Documentaire/Une mise en perspective très intéressante qui reprend l'origine de l'affaire en posant des questions sur le présent et l'avenir
Réalisé par Ursula Macfarlane
Long-métrage Américain
Titre original : Untouchable
Durée : 01h39mn
Année de production : 2018
Distributeur : Le Pacte
Date de sortie sur nos écrans : 14 août 2019
Résumé : Une plongée au cœur de la saga la plus explosive de l'histoire du Cinéma : L'INTOUCHABLE raconte l'histoire de l'ascension et de la chute du magnat d'Hollywood Harvey Weinstein. Comment il a acquis et préservé sa toute-puissance au fil des décennies, même quand le scandale menaçait. D’anciens collaborateurs et plusieurs de ses accusatrices décrivent son mode opératoire, ainsi que les conséquences de ses abus sexuels présumés, dans l’espoir que justice soit faite et que les choses bougent enfin...
Bande annonce (VOSTFR)
Ce que j'en ai pensé : avec son documentaire L'INTOUCHABLE, HARVEY WEINSTEIN, la réalisatrice, Ursula Macfarlane, nous propose de revenir sur des faits avant toute décision de justice. Nous en sortons mieux informés et pourrons donc prendre la mesure du jugement au cours du procès Harvey Weinstein en septembre. Il faut noter que ce film sort en France cet été, tandis qu'il ne pourra sortir aux Etats-Unis qu'après le procès.
Au-delà du portrait de l'homme de pouvoir qui utilise son influence pour agir en criminel en toute impunité, la réalisatrice dénonce les rouages d'un système machiavélique extrêmement bien huilé qui existait déjà bien avant cette affaire et qui existe certainement toujours.
Le but de la démarche #MeToo est d'ailleurs d'arrêter l'engrenage pour que ce genre de comportement ne puisse plus jamais trouver les moyens de prospérer, servit par un silence retentissant. Elle filme les témoignages comme de sobres portraits qui racontent des traumatismes. Ils sont difficiles à entendre et pourtant, il faut impérativement les écouter, parce que savoir, reconnaître et dénoncer sont des outils essentiels.
Copyright photos @ Le Pacte
Le harcèlement sexuel, les menaces, le sentiment d'être intouchable sont autant de faits que la réalisatrice décortique à coup de paroles et d'images d'archives avec des moments qui paraissent incroyables tant il semble inconcevable que certains agissements aient pu demeurer à ce point dans l'ombre jusqu'à maintenant. Elle montre aussi comment les fissures ont commencé à se former permettant au scandale d'éclore. Ce film explique et met en lumière comment le règne Weinstein a été possible. Il soulève aussi des questionnements sur l'après. On savait que cela existait, maintenant que c'est acté, on fait quoi ?
Certes L'INTOUCHABLE, HARVEY WEINSTEIN prouve que même un géant malfaisant et tout-puissant peut-être mis à mal, mais comment faire en sorte que ces agissements appartiennent à un passé honteux, enfermés à jamais dans l'intolérable, sans possible remise de peine ? Un premier pas serait peut-être d'aller voir ce documentaire.
NOTES DE PRODUCTION
(À ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers !)
Suite à la projection du documentaire, Véronique Le Bris du site www.cine-woman.fr a eu la gentillesse de venir partager avec nous ses impressions, puisqu'elle a pu rencontrer la réalisatrice Ursula Macfarlane, et de répondre à nos questions. Retrouvez cet échange dans les vidéos ci-dessous (à ne regarder qu'après avoir vu le documentaire pour éviter les spoilers) :
NOTES DE PRODUCTION
PRÉSENTATION
L’INTOUCHABLE est une parabole
moderne pour notre époque et les générations futures. Radiographie
de l’ascension et de la chute spectaculaires d’Harvey Weinstein,
le film révèle comment le magnat d’Hollywood a acquis et exercé
sa toute-puissance au fil des décennies. D’anciens collaborateurs,
des camarades d’université et des journalistes s’interrogent sur
la légende d’un Weinstein visionnaire, tout en décrivant ses
stratégies impitoyables pour préserver son pouvoir, même quand le
scandale menaçait de l’engloutir. Émaillé de témoignages
sincères, sensibles et souvent déchirants de ses victimes, dont la
plupart s’expriment pour la première fois devant une caméra,
L’INTOUCHABLE lève le voile sur le mode opératoire et les
dommages collatéraux des abus sexuels présumés de Weinstein. Alors
que la procédure pénale à son encontre suit son cours, le film
invite le spectateur à se demander si les puissants sont réellement
au-dessus de la loi et si un changement significatif est vraiment
possible.
