers mal outillés, contraints de retourner en piste. J'avais besoin d'une machine visuelle pour représenter tout cela. Le cinéma est un travail d'équipe. Un instrument polyphonique, et il était essentiel, pour pouvoir jouer à l'unisson, que nous sachions tous ce que nous recherchions. Avec le décorateur, la costumière et le directeur de la photo, nous avons créé une espèce de triade : il fallait que l’on avance en même temps pour trouver la Naples du film, il fallait créer un univers où les décors seraient aussi stylisés que les personnages. Des acteurs napolitains n’auraient jamais accepté de jouer dans un film sur Naples s’ils pensaient que cette Naples est fausse ! Et il pleut aussi à Naples, vous savez ! Comme tous les films, le résultat est un mélange de réalité et de construction imaginaire. Nous avons trouvé des décors naturels, mais nous en avons aussi construit d’autres  : parfois, les lieux qui semblent les plus authentiques sont ceux qui sont les plus fabriqués, et inversement. Le Palazzo Dallara, où a lieu l’échange des prisonniers, n’existe pas, c’est une terrasse sur un simple bâtiment.
Mais qui connaît Naples identifiera peut-être les quartiers de Rione Sanità, Forcella, Porta Nolana. Ce sont encore des zones livrées à la criminalité : à la place des travestis que croise Peppino, il y avait cinq dealers d’organisations différentes, qu’on a dû faire partir pour pouvoir tourner.

Le découpage du film est-il proche de celui de la bande dessinée ?

Ce sont deux langages aussi différents que, par exemple, le théâtre et le cinéma : la page offre une composition globale, le cinéma ne permet pas la simultanéité des images – hormis ces petits clins d’œil en split screen que je m’autorise parfois. Un livre, on peut en arrêter la lecture  ; impossible au cinéma. A chaque outil, de nouvelles possibilités. Travailler sur l’adaptation, c’était réinventer la narration.
Il y a des personnages qui n'apparaissent pas dans la BD, comme le bossu par exemple. Et tout le début, ainsi que la fin du film sont différents du scénario de la BD. Parfois, il était nécessaire de couper les dialogues ou les scènes qui fonctionnaient sur papier mais une fois "incarnés" par un acteur, ils donnaient à la scène un aspect "hors registre". Peu plausible. Je crois que c'était cela, la difficulté. Par contre, le grand acteur qu'est Toni Servillo s’est inspiré des mouvements du personnage que j’avais conçu.
Sinon, pour l'aspect plastique, je voulais la patte du cinéma des années 60 et 70, avec des couleurs très foncées – et donc pas du tout la bande dessinée en bichromie. Je voulais aussi que la musique évoque le cinéma de ces années-là, la longue tradition italienne de Piero Umiliani, Ennio Morricone, Armando Trovajoli, etc. J’ai appelé les musiciens Sarah Tartuffo (Startuffo) et Rosario Castagnola (D-Ross)  : elle est française, il est napolitain. J’ai déjà travaillé avec eux au sein du groupe Igort & Lo Ciceros : c’est ma voix que l’on entend dans l’autoradio de Nino, une chanson extraite de l’album Casino.

Le choix de la voiture de Nino renvoie aussi au cinéma des années 60…

C’est la Bianchina : le modèle créé par Autobianchi, qui était un peu la rivale de la Fiat 500, une petite voiture que les gens ordinaires utilisaient. Je ne voulais pas montrer de Ferrari ou de Lamborghini, je voulais démythifier le pouvoir et la richesse de la mafia.

On est frappé par ces scènes où Peppino et Totò sont en voiture : la pluie sur la vitre brouille les contours des visages. On est loin de l’hyperréalisme que peut apporter le cinéma…

La pluie qui tombe apporte cette vision un peu floue, très impressionniste… J’avais dit au chef-opérateur que je voulais la patte du cinéma. Et même ses défauts. La précision de l’ordinateur, la haute définition du numérique, j’en ai horreur, je cherche l’humanité. On a aussi choisi des objectifs anamorphiques qui donnaient l’idée du cinéma des années 60. Parfois, on cherchait sur l’iPad une référence picturale, la bonne couleur…

À l’image de la « cérémonie du café », les personnages vivent des rituels.

