samedi 2 mars 2019

STAN & OLLIE


Biopic/Drame/Un beau film émouvant et un merveilleux duo d'acteurs

Réalisé par Jon S. Baird
Avec Steve Coogan, John C. Reilly, Nina Arianda, Shirley Henderson, Danny Huston, Rufus Jones, Susy Kane, Bentley Kalu...

Long-métrage Britannique
Durée : 01h38mn
Année de production : 2018
Distributeur : Metropolitan FilmExport

Date de sortie sur les écrans britanniques : 11 janvier 2019
Date de sortie sur nos écrans : 6 mars 2019


Résumé : 1953. Laurel et Hardy, le plus grand duo comique de tous les temps, se lancent dans une tournée à travers l’Angleterre.

Désormais vieillissants et oubliés des plus jeunes, ils peinent à faire salle comble. Mais leurs capacités à se faire rire mutuellement et à se réinventer vont leur permettre de reconquérir le public, et renouer avec le succès.

Même si le spectre du passé et de nouvelles épreuves ébranlent la solidité de leur duo, cette tournée est l’occasion unique de réaliser à quel point, humainement, ils comptent l’un pour l’autre…

Bande annonce (VOSTFR)



Extrait - "Tu m'as trahi" (VOSTFR)



Extrait - "Plus rien à boire" (VOSTFR)



Extrait - "Performance" (VOSTFR)



Featurette - "Relationship" (VOSTFR)



Featurette - "Dans la peau du personnage" (VOSTFR)



Ce que j'en ai pensé : le réalisateur Jon S. Baird fait revivre à l’écran un des duos les plus marquants du cinéma. Il apporte un soin particulier aux ambiances et aux décors afin de bien nous situer dans l’époque de l’action. On sent qu’il aime ses deux personnages et bien qu’il reste sur un chemin classique pour nous narrer son histoire, il sait ménager de beaux moments très drôles et d’autres très touchants. 

Le scénario nous entraîne sur les pas de la fin de carrière de ses deux superbes artistes qui ont fait (et, espérons-le, continue de faire) rire des générations de spectateurs grâce à leurs talents de comiques. Il y a une grande dureté dans cette histoire que ce soit lorsqu’elle aborde les relations entre les artistes et les studios, l’oubli ou encore les problèmes d’argent. Il est déchirant de ressentir leur désarroi et leurs déceptions. Cependant, le réalisateur équilibre habilement son propos en se reposant sur l’humour que Laurel et Hardy savait si bien nous transmettre. Ainsi, il éclaire son histoire par des scènes qui provoquent le rire tout en nous rappelant combien ils étaient merveilleux. 

Les deux acteurs principaux sont magnifiques. Steve Coogan interprète Stan Laurel et John C. Reilly interprète Oliver Hardy. On oublie les comédiens et on voit Laurel et Hardy à l’écran, tout simplement. Leurs performances sont remarquables dans la ressemblance, les attitudes, leur capacité à les représenter sur scène et hors scène. Ils sont profondément attachants et bluffants dans ces rôles. 




Un autre duo beaucoup plus inattendu, mais tout aussi touchant, se dessine également, celui des épouses interprétées par Nina Arianda dans le rôle d’Ida Kitaeva Laurel, et Shirley Henderson dans le rôle de Lucille Hardy. Elles sont impeccables. 


Copyright photos @ Metropolitan FilmExport

En ce qui concerne les relations professionnelles dans le monde artistique Danny Huston, qui interprète Hal Roach, et Rufus Jones, qui interprète Bernard Delfont, sont des spécimens convaincants, chacun avec leur façon de faire, mais tous deux avec un objectif commun qui est d’exploiter leurs poules aux œufs d’or. 

STAN & OLLIE est un beau film très émouvant qu’il faut aller découvrir pour ses incroyables acteurs et son histoire douce-amère qui nous raconte de façon touchante un petit bout de l’histoire du cinéma.


NOTES DE PRODUCTION
(À ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers !)