NOTE DE LA RÉALISATRICE URSULA
MACFARLANE
Quand le producteur Simon Chinn m’a
proposé de réaliser ce long métrage documentaire, j’ai pensé
que c’était un projet idéal pour moi. Dans une époque
d’inégalités croissantes entre les sexes, un film sur Harvey
Weinstein permettait de soulever les problèmes de domination, d’abus
de pouvoir, de complicité et de dissimulation qui m’interpellent,
vu que j’ai toujours mis un point d’honneur à donner la parole
aux femmes dans mes films. Ayant été élevée par une mère
féministe, j’ai observé avec effroi l’effondrement des acquis
du féminisme et l’émergence d’une culture du sexisme ordinaire,
avec un « attrapeur de chattes » autoproclamé siégeant à la
Maison-Blanche. Ces questions résonnaient chez tous ceux à qui j’en
ai parlé. Les femmes avaient toutes leurs propres histoires #MeToo à
raconter – certains hommes aussi. Étant réalisatrice, il n’y
avait pas de meilleur moyen que le cinéma pour mettre ces problèmes
en lumière.
Aujourd’hui, au terme de neuf mois de
procédure, alors que les victoires du mouvement #MeToo sont menacées
d’être balayées du fait de la fragilisation de l’accusation, il
semble plus que jamais opportun de dévoiler au grand public la
pathologie de cet homme, qui a passé sa vie à asseoir son pouvoir
en abusant des plus faibles et en dissimulant ses exactions – ceci
dans l’industrie du cinéma au sein de laquelle je suis si fière
de travailler.
Le film est conçu comme un drame en
trois actes, adoptant la structure de la tragédie grecque – depuis
le défi aux dieux jusqu’au revers de fortune et, on l’espère,
jusqu’au jugement tant attendu. Il retrace minutieusement
l’ascension de Weinstein, son charisme aiguisé, son talent reconnu
d’orateur et de négociateur ont fait de lui le roi d’Hollywood.
Le récit montre comment son aura, garante de succès et de richesse,
lui a permis de s’en prendre à des personnes jeunes et
vulnérables.
Les abus sexuels présumés de
Weinstein sont au cœur de L’INTOUCHABLE. Ses accusatrices sont
représentées par une jeune actrice que l’on rencontre au début
du film, dont les espoirs et les rêves semblent reposer sur
l’obtention des faveurs du producteur. Son parcours illustre la
dangereuse relation entre les puissants, qui ont quelque chose à
offrir, et les faibles, qui veulent désespérément ce que les
puissants offrent.
Grâce aux témoignages d’anciens
employés de Miramax et de la Weinstein Company, dont beaucoup
s’expriment pour la première fois devant une caméra, nous avons
pu explorer les différents niveaux de connivence entourant les abus
de pouvoir, ainsi que la nature même du consentement. Admettant
qu’il y avait un prix à payer pour entrer dans le monde d’Harvey,
d’anciens collaborateurs expriment leur sentiment de culpabilité
et leurs regrets de n’avoir rien fait pour l’arrêter. Témoignant
aussi pour la première fois publiquement, une jeune employée nous
parle d’une note interne explosive qu’elle a signée, faisant
état de « l’environnement toxique pour les femmes »
régnant au sein de la Weinstein Company. C’est cette note interne,
publiée par le New York Times en octobre 2017, qui a provoqué la
chute de Harvey Weinstein.