Le café, c’est important en Italie ! Mais, oui, la ritualité, c’est ce que l’on cherchait dans la façon dont sont tournés les combats, les duels et aussi les poses un peu hiératiques, théâtrales, en début de chaque chapitre. La vie des personnages est faite de rituels. Quand on rentre dans la Camorra, on prête serment, ce qui est un rituel – et ce qui existe aussi dans les triades chinoises. Le rapport avec la religion, les contradictions de ces hommes qui sont des sanguinaires mais qui vouent un culte à la Madone, c’est typique d’une dimension rituelle dans laquelle vie et mort jouent une danse singulière.

Le film est parlé en dialecte napolitain ?

Un napolitain assez compréhensible, pas le napolitain glissé de la dernière saison de Gomorra. C’est une langue plus littéraire, plus théâtrale, qui vient des dramaturges comme Eduardo de Filippo, Raffaele Viviani ou Enzo Moscato, une espèce de Jean Genet napolitain, un génie. Mimmo Borelli, qui joue Don Guarino est l’un des représentants d’un nouveau théâtre napolitain. Toni a joué certains de ses textes.

Réaliser un film, cela s’apprend vite ?

Ce n’était pas très compliqué parce que j’avais une très bonne équipe et que je savais ce que je voulais. Je voulais retrouver l’esprit avec lequel je m’étais amusé à écrire et dessiner cette histoire. C’est un autre métier, bien sûr mais la gymnastique mentale n’est pas si différente que je sois à ma table de travail ou sur le plateau : qu’est6ce que je veux raconter  ? On avait préparé un «  scrapbook  »  : j’y avais mis des peintures d’Edward Hopper, de Felice Casorati, de Filippo de Pisis, coloriées avec ma palette ; des références, des scènes de pluie, des fragments de story-board.
Avec la complicité de Nicolaj Brüel, les choses allaient vite : si le personnage était vêtu de blanc, il y avait ailleurs dans l’image une tache rouge foncé, et puis des ombres, et des sources lumineuses aux fenêtres. Ce jeu d’ombres et de lumières, c’est un peu l’histoire du cinéma. Que l’on convoque aussi ailleurs dans le film : l’imperméable de Toni Servillo, dans les premières scènes, c’est un hommage au cinéma français. À Jean-Pierre Melville, mais aussi à Belmondo dans À bout de souffle, et aussi à Jean Gabin, dont l’imper était lui-même une réponse à celui d’Humphrey Bogart dans Casablanca… !

Qu’est-ce qui a attiré Toni Servillo dans le rôle de Peppino ?

Toni aime beaucoup se transformer  : il a joué Giulio Andreotti, Silvio Berlusconi, des hommes qui sont très loin de son apparence physique. J’avais ironiquement donné à Peppino un nez assez proche de celui de Dick Tracy, dessiné par Chester Gould dans les années 30 : une partie des traits d’un détective finit sur le visage d’un criminel… C'était idéal pour Toni, qui avait envie d’un visage fort, très caractérisé : quelqu’un d’immédiatement reconnaissable comme le fut par exemple le grand acteur italien Adolfo Celi, que l’on a évoqué. Le maquillage et les costumes permettent à Toni de se faire oublier et d’entrer directement dans un personnage et une époque. Et puis il aime jouer les classiques de la tradition napolitaine et Peppino, à sa façon, en fait partie. Il a attendu quinze ans pour le jouer. Il y a aussi trouvé des choses proches du théâtre de De Filippo. Ou de Tchekhov, qui est un peu notre oncle à tous les deux…

On connaît peu en France Carlo Buccirosso, qui joue Totò le boucher…

C’est un grand acteur comique, mais dont le regard peut paraître tour à tour très gentil ou très méchant ! Cela m’intéressait pour l’ambiguïté du personnage. Carlo a joué avec Toni Servillo dans deux films de Paolo Sorrentino, il y avait une bonne complicité possible entre eux deux. J’avais aussi besoin d’un physique spécifique : un homme petit, potentiellement méchant, dont le physique trahit l’esprit intérieur…

Valeria Golino joue l’anti-femme fatale…

Ah oui, ce n’est pas la « baby » du gangster. Quand j’ai rencontré Valeria, qui est une grande actrice, qui cherche et improvise sans cesse selon la «  Méthode  » de Lee Strasberg, on s’est dit que Rita était le cœur secret du film. Elle est la seule à savoir ce qu’elle cherche  : une nouvelle vie avec un homme qu’elle a attendu vingt ans. C’est comme Orphée et Eurydice, mais Orphée, c’est elle : elle descend aux enfers, elle se salit les mains, elle tue. C’est une petite prof, qui lit des livres – et notamment Le Guépard. Mais elle a vécu entourée par la Camorra : son frère a fait des allers et retours à Poggioreale, la prison de Naples, son père aussi appartenait à la Mafia. Elle est tombée amoureuse d’un ouvrier de la mort. Elle doit quitter Naples. La catharsis finale est due à sa force et à sa ténacité.