"C'est une histoire d'amour
L'écriture du projet

Stan Laurel et Oliver Hardy sont largement considérés comme le plus grand tandem comique de l'histoire du cinéma. De 1927 à 1950, ils se sont produits dans 107 films (32 courts métrages muets, 40 courts parlants, 23 longs métrages, 12 apparitions). Ils ont ainsi donné ses lettres de noblesse à la notion de "duo comique" avec une complicité contagieuse et des gags qui pouvaient sembler naturels, mais qui étaient ciselés dans leurs moindres détails. Les deux comédiens font partie des très rares stars du muet à avoir survécu au parlant – et même à s'y être épanouis –, ajoutant des jeux de mots à leur panoplie comique. 

Leur influence dépasse largement les données chiffrées et l'analyse critique : ils ont en effet encore aujourd'hui d'innombrables fans, trois musées leur sont consacrés et ils ont même leur fan club, Sons of the Desert [en hommage à leur film LES COMPAGNONS DE LA NOUBA, NdT]. Aimés dans le monde entier – ils sont appelés "Dick Und Doof" en Allemagne, "Flip I Flap" en Pologne, "O Gordo e o Magro" au Brésil –, ils incarnent l'humour à l'état pur et nous plongent dans un monde où l'absurde frôle le sublime et où l'amitié est une valeur intangible. Qu'on les connaisse à travers les rediffusions télé, les adaptations en dessins animés ou une simple image sur Twitter, il suffit d'entendre leur thème musical ("C'est moi Laurel, c'est moi Hardy") pour sourire et basculer dans une époque moins cynique qu'aujourd'hui. Les gens admirent Chaplin, sont impressionnés par Buster Keaton mais adorent Laurel et Hardy. Très rares sont les humoristes qui ne revendiquent pas leur influence.

Le scénariste Jeff Pope éprouve, lui aussi, une vraie tendresse pour le duo. Nourri aux courts métrages comiques du tandem légendaire diffusés le samedi matin sur la BBC, il s'est vu offrir un coffret DVD de Laurel et Hardy il y a une quinzaine d'années. Après avoir vu LAUREL ET HARDY AU FAR WEST, il s'est lancé dans des recherches sur la véritable histoire des deux stars. Il a alors découvert un pan méconnu de leur parcours : la tournée théâtrale du célèbre duo au Royaume-Uni au début des années 50, comme en témoigne l'ouvrage "Laurel & Hardy : The British Tours" de AJ Marriot. 

"Il y a cette incroyable photo de ces deux types, qui avaient été des icônes du cinéma, et qui séjournaient dans de modestes auberges, qui se produisaient dans de petits théâtres et qui ne se rendaient pas compte qu'ils faisaient tout ça parce qu'ils s'aimaient", déclare Pope. "C'est ce qui m'a poussé à écrire ce film : c'est une histoire d'amour fraternel entre deux hommes".

La productrice Faye Ward acquiesce : "STAN & OLLIE est avant tout une histoire d'amitié. Et le film parle de ces deux amis qui sont arrivés au soir de leur vie, mais qui n'en ont pas conscience. Mais il évoque aussi leur génie artistique et la manière dont la magie se produit sur scène".

Steve Coogan, qui campe Laurel, avait travaillé avec Pope sur PHILOMENA de Stephen Frears (dont le scénario avait été nommé à l'Oscar). Il a aussitôt été sensible à l'approche du scénariste qui s'attache à leur complicité, vieille de 35 ans, à travers le prisme de la tournée.

"C'est très intelligent de la part de Jeff car on commet souvent l'erreur de raconter l'histoire de la vie de quelqu'un de manière chronologique", dit-il. "C'est beaucoup plus fort de se focaliser sur un pan de leur parcours qui, souvent, permet de tout connaître de la personne. On perçoit l'humanité d'un être en s'attachant à un moment de son existence".

La production a choisi d'appeler le film STAN & OLLIE, et non LAUREL & HARDY, car il s'agissait de débusquer les hommes derrière les légendes : le scénario de Pope cherche à cerner la vérité au-delà de l'image publique des deux acteurs. Alors que Hardy aimait donner le sentiment de prendre le contrôle à l'écran, Laurel était la tête pensante du tandem et supervisait le moindre aspect du tournage. De son côté, dès lors que le film était en boîte, Hardy allait souvent jouer au golf. Le film suggère aussi que, si le duo était inséparable à l'écran, leurs liens étaient plutôt professionnels par ailleurs. Comme le signale Pope, "Ils se sont vraiment rapprochés au cours de cette tournée difficile où ils passaient le plus clair de leur temps ensemble. Le film raconte donc les circonstances dans lesquelles ils sont devenus aussi proches dans leur vie qu'ils l'étaient à l'écran".