L’INTOUCHABLE est une parabole sombre
sur l’inconduite sexuelle et la dynamique du pouvoir. Bien que le
dénouement de l’affaire Weinstein ne soit pas encore écrit –
ses plus grands rebondissements restant peut-être à venir –, il
ne fait aucun doute que cette avalanche d’allégations a impulsé
un changement significatif. La douleur éprouvée par les
accusatrices de Weinstein est palpable dans le film, mais il apparaît
aussi que les blessures individuelles peuvent se transformer en une
force collective. L’INTOUCHABLE rend hommage à la force que
procure le fait de briser le silence collectivement.
ENTRETIEN AVEC LA PRODUCTION
Comment le projet est-il né ?
Peu après l’annonce des abus sexuels
présumés d’Harvey Weinstein, en octobre 2017, Simon Chinn a
entamé un dialogue avec Simon Young, producteur à la BBC, au sujet
d’un long métrage documentaire qui raconterait l’histoire de
Weinstein sous un angle inédit, en dépit de l’avalanche
d’articles publiés sur l’affaire. En étudiant le projet, Simon
Chinn et son cousin Jonathan Chinn, associés chez Lightbox, en sont
arrivés à la conclusion qu’un long métrage documentaire
ambitieux pour une sortie salles était un défi qui valait la peine
d’être relevé. Ils ont estimé qu’un tel film offrirait un
regard neuf s’il était capable de saisir la complexité d’une
histoire couvrant six décennies, et de la raconter de manière
nuancée, avec ses contradictions inhérentes, en partant des
réflexions personnelles et sincères de ceux qui l’ont vécue de
l’intérieur. Personne n’avait encore raconté l’ascension et
la chute de Weinstein au regard de cette nouvelle donne. Le défi
consistait à le faire d’une façon qui résonnerait chez les
spectateurs du monde entier, en traitant des thèmes universels tels
que : le pouvoir et ses limites, le machisme et le sexe, ainsi
que la question du « consentement » au cœur de la
défense de Weinstein – qu’en est-il à l’intérieur de ce
système de pouvoir ?
Quand la production a-t-elle débuté ?
Simon Chinn a approché Ursula
Macfarlane en novembre 2017 et elle a immédiatement signé pour
réaliser le film. Elle avait déjà travaillé avec Lightbox sur la
série Captive, pour Netflix, traitant des négociations de
libération d’otages. Les Chinn ont pensé qu’elle serait la plus
à même de mener le projet à bien, du fait de son empathie, de son
intelligence et de sa rigueur journalistique et narrative. La
productrice Poppy Dixon, qui avait travaillé avec Simon Chinn sur
The Imposter, long métrage documentaire nommé aux BAFTA, ainsi
que le monteur Andy Worboys, lauréat d’un BAFTA, sont venus
compléter l’équipe, puis les recherches et la préproduction ont
démarré sérieusement à Londres en février 2018.
À quelles difficultés vous
attendiez-vous ?
On a compris immédiatement que le
principal challenge serait d’accéder directement aux victimes.
S’agissant d’une affaire toujours en cours et dont le dernier
chapitre n’est pas encore écrit, on se doutait bien qu’on
rencontrerait différents types de réactions pour s’engager à nos
côtés. Mais on savait aussi que beaucoup de ceux qui avaient
travaillé de près avec Weinstein avaient eu un regard privilégié
sur ses agissements et avaient des choses à dire. S’agissant d’une
histoire dans le milieu du cinéma, on était parfaitement conscients
de la nécessité de sonder, d’une manière ou d’une autre,
l’industrie dans laquelle nous exerçons. Étant nous-mêmes
impliqués dans la profession, on savait que cette démarche serait
salutaire, mais on était également conscients de ses
chausse-trapes. On a tenté d’aborder l’histoire avec une
certaine objectivité et ne pas tomber dans le piège de faire un
film pour les gens du métier, mais plutôt de s’adresser au plus
grand nombre avec un film qui prendrait les particularités de
cette histoire pour les connecter au débat plus large qui avait lieu
dans le monde entier.