Le dialogue amusant sur la différence entre les BD italiennes et les BD américaines, vous y souscrivez entièrement ?

Mais c’est la vérité. Les Américains ont toujours eu des héros héroïques ! Et la BD italienne des années 60 et 70, qui a connu un grand succès, avait comme personnages principaux des criminels. C’était comme ça, on a grandi avec le « facteur K » : Kriminal, Diabolik, Satanik, Sadik, etc. Une espèce de prolifération d’imaginaire, contagieuse et ironique. Nos héros à nous ne se prenaient pas trop au sérieux.

PERSONNAGES PRINCIPAUX

PEPPINO LO CICERO

C’est un camorriste de la vieille école, exécuteur implacable de la volonté du Boss, fortement attaché aux valeurs de la pègre. Respecté et aimé par ses vieux compagnons, il n’est jamais sorti de Naples et il est veuf d’une femme qu’il continue à adorer comme une madone.

Seuls les souvenirs et l’amour pour son fils, lui aussi à la solde de la Camorra, semblent le maintenir en vie. Il porte le poids d’une fatigue presque atavique et aurait envie de tout laisser enfin derrière lui, mais quand son fils est tué dans un guet-apens, Peppino ne mettra aucune limite à sa vengeance. Pour l’aider, il appelle Totò, son partenaire de toujours, et Rita, sa maîtresse qui l’attend depuis des années.

INTERPRÉTÉ PAR TONI SERVILLO

Acteur, dramaturge, metteur en scène de théâtre et d’opéra, Toni Servillo est l’un des acteurs italiens les plus importants de ces dernières décennies, visage irremplaçable du cinéma de Paolo Sorrentino. Il a reçu de nombreuses récompenses internationales dont deux Prix du Meilleur acteur européen (décernés par l’Académie européenne du cinéma) et quatre David di Donatello du Meilleur acteur (équivalent des Césars italiens). Après avoir travaillé avec Mario Martone dans des films comme Mort d’un mathématicien napolitain et Teatro di guerra, il débute en 2001 une longue collaboration avec Paolo Sorrentino dans L’homme en plus. En 2008, il interprète les rôles principaux des films Gomorra de Matteo Garrone et Il divo de Paolo Sorrentino, tous deux en compétition au Festival de Cannes et récompensés par des Prix du Jury. En 2013, il incarne Jep Gambardella dans le film de Paolo Sorrentino primé aux Oscars, La grande bellezza. En 2018, il interprète le rôle de Sivio Berlusconi dans Silvio et les autres de Paolo Sorrentino.

Filmographie sélective : Silvio et les autres de Paolo Sorrentino (2018), Les Confessions de Rober to Andò (2016), La grande bellezza de Paolo Sorrentino (2013), Viva la libertà de Roberto Andò (2013), La Belle endormie de Marco Bellocchio (2012), Une Vie tranquille de Claudio Cupellini (2010), Un Balcon sur la mer de Nicole Garcia (2010), Il divo de Paolo Sorrentino (2008), Gomorra de Matteo Garrone (2008), La Fille du lac d’Andrea Molaioli (2007), Les Conséquences de l’amour de Paolo Sorrentino (2004), L’homme en plus de Paolo Sorrentino (2001), Teatro di guerra de Mario Martone (1998), Mort d’un mathématicien napolitain de Mario Martone (1992).

RITA

Elle semble apparaître à l’improviste, comme un personnage fortuit et étranger à l’histoire mais elle s’y insère immédiatement avec un rôle central. Elle connaît les deux camorristes depuis toujours et est liée à Peppino par un amour pudique et presque secret. Elle n’a jamais tenu aucune arme mais elle est prête à risquer sa vie et même à tirer pour défendre l’homme qu’elle aime. C’est le seul personnage doué de conscience, la seule qui imagine concrètement un avenir pour elle et pour Peppino.