La productrice Fay Ward renchérit : "À mon avis, c'était fondamental de revenir à la nature même du tandem Laurel-Hardy et c'est pour cela qu'on ne voulait pas faire un biopic traditionnel. On voulait réaliser un film qui puisse plaire aux spectateurs de tous âges. Laurel et Hardy sont adorés dans le monde entier et ils ont des fans parmi des acteurs comiques comme Ricky Gervais et Paul Merton, John C Reilly et Steve Coogan. Il y a des millions d'autres gens qui se disent encore marqués par le célèbre tandem. Je crois qu'on est immédiatement à l'aise en leur compagnie : même si on les découvre, on comprend à quel point ils ont inspiré des comiques d'aujourd'hui".

Le scénario de Pope est ponctué de détails à la fois révélateurs et touchants sur la relation entre les deux protagonistes – Laurel a continué d'écrire des sketchs pour le duo sept ans après qu'ils se soient retirés des écrans – mais Coogan était convaincu que ce cocktail n'était pas suffisant pour STAN & OLLIE.

"Je savais que le film allait être poignant, triste et émouvant, mais je craignais qu'il ne soit pas très drôle", relève-t-il. "L'émotion à travers la séduction du spectateur, cela se mérite. Mais on peut charmer les gens grâce à l'humour".

Si l'humour est surtout lié aux sketchs de Laurel et Hary sur scène, scrupuleusement reconstitués, le scénario inscrit également certains de leurs plus célèbres numéros dans leur quotidien. C'est ainsi que leur tentative de monter les marches d'une gare avec une malle fait directement référence à la scène mémorable d'acheminement d'un piano en haut d'un escalier dans LIVREURS, SACHEZ LIVRER ! qui a remporté un Oscar. "Au cours de l'écriture, je me suis rendu compte que je pouvais rendre hommage à leur passé glorieux", confie Pope. Mais pour Coogan, intégrer les sketchs du tandem à des situations quotidiennes en dit long sur la nature de ces artistes.

"Comme chez beaucoup de comiques, il n'y a pas de séparation totale entre le personnage qu'il incarne et son propre tempérament, surtout s'ils sont très investis dans l'écriture", remarque-t-il. "Il y a des liens entre les deux et on a fait en sorte que le spectateur s'en aperçoive. Pour les vrais fans de Laurel et Hardy, c'est important de voir qu'on a essayé d'être fidèle à leur mémoire et de brosser d'eux un portrait intime et précis. Et pour les autres, le film reste divertissant parce qu'en mettant en scène leurs sketchs les plus connus, on a fait en sorte qu'ils soient encore très drôles pour un public contemporain".

"Il ne s'agit pas d'un biopic traditionnel"
La réalisation du film

Jeff Pope a envoyé le scénario à Jon S. Baird, qui réalisait la série BABYLON de Danny Boyle. Baird, bercé par les films de Laurel et Hardy dans son enfance en Écosse, s'est souvent amusé, plus jeune, à imiter le célèbre tandem. "J'ai encore des photos de moi et d'un copain, déguisés en Laurel et Hardy, pour un spectacle scolaire", se souvient-il en riant. "Je jouais Stan, et lui Ollie. Il portait pas mal de rembourrage, qui me fait penser aujourd'hui aux faux gros ventres de cinéma".

Le projet s'est vraiment concrétisé quand la productrice Faye Ward (LES SUFFRAGETTES), de Fable Pictures, s'est engagée dans l'aventure. Elle avait fait la connaissance de Baird à l'occasion d'une rencontre d'Inside Pictures et elle avait aussitôt considéré que le projet pouvait séduire un large public – et pas seulement les cinéphiles.

"Même si Laurel et Hardy n'étaient pas les protagonistes de cette histoire, il s'agit avant tout de deux amis qui ont vécu une sacrée aventure", dit-elle. "Ils ont vécu ensemble des mariages, des expériences professionnelles, des périodes de vaches maigres, des hauts et des bas. Au début des années 50, ils prennent conscience qu'ils ont vieilli et qu'ils n'ont peut-être plus beaucoup de temps à vivre. C'est un cheminement qui resterait fascinant même si on n'avait pas affaire à Laurel et Hardy. C'était d'une totale évidence quand j'ai découvert le scénario de Jeff et quand Jon m'a parlé de sa vision du film. J'ai tout de suite décelé qu'on pouvait tenir un film hors du commun".

