Fantastique/Épouvante-horreur/Thriller/Une relecture efficace et angoissante
Réalisé par Leigh Whannell
Avec Elisabeth Moss, Oliver Jackson-Cohen, Storm Reid, Aldis Hodge, Harriet Dyer, Michael Dorman, Amali Golden, Benedict Hardie...
Long-métrage Américain
Titre original : The Invisible Man
Durée : 02h04mn
Année de production : 2020
Distributeur : Universal Pictures International France
Date de sortie sur les écrans américains : 28 février 2020
Date de sortie sur nos écrans : 26 février 2020 - Ressortie le 22 juin 2020
Résumé : Cecilia Kass est en couple avec un brillant et riche scientifique. Ne supportant plus son comportement violent et tyrannique, elle prend la fuite une nuit et se réfugie auprès de sa sœur, leur ami d'enfance et sa fille adolescente.
Mais quand l'homme se suicide en laissant à Cecilia une part importante de son immense fortune, celle-ci commence à se demander s'il est réellement mort. Tandis qu'une série de coïncidences inquiétantes menace la vie des êtres qu'elle aime, Cecilia cherche désespérément à prouver qu'elle est traquée par un homme que nul ne peut voir. Peu à peu, elle a le sentiment que sa raison vacille…
Bande-annonce (VOSTFR)
Extrait - "La sœur de Cecilia lui vient en aide" (VOSTFR)
Ce que j'en ai pensé : le réalisateur Leigh Whannell nous a concocté un film d'horreur qui prend ses racines dans l'idée de la menace invisible. Sa mise en scène utilise habilement des techniques, comme le hors champ, pour nous angoisser. En ne nous montrant pas tout, il fait écho avec sa caméra à son INVISIBLE MAN.
Il a également écrit le scénario de son film inspiré de l'oeuvre de H.G. Wells. Il trouve des idées originales pour renouveler le concept. Il inclut beaucoup d'éléments variés à son récit et veille à ce qu'ils s'imbriquent pour raconter une histoire qui a du sens. Son sujet principal est la maltraitance et il met efficacement en lumière la souffrance psychologique ainsi que la souffrance physique qui l'accompagnent. Par contre, si on est un habitué des films de genre, on devine aisément certains des aspects qui vont être déroulés et, de ce fait, des longueurs peuvent se faire sentir.
Avec sa réalisation, il conserve cependant une forme de tension permanente - habilement mise en valeur par la musique du compositeur Benjamin Wallfisch - qui nous fait ressentir le mal-être de sa protagoniste principale et nous donne envie de comprendre comment elle va s'en sortir. Les décors des habitations sont cohérents par rapport aux personnages qui les occupent. Le réalisateur réussit très bien à faire monter le stress dans de petits ou de grands espaces.
Afin de donner de la crédibilité face à l'impossible, il lui fallait une actrice capable de produire de l'intensité dans la terreur, de faire prendre vie à une présence qu'on ne voit pas et de faire croire à la capacité de cette femme à réagir. Il trouve en Elisabeth Moss, qui interprète Cecilia Kass, un excellent vaisseau dans ce rôle aux multiples facettes qui flirte de près avec la folie.
Face à son personnage, il y a trois profils d'hommes différents. Les acteurs ne laissent aucun doute sur les traits de caractère qui forment la personnalité de leur protagoniste que ce soit Aldis Hodge qui interprète James Lanier, Oliver Jackson-Cohen qui interprète Adrian Griffin ou Michael Dorman qui interprète Tom Griffin.
La jeune Storm Reid apporte de la fraîcheur au rôle de Sydney Lanier, quant à Harriet Dyer, elle donne de l'épaisseur à celui d'Emily Kass.
INVISIBLE MAN bénéficie d'une réalisation solide et d'interprètes très convaincants. Bien qu'on devine certains des aspects, cette relecture est efficace et angoissante.
Il a également écrit le scénario de son film inspiré de l'oeuvre de H.G. Wells. Il trouve des idées originales pour renouveler le concept. Il inclut beaucoup d'éléments variés à son récit et veille à ce qu'ils s'imbriquent pour raconter une histoire qui a du sens. Son sujet principal est la maltraitance et il met efficacement en lumière la souffrance psychologique ainsi que la souffrance physique qui l'accompagnent. Par contre, si on est un habitué des films de genre, on devine aisément certains des aspects qui vont être déroulés et, de ce fait, des longueurs peuvent se faire sentir.
Avec sa réalisation, il conserve cependant une forme de tension permanente - habilement mise en valeur par la musique du compositeur Benjamin Wallfisch - qui nous fait ressentir le mal-être de sa protagoniste principale et nous donne envie de comprendre comment elle va s'en sortir. Les décors des habitations sont cohérents par rapport aux personnages qui les occupent. Le réalisateur réussit très bien à faire monter le stress dans de petits ou de grands espaces.
Afin de donner de la crédibilité face à l'impossible, il lui fallait une actrice capable de produire de l'intensité dans la terreur, de faire prendre vie à une présence qu'on ne voit pas et de faire croire à la capacité de cette femme à réagir. Il trouve en Elisabeth Moss, qui interprète Cecilia Kass, un excellent vaisseau dans ce rôle aux multiples facettes qui flirte de près avec la folie.
Face à son personnage, il y a trois profils d'hommes différents. Les acteurs ne laissent aucun doute sur les traits de caractère qui forment la personnalité de leur protagoniste que ce soit Aldis Hodge qui interprète James Lanier, Oliver Jackson-Cohen qui interprète Adrian Griffin ou Michael Dorman qui interprète Tom Griffin.
Copyright photos @ Universal Pictures International France
INVISIBLE MAN bénéficie d'une réalisation solide et d'interprètes très convaincants. Bien qu'on devine certains des aspects, cette relecture est efficace et angoissante.
NOTES DE PRODUCTION
(À ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers !)
LE CONTEXTE
Les monstres
Universal
Le début d'une
nouvelle époque
Le personnage de l'Homme invisible fait partie intégrante
de l'univers cinématographique des monstres Universal, à l'instar des figures
légendaires de Dracula, du Loup-garou, de la créature de Frankenstein, de la
Fiancée de Frankenstein, et de la Créature du Lac Noir. Si ces personnages
tristement célèbres ont traversé les époques, c'est qu'ils sont atemporels et
incarnent de nombreuses peurs et angoisses, au carrefour entre les découvertes
scientifiques et la force éternelle de l'amour et de la mort.
Avec INVISIBLE MAN, le studio inaugure une nouvelle
approche de ces créatures mythiques. Une approche qui met à l'honneur des
réalisateurs et scénaristes audacieux dont les idées renouvellent les enjeux
des personnages.
Cet opus en offre un bon exemple. Le scénariste et
metteur en scène Leigh Whannell avait une vision inédite, à la fois captivante
et terrifiante, du personnage et le studio était enchanté de la développer avec
lui. À l'avenir, les films de monstres Universal appartiendront certes au genre
horrifique, mais bénéficieront de budgets confortables, pourront explorer des
registres variés et s'adresser à des publics différents. Ils ne composeront pas
une saga dont les personnages se retrouvent d'un chapitre à l'autre, mais
chaque nouvel opus constituera un film à part entière.
Ce premier chapitre est supervisé par le producteur Jason
Blum, des célèbres Blumhouse Productions. "Il s'agit du tout premier
épisode d'une nouvelle génération de films 'Universal Monster'", déclare-t-il.
"Universal en prépare d'autres, mais INVISBLE MAN est le premier. C'est
donc stressant et excitant à la fois".
Le producteur de plusieurs gros succès du studio – la
saga AMERICAN NIGHTMARE, SPLIT, GLASS et GET OUT – explique que les Monsters
ont toujours beaucoup compté à ses yeux. "Notre société est adossée au
studio depuis longtemps", ajoute Blum. "La relation
privilégiée d'Universal avec le cinéma d'horreur remonte aux films de monstre
des années 1930 et 1940. Cet héritage occupe une place majeure au sein du
studio. J'ai eu un rendez-vous avec la PDG Donna Langley et elle souhaitait
donner un nouveau souffle aux Monsters. Étant donné qu'on nous a souvent comparés
à cette époque de l'histoire d'Universal, c'était une association assez
logique".
"Ces films de monstres me sont très chers", poursuit-il. "C'est
pour cette raison que je souhaitais m'engager dans l'aventure. Notre objectif
était de raconter une histoire ancrée dans la réalité d'aujourd'hui. Et c'est
exactement ce qu'a fait Leigh avec INVISIBLE MAN".
Un personnage
mythique et une histoire nouvelle
Leigh Whannell
réinvente le genre horrifique
Le personnage de l'Homme invisible imaginé par H.G. Wells
obsède Leigh Whannell depuis l'époque où il séchait l'école pour voir en secret
les films de monstres Universal à la télévision. S'il apprécie autant le
personnage, c'est que son histoire, contrairement à tant d'autres, n'a pas
donné lieu à d'innombrables versions. "Quand on fait un film sur un
personnage extrêmement populaire, on est sur la corde raide", souligne-t-il.
"Vous n'avez qu'à interroger n'importe quel réalisateur ayant signé un
film de la saga Star Wars pour connaître le degré de pression qu'il a subi en
s'attaquant à un tel monument ! Avec l'Homme invisible, je me suis senti libre.
Bien entendu, les gens connaissent le personnage, mais j'avais le sentiment
qu'il faisait un peu figure d'outsider parmi les méchants du cinéma d'horreur.
C'était exaltant de me demander ce que j'allais pouvoir faire vivre au
personnage et dans quelle mesure je pouvais enrichir sa personnalité".
Si Whannell a entamé sa carrière comme scénariste avec le
court métrage SAW en 2003, puis le long métrage qui en a découlé – à l'origine
d'une saga générant un milliard de dollars de recettes –, il a vraiment débuté
comme acteur et continue d'ailleurs à jouer. En se produisant dans des films
comme MATRIX RELOADED et des thrillers comme la saga INSIDIOUS, Whannell a
vraiment saisi le travail du comédien… et son désir de repousser ses propres
limites.
Étant donné qu'il a écrit plusieurs films du genre, il
est clair que le réalisateur affectionne le suspense et l'horreur. "Je
suis un grand fan de cinéma d'horreur et j'ai beaucoup apprécié de pouvoir
participer à des films du genre", explique-t-il. Pour autant, c'est
après son dernier film qu'il s'est mis à s'interroger sur son intérêt pour le
genre. "Après UPGRADE, je suis devenu accro au cinéma d'action",
reprend-il. "Quand on est sur un plateau et qu'on orchestre une
course-poursuite en voiture ou une scène de bagarre, c'est très addictif. Dès
que j'ai terminé ce film, je me suis demandé quand j'allais pouvoir remettre ça
! À ce moment-là, j'étais certain que mon prochain projet allait être un film
d'action qui vous prend aux tripes".