INTERPRÉTÉE PAR VALERIA GOLINO

Actrice et réalisatrice, Valeria Golino est également productrice et scénariste. Son travail en tant qu’actrice et de réalisatrice a été récompensé par plus de 65 prix internationaux. Elle fait ses débuts au milieu des années 1980 avec Peter del Monte et obtient en 1986 la Coupe Volpi à la Mostra de Venise pour son interprétation dans Storia d’amore de Francesco Maselli. Entre 1988 et 2000, elle travaille essentiellement aux États-Unis où elle est notamment choisie pour Rain Man (1988) aux côtés de Dustin Hoffman et Tom Cruise. En 2002, elle remporte le Ruban d’argent de la Meilleure actrice pour Respiro d’Emanuele Crialese et en 2006 le David di Donatello de la Meilleure actrice pour La guerra di Mario d’Antonio Capuano. Elle est également remarquée en 2007 dans Actrices de Valéria Bruni-Tedeschi. En 2013, elle réalise son premier film, Miele, présenté au Festival de Cannes dans la section Un certain regard. La même année, elle gagne le David di Donatello pour son interprétation dans Les Opportunistes de Paolo Virzì. En 2015, elle est récompensée une seconde fois par la Coupe Volpi à la Mostra de Venise pour son rôle dans le film Par amour de Giuseppe M. Gaudino. Son second longmétrage en tant que réalisatrice, Euforia, est présenté dans la sélection Un certain regard du Festival de Cannes en 2018. En 2019, elle joue dans Dernier Amour sous la direction de Benoit Jacquot et dans Portrait de la jeune fille en feu, réalisé par Céline Sciamma, qui obtient le Prix du Scénario au Festival de Cannes 2019.

Filmographie sélective : Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma (2019), Dernier amour de Benoît Jacquot (2019), Les Estivants de Valéria Bruni Tedeschi (2018), Ma Fille de Laura Bispuri (2018), La vita possibile d’Ivano De Matteo (2016), Par amour de Giuseppe M. Gaudino (2015), Le Garçon invisible de Gabriele Salvatores (2014), Les Opportunistes de Paolo Virzì (2014), La Fille du lac d’Andrea Molaioli (2007), Actrices de Valéria Brunedeschi (2007), La guerra di Mario d’Antonio Capuano (2005), Respiro d’Emanuele Crialese (2002), Les Acrobates de Silvio Soldini (1997), Groom Service de Q. Tarantino, R. Rodríguez, A. Anders, A. Rockwell (1995), Puerto Escondido de Gabriele Salvatores (1992), Rain Man de Barry Levinson (1988), Storia d’amore de Citto Maselli (1986), Piccoli fuochi de Peter Del Monte (1985).

TOTÒ LE BOUCHER

C’est son passé sanguinaire et sa réputation de tueur impitoyable qui lui ont valu ce surnom. Ami fraternel de Peppino, il a partagé avec lui aventures, missions homicides et confidences. Il est prêt à tout pour lui et pour sa cause. Il est encore pris dans les engrenages de la Camorra et semble plus crispé que son partenaire mais il est animé par une grande détermination et un grand courage. Un personnage fondamentalement ambigu sur lequel ne pourra que se poser une lumière sinistre.

INTERPRÉTÉ PAR CARLO BUCCIROSSO

Auteur, metteur en scène et acteur de théâtre aux multiples talents, Carlo Buccirosso est surtout connu au cinéma pour ses rôles dans des comédies, celles de Vincenzo Salemme et de Carlo Vanzina en particulier, où il a souvent incarné la figure du Napolitain moyen. Second rôle parfait, son interprétation de Paolo Cirino Pomicino dans Il divo de Paolo Sorrentino (2008) lui a valu d’être nommé aux David di Donatello. Il joue à nouveau sous la direction de Paolo Sorrentino en 2013 dans La grande bellezza. En 2015, il est recompensé par un David di Donatello du Meilleur acteur dans un second rôle pour son interprétation dans le film Noi e la Giulia d’Edoardo Leo. En 2017, il reçoit à la Mostra de Venise le Prix Pasinetti avec l’ensemble des acteurs du film Ammore e malavita de Marco et Antonio Manetti.