Ayant de la famille près d'Ulverston, la ville natale de Stan Laurel, Faye Ward a souvent visité le Laurel and Hardy Museum pendant les vacances d'été. Grande fan du tandem, elle a tout mis en œuvre pour que STAN & OLLIE ne bascule pas dans les pires clichés des biopics.

Le réalisateur avait un point de vue très clair sur la question essentielle soulevée par la décision d'Oliver d'avoir tourné un film – DEUX BONS COPAINS – sans Stan.

"C'est comme s'il s'agissait d'un couple marié qui s'aime, mais l'un des deux a été infidèle par le passé", précise-t-il. "Désormais, l'autre a l'occasion de faire pareil : va-t-il s'en saisir ?"

Juste avant le tournage, Baird a eu une crise d'appendicite et a dû être opéré d'urgence. Puis, il a récupéré en un temps record et, une semaine plus tard, il était sur le plateau ! Au cours du tournage, la vision du réalisateur et sa détermination ont impressionné tous ses collaborateurs. "Il était formidable sur le plateau, il était d'une grande précision dans ses consignes", indique Coogan. "Il ne parlait pas pour ne rien dire, ce qui arrive parfois à certains metteurs en scène".

John C. Reilly, qui interprète Oliver Hardy, s'est lui aussi laissé embarquer par la passion communicative de Baird. "Jon est vraiment celui qui m'a convaincu que je pouvais y arriver", dit-il. "C'est un homme de conviction et un indéfectible optimiste. Si ce projet est réussi, c'est grâce à l'engagement total de Jon et à la confiance qu'il nous a témoignée".

Faye Ward déclare : "Jon est un type incroyable ! Il avait une vision très précise du projet et, à mon sens, il a parfaitement compris le tandem Laurel & Hardy, mais aussi les rapports entre Stan et Ollie".

Le dynamisme de la mise en scène de Baird est palpable d'entrée de jeu. Le film s'ouvre en effet sur un travelling de six minutes où l'on voit Stan et Ollie quitter leur loge, traverser un plateau de tournage hollywoodien, arriver sur le tournage et se disputer avec le patron du studio, Hal Roach.

"J'avais envie qu'on sente cette atmosphère des studios hollywoodiens, et j'avais le sentiment que c'était le bon dispositif", note Baird. "On a besoin de voir tout le déroulement de cette séquence. Je me suis dit que c'était justifié par le scénario et j'avais aussi envie de me lancer ce défi !"

Très audacieux, Baird était non seulement exigeant avec ses chefs de poste, mais aussi avec ses acteurs qui devaient énoncer des dialogues très denses d'un seul trait.

"On ressent une vraie pression dans un plan comme celui-là", reconnaît Coogan. "Il faut presque essayer de ne pas y penser. Si on était trop stressés à l'idée de ne pas y arriver, on risquait de ne pas être crédibles. Du coup, mieux vaut oublier la gestuelle réglée d'avance –et se dire qu'on est simplement deux types en train de discuter. Je crois qu'il faut une certaine expérience pour parvenir à ce résultat, et comprendre que le mieux qu'on ait à faire, c'est de se détendre et de se moquer du reste !"

Autre scène importante, qui marque un moment emblématique pour les deux comiques : la légendaire scène de danse de Stan et Ollie, sur l'air de "At The Ball, That's All", devant un décor de saloon dans LAUREL ET HARDY AU FAR WEST. Coogan et Reilly ont travaillé avec le chorégraphe et superviseur de gestuelle Toby Sedgwick pour que la scène soit la mieux préparée possible. On retrouve ces pas de danse au cours du film car Laurel et Hardy l'interprètent pendant la tournée – et leur numéro semble de plus en plus ringard. Pour la version "cinématographique" du film dans le film, Sedgwick a même entraîné les comédiens à répéter les erreurs commises par Laurel et Hardy au cours du tournage.