Quel a été votre angle d’attaque ?
S’attaquer à la vie privée et à la
carrière d’Harvey Weinstein, ainsi qu’aux nombreuses accusations
portées contre lui, était une tâche ardue. On a dressé une liste
de plus de 600 noms – des personnes du monde entier ayant une
connaissance approfondie de cette histoire. On a contacté près de
400 personnes, dont 128 ont consenti à nous parler – certaines
officieusement. On a finalement interviewé 29 personnes sur une
période de neuf mois. La plupart d’entre elles figurent dans le
film. Ces témoins évoquent les nombreux aspects de la carrière et
de la vie de Weinstein sur plus de soixante ans. Ils forment
l’ensemble le plus exhaustif à avoir raconté cette histoire à
l’écran. Beaucoup d’entre eux ne s’étaient encore jamais
exprimés publiquement sur le sujet.
Nous étions parfaitement conscients
qu’exposer des femmes confrontées à des souvenirs douloureux
demanderait beaucoup de délicatesse et de sensibilité. Nombre
d’entre elles ont fait preuve de volonté et d’un grand courage
pour s’exprimer face caméra, souvent pour la première fois,
encouragées par l’écho médiatique qui nous avait précédés et
la réaction internationale qu’il avait suscitée.
Les gens du métier étaient souvent
plus réticents. Ceux qui avaient étroitement travaillé avec
Weinstein, manifestaient souvent une gamme complexe d’émotions et
estimaient généralement qu’ils avaient plus à perdre qu’à
gagner à témoigner devant la caméra. Mais certains personnages
clés ont joué le jeu. Nous sommes très reconnaissants envers tous
ceux qui ont contribué au film devant la caméra, ainsi qu’envers
ceux qui nous ont aidés et conseillés en coulisses.
Comment les poursuites judiciaires
sont-elles évoquées dans le film ?
L’affaire est toujours entre les
mains de la justice, avec les accusations criminelles dont Weinstein
se défend, ainsi que les nombreuses procédures civiles engagées
contre lui. Alors que le film traite des charges criminelles et du
système de défense de Weinstein à New York, nous n’avons jamais
eu l’intention de couvrir les tenants et les aboutissants de ce
drame judiciaire et, de plus, cela aurait été hors de notre portée.
On a fait le choix de se concentrer sur les faits antérieurs à 2017
afin d’essayer de comprendre comment on en était arrivé là et de
soulever les questions de fond sur l’état du monde avant que le
scandale n’éclate. Ce monde étaitil différent de celui dans
lequel on vit aujourd’hui ? Alors qu’on tournait, des éléments
fragilisant les accusations portées contre Weinstein ont émergé et
la colère de beaucoup de ceux qui espéraient le voir traduit en
justice s’est sensiblement modifiée. En plus de prendre part au
débat actuel, on a toujours eu l’ambition de regarder au-delà de
ces machinations pour concevoir ce qui, on l’espère, constituera
un document de référence reflétant une époque révolue, non
seulement pour notre génération, mais aussi pour celle de nos
enfants.
URSULA MACFARLANE, RÉALISATRICE
Ursula Macfarlane est une réalisatrice
basée au RoyaumeUni dont les documentaires ont récolté des prix et
nominations aux BAFTA, aux Grierson Awards et aux Royal Television
Society Awards. Sa filmographie inclut des titres tels que One Deadly
Weekend in America, documentaire sur les morts commises par arme à
feu au cours d’un seul week-end de juillet ; la série Captive,
pour Netflix ; Charlie Hebdo: Three Days That Shook Paris et
Breaking Up with the Joneses, long métrage documentaire sur un
couple en instance de divorce.
AVEC LA CONTRIBUTION DE (DANS
L’ORDRE D’APPARITION)
Source et copyright des textes des notes de production @ Le Pacte
#LIntouchableHarveyWeinstein
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.