Filmographie sélective :Ammore e malavita de Marco et Antonio Manetti (2017), Un paese quasi perfetto de Massimo Gaudioso (2016), Noi e la Giulia de Edoardo Leo (2015), Song'e Napule de Marco et Antonio Manetti (2014), La gente che sta bene de Francesco Patierno (2014), La grande bellezza de Paolo Sorrentino (2013), Dalla vita in poi de Gianfrancesco Lazotti (2010), Il divo de Paolo Sorrentino (2008), Febbre da cavallo - La mandrakata de Carlo Vanzina (2002), A ruota libre de Bruno Colella (2000), Amore a prima vista de Bruno Colella (1999), L’amico del cuore de Vincenzo Salemme (1998), Amami de Bruno Colella (1992).

IGORT

Igort (Igor Tuveri) travaille depuis la fin des années 1970 comme auteur de bande dessinée, illustrateur, essayiste et musicien. Ses premières histoires apparaissent dans la revue « Il pinguino » qu’il a lui-même fondée et à laquelle participent également Giorgio Carpinteri, Lorenzo Mattotti, Daniele Brolli, Roberto Baldazzini.

Depuis les années 1980, ses bandes dessinées sont publiées dans les pages de revues nationales et internationales telles que Linus, Alter, Frigidaire, Métal Hurlant, L’écho des Savanes, Vanity, The Face, Vogue, The New Yorker. Il écrit des articles, des essais, des réflexions pour Il Manifesto, Reporter, Il Corriere della Sera, Repubblica. En 1983, avec Brolli, Carpinteri, Jori, Kramsky et Mattotti, il crée le groupe Valvoline qui bouleverse les règles de la bande dessinée d’aventure traditionnelle.

Ses œuvres sont publiées dans plus de 26 pays, dont les États-Unis et la France. Depuis les années 1990, il publie régulièrement au Japon en créant les séries Amore, qui se déroule en Sicile, et Yuri, toutes deux éditées par Kodansha. Il part vivre à Tokyo et participe à des éditions spéciales du prestigieux Magazine House Tokyo, Hon Hon Do et d’autres. En collaboration avec le musicien récompensé aux Oscars Ryuichi Sakamoto, il publie une histoire écrite à quatre mains, qui sort au Japon et en Italie.

Il expose à New York, Tokyo, Paris, Genève, Milan et, en 1994, à la Biennale de Venise. Dans le domaine du design, il collabore avec Studio Alchimia, Swatch, Alessi, Memphis. Il est actif dans le domaine musical depuis 1978. Igort chante, joue, compose et publie des albums avec différentes formations dans toute l’Europe.

En 2000, il fonde et dirige la maison d’édition Coconino Press, dont le siège est à Bologne. Son roman graphique 5 est le numéro parfait, qui paraît en 2002, est aussitôt publié dans une quinzaine de pays.

Il travaille également à la série Baobab, écrit des romans et des scénarios pour le cinéma. Ses œuvres sont publiées en Italie par Coconino Press, Rizzoli, Mondadori, Feltrinelli, Einaudi, Repubblica, Corriere della Sera… Il voyage, recueille des témoignages qui deviennent des documentaires dessinés : Les Cahiers ukrainiens, Les Cahiers russes, Les Cahiers japonais, traduits dans de nombreuses langues.

Il a récemment reçu le prestigieux Premio Napoli, sous le Haut Patronage de la Présidence de la République, pour la diffusion de la culture italienne dans le monde.

Il vit entre Paris et sa Sardaigne d’origine.


5 EST LE NUMÉRO PARFAIT

Dès sa sortie, la bande dessinée 5 est le numéro parfait a été un phénomène d’édition. Publié dans 20 pays, traduit dans 15 langues et récompensé par de nombreux prix internationaux, il est devenu un livre culte, l’un des romans graphiques les plus traduits dans le monde qui a hissé son créateur au rang des plus importants auteurs du genre au niveau international.


Parmi les différentes éditions :
Coconino Press, Rizzoli et Repubblica en Italie.
Casterman (Gallimard) en France.
Random House au Royaume-Uni, Australie, Nouvelle Zélande et Commonwealth. Drawn & Quarterly aux États-Unis et Canada.
Avant Verlag en Allemagne. Sinsentido en Espagne.
Ogg & Blik en Hollande.

Source et copyright des textes des notes de production @ Nour Films

  
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