Un homme averti en vaut deux : c'est alors qu'INVISIBLE
MAN s'est invité dans la vie de Whannell. Quand on lui a téléphoné pour lui
proposer un rendez-vous avec l'équipe du développement de Blumhouse pour évoquer
d'éventuels projets, il ne se doutait pas qu'il aurait l'occasion d'imaginer
une nouvelle aventure à l'un des personnages des Universal Monsters. Et cette
simple discussion avec Blumhouse a abouti à une proposition qui a changé sa
vie.
Un nouveau point de
vue
L'Homme invisible
réinventé par Whannell
Tandis que le personnage de Wells était un scientifique
qui basculait vers la folie, Whannell s'intéressait davantage à ce qui obsédait
cet être maléfique. Au cours de son rendez-vous chez Blumhouse, il a compris
qu'il fallait renverser le point de vue. "J'ai eu cette idée de manière
spontanée, sans vraiment y réfléchir", confie-t-il. "J'ai
suggéré que si on faisait un film sur l'Homme invisible, on devrait adopter le
point de vue de sa victime. Par exemple, une femme qui réussit à échapper à son
mari violent en pleine nuit et qui découvre ensuite qu'il s'est tué, sans y
croire vraiment, surtout lorsque de mystérieux phénomènes commencent à se
produire".
Après ce rendez-vous, cette idée initiale n'a plus quitté
Whannell. "Je n'arrêtais pas d'imaginer des scènes de ce film et de
réfléchir à la manière dont je m'y prendrais pour le tourner",
ajoute-t-il. "Ce n'est pas moi qui ai choisi ce projet : c'est lui qui
m'a choisi. J'ai fini par me calmer, en me disant que ce projet m'accaparait
beaucoup trop et que je si je voulais m'en libérer, il fallait que je tourne ce
film". Il s'interrompt, puis reprend : "Je ne l'aurais pas
fait si je n'avais pas senti qu'il y avait quelque chose d'exceptionnel qui me
tendait les bras".
Le réalisateur a laissé libre cours à son imagination en
échafaudant le récit. "Je savais à quoi je m'attaquais", dit-il.
"Le plus difficile consistait à bâtir une toute nouvelle histoire
autour du personnage et à se demander de quel point de vue on se plaçait. J'ai
ensuite pris l'habitude de noter toutes mes idées sur un carnet. C'était une
occasion enthousiasmante car j'avais le sentiment que c'était un personnage qui
n'avait pas été surexploité".
Tandis qu'il élaborait un récit terrifiant sur
l'obsession, il a envisagé l'histoire du point de vue de Cecilia Kass,
architecte intelligente et douée de San Francisco, devenue captive d'Adrian
Griffin, son petit ami violent et puissant. Lorsqu'elle parvient à fuir cet
inventeur brillant, pionnier en matière d'optique, elle se cache grâce à l'aide
de ses amis et de sa famille. Mais après le suicide de son ex, Cecilia commence
à douter de sa mort et à se demander s'il n'est pas devenu invisible…en mettant
à profit son invention révolutionnaire pour la torturer. Le problème, c'est que
sa théorie est tellement délirante et paranoïaque qu'elle s'interroge sur son
propre état mental, tout en cherchant à se défendre et à protéger ceux qu'elle
aime.
"Je n'ai pas élaboré dix versions différentes de
cette histoire", précise Whannell. "La trajectoire d'une victime
harcelée par l'Homme invisible s'est imposée presque immédiatement. J'ai fini
par accepter l'idée qu'on n'avait pas forcément besoin de passer des semaines à
se creuser la tête dans l'espoir de trouver quelque chose de mieux. Avec le
recul, quand je repense au scénario, je sais que je voulais évoquer ces femmes
victimes de violences qu'on ne prend pas au sérieux – qui tentent de prouver
que quelque chose d'affreux leur est arrivé sans parvenir à en convaincre qui
que ce soit. Mais je ne veux pas trop en dire parce qu'à mes yeux, l'un des
plaisirs du cinéma, c'est d'observer les gens se faire leur propre idée".
Cette femme dit la
vérité
Une histoire très
actuelle
Deux fidèles partenaires de
Whannell ont décidé de l'accompagner dans cette nouvelle aventure : Jason Blum,
créateur et patron de Blumhouse Productions, et Kylie du Fresne, de la société
australienne Goalpost Pictures. Ces deux structures avaient collaboré avec le
cinéaste pour UPGRADE – et Blumhouse avait produit la saga INSIDIOUS écrite par
Whannell. Autant dire que Blum et Kylie du Fresne avaient envie de renouveler
l'expérience.
La productrice, qui produit
des séries et longs métrages dans son pays depuis plus de 25 ans, a été séduite
par l'approche du parcours de la protagoniste. "Leigh a un talent fou
pour écrire des personnages féminins forts", dit-elle. "C'est
ce qu'il a fait dans la saga INSIDIOUS. Il sait créer des femmes mémorables si
bien que je n'ai pas été étonnée du tout que sa relecture du mythe de l'Homme
invisible adopte un point de vue féminin. Quand on parle d'INVISIBLE MAN, les
gens partent du principe que le rôle-titre est le personnage principal, alors
que c'est Cecilia (Elisabeth Moss). C'est ce qui rend l'approche de Leigh aussi
originale et enthousiasmante. Il a renversé le point de vue traditionnel pour
adopter celui d'une femme forte – et il a écrit un rôle magnifique".
Selon la productrice, il
s'agissait ainsi d'une histoire très actuelle, capable d'évoquer les violences
conjugales et la perception des femmes dans les médias. "J'avais le
sentiment que Cecilia appartient totalement à notre époque, y compris du point
de vue des droits des femmes", explique Kylie du Fresne. "Leigh
ponctue le film de ces thématiques et les intègre avec subtilité dans la trame
narrative. Il raconte comment des femmes qu'on a fait souffrir – sous l'emprise
d'un homme pendant un moment – ont le sentiment de perdre pied avec la réalité,
et que la société les considère comme étant 'tout simplement hystériques' et
estime qu'elles ont tout inventé. Ce n'est pas vrai. On le ressent très
fortement à l'heure actuelle et le film l'évoque comme peu de longs métrages
l'ont fait".
Selon la productrice, si
Whannell a su raconter la trajectoire de Cecilia avec une telle force, c'est
parce qu'il a gagné le respect et la confiance de ses comédiens et techniciens.
Grâce à la production, installée à Sydney, Whannell, lui-même originaire de
Melbourne, a pu travailler avec plusieurs de ses compatriotes. "Leigh
entretient des relations fidèles avec ses collaborateurs artistiques, et ça se
voit à l'écran", indique Kylie du Fresne. "Les gens se mettent
en quatre pour lui. C'est un gars de Melbourne qui a accompli une réussite
exemplaire et donné naissance à la saga SAW avec James Wan. Du coup, quand il
revient en Australie pour tourner ses films, les gens ont envie de se mettre en
quatre pour lui : ils sont fiers de son succès. Il a un regard singulier d'une
grande force sur les histoires qu'il raconte. C'est galvanisant de le voir
mettre en images les récits dont il s'empare".
Blum était, lui aussi,
impressionné par les idées novatrices du réalisateur en matière d'angoisse. "Leigh
excelle à terroriser le spectateur", dit-il. "Au fond, il n'y
a pas tant d'angoisses différentes que ça, mais ce qui l'intéressait en
s'attelant à INVISIBLE MAN, c'était de jouer sur toutes les formes de peurs
qu'on peut imaginer et sur la suggestion plutôt que sur les effets de
manche". Selon Elisabeth Moss, le film joue délibérément sur les codes
du cinéma d'horreur. "Quand l'armoire à pharmacie s'ouvre et se
referme, on s'attend à ce quelqu'un soit là", déclare la comédienne. "C'est
la même chose lorsque la porte du réfrigérateur s'ouvre. On a pris un vrai
plaisir à échafauder les effets de suspense. Comme lorsqu'on allume une lumière
dans une pièce sombre et qu'on se rend alors compte que cette forme suspecte
qu'on croit apercevoir dans un coin est … un portemanteau !"
LES PROTAGONISTES
Cecilia Kass
Elisabeth Moss
Cecilia a beau être une jeune femme forte et intelligente
– elle a subi un terrible traumatisme. Le regard qu'elle porte sur elle-même et
sur le monde est marqué par sa relation avec son compagnon. Elle est angoissée,
paranoïaque et repliée sur elle-même. Par conséquent, lorsqu'elle soupçonne
Adrian de l'avoir retrouvée pour ne plus la lâcher, ses proches et ses amis ont
du mal à la croire. Elle a une grande proximité avec sa sœur Emily, son ami
James et sa fille Sydney. Malgré tout, tandis que Cecilia commence à perdre
pied, ces liens sont mis à l'épreuve. Ce qu'on ignore pour l'heure, c'est si sa
conviction qu'Adrian est toujours en vie est fondée… ou le fruit de son
imagination.
Leigh Whannell a fait de Cecilia une femme forte, douée
et débrouillarde. "Je voulais que Cecilia ait toute la vie devant elle,
même si son existence a été soudain bouleversée par une relation toxique",
note le réalisateur. "En s'engageant avec la mauvaise personne, sa
vie a été comme interrompue. Cecilia s'est retrouvée sous l'emprise d'un homme,
étouffée pour ainsi dire, et privée de libre-arbitre. Son compagnon l'a
asphyxiée. Au moment où elle s'enfuit, je voulais qu'elle retrouve ses
forces".
Pour le cinéaste, il était fondamental d'imaginer une
protagoniste qui s'effondre totalement. "J'aime bien ce vieux dicton
qui dit que lorsqu'on écrit un film, on doit attacher son protagoniste à un
arbre et lui jeter des pierres", rapporte Whannell. "Plus
votre personnage principal affronte d'obstacles, plus les enjeux dramatiques
sont importants. Je voulais que les embûches se trouvant sur la trajectoire de
Cecilia et les forces se liguant contre elle soient insurmontables, à tel point
que le spectateur se demande comment elle va bien pouvoir s'en sortir".
Quand Whannell a achevé le scénario, il savait qu'il lui
fallait une actrice exceptionnelle pour être à la hauteur du rôle. "Lorsqu'on
a affaire à un personnage qui perd les pédales, c'est toujours très délicat
pour un comédien", reprend-il. "C'est facile d'être dans
l'excès et de surjouer. Il me fallait quelqu'un qui puisse camper un personnage
dont la raison vacille… mais de manière réaliste".