"On a répété ce numéro si souvent qu'on pouvait l'exécuter pendant qu'on dormait", confirme Coogan. "Ce qui est formidable quand on les regarde danser, c'est qu'ils semblent faire ça avec désinvolture et sans effort. Ça demande beaucoup de travail de donner le sentiment de la facilité".

Faye Ward salue l'extraordinaire dévouement de Coogan et Reilly. "Ils ont travaillé comme des fous. Ils se sont appropriés le numéro avec un tel degré de véracité que même lorsque les vrais Laurel et Hardy commettent une erreur dans les images d'archives, ils les ont reproduites aussi. Ils ont totalement réussi et c'était magique !"

Également humoriste, Sedgwick a aussi fait répéter les sketchs interprétés sur scène par Laurel et Hardy aux acteurs. Coogan, Reilly et Sedgwick ont ainsi reproduit les numéros bien rodés du célèbre tandem, mais en ont inventé de nouveaux pour les besoins du film. Ce qui n'a fait qu'enrichir l'expérience du tournage.

"On est devenus très complices dans ces moments-là car cela va au-delà d'un simple tournage", se souvient Reilly. "Comme Laurel et Hardy se produisaient sur scène, on filmait notre prestation et on jouait devant un public. Il y avait non seulement la pression d'un tournage de cinéma, mais aussi celle de ces spectateurs qui nous regardaient ! Il fallait également qu'on se donne pour eux ! On était presque deux combattants qui se devaient loyauté. Je resterai éternellement attaché à Steve en repensant à ce qu'on a vécu ensemble".

C'était effrayant d'interpréter ces types"
LE CASTING

Pour STAN & OLLIE, il était indispensable de dénicher les comédiens non seulement capables d'incarner le célèbre tandem, mais aussi d'apporter un éclairage sur leur trajectoire personnelle – afin de mieux cerner qui ils étaient et ce qui les faisait vibrer.

Steve Coogan a été la première – et la dernière – personne à qui Jon Baird ait proposé de camper le rôle de Stan Laurel. L'acteur a d'abord découvert Laurel et Hardy à la télévision, en regardant leurs mésaventures en robe de chambre pendant les grandes vacances. "Ces films étaient très accessibles à un enfant", se souvient-il. "C'était un humour lié à la personnalité des deux comédiens, et pas un comique de situation. Il n'y a pas de conséquences à leurs actions car ils évoluent fondamentalement dans un monde joyeux". Au cours d'échanges avec Baird et Faye Ward via Skype, Coogan a montré qu'il pouvait facilement adopter les attitudes et les tics de langage de Laurel, mais aussi exprimer l'énergie et l'honnêteté de l'homme. Comme l'indique Faye Ward, "c'est formidable de voir Steve accomplir quelque chose qu'il n'avait jamais fait auparavant".

Le réalisateur précise : "J'ai rencontré Steve au cours d'un déjeuner et on parlait tranquillement de Stan Laurel et sans prévenir il a commencé à se glisser dans la peau de son personnage. Puis, il a fait tomber sa serviette, et s'est cogné la tête contre la table – et j'en ai eu des frissons dans le dos et j'ai été bluffé ! C'est ce moment qui n'a l'air de rien qui a été déterminant. Je savais que c'était un type très intelligent, et qu'il s'y prendrait à merveille, Et en le voyant incarner Stan avec une telle précision dans la voix et le jeu, j'ai su au bout de cinq minutes qu'il s'imposait dans le rôle. Tout le monde était fou de joie quand Steve nous a donné son accord, pour des raisons évidentes".

"Steve a été un partenaire formidable", affirme John C. Reilly. "On s'est rendu compte dès le départ qu'il n'y avait pas moyen de jouer ces rôles sans apprendre à s'aimer. On ne se connaissait pour ainsi dire pas, mais on est devenus très amis. C'est l'un des types les plus drôles que j'aie jamais rencontré. Je me sentais vraiment seul dès que Steve n'était pas sur le plateau avec moi. J'avais le sentiment qu'il me manquait une partie de moi-même".

Faye Ward se souvient du sentiment qu'elle a éprouvé en apprenant que Coogan et Reilly avaient rejoint le film. "C'était tout simplement exaltant que John et Steve soient des nôtres", dit-elle. "Il n'y a franchement pas beaucoup d'acteurs au monde qui puissent réellement incarner Laurel et Hardy. Ce sont des acteurs qui ont un extraordinaire sens du rythme et du burlesque. C'était merveilleux de voir ces deux-là camper Laurel et Hardy : on avait vraiment le sentiment de voir deux légendes incarner deux légendes".

Si Coogan a l'habitude de se produire seul, Reilly a souvent travaillé en tandem avec Will Ferrell. Mais l'acteur était malgré tout intimidé à l'idée d'incarner un mythe de la comédie.

"J'ai d'abord voulu renoncer au projet car il s'agit de deux figures écrasantes et impressionnantes", déclare Reilly. "J'ai le sentiment qu'à l'époque de Google et Wikipédia, on peut avoir accès à n'importe quel moment à tout ce qu'on veut savoir sur la vie de quelqu'un. Mais ce qui est magnifique dans cette histoire, c'est qu'on plonge dans l'intimité de leurs rapports et qu'on comprend comment se passait leur tandem". 

Habitué à passer d'un genre à l'autre – de la comédie au film musical en passant par le drame –, Reilly possède un large registre de jeu qui lui a permis de trouver le bon équilibre entre humour et émotion. 

"C'est un comédien fantastique", note Coogan. "Il sait être réfléchi, poignant et authentique tout en maîtrisant les techniques comiques. Ce sont deux registres très différents. Le comique fait souvent appel à des compétences techniques, et pour être capable d'exprimer des sentiments sincères, il faut être capable de puiser dans ses émotions. Il y a très peu d'acteurs qui soient bons dans les deux. John en fait partie".

Le choix de Reilly a joué un rôle décisif dans la participation de Coogan au projet. "J'ai demandé à la production qui était envisagé pour Oliver Hardy", se souvient Coogan. "On m'a répondu John C. Reilly et j'ai dit : 'S'il donne son accord, je suis partant'".

Baird se souvient de son rendez-vous avec Reilly : "John m'a dit : 'c'est une responsabilité énorme de jouer ce personnage – c'est mon héros', et Steve m'avait dit la même chose", signale-t-il. "Mais John a ajouté : 'Je ne laisserai personne d'autre tenir ce rôle. C'est terrifiant d'accepter un rôle pareil, mais je ne laisserai personne d'autre le faire à ma place'". Et je me suis dit : 'Si tu es de cette trempe-là, tu es le genre de mec avec qui je veux travailler parce que tu fais preuve de responsabilité et de courage'".

Dès que les deux comédiens ont fait part de leur intérêt pour le projet, la production a souhaité s'assurer qu'ils étaient suffisamment complices pour que le célèbre tandem existe à l'écran.

"Jon et Jeff se sont rendus à New York pour les réunir et s'assurer qu'ils s'entendent bien", se remémore Faye Ward. "C'était totalement stressant. Ils les ont laissés discuter dans le restaurant et soudain, à quelques mètres de là, ils ont aperçu Laurel et Hardy en train de dîner. Ils se sont dit 'on tient nos personnages' ".

L'alchimie entre les deux acteurs s'est ressentie tout au long du tournage. La productrice reprend : "Ils ont joué le sketch des 'doubles portes' sur scène au cours de la première semaine de tournage devant toute l'équipe. Et les équipes de films sont parfois un rien cyniques car elles voient défiler des centaines de stars faire tout un tas de choses. Mais la salle a plongé dans un silence admiratif, puis a explosé de rire. D'ailleurs, Harriet, notre 2ème assistante-réalisateur, pleurait. C'était formidable".

La danse tirée de LAUREL ET HARDY AU FAR WEST était l'une des séquences les plus difficiles pour les comédiens. Steve Coogan se souvient : "On a étudié ce que Laurel et Hardy avaient fait dans le film en question, puis on a répété et chorégraphié les enchaînements. Mais ce qui était particulier, c'est qu'on devait non seulement apprendre ces pas de danse, mais aussi reproduire leurs maladresses. Car il y avait un côté amateur et incohérent dans leur manière d'exécuter ce numéro. On devait donc imiter leurs erreurs et leurs gestes désinvoltes. C'était assez difficile puisqu'on devait reproduire la chorégraphie du film, telle qu'ils l'ont tournée, et la jouer sur scène – sans les erreurs. Il y avait au total deux manières de faire ce numéro : l'une avec quelques maladresses et l'autre de manière plus sophistiquée. C'était un peu déroutant mais on l'a tellement répété qu'on le connaissait par cœur et que je serais sans doute capable de le reproduire aujourd'hui encore !"

"C'était comme porter un masque qui recouvrait tout le corps".
La transformation physique

La transformation physique de Coogan et Reilly a été supervisée par le chef-maquilleur Jeremy Woodhead et le chef-prothésiste Mark Coulier, oscarisé pour THE GRAND BUDAPEST HOTEL et LA DAME DE FER.

Après plusieurs essais, l'équipe a choisi de privilégier la sobriété en matière de maquillage.

"Il faut veiller à ce que le spectateur ne se dise pas 'Quel maquillage extraordinaire !'", explique Coogan. "Il doit être absorbé par l'interprétation et l'histoire et ne surtout pas être interpellé par quoi que ce soit qui le déconcentre de l'intrigue".

Au bout du compte, Coogan a choisi un faux menton, de fausses dents et des embouts auriculaires personnalisés donnant l'impression qu'il a les oreilles décollées. Détail amusant : Coogan, qui a les yeux marrons, a dû porter des lentilles bleues, et Reilly, qui a les yeux bleus, a dû porter des lentilles marrons. Pour la coiffure un rien excentrique de Stan, Woodhead a appliqué la même philosophie minimaliste.

"On a laissé à Steve ses vrais cheveux, mais on les a teints pour se rapprocher de la couleur de Stan Laurel", indique-t-il. "Stan était roux. On a envisagé de teindre Steve en roux, mais ça sautait trop aux yeux et risquait de détourner l'attention du spectateur. De toute façon, vers la fin de sa vie, Stan se teignait les cheveux".

Pour se fondre dans la peau de son personnage, Reilly subissait quatre heures de maquillage par jour. Dans les années 50, Hardy pesait près de 180 kg, mais l'équipe a choisi de ne pas aller jusque-là. Coulier et Woodhead ont testé quatre faux gros ventres en mousse polyéthylène. Pour obtenir un résultat satisfaisant, l'équipe s'est inspirée de la vie personnelle de Hardy.

"On a longuement travaillé avec John C. Reilly pour que son allure soit conforme à la réalité", indique Faye Ward. "Il a fait des centaines d'essayages et on a élaboré son costume en y intégrant toutes sortes de détails. Bien entendu, il y a énormément de choses pratiques à prendre en compte en matière de prothèse car l'acteur doit ressembler au personnage sans que sa tenue ne gêne son jeu. On doit pouvoir percevoir le génie de John C. Reilly à travers sa combinaison, tout en étant convaincu qu'on a Hardy face à soi".

"Le surnom d'Oliver Hardy était 'bébé' car il avait la taille et les proportions d'un gigantesque bébé", précise Reilly. "J'ai envoyé des photos de bébé à Guy et Mark et l'allure du personnage a commencé à prendre forme".

Reilly avait plusieurs combinaisons pour les différentes étapes de la vie du personnage, sachant que la version de 1937 était plus ferme. Même si la mousse polyéthylène est légère, elle conserve malgré tout la chaleur, si bien que l'acteur était branché à une machine à glace entre les prises. Ce dispositif a permis à Reilly d'avoir davantage confiance en lui pour interpréter le personnage.

"Seuls mon visage et la paume de mes mains étaient à l'air libre", se souvient-il. "Le reste de mon corps était recouvert soit par les prothèses, soit par le faux ventre. Comme si je portais un masque sur tout le corps. Et le masque était si convaincant qu'il m'a donné la force de jouer le rôle !"

Jon Baird évoque la première fois qu'il a découvert les deux acteurs grimés : "Le silence était total", dit-il. "J'ai cru qu'il y avait un problème. Mais pas du tout. Les gens étaient simplement estomaqués par leur allure". Nina Arianda a découvert le tandem lorsqu'Ida les observe en train de jouer. "J'en ai oublié où j'étais pendant un instant", s'enthousiasme-t-elle. "J'avais vraiment l'impression de me retrouver face à Laurel et Hardy. C'était fascinant. Ce jour-là, j'ai totalement oublié ce que je faisais".

Source et copyright des textes des notes de production @ Metropolitan FilmExport

  
#StanetOllie

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