Drame/Instructif, belle réalisation, interprétation intense
Réalisé par Erik Poppe
Avec Juliette Binoche, Nikolaj Coster-Waldau, Lauryn Canny, Adrianna Cramer Curtis, Maria Doyle Kennedy, Larry Mullen Jr., Mads Ousdal, Chloë Annett...
Long-métrage Norvégien/Irlandais/Suédois
Titre original: Tusen ganger god natt (1,000 TIMES GOOD NIGHT)
Durée: 01h57mn
Année de production: 2013
Distributeur: Septième Factory
Date de sortie sur les écrans norvégiens: 18 octobre 2013
Date de sortie sur les écrans irlandais: 16 mai 2014
Date de sortie sur les écrans suédois: 25 juillet 2014
Date de sortie sur nos écrans: 6 mai 2015
Résumé : Rebecca est une photographe de guerre de renommée internationale. Alors qu’elle est en reportage en Afghanistan pour suivre un groupe de femmes qui préparent un attentat suicide, elle est gravement blessée par l'explosion d'une bombe. De retour chez elle en Irlande, pour se remettre de ce traumatisme, elle doit affronter une autre épreuve. Marcus, son mari et Stéphanie, sa fille ainée de 13 ans, ne supportent plus l’angoisse provoquée par les risques que son métier impose. Rebecca, qui est déchirée entre les souffrances qu’elle fait subir à ses proches et sa passion de photoreporter, doit faire face à un ultimatum : choisir entre son travail et sa famille. Mais peut-on vraiment échapper à sa vocation, aussi dangereuse soit-elle ? Renoncera t-elle à couvrir ces zones de combats, et à sa volonté de dénoncer la tragédie humaine de son époque ?
Bande annonce (VOSTFR)
Extrait (VOSTFR)
Ce que j’en ai pensé : L’ÉPREUVE est un film qui m’a beaucoup plu. Le sujet du film est axé sur la vie que peut avoir un photographe de guerre. Comment gérer un métier certes passionnant mais dangereux, prenant et traumatisant, en parallèle avec une vie de famille quand on revient du terrain ? Bien évidemment la questions se pose que l’on soit une femme ou un homme et de ce point de vue-là, j’ai trouvé le sujet bien traité car, finalement, peu importe que le personnage central soit une femme, l’intrigue et le vécu personnel de la famille aurait été les mêmes avec un homme.
J’ai aimé l’aspect éducatif sur le métier de reporter photographe de guerre que ce long-métrage développe. Au travers du point de vue de Rebecca, on apprend ce qu'est ce métier et les difficultés qui vont avec. Le réalisateur, Erik Poppe, qui a lui-même été reporter photographe de guerre, raconte une histoire, les faits sont donc romancés, mais dans le fond il aborde des sujets réalistes qui importent. Ils rendent le film intéressant et touchent le spectateur.
Je me demandais comment on peut photographier des faits horribles et donc en être témoin, sans intervenir, et comment on peut vivre avec ces images en tête par la suite. Je ne sais pas si L’ÉPREUVE est une démonstration de la réalité mais en tout cas il donne la sensation de s’approcher des réponses à ces interrogations.
La scène d'introduction est très impressionnante. Erik Poppe, le réalisateur, nous plonge au cœur de l’action. Les scènes sont dures. J’ai été impressionnée par la douceur des plans, des couleurs, de la mise en scène qui sont en opposition totale avec la dureté du propos. Cela amplifie l’horreur de la situation.
La photographie est remarquable tout au long du film.
Les acteurs sont superbes. Comme toujours la sensibilité de Juliette Binoche, qui interprète Rebecca, explose à l'écran. Je trouve intéressant de savoir que ZORIAH, photographe reporter de guerre a coaché Juliette Binoche sur le plateau. Ses gestes et positionnements paraissent très professionnels. L’interprétation de Nikolaj Coster-Waldau qui interprète Marcus est très juste. Ils forment un très beau duo, crédible et convaincant.
L’ÉPREUVE présente beaucoup d'angles intéressants et instructifs. C’est un film choc par certains aspects mais on sent qu’il veut nous délivrer un message, nous intéresser à sa cause. Je vous le conseille car il est très bien filmé et interprété et qu’il reste centré sur son sujet avec un angle humain.
A noter : Le cinéma MK2 BIBLIOTHÈQUE, situé à Paris, organise du 28 avril au 12 mai 2015, organise une exposition de 13 photos de tournage du film prises par ZORIAH, photographe reporter de guerre et coach photo de Juliette Binoche sur le plateau (http://www.zoriah.com/).
NOTES DE PRODUCTION
(A ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers!)
Entretien avec
Erik POPPE
Réalisateur
Qu’est-ce qui vous a inspiré le scénario de L’ÉPREUVE ?
Avant de devenir réalisateur, j’ai exercé le métier de photographe
reporter de guerre pour des magazines jusque dans les années 80. Ces derniers
temps, je suis retourné couvrir des zones de conflits mais depuis que j’ai deux
filles et une épouse, il y a une grande différence comparé à ma situation d’avant.
J’ai dû prendre en compte le stress que mes proches subissaient en raison de
mes choix professionnels et je me suis demandé : qui suis-je pour leur imposer
d’avoir peur chaque fois que je pars ? Par ailleurs, j’avais depuis longtemps l’idée
de faire un film sur un reporter de guerre. Pas sur la problématique de savoir
comment survivre dans ces régions à risques, on devient vite excellent pour ça,
mais sur la partie la plus difficile du travail : comment «survivre» de retour
à la maison ?