Son choix s'est porté sur Elisabeth Moss, deux fois
lauréate du Golden Globe, dont le jeu authentique et sans concession est
palpable dans MAD MEN et THE HANDMAID'S TALE – LA SERVANTE ÉCARLATE. "Dans
THE HANDMAID'S TALE, on ne voit qu'elle et elle réussit à vous faire croire au
monde parallèle où évolue son personnage", souligne Whannell. "Si
on ne croyait pas à ce personnage majeur, la série ne tiendrait pas du tout la
route. Je savais qu'elle pouvait jouer cette forme de descente aux enfers sans
excès. Elisabeth est la garante de l'authenticité. Si elle avait le sentiment
qu'une scène ne fonctionnait pas ou sonnait faux, elle avait du mal à la jouer.
On a formé une bonne équipe".
Ensemble, la comédienne et le réalisateur partageaient la
même vision du film et du personnage. "Lizzie m'encourageait à revoir
les dialogues et le scénario", poursuit Whannell. "Et je la
poussais à adopter un jeu plus physique. Elle a fait pas mal de choses très
difficiles". Comme, par exemple, tourner en plein hiver, à 3h du
matin, sous des trombes d'eau générées par des machines à pluie. La comédienne
était trempée tandis que le reste de l'équipe était au sec, à l'abri sous des
tentes, et portait des gilets bien épais. "On s'est tous les deux
poussés dans nos retranchements respectifs", ajoute le réalisateur. "On
a fait un vrai travail d'équipe en la matière. Quand on dit 'Action !', Lizzie
se donne à 100%".
Pour Elisabeth Moss, il s'agit du rôle le plus éprouvant
de sa carrière. "Il m'a fallu dix minutes pour comprendre le point de
vue de Leigh, et à quel point ce projet était moderne et ancré dans notre
époque", affirme l'actrice. "J'adore la manière dont il a
renversé le mythe de l'Homme invisible. C'est le genre de scénario dont on se
dit, en le lisant, 'j'aurais adoré avoir cette idée…' C'est une formidable
parabole qui, dans le même temps, est d'une incroyable actualité… et qui me
parle en tant que femme vivant dans cette société".
En outre, Elisabeth Moss est souvent seule à l'écran
pendant des scène entières, jouant face à quelqu'un qu'elle ne voit pas.
"Pendant toute une partie du film, j'étais seule", dit-elle. "Je
me tournais vers Leigh et lui disais 'à ton avis, il est où ?' D'une scène à
l'autre, mon personnage savait – ou pas – où était l'Homme invisible. Parfois,
je ne savais pas du tout où était Adrian. À d'autres moments, je sentais une
présence ou j'entendais un bruit ou quelque chose et je me retournais".
"À un moment donné, Cecilia est convaincue qu'Adrian
est constamment dans la même pièce qu'elle", poursuit Elisabeth
Moss. "Comme si elle avait acquis un sixième sens pour le repérer… même
s'il n'était pas là. On s'imaginait qu'il était dans un coin de la pièce ou
qu'il surgissait d'une chambre. Ça fait trente ans que je fais ça dans mon
métier, mais c'est la première fois que cette situation fait partie intégrante
du scénario. Pourtant, je suis parfaitement habituée à voir quelque chose que
personne d'autre ne peut voir. C'est ce que je fais tous les jours dans mon
travail d'actrice".
Grâce au tournage d'INVISIBLE MAN, Elisabeth Moss a pu
réfléchir aux relations qui peuvent s'avérer violentes ou toxiques. Elle
explique : "Pour Leigh et moi, c'était important d'imaginer des
rapports qui ne soient pas seulement violents d'un point de vue physique, mais
émotionnel et psychologique. Ces rapports peuvent être tout aussi dévastateurs.
J'espère que ce film permettra à tous ceux qui en ont souffert de se sentir mieux
représentés et soutenus. En tant que femmes, nous avons le sentiment de nous
émanciper et d'incarner une génération qui n'hésite plus à prendre la parole,
mais je crois qu'on juge parfois sévèrement celles qui ne mettent pas fin à des
relations toxiques".
La comédienne conclut : "Je trouve qu'il est
important de se montrer tolérant vis-à-vis des femmes qui sont plus faibles que
d'autres. On peut être à la fois fort et terrorisé. Et on peut être à la fois
fort et faible. On peut être féministe et amputé de son libre-arbitre. C'est
important de s'en souvenir et de l'accepter".
Adrian Griffin
Oliver
Jackson-Cohen
Scientifique aussi riche que brillant, Adrian Griffin,
PDG de Cobalt, est charmant, séduisant et violent. Il est obsédé par Cecilia et
ne songe qu'à la dominer… et rien ne l'arrêtera pour la récupérer.
Au début, il contrôlait les moments qu'il passait avec
Cecilia. Puis il a voulu savoir à qui elle parlait et à quel moment elle
quittait la maison. Par la suite, il a cherché à contrôler tout ce qu'elle
disait… et tout ce qu'elle pensait. Et si ses réflexions – ou, du moins, ce
qu'il supposait être ses réflexions – ne lui plaisaient pas, il la corrigeait.
La réussite exemplaire d'Adrian lui a toujours valu
d'être encouragé dans son comportement. "Dans notre monde moderne, on
est le plus souvent salué quand on connaît un tel succès", relate
Whannell, "et personne ne s'interroge pour savoir comment on en est
arrivé là. Avec ce personnage, je voulais évoquer le narcissisme et le
comportement propre au sociopathe qui aboutissent à la réussite. Ça le rend fou
de savoir que Cecilia pourrait le quitter… que quelqu'un ose le défier de cette
manière. Il a un besoin compulsif et pathologique de la dominer et c'est,
fondamentalement, ce qui l'anime".
Oliver Jackson-Cohen explique qu'il a passé pas mal de
temps en répétitions pour mettre au point ces rapports de domination. "Il
n'y avait que Lizzie, Leigh et moi", dit-il. "On voulait
montrer comment ce type de relation s'installe, et comment certaines personnes
se remettent en couple avec un conjoint violent tout en étant conscientes des
risques. Car ces gens exercent une forme de magnétisme : Adrian réussit à
retenir Cecilia, puis à faire en sorte qu'elle se trouve là où il veut. Adrian
obtient exactement ce qu'il désire – autrement dit, voir Cecilia souffrir et
basculer vers la folie".
DÉCORS ET LIEUX DE TOURNAGE
Un film d’horreur
moderne : la terreur prend un nouveau visage
“Le style
d'INVISIBLE MAN est à la fois contemporain et épuré et, à cet égard, il se distingue
vraiment des films de monstres traditionnels. On ne retrouve pas cette ambiance
malsaine avec des toiles d’araignée partout”, déclare Jason Blum. Les
décors créés par Alex Holmes détournent le genre et déjouent les attentes du
spectateur. “On ne voulait pas tomber
dans l’esthétique prévisible du cinéma d’horreur”, explique Alex
Holmes. “On a abordé le film comme
un thriller réaliste. On ne voulait pas de papiers peints, de couleurs voyantes
ou d’espaces confinés et oppressants. Leigh souhaitait aussi qu’on amène de la
lumière. On voulait faire un film d’horreur baigné de lumière naturelle. Il n'y
a pas de créature tapie dans l’ombre, mais quelqu’un qui est présent sans
l'être vraiment. Comme le représenter à l'écran ? En éclairant l’espace”.
Le chef décorateur tenait à ce qu'INVISIBLE MAN révèle
des univers contrastés, et ne se résume pas qu'à un climat ambiant monotone. “Cecilia s’échappe d’un milieu opulent pour
trouver refuge dans un environnement de classe moyenne traditionnelle”,
rappelle Alex Holmes. “On passe d’un
laboratoire high-tech à une cuisine terne, d’une suite luxueuse à une chambre
exiguë de trois mètres sur trois. On passe beaucoup de temps dans un univers
domestique confiné, mais Leigh tenait justement à ce qu’on quitte aussi la maison
pour se rendre à l’extérieur : dans les rues de San Francisco, un
commissariat de police, un restaurant… Il fallait qu’on arrive à représenter
les changements d'échelle et qu'on aperçoive le restaurant en entier et
toutes les personnes à l’intérieur, ou encore le commissariat de police dans
son intégralité et pas seulement une partie de celui-ci”.
INVISIBLE MAN se déroule à San Francisco, mais le
thriller a été tourné à Sydney. “Sur le
plan du tournage, un de nos plus grands défis a consisté à repérer des lieux à
Sidney susceptibles d'évoquer San Francisco”, explique Kylie du Fresne, “en particulier pour la maison d’Adrian. Il
fallait qu’elle ait une architecture singulière et qu’elle ait l’air de se
situer aux alentours de la Silicon Valley”.
L’antre d’Adrian
Le département des décors savait que, pour des questions
de budget, la propriété d'Adrian devait être un décor réel. Cette maison devait
être éloquente sur la personnalité obsessionnelle, autoritaire et implacable du
scientifique. Ils ont fait appel au régisseur d’extérieurs Edward Donovan pour
les aider à trouver ce lieu : “On a
demandé à Ed de chercher des maisons avec une architecture brutaliste, avec des
formes marquées, monolithiques et dures… une sorte de prison de luxe”,
raconte Alex Holmes. “On a passé
plusieurs mois à chercher cette maison”, ajoute Kylie du Fresne. “Leigh voulait qu’elle ressemble à Adrian,
qu’elle ait cette même froideur. Ce
n’est pas une maison dans laquelle on rentre en se disant ‘Quel endroit
charmant !’, mais plutôt l’inverse…”. Alex Holmes poursuit : “On voulait une palette neutre, faite de
noirs, de gris et de blancs. Quand on quitte cette maison pour aller chez
James, lieu plus chaleureux aux couleurs plus chaudes, on ressent un certain
soulagement”.
Finalement, la propriété d’Adrian a été tournée dans
quatre lieux différents. “L’intérieur de
la maison a été filmé à Pebble Cove, à environ deux heures et demi de route de
la côte sud de Sydney. C’était la première fois qu’une équipe de tournage
filmait dans cet espace verdoyant sur le littoral. La maison est en béton avec
un superbe parquet en bois construit à partir de poutres qui ont échappé à un
incendie au château de Windsor”, raconte Kylie du Fresne. “Tout était sur mesure. En tant que
producteur, ce n’était pas facile de tourner dans une maison aussi luxueuse.
J’ai passé le plus clair de mon temps à m’assurer que personne n’allait érafler
un mur avec une perche”.
Dovecote, une autre demeure d’exception, a été choisie
pour l’extérieur de la maison d’Adrian. Cette dernière est censée se situer en
dehors de la ville, en bordure d’océan, dans un espace ouvert mais hautement
sécurisé. “Par chance, nous l’avons
trouvée juste à côté de Pebble Cove. Au moment où on a commencé à filmer, la
maison a remporté le prix australien de la Maison de l’année”, explique
Kylie du Fresne.
Leigh Whannell avait aussi en tête une topographie
particulière pour la maison. Il fallait qu’elle soit adossée à une grande
forêt, avec un mur imposant qui retienne Cecilia prisonnière. Il était donc nécessaire
que l’équipe construise un vaste mur de béton avec un portail devant la maison.
“En Australie, c’est rare d’avoir des
murs autour des grandes maisons dans la campagne”, remarque Alex Holmes. “Mais on avait besoin de cet accès à l’antre
ultra sécurisée d’Adrian, si bien qu'on a construit un grand portail
électronique en bois sombre et de faux murs en béton”.
En postproduction, les murs ont été agrandis pour donner
l'illusion qu'ils font le tour de la propriété. “Cela marquait l’entrée dans un autre monde. La vue dégagée vers l’océan
était aussi intéressante. Cecilia touche du doigt la liberté, mais elle est
prise au piège. Jusqu’au début du film, elle n’a jamais envisagé de s’échapper
car le pouvoir qu’Adrian exerce sur elle est trop prégnant”, déclare Alex
Holmes.
Le troisième lieu a accueilli le laboratoire d’Adrian. “C’était un garage incroyable qui abritait
une série de voitures de collection”, note Kylie du Fresne. “Notre département artistique a réussi à
aménager ce garage en un laboratoire high-tech”.
Enfin, le quatrième lieu était à Coogee, une station
balnéaire des environs de Sydney. “On a
construit le dressing et la salle de bain d’Adrian dans le salon de cette
maison, pour créer un une chambre avec salle de bain attenante”, raconte Kylie
du Fresne. “Ces quatre lieux de tournage
fonctionnent très bien ensemble : on dirait une seule et même maison ! C’est la
magie du cinéma”.
Le labo de l'Homme
invisible
Les régisseurs ont cherché longtemps avant de dénicher le
lieu dans lequel filmer le laboratoire d’Adrian. “Tout à coup, on a trouvé le garage d’un riche propriétaire qui possède
huit voitures”, raconte Alex Holmes. “Il
y avait des bandes de lumière LED hallucinantes au plafond et sur les murs.
Cela faisait penser à un univers de science-fiction tout en étant réaliste. J’y
ai ensuite ajouté des pièces sécurisées et des espaces climatisés pour les
expériences scientifiques. Pour apporter de l’intensité et donner une
impression ‘dernier cri’, j’ai peint les murs en noir brillant. Je me suis
inspiré de laboratoires d’université que j’ai visités, et j’en ai fait une
version sur mesure pour un homme riche”.
L'accessoire le plus difficile à concevoir pour le
décorateur a été le cintre sur lequel repose le costume. “Un cintre pour un costume qu’on ne voit pas”, résume Alex Holmes. “Il devait avoir l’air d’un objet de
science-fiction tout en étant très fonctionnel… pas comme un accessoire de
super-héros. Après en avoir parlé avec un des experts en physique, on s’est dit
que ce serait intéressant que, lorsque Cécilia pénètre dans la pièce où se
trouve le costume, elle aperçoive un iPad au mur dans lequel elle se voit
entrer dans la pièce… du point de vue du costume ! Elle se voit en temps
réel, comme si elle était filmée, sauf qu’elle ne voit de caméra nulle
part". La scène a été retravaillée en conséquence. “Leigh a réécrit et reconstruit la scène pour
l’adapter à cette nouvelle idée”, précise Alex Holmes. “J’espère que cela constituera un moment
important du film”.
La maison de James
et Sydney
Pour toute l’équipe, il était clair que la maison de
James et Sydney devait être aux antipodes de celle d’Adrian. Assez rapidement,
ils ont décidé de construire le décor en studio. Étant donné le nombre de
cascades que Leigh Whannell prévoyait dans cette maison, il était préférable
qu’elle se situe dans l’espace contrôlé du studio, pour pouvoir lever les murs,
faire sauter les plafonds et voler les objets… et les acteurs !
“Sur le plan
esthétique, je voulais me rapprocher d’un intérieur de la classe moyenne américaine,
notamment du point de vue des couleurs et des tonalités”, explique Alex
Holmes. “Je me suis inspiré de GONE GIRL,
PRISONERS, LES NOCES REBELLES et LA FILLE DU TRAIN qui présentent de tels
décors, avec des palettes de couleur volontairement neutres, réalistes et
passe-partout”.
Il fallait un espace qui semble sûr et familier : une
maison américaine typique. “D’une
certaine façon, c’est l’aspect normal du lieu qui donne la sensation
dérangeante que Cecilia est en train de devenir folle”, remarque Alex
Holmes. “Un homme invisible dans ce salon
terne ? Qui croirait une chose pareille ? Il ne s'agit pas d’une
maison hantée et sinistre perchée en haut d’une colline, mais d’une maison
beige avec des petites chambres et un grenier exigu. On a volontairement évité
d’avoir un grenier haut de plafond dans lequel on peut se tenir debout… C’est
le genre de chose qu’on a déjà vu dans des milliers de films d’horreur”.
Leigh Whannell a choisi un grenier qu’on voit dans de
nombreuses maisons : un espace très étroit dans lequel il n’est pas facile
de circuler. L’équipe a construit un grenier avec un toit très bas mais
amovible : “Au lieu de créer des
espaces caverneux dans lesquels le monstre pourrait se tapir, on a réduit les
espaces autour de Cecilia pour faire monter la tension. On a construit le
grenier de toutes pièces car il aurait été impossible de filmer dans un vrai
grenier. Les chambres sont quant à elles de taille normale et bien éclairées.
L’impression de claustrophobie vient du fait que l’Homme invisible pourrait
être tout près d’elle à n’importe quel moment”.
Une palette de
couleurs bien maîtrisée
Grâce à ces murs de couleur neutre, le chef décorateur a
permis au directeur de la photo de créer l’éclairage adéquat et de composer des
ombres qui ne soient pas trop obscures. “On
ne voulait pas aller vers le clair-obscur”, précise Alex Holmes. “Pour cela, il nous aurait fallu des murs
très sombres. On a plutôt choisi des murs aux couleurs neutres, ce qui est
inhabituel. En réalité, le décor n’a pas besoin d’être sombre pour être
effrayant. Il suffit de regarder L’EXORCISTE. C’est une maison tout ce qu’il y
a de plus normal, avec un éclairage simple… c’est le gamin qui est
flippant !”
L’équipe a également limité l’usage de la couleur sur le
plateau, à l’exception de l’antre noire de jais d’Adrian : “Les couleurs vives ont tendance à saturer
l’image”, explique Alex Holmes. “Je
savais que l’équipe effets visuels allait créer un léger scintillement pour
suggérer la présence de l’Homme invisible, si bien qu'on ne voulait pas que
l’arrière-plan soit encombré de motifs, de contrastes et de couleurs prononcées”.
L’hôpital
psychiatrique
L’asile psychiatrique dans lequel Cecilia est confinée
est à la fois brut et réaliste, et rappelle un hôpital public qui a subi
l’usure du temps. “On a même ajouté des
vieux bouts de scotch au mur, pour évoquer les affiches qui ont dû y être
accrochées”, raconte Alex Holmes. “On
a trouvé une ancienne usine de cosmétique et on l’a transformée en asile. Il y
avait un éclairage au néon et une palette de bleus et gris très
institutionnelle. Ensuite on a ajouté pas mal de détails pour aménager ce lieu
en un véritable institut psychiatrique hautement sécurisé”.
Le décor, composé de verrous, de meubles équipés de
dispositifs anti-suicide et de la cabine de douche où Cecilia enferme Adrian,
est signé Katie Sharrock (MAD MAX : FURY ROAD). “Katie a pris en compte chaque détail avec une attention remarquable”,
souligne Alex Holmes. “En extérieurs, on
a dû ajouter des lumières fluorescentes partout pour éclairer la scène
centrale, dans laquelle Cecilia poursuit Adrian, toujours invisible, sous une
pluie battante à travers un parking. La pluie ajoute une dimension
spectaculaire à la scène mais surtout, en tombant, elle définit les contours de
l’homme invisible. C’est une des nombreuses idées foncièrement
cinématographiques que Leigh a intégrées au scénario”.
Les défis du
tournage
Comme le tournage se déroulait à Sydney, l’équipe a eu un
nouveau défi à relever en matière de voitures : “Il n’y a pas beaucoup de voitures avec le volant à gauche en Australie”,
explique Alex Holmes. “On a dû être très
inventifs”. De faux volants ont parfois été utilisés. Les voitures avec le
volant à droite étaient utilisées pour filmer l’arrière du véhicule, tandis que
celles avec le volant à gauche étaient réservées pour filmer l’avant de la
voiture.
“On devait faire du
recyclage et métamorphoser les voitures qu’on avait déjà utilisées avec un film
en vinyle”, avoue Alex Holmes. “Sans
compter qu’on avait des cascades à exécuter avec ces voitures. Enfin, certaines
scènes nécessitaient des décors de grande ampleur : le commissariat de San
Francisco, les restaurants, l’hôpital psychiatrique, les rues de la ville… On
avait besoin de beaucoup de main d’œuvre pour mettre en place ces vastes décors”.
Effets spéciaux et effets
visuels
De l’usage des
effets spéciaux : le réalisme avant tout
Le superviseur effets visuels Jonathan Dearing, à la tête
de Cutting Edge, a rejoint l’équipe de INVISIBLE MAN, après avoir collaboré
avec Leigh Whannell sur son dernier thriller. “Quand on a travaillé ensemble sur UPGRADE, je me suis rendu compte
qu’on avait la même approche des effets visuels”, déclare Jonathan Dearing.
“On considère tous les deux que les
effets visuels doivent soutenir des choix de mise en scène tournés avant tout
vers le réalisme”.
Pour ce film, si l’option 100% réaliste n’était pas
envisageable, ils cherchaient ensemble une stratégie permettant d’ancrer les
effets visuels dans la réalité. “On
partageait l’ambition de produire des effets visuels aussi crédibles que
possible. On ne voulait pas être tentés de créer un univers complètement
étrange, qui brouille la frontière entre le fantastique et la réalité”.
Créer un costume
invisible : les technologies de l’invisibilité
Les équipes de Odd Studios ont fait un travail
remarquable sur le costume, qui constituait un défi de taille. “On a mené beaucoup de recherches sur les
techniques d’invisibilité qui existent aujourd’hui”, raconte Alex Holmes. “Elles existent à petite échelle : par
exemple, on peut détourner la lumière autour d’un objet, ce qui le fait
disparaître puisqu’il ne renvoie plus la lumière vers nous. On trouvait que
cette idée n’était pas assez cinématographique. On a plutôt choisi une idée en
rapport avec l'optique : un costume constitué de centaines de mini-caméras
qui filment ce qu’il y a autour d’elles, tout en projetant un hologramme de ce
que filme la caméra opposée. Une caméra située à l’arrière du costume filme ce
que se passe derrière, mais l’image qui est ainsi filmée est projetée sous
forme d’hologramme sur le devant du costume, exactement à l’opposé. Du coup,
tout ce qui se situe derrière la personne portant le costume est projeté devant
lui, ce qui le fait disparaître”.
À partir de cette idée, la post-production a pu créer des
effets remarquables avec des hologrammes et des objectifs de caméra qui
s’allument, pour créer des centaines de petits yeux sur le costume. “On a consulté des experts de CSIRO [the
Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation in Australia] et
des universités”, souligne Alex Holmes. “Les scientifiques nous ont expliqué que ce qu’on proposait était
faisable en théorie, mais qu’il faudrait encore une vingtaine d’années de
développement pour y arriver. C’était parfait : on voulait justement que cette
technologie ait l’air inaccessible aujourd’hui mais néanmoins plausible”.
C’est déjà difficile de créer quoi que ce soit grâce aux
effets visuels, si bien qu'on peut imaginer le défi que représente la création
d'un personnage qui n’est pas à l’écran ! L’enjeu était d’autant plus
important pour Jonathan Dearing et sa talentueuse équipe. Pour faire exister
l’Homme invisible, ils ont créé une version numérique d’une véritable
combinaison de plongée. Il fallait ensuite trouver le moyen de montrer aux
spectateurs la technologie employée pour le costume. “Il s'agissait de montrer les centaines d’objectifs qui permettent de
faire disparaître la surface du costume”, explique Jonathan Dearing.
Le costume d’Adrian devait imiter les mouvements du
cascadeur Luke Davis (PACIFIC RIM UPRISING) tout en conservant une certaine
intégrité au niveau de sa surface. Il fallait donc que des centaines de pièces
de forme hexagonale fonctionnent et se déplacent ensemble, au fil des
mouvements du costume. “Ce qui est génial
chez Leigh, c’est qu’il est complètement convaincu par ce qui lui plaît”,
remarque Jonathan Dearing. “Cela provoque
une réaction émotionnelle puissante chez lui et il s’appuie sur ce ressenti
pour aller de l’avant”.
Au cours de de la première réunion avec Cutting Edge, les
discussions se sont concentrées sur le costume : “On s’est mis autour de la table pour échanger des idées et des
suggestions de modèles”, se souvient Jonathan Dearing. “Quand on est parvenu à l’idée d’un costume
simple et foncé, façon combinaison de plongée avec des formes hexagonales, cela
a plu à Leigh, à Alice Lanagan, la directrice artistique, à la costumière et à
moi-même. Odd Studios a fait quelques essais à partir des explications de Leigh
et cela nous a permis de choisir un modèle. Le processus a été rapide et
efficace, et on n’a jamais dévié de notre objectif du début à la fin”.
Contraintes
d’espace et effets visuels
Le défi principal en matière d'effets visuels consistait
à faire disparaitre le travail de Luke Davis en costume vert derrière la
performance de l’Homme invisible. C’était particulièrement difficile quand Luke
Davis se trouvait devant un autre acteur ou un autre élément dont les équipes
ne pouvaient pas contrôler le mouvement.
La méthode la plus simple pour ce travail est d’utiliser
un dispositif de motion-control. Cela permet de filmer le décor nu pendant une
même prise et de faciliter le "nettoyage" qui intervient ensuite.
Malheureusement, Cutting Edge n’a pas toujours pu recourir à cette technique,
notamment en raison de contraintes spatiales. Ainsi, dans la scène où l’Homme
invisible poursuit Cecilia dans le grenier, le dispositif de motion-control ne
passait pas dans cet espace confiné.
Au cours d'une scène décisive, Cecilia jette un pot de peinture
sur une échelle qui semble vide, depuis une ouverture dans le plafond du
grenier. On découvre alors la silhouette de l’Homme invisible à seulement
quelques mètres d’elle. Au départ, Leigh Whannell voulait que cette scène
démarre avec l’ouverture qui forme un point lumineux dans la pénombre, puis
dans un mouvement régulier, la caméra se serait placée du point de vue de
Cecilia au moment où elle renverse la peinture sur l'Homme invisible.
“Leigh voulait
tourner la scène en plan-séquence”, explique Jonathan Dearing. “Mais sans le motion-control, on n'aurait pas
pu garantir le résultat. On n’était pas sûr de bien voir l’arrière-plan
initial, ce qui aurait pu faire rater la scène”.
Après plusieurs essais au Steadicam, qui ne fonctionnait
pas non plus dans l’espace confiné du grenier, Leigh Whannell a accepté
d’utiliser une caméra fixe. “Cela nous a
permis de nous concentrer sur l’effet de la peinture projetée sur le costume”,
estime Jonathan Dearing. “On avait
confectionné un costume sur mesure pour cette scène où on aperçoit sa texture
unique lorsqu’il est recouvert de peinture. Le tournage s’est passé sans
encombre et l’équipe des effets visuels a terminé le travail sur ordinateur”.
Cecilia traquée
dans l'hôpital psychiatrique
La scène de bagarre dans le couloir de l’hôpital
psychiatrique, où l’Homme invisible tente d’échapper aux gardes et à Cecilia,
montre la prouesse technique du film et sa capacité à assembler plusieurs
scènes d’action avec fluidité.
Les effets visuels peuvent faire disparaître les câbles,
les matelas pour les cascades, les fenêtres cassées… Toutes ces scènes étaient
répétées avec attention pour que la caméra soit dans la position optimale au
moment de filmer. Le découpage des scènes d’action permettait de ne pas
affecter la durée de la séquence dans son intégralité. Le résultat final est
une séquence rythmée avec des mouvements de caméra amples qui semblent annoncer
l’action qui va suivre.
Une fois que Cecilia et l'Homme invisible étaient sortis
de l’hôpital avec perte et fracas, l’équipe des effets visuels et Cutting Edge
avaient encore du pain sur la planche : “On a remplacé le sol par des éléments infographiques et on a bien sûr
ajouté l’Homme invisible grâce aux effets visuels”, détaille Jonathan
Dearing. “On a aussi remplacé l’arme que
l’Homme invisible utilise dans cette scène par une version numérique. Enfin, on
a fait la liaison avec un passage en Steadicam, lorsqu’on suit Cecilia dans une
cage d’escalier, avant d’enchainer avec la scène où elle sort du bâtiment”.
L’influence de la
technologie sur le scénario
Les producteurs ont apprécié l’ouverture d’esprit de
Whannell qui a accueilli nouvelles idées et technologies et cherché comment les
intégrer au film : "Par
exemple, on a utilisé une nouvelle caméra à 360 degrés que j’étais en train de
tester", déclare Dearing. "J’avais
décidé de moderniser mon matériel et je voulais me familiariser avec ma caméra,
car je me sers de ce genre d’équipement sur les tournages pour obtenir
rapidement des images HDR et même des plans panoramiques des décors".
Tout en visionnant des plans précédemment tournés avec le
réalisateur, le superviseur effets visuels a montré à Whannell comment il
pouvait tourner autour de l’image sur sa tablette pendant le repérage des lieux
de tournage. "J’ai montré à Leigh à
quel point c’était génial de pouvoir visionner de manière interactive tout ce
qu’on voulait", explique Dearing. "Il
a adoré ces plans et ce dispositif high-tech et on a cherché à s'en servir
comme d'un point de vue. Nous avons continué à parler de la technologie, et en
très peu de temps, Leigh l'avait intégrée au scénario. Dans la scène du
laboratoire où Cecilia découvre le costume d’Adrian, on l’a filmée avec ma
caméra à 360° et ma tablette en direct : tous ses mouvements ont été
tournés en temps réel et n'ont pas été retouchés en postproduction. C’est un
autre exemple du bonheur qu'on a de tourner avec Leigh".
La "synergie
FX"
Un assemblage
complexe d’effets spéciaux et visuels
Cutting Edge a fait appel au superviseur effets spéciaux
cité à l'Oscar Dan Oliver et son équipe pour les séquences les plus
importantes. C'était essentiel pour respecter la vision du réalisateur. Leigh
Whannell tenait à collaborer avec Dan Oliver.
"Dan est fantastique et aguerri et il a une approche très pragmatique de
la réalisation. Notre équipe est toujours ravie d’aider Dan, quand il cherche à
réaliser des effets spéciaux de façon pratique, s’il pense que c’est
possible", déclare Dearing. Oliver lui retourne le compliment : "Jonathan a une approche très
pragmatique des effets et était d’accord pour en obtenir le maximum au moment
du tournage", explique Oliver. "Il
avait énormément à faire mais gardait la tête froide pour régler tous les
problèmes qui se présentaient". Oliver a fait bénéficier le tournage
de décennies de savoir-faire.
"L’expérience accumulée donne suffisamment confiance en soi pour savoir
que, si une difficulté se présente, il y a une forte chance qu’on sache quoi
faire", ajoute ce dernier.
Grâce à leur expérience, Dearing et son équipe sont
conscients qu’il est inutile de s'orienter vers l'infographie si l'effet
recherché peut être obtenu au moment du tournage et ce, pour plusieurs raisons. "Personne ne conteste le résultat si
ça fonctionne, toutefois il y a en général des éléments résiduels inattendus
qui ajoutent de la valeur au plan", reprend Dearing. "C’est toujours préférable pour les
acteurs de jouer face à un partenaire ou à un élément concret plutôt que sur un
fond vert ou bleu".
L’équipe des effets visuels est donc intervenue dès qu’un
effet pratique en avait besoin. En témoigne la séquence où Adrian fracasse d’un
coup de poing la vitre de la voiture d’Emily et tente d'agresser Cecilia : "Si la vitre d’une voiture côté
passager doit exploser, les effets spéciaux peuvent apporter une solution",
explique Dearing. "Mais si le verre
explose réellement face à la caméra, on capte instantanément un élément qui a
été créé dans l’environnement lumineux adéquat et qui réagit selon les lois de
la physique. L’explosion doit peut-être être filmée sur un fond bleu, et si on
doit tirer des pièces de silicone avec un canon à air pour accentuer l’effet,
la postproduction se fait un plaisir de prendre ces éléments pratiques et de
les raccorder harmonieusement plutôt que de réaliser la totalité de la séquence
en images de synthèse. On appelle ça la synergie FX".
Du bacon qui brûle
et une pluie battante
L’une des scènes préférées du superviseur effets spéciaux Dan Oliver est celle où Cecilia commence à soupçonner qu’Adrian est toujours en vie. Elle est en train de préparer le petit-déjeuner de Sydney, s’éloigne un moment et la gazinière est soudain en position maximale. "Le bacon commence à brûler et à fumer, puis la poêle prend feu", détaille Oliver. "C’était complexe. Quand Leigh nous a expliqué comment tout devait se passer à des moments très précis, je n’étais pas certain de savoir comment réaliser ces effets sans raccords de montage. Mais on a réussi à les obtenir exactement comme il le souhaitait et on a tout filmé avec nos acteurs à proximité mais sans les exposer au feu ou à la fumée".
Autre séquence cruciale largement mise en valeur par les
effets spéciaux : la poursuite sous une pluie diluvienne durant laquelle
Cecilia s’échappe de l’hôpital psychiatrique.
"On a travaillé avec Leigh et le directeur de la photographie pour trouver
le moyen le plus efficace de la filmer, afin de réduire au maximum les
mouvements de la machine à pluie", confie Oliver. "On a utilisé les plus grands dispositifs de fausse pluie à notre
disposition pour créer un véritable déluge. On a ajouté quelques impacts de
balles et le résultat est franchement épatant".
LUMIÈRE ET PHOTO
Les bords du cadre
Les cadrages
d'INVISIBLE MAN
Le directeur de la photographie Stefan Duscio a rencontré Whannell lors de la prépa d’un film australien sur lequel ils travaillaient tous deux et a depuis collaboré plusieurs fois avec lui. "Leigh et moi nous sommes rencontrés sur THE MULE, film qu’il a coécrit et dans lequel il jouait aux côtés d'Angus Sampson [partenaire de Whannell dans INSIDIOUS]", raconte Duscio. "Et comme par hasard, Leigh et moi avons fait les mêmes études à Melbourne, à quelques années d’intervalle. Il a parlé d'UPGRADE après ce premier tournage et on est resté en contact pendant qu’il développait le film".
Le chef-opérateur, qui s'est illustré par ses clips pour
Beyoncé ("Ghost") ou des films australiens primés (BACKTRACK, JUNGLE),
déclare que Whannell et lui ont aimé forger un langage visuel singulier pour
UPGRADE et qu’ils l’ont poussé encore plus loin dans INVISIBLE MAN. "En gros, le style des cadrages sur
UPGRADE était assez libre au départ et devenait progressivement de plus en plus
formel et rigide à mesure que l’intelligence artificielle prend le contrôle du
corps du personnage", déclare Duscio. "[Sur UPGRADE], on a utilisé beaucoup de capture de mouvement via
caméra pour l’acteur principal au cours des scènes d’action. Leigh était
intéressé par l’idée qu’on puisse améliorer encore ce dispositif pour INVISIBLE
MAN. Il a écrit un scénario absolument génial et m’a poussé, ainsi que le reste
de l’équipe, à trouver des moyens innovants de le filmer".
Inspirations
cinématographiques
Il est impossible de penser à un film où l’héroïne semble perdre prise avec la réalité sans faire référence aux classiques d'Hitchcock comme PAS DE PRINTEMPS POUR MARNIE ou LES OISEAUX. Mais Duscio et Whannell ont puisé dans d’autres sources d’inspiration moins évidentes. "On a passé des jours, au début de la prépa, à regarder des films dont nous aimions le suspense et le ton", déclare Duscio. "Par exemple, PRISONERS et SICARIO de Denis Villeuneuve, ainsi que A GHOST STORY, PERSONAL SHOPPER et L’EXORCISTE. Ils n'ont pas tous un rapport évident au film de Leigh mais ils ont tous été une source d’inspiration, quand nous tentions de déterminer la tonalité d'INVISIBLE MAN. J’ai toujours été fan de Roger Deakins [chef-opérateur qui a notamment éclairé SICARIO et PRISONERS, NdT] et j’admire la force et la puissance de narration de ses images", poursuit-il.
Par ailleurs, le film a bénéficié du talent d’Elisabeth
Moss, dont le visage peut exprimer un millier d'émotions sans prononcer un seul
mot. "Elisabeth est une vraie pro
qui a su nous époustoufler, parfois dès la première prise", dit-il
encore. "On devait être prêts à
filmer ces interprétations extraordinaires tout en
nuances. Elle possède un talent unique, elle est comme un caméléon, et
l’éclairer et la cadrer ont été d’une richesse et d’une stimulation
incroyables".
Quand le chef
décorateur Alex Holmes a visionné un montage préparatoire que Whannell a montré
aux équipes, il en est resté bouche bée. "C’est
là que j’ai pris conscience du thriller élégant que Leigh et Stef Duscio
étaient en train de faire", déclare Holmes. "C’était évident dans la mise en scène : des mouvements de
caméras sinistres et nets guidés par le motion-control. C’était très précis et
ça correspondait au caractère d’Adrian. Souvent, la caméra est une
manifestation de sa présence".
Mouvements et
cadrages
La création d’une
tension constante
Comme pour Whannell, Duscio jugeait important de cadrer l’un des classiques des Universal Monsters avec originalité. "L’un des défis auxquels on a dû faire face a été de créer du suspense avec des images très lumineuses. On a tous deux l’expérience de films d’horreur sombres, et la singularité du travail de Leigh avec INVISIBLE MAN, c’est d'avoir obtenu ce sentiment de terreur tout en faisant en sorte que le moindre recoin de l’espace domestique soit visible. L’Homme invisible peut être n’importe où dans cet environnement", explique Duscio.
Le thriller se concentre en grande partie sur Cecilia et
sa plongée dans la folie : il fallait donc montrer sa terreur et souligner
qu'elle finit par s’en servir comme d’une force. "On était très intéressés par le point de vue extrêmement
paranoïaque de Cecilia. On a filmé exprès des espaces vides, en laissant la
caméra s'attarder dans les recoins des pièces. On l’a également cadrée de
manière inhabituelle pour suggérer que quelqu’un se tient dans le hors
champ", commente-t-il encore.
Parfois, Duscio s'attache à un élément inattendu du
cadre, au-delà d’un personnage situé au premier plan. "Cette technique peut sembler étrange ou inhabituelle dans sa
composition mais notre but est de créer une tension constante. On espère aussi
que ça permet d’attirer l’attention du spectateur pour chercher à déceler le
moindre mouvement ou indice de la présence de notre prédateur dans les recoins
de chaque plan. C’était vraiment difficile de se 'couvrir' pour ces scènes-là
et il a fallu beaucoup d’imagination de la part des acteurs et des techniciens
pour nous faire confiance et imaginer que ces séquences seraient
haletantes", poursuit-il.
Tourner dans le
noir
Une grande partie du film – de la séquence où Cecilia
s’échappe de la maison d’Adrian à sa découverte dans le grenier et à son
attaque brutale à l’hôpital psychiatrique – a été tournée de nuit dans
l’obscurité. "J'apprécie de tourner
dans le noir même si je trouve cela difficile", déclare Duscio. "On doit donner à la scène une ambiance
sombre tout en continuant à raconter l'histoire avec clarté et précision. Il
est très facile de trop – ou pas assez – éclairer dans une telle
situation et on doit faire des modifications très subtiles au niveau de
l’éclairage ou du choix des caméras pour trouver la bonne exposition de façon
naturelle. Leigh et moi avons établi un story-board ou prévisualisé au maximum
les séquences les plus complexes, pour me permettre de communiquer clairement à
mes équipes ce que je voulais".
Et pour filmer avec des effets de lumière et d’ambiance
différents, la nouvelle caméra grand angle ARRI Alexa LF (large format) s'est
avérée le bon choix. Il se trouve qu'elle a aussi permis au directeur de la
photographie de mieux cerner le style de Roger Deakins. "Je crois bien qu'il s'agit du deuxième film tourné avec ce
dispositif après 1917. On a eu la chance que la société ARRI, à Munich, nous
ait donné un prototype d’Alexa mini LF juste à temps pour le tournage. On a
utilisé cette caméra plus légère pour tourner les nombreuses scènes d’action,
notamment les longs plans à la Steadicam et les prises de vue à l'épaule, mais
aussi les scènes en motion-control et la course-poursuite en voiture",
confie Duscio.
Grâce à la nouvelle caméra
grand angle, Duscio et Whannell ont découvert tout un éventail de possibilités
en matière de formats d’objectifs, permettant des images époustouflantes avec
plus de profondeur et une meilleure résolution. "Ça nous a aussi permis de filmer des plans au plus près de nos
acteurs, tout en laissant un vaste champ autour d’eux", dit-il.
La production a eu recours à une multitude de techniques
pour filmer les déplacements de l’Homme invisible. "Quand les rapports entre acteurs et les mouvements de caméras
étaient complexes, on utilisait généralement un système de capture de
mouvements ARGO pour créer des déplacements de caméras qu’on pouvait
reproduire", explique le directeur de la photographie. "On tenait à obtenir des prises
parfaites des acteurs, des interprètes en combinaison verte et des
arrière-plans. Heureusement, Leigh et moi aimons la façon dont la caméra de
motion-control crée une gestuelle austère et artificielle. On a étudié ça et
essayé de le reproduire lors de notre travail habituel avec la Dolly, afin
d’harmoniser les deux styles de cadrage".
Elisabeth Moss
s’éclaire elle-même
La
fusion entre acteurs et techniciens
Le tournage dans des espaces étouffants a influé sur tous les choix de caméras et d’éclairages du directeur de la photo. "Filmer dans des lieux exigus est toujours délicat, car les équipements techniques dans le cinéma nécessitent généralement de la place", remarque Duscio. "Mais j’ai aimé relever le défi de filmer Elisabeth dans un grenier sombre, où elle était éclairée uniquement par la lampe torche qu’elle tient à la main. J’ai donc compté sur Elisabeth pour s’éclairer elle-même, ou plutôt pour ne pas le faire. Et je me suis recroquevillé dans un coin du grenier avec la plus petite installation technique possible et une caméra à la main. Alex Holmes a conçu un environnement génial qui nous a permis de travailler tout en se sentant dans un espace étouffant et encombré".
Whannell et Duscio ont passé beaucoup de temps à préparer
et élaborer la séquence d’ouverture dans laquelle Cecilia s’échappe de la
maison d’Adrian. "C’était important
de créer la tension de son point de vue, par le prisme de sa paranoïa. Les
spectateurs savent à quel genre de film ils ont affaire et on a voulu
satisfaire leurs attentes en les invitant à fouiller constamment du regard
notre cadrage suggestif ou nos plans de grande envergure qui s’ouvrent sur du
vide".
Pendant l'essentiel du film, Cecilia est enfermée, que ce
soit littéralement ou psychologiquement par sa peur ou les circonstances. Une
situation qui a permis aux équipes caméra d’explorer différentes techniques
pour représenter la terreur. "La
pauvre Cecilia passe d’une prison à une autre !", note Duscio. "La maison d’Adrian, celle de James
puis un véritable hôpital psychiatrique dans lequel elle est enfermée. Cette
séquence a été très difficile à concevoir pour Leigh et moi et on l’a filmée et
montée intégralement à l’aide d’une petite caméra numérique et de doublures
techniques. Il y avait tellement d’éléments mobiles dans cette séquence qu’il a
fallu la décomposer minutieusement. Leigh adorait l’idée que l’éclairage puisse
être aveuglant et on a donc installé des éclairages LED très puissants dans
tout l’intérieur de l’hôpital".
CHORÉGRAPHIE DES CASCADES ET DES
SCÈNES DE COMBAT
Quand on se bat
pour sa vie
Des cascades tout
en émotion et en intensité
Ce qui rend les cascades d'INVISIBLE MAN particulièrement impressionnantes, c’est qu'à chaque fois que le personnage éponyme entre en scène, on a l’impression que la vie de sa victime potentielle est en jeu. Pour mener à bien cet aspect du thriller, Leigh Whannell a fait appel au chef cascadeur Harry Dakanalis, dont la trentaine d’années dans le métier lui a assuré une expérience solide et inégalée. Quand on sait que l’un de ses tout premiers films a été la saga MATRIX des Wachowski, on comprend que l'homme puisse partager ses connaissances avec Elisabeth Moss et le reste des acteurs. "Les cascades que j’ai réalisées dans MATRIX restent les plus mémorables et difficiles de ma carrière", raconte-t-il. "Lana et Lilly Wachowski m’ont appris que l’imagination est sans limites et qu’il faut suivre son instinct quand il s’agit des acteurs".
"Travailler avec Leigh a été une expérience elle aussi
fantastique", poursuit Dakanalis. "Dès le début, on a été sur la même longueur
d’onde. Tout au long du projet, il nous a laissés explorer chaque scène et nous
a donné le temps nécessaire pour tester les chorégraphies qui allaient se
retrouver à l’écran".
Elisabeth Moss est pour ainsi dire dans toutes les scènes d'INVISIBLE MAN.
Il a donc fallu que l’actrice et sa doublure cascade Sarah Laidler travaillent
étroitement avec le chef cascadeur pendant la prépa et tout au long du
tournage. Dakanalis admet avoir compris qu’à la première lecture du scénario,
il devrait avoir une approche différente sur ce projet. "L’équilibre
était subtil pour que Cecilia paraisse dans un perpétuel état de surprise,
presque de choc. J’y suis parvenu non pas en répétant sans cesse avec Elisabeth
mais en laissant toutes les scènes de combat survenir naturellement. J’ai
appliqué cette technique à ce film avec beaucoup de succès".
"En général, on répétait les scènes d’action à fond avec Sarah et Luke
Davis, la doublure de notre Homme invisible, jusqu’à ce que la scène prenne
forme", déclare le chef
cascadeur. "On faisait ensuite découvrir à Elisabeth comment la
séquence allait se dérouler et à quel rythme pendant en moyenne trois à quatre
heures de travail. C’était suffisant pour qu’elle puisse être synchrone avec la
caméra. L’étape suivante était le tournage, avec la doublure de l’Homme
invisible qui se mesure à elle et qui lui résiste tandis qu'elle l’attaque en
se fiant à son instinct plutôt qu'à des gestes effectués machinalement. Très en
amont des répétitions, on a découvert que les réactions spontanées d’Elisabeth
s’avéraient beaucoup plus intéressantes que ses gestes chorégraphiés. Et on
s’est tenu à cette démarche pendant tout le film".
Le chef cascadeur a étroitement collaboré avec le chorégraphe de combat
Chris Weir qui a également travaillé sur UPGRADE de Leigh Whannell, et qui
avait également servi de doublure cascade de Logan Marshall-Green pour les
scènes de combat d'UPGRADE. "C’est merveilleux de travailler avec
Chris", poursuit Dakanalis. "Il a une approche extrêmement
méthodique". Cette description est aussi valable pour le reste des
acteurs qui se sont mesurés à l’interprétation physique d’Elisabeth Moss et de
son équipe cascade, notamment Aldis Hodge qui joue James. "Aldis a une
aptitude innée pour le combat. C’est un très grand acteur et il possède de
formidables facultés physiques, ce qui m’a rendu la tâche très facile".
Travail d’équipe
Sarah Laidler et
Elisabeth Moss en décousent
Étant donné que le film comporte un grand nombre de scènes particulièrement physiques, il était primordial que la cascadeuse expérimentée Sarah Laidler soit attentive aux questions de sécurité. "En tant que cascadeuse, je n’arrête jamais de m’entraîner pour être toujours prête à travailler", explique-t-elle. “Un rôle comme celui-ci consistait surtout à préparer mon corps à être vraiment maltraité”!
La cascadeuse et Elisabeth Moss avaient déjà collaboré ensemble, notamment
sur la série TOP OF THE LAKE. "J’ai beaucoup plus travaillé avec
Elisabeth sur INVISIBLE MAN", raconte Sarah Laidler. "On a eu
plus de temps pour répéter et évoquer les scènes. J’ai pu me familiariser
davantage à sa gestuelle et j’ai appris à mieux la connaître sur un plan
personnel. J’ai veillé à prendre de ses nouvelles et à m’assurer qu’elle était
physiquement prête pour chaque scène d’action. Elle n’a jamais hésité à me
parler si elle doutait de quelque chose, ce qui nous a permis de faire en sorte
qu’elle ne soit jamais en danger tout en obtenant les meilleurs résultats
possibles. J’ai hâte de collaborer avec elle à nouveau".
La doublure cascade souligne que Whannell possédait une vision très précise
de ce qu’il attendait de chaque scène, et Dakanalis et Weir se sont montrés
tous les deux très impliqués dans les discussions et l’élaboration des scènes
avec le réalisateur. Ils ont ensuite travaillé avec l’équipe de cascadeurs pour
les mettre en œuvre sur le plateau.
Sarah Laidler a également apprécié le degré de complexité nécessaire pour
donner l’impression que Cecilia luttait pour sa vie lorsqu’elle est attaquée
par Adrian dans la maison de James. "La scène dans la cuisine-salle à
manger est l’une de mes préférées", reprend-elle, "parce qu’on
y a consacré énormément de temps en jouant avec le motion-control et les axes
de caméra". Et, après une pause, elle ajoute : "C’est l’un des
plus grands coups que j’ai pris de tout le film".
Contrairement à un film traditionnel, l’équipe a dû concevoir
l’inimaginable puisque Cecilia se bat contre quelqu’un qui est littéralement
absent. Pour accomplir ce tour de force, Elisabeth Moss et Sarah Laidler ont
été assistées par leur partenaire Luke Davis. "La plupart du temps,
Luke était en combinaison verte, ce qui m’a aidée", poursuit la
cascadeuse. "Pendant ses scènes hors champ, pour des raisons d’effets
visuels, il a continué à peaufiner des détails pour que des gestes comme le
fait d'agripper son bras aient l’air réaliste".
Luke Davis et Sarah Laidler ont largement travaillé avec le chef cascadeur
et le chorégraphe de combat pendant la prépa. "On a testé pas mal
d’idées différentes, on a fait des changements en cours de route mais aussi à
la suite des commentaires de Leigh", souligne Sarah Laidler. "C’était
bien d’avoir un 'homme invisible' tangible pour me tirer et me projeter à
droite et à gauche, ou me maintenir immobile à l’aide de câbles. Ça a aussi été
utile à Elisabeth pour pouvoir repérer où il se tenait dans la pièce. Les
cascadeurs ont fait un travail remarquable en nous balançant, Lizzie et moi,
suspendues à ces câbles".
La cascadeuse a du mal à dire quels sont ses souvenirs préférés du tournage
mais la scène où Cecilia s'échappe de l’hôpital psychiatrique après s’être
battue contre Adrian en fait partie. "Ça a été un travail d’équipe.
Elisabeth a réalisé beaucoup de ses cascades, après un travail de
reconnaissance ensemble", dit-elle en évoquant la fuite qui marque le
début du film. "Elle court et escalade le bas du mur puis je prends le
relais pour la partie supérieure et la chute de l’autre côté du mur. Mais le
plus dur a été de se synchroniser avec le chien !", ajoute-t-elle en
riant.
Entre son affrontement avec l’Homme invisible dans la douche, sa bagarre
avec le garde et sa fuite dans la nuit, l’éprouvante évasion de Cecilia de
l’hôpital psychiatrique a été l’une des séquences les plus complexes du
tournage. "La scène était à la fois amusante et difficile à tourner,
car elle est très technique et précise et devait être filmée grâce à la caméra
de motion-control", insiste la cascadeuse. "On a travaillé
suivant un minutage précis et, bien entendu, le timing de la caméra était toujours
parfait ! Ça a été aussi très chouette d’avoir une plus grosse équipe de
cascadeurs dans le couloir et des chorégraphies inventives. Et cerise sur le
gâteau, j’ai pu voler à travers la pièce".
S'agissant de la course-poursuite en voiture, au moment où Cecilia
s’échappe de l’asile, le pilote chevronné Mick Van Moorsel (MAD MAX : FURY
ROAD) a confié à Whannell et au chef-opérateur Duscio tous ses secrets. "Mick
avait arrimé une nacelle à l’extérieur de la voiture", confirme Sarah
Laidler, "ce qui lui permettait de la conduire, pendant que Lizzie
était au volant".
LES COSTUMES
Personne ne porte
de t-shirts basiques dans la vraie vie
Emily Seresin
habille les acteurs
La chef costumière Emily Seresin, qui a débuté sa carrière en Australie
comme chef-habilleuse sur le légendaire PRISCILLA, FOLLE DU DÉSERT, a été
recrutée pour les costumes d'INVISIBLE MAN. Elle a trouvé en Leigh Whannell un
réalisateur capable de percevoir avec finesse les univers socio-économiques et
culturels de ses personnages. "Collaborer avec Leigh, c’est comme
travailler avec Louis Theroux, Andy Warhol et Noam Chomsky réunis en une seule
personne", commente Emily Seresin. "On sait qu’il va falloir
écouter avec attention les idées que vous lance le patron. Par exemple, la
propriété d’Adrian n’est pas tant une maison qu’une représentation de sa
personnalité et veut dire, 'Mes problèmes ne sont pas ceux de tout le monde'.
Leigh a adoré intégrer des références au film. Il lançait : 'Personne dans la
vraie vie ne porte de tee-shirts basiques' et on a donc eu une très longue
liste de choses de ce genre à prendre en compte".
S’agissant des styles vestimentaires, et très en amont du tournage,
Whannell et la chef-costumière ont évoqué la tonalité réaliste qu’ils voulaient
restituer. "Leigh souhaitait adopter cette dimension brute, sans fard,
et pas une version aseptisée comme on en voit parfois au cinéma",
reprend Emily Seresin. "Il y avait d’autre part l’univers d’Adrian
totalement dépouillé, et il nous fallait donc des éléments hyper design, mais
sans oublier Cecilia dans son vieux sweat à capuche de la fac tout élimé et
James dans ses vieux vêtements qu'il porte quand il peint".
La garde-robe de
Cecilia
La costumière avait déjà travaillé avec Elisabeth Moss sur un épisode de TOP OF THE LAKE : CHINA GIRL et estimait que l’actrice savait rendre un personnage authentique. "Ça se voit à l’écran. Elisabeth est intelligente tout en ayant un regard joyeux sur la vie. Cela permet de travailler avec sincérité tout en s’amusant. Elle possède un sens très prononcé de ce qui fait authentique, tout en étant capable d'incarner pleinement son personnage ".
Dans son travail, Emily Seresin cherche à faire essayer une multitude de
vêtements aux acteurs et Elisabeth Moss s’est amusée de ces séances de
plusieurs heures. "Les essayages ont été un peu fatigants",
poursuit la chef costumière. "Je ne peux pas toujours expliquer
pourquoi certaines tenues fonctionnent, mais quand ça tombe juste, ça paraît
évident. C’est donc un processus très intuitif. Souvent, la forme convient mais
pas la couleur ou la matière. On a bien sûr créé des pièces pour Cecilia, ou on
les a teintes ou modifiées, mais, en général, on a d’abord trouvé quelles
formes on voulait grâce aux essayages".
Aux côtés du réalisateur, la créatrice a passé en revue une grande partie
des matières avec le directeur de la photographie Stefan Duscio et le chef
décorateur Alex Holmes. Pour symboliser la dépression de Cecilia, ils ont fini
par choisir une palette de couleurs relativement douce en se focalisant plutôt
sur les textures et l’éclairage. "J’ai découvert que les patients
d’hôpitaux psychiatriques en Californie portaient un uniforme dans les tons de
beige", indique Emily Seresin. "Cela nous a donné l’occasion
d’associer la perte de crédibilité de Cecilia à un élément significatif comme
l'élimination des couleurs vives".
En matière de costumes, le cheminement de Cecilia a été fascinant. À cet
effet, l’équipe devait montrer une femme qui s’habille pour tenir un rôle dans
sa propre vie. "La scène clé du dîner est préméditée. La robe de
Cecilia devait respirer la femme sûre d’elle et [Cecilia] devait reprendre le
même vocabulaire qu’Adrian. C’est gratifiant de la voir en sweat et pyjama
pendant tout le film, puis de la voir prendre le contrôle de la situation telle
une Amazone en talons-aiguilles à la manière d’Helmut Newton",
commente encore la costumière.
Donner un style à
la duplicité d’Adrian
L’équipe de production a également évoqué l’allure élégante d’Adrian. "C’est un homme qui dégage une impression d'opulence et d’ambition – il fait peut-être partie de ces ultra-riches ou il aspire à l’être en tout cas – et qui porte une sorte d’uniforme", suggère la chef costumière. "Le sien est un pull en cachemire, un t-shirt, une veste légère et un pantalon, mais le tout admirablement taillé sur mesure. De mon point de vue, il s’agit simplement de trouver la forme adéquate et la bonne coupe".
En ce qui concerne la "tenue invisible" d’Adrian, Emily Seresin
n’a pas pu dévoiler son secret. "Ce serait trop risqué ! Je dois
admettre que je n’ai fait que quelques suggestions au sujet du costume
invisible. La conception en revient à Alex et Leigh. L’une de mes idées était
de faire appel aux Odd Studios, qui ont recouru à un mélange d’impression 3D et
de sculpture pour lui donner vie".
MAQUILLAGE ET COIFFURES
Belle et envoûtante
Angela Conte et
Elisabeth Moss : une équipe de choc
Angela Conte (PRISCILLA, FOLLE DU DÉSERT), primée au
BAFTA Awards, était à la tête de l'équipe maquillage-coiffure. Pour restituer
la déliquescence mentale de Cecilia, Angela Conte a travaillé avec l'actrice en
étroite collaboration. "C'est extrêmement difficile d'enlaidir Elisabeth,
si bien que lorsqu'il a fallu imaginer son allure de femme brisée, sa
coopération a été décisive. Elle a un regard formidable et elle est audacieuse.
Ensemble, on lui a façonné des expressions que j'appelle 'sublimes et
envoûtantes".
La mission de la chef-maquilleuse et coiffeuse consistait
à faire en sorte que Cecilia, qui a d'abord l'allure parfaite d'une
"potiche" quand elle vit avec Adrian, adopte ensuite un visage
dévasté dès lors qu'elle plonge vers ce que son entourage perçoit comme la folie.
Un état qui comportait plusieurs phases. "Lizzie ne voulait pas avoir
l'air d'une potiche caricaturale", relève Angela Conte. "Car
Cecilia a subi des violences physiques et émotionnelles de la part de son
partenaire".
En travaillant avec Leigh Whannell, la chef-maquilleuse
et coiffeuse a pu transposer visuellement le formidable imaginaire du metteur
en scène et ses idées visionnaires. "Leigh avait ses propres
story-boards", détaille-t-elle, "et ils m'ont été utiles dans
mon travail. Ensemble, on a mis au point des expressions de visage
extraordinaires, et lorsque Lizzie s'est investie dans ce processus, on a réuni
l'équipe idéale".
"J'ai scrupuleusement analysé des images qui m'ont
servi : tandis que Cecilia perd pied peu à peu – et que son état mental suit le
même chemin –, son maquillage se met à couler et sa coiffure est en
bataille", poursuit Angela Conte. "J'ai eu l'idée de lui
ajouter des extensions de magnifiques cheveux blonds bien épais pour son allure
de 'potiche', quand elle est encore en couple avec Adrian. Pour son allure de
femme dévastée, on a très légèrement assombri sa teinture et rendu ses cheveux
plus fins. Il ne s'agissait pas de modifier sa couleur de cheveux, mais de leur
donner un aspect sale et mal soigné. C'était un effet d'illusionniste. À mesure
qu'on lui enlevait les extensions, ses cheveux devenaient plus cassants et
filasses, notamment pour les scènes d'hôpital psychiatrique".
Pour les scènes où Cecilia est au fond du gouffre, Angela
Conte a mis au point un maquillage donnant à l'actrice un teint pâle et un air
malade et dénué d'expression. "On l'a affublée de rougeurs sur le
visage, de cernes sous les yeux, de coupures et d'égratignures",
dit-elle. "Et il fallait que tout ce maquillage tienne sous une pluie
diluvienne et pendant les scènes d'action. En d'autres termes, il fallait que
ça résiste sans que j'aie besoin de venir retoucher son maquillage toutes les
cinq secondes. J'ai donc utilisé une teinture et un maquillage résistants à
l'eau. On lui a également ajouté des extensions de cheveux capables de résister
à ses cascades et aux trombes d'eau se déversant sur elle".
Dans la scène du dîner avec Adrian, on retrouve une
Cecilia émancipée. La chef-coiffeuse et maquilleuse a donné une allure plus
combative et plus élégante à la comédienne. "Elle n'est pas
parfaitement impeccable car Cecilia a connu l'enfer", remarque-t-elle.
"Je voulais que ça se ressente dans le maquillage et la coiffure".
LA MUSIQUE
Ne leur dites pas à quel moment sursauter !
Benjamin Wallfisch
entre en scène
Benjamin Wallfisch, à qui on doit les partitions de BLADE
RUNNER 2049, SHAZAM! et la saga ÇA, a été engagé pour imaginer des sonorités
bien particulières pour INVISIBLE MAN. D'emblée, le réalisateur a clairement
spécifié ce dont il ne voulait pas. "Je ne voulais surtout pas d'une
musique démonstrative, avec des cordes très présentes, pour bien souligner les
moments où on est censé avoir peur", dit-il.
Prenant en compte la volonté du cinéaste de, selon ses
propres termes, "laisser beaucoup de liberté au spectateur",
le compositeur précise : "Il s'agissait d'utiliser les silences par
souci de rythme si bien que, lorsqu'on entend de la musique, les sonorités
prennent un relief très particulier. On croit qu'on va entendre la musique,
mais elle ne vient pas – comme un écho à la présence invisible d'Adrian
Griffin".
"Je tenais aussi à restreindre l'instrumentation aux
cordes", poursuit Wallfisch, "si bien que les musiciens devaient donner la
pleine puissance à leur interprétation sans l'appui d'un orchestre au grand
complet. C'était aussi un hommage à l'une de mes idoles, l'immense Bernard
Herrmann, et à son chef-d'œuvre composé pour PSYCHOSE. Une manière d'évoquer la
dimension hitchcockienne du film".
Tandis que Cecilia se met à douter d'elle-même, avant de
reprendre des forces, le musicien raconte la manière dont il a abordé son
parcours. "Le 'thème de Cecilia', mélodie toute simple pour violoncelle
et cordes, permet au personnage de se souvenir qu'elle a toute sa tête, y
compris dans les moments où le sol se dérobe sous ses pieds", dit-il. "On
ne l'entend que quelques fois dans le film, à des moments-clés de sa
trajectoire. On entend aussi un thème au piano qui revient à quelques reprises.
C'est un motif insistant qui montre qu'elle est encore capable de se raccrocher
à sa véritable identité, en dépit de tous les obstacles, et qu'elle finira par
triompher".
Étant donné qu'il devait imaginer un espace sonore pour
un ennemi qu'on ne voit pas, le compositeur a dû faire des choix qu'il n'avait
encore jamais envisagés pour un antagoniste : "Il nous fallait une
sonorité qui lui soit propre – quelque chose qui vous prenne par
surprise", conclut Wallfisch. "Le thème de l'Homme invisible
est entièrement électronique et quand il est poussé au maximum, on a fait en
sorte que les sonorités occupent tout l'espace".
Source et copyright des textes des notes de production
@ Universal Pictures International France
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