Comment accepter que les gens ne s’intéressent pas à ce qui se
passe dans le monde ?
C’est cette épreuve qui est à l’origine du film. Le scénario est
inspiré de ma vie de famille et de mon expérience en tant que correspondant de
guerre.
Pourquoi avoir choisi un personnage de femme photoreporter de
guerre, plutôt qu’un homme ?
Si un homme laisse ses enfants à la maison pour son travail, on
trouve cela normal. Mais dans le cas d’une femme, les réactions sont plus
mitigées. D’autre part, depuis 20 ans, beaucoup de femmes sont apparues dans la
profession, parce que beaucoup de conflits ont lieu dans des régions de culture
islamiques. Dans ces endroits, un homme ne peut raconter que la moitié des
événements, car il ne pourra pas approcher les femmes, alors qu’une femme
reporter pourra établir des contacts, rencontrer d’autres femmes et les photographier.
Comment avez-vous abordé le personnage de Rebecca?
Pour chaque film je fais beaucoup de recherches. Si je veux
raconter une histoire la plus crédible possible, je me dois de connaitre
beaucoup de choses sur le sujet. Pour L’ÉPREUVE, j’en savais déjà énormément en raison de ma propre
expérience. La question centrale du film tourne autour de la problématique de
Rebecca : comment faire dans une situation où il faut choisir entre sa passion
et les êtres qu’on aime ? Rebecca va retarder le moment de sa décision, car
elle a besoin d’accomplir auparavant ce qu’elle considère être son destin.
Rebecca semble être plus à l’aise au milieu des combats que dans
sa maison. Pensez-vous que cela soit une caractéristique des correspondants de
guerre ?
Il y a beaucoup de personnalités différentes dans le milieu des
reporters de guerre, qui viennent d’horizons très divers. Les motivations sont
également très variées. Certains le font pour l’adrénaline, d’autres pour des
raisons financières, mais beaucoup sont motivés par le désir de voir si leur
histoire, une fois publiée, pourrait attirer l’attention et créer des changements
dans l’opinion et éventuellement avoir des conséquences politiques. Il y a une
addiction à combattre les injustices dans le monde et il est très difficile de
s’en débarrasser, car cela vous hante l’esprit. Quand vous êtes chez vous, dès
que des événements éclatent, vous ne pensez qu’à partir. Sur le terrain,
côtoyer la mort fait que vous vous sentez très vivant. Avoir une mission à
accomplir vous donne le sentiment d’être important.
Quelle est la relation du couple formé par Rebecca et Marcus ?
Quelle est leur histoire ?
Ce sont deux passionnés. Rebecca veut attirer l’attention du
public sur les drames qui se jouent dans le monde, Marcus est un biologiste
marin qui étudie les pollutions en mer pour alerter sur l’état de la nature.
Leurs métiers respectifs les comblent. Ils sont profondément attachés l’un à l’autre,
mais Marcus ne supporte plus la situation de voir sa femme côtoyer en
permanence le danger. Il craque et pose un ultimatum à Rebecca. De son côté,
elle ne veut pas l’éclatement de sa famille et pense pouvoir renoncer à son métier
pour sauver l’essentiel. Mais les événements la rattrapent.
Pourquoi avoir décidé de travailler avec Juliette Binoche ?
Les producteurs voulaient un casting international. Il y a eu
plusieurs propositions, mais son nom est très vite arrivé. Je suis sa carrière
depuis vingt ans et je considère Juliette comme l’une des actrices les plus
talentueuses du moment. Elle a le courage d’accepter de faire des petits films
à côté de superproductions. J’avais besoin d’une personnalité très forte,
totalement intègre pour interpréter ce rôle. Quand elle a accepté le projet elle
s’est battue pour son personnage, qui ne lui est pas étranger. Même si Juliette
n’est pas photographe, elle sait ce que c’est d’avoir une passion et des
enfants à la maison.
Comment s’est construite la collaboration avec Juliette Binoche?
Mon idée était de faire un film le plus réaliste et le plus
détaillé possible, pour partager la vie d’authentiques photographes
correspondants de guerre sur le terrain. Nous avons eu des échanges sur mon
expérience et Juliette s’est préparée avec d’autres photographes reporters de
guerre qui l’ont coaché. Elle s’implique énormément sur chacun de ses films, et
son immense expérience lui permet de beaucoup apporter à un projet. Pour moi, elle a été comme un cadeau du
ciel, ce dont ce film avait vraiment besoin. On s’est battu sur le scénario,
qui n’était pas abouti comme il aurait dû l’être. Celui-ci changeait tout le
temps et elle m’a poussé pour que ça avance. Juliette est très exigeante, elle
a opposé une résistance à la limite de mes forces mais c’était une bonne chose,
parce que nous luttions
pour notre film. Au final, j’avais décidé de la pousser à jouer d’une
manière encore plus puissante que ce que j’avais perçu d’elle, pour la voir
faire ce qu’elle n’avait jamais fait auparavant. Elle était d’accord. Je suis
fier de la façon dont cela s’est passé, comment nous nous sommes poussés
mutuellement au-delà de nos limites. Aujourd’hui le respect que je lui
porte est encore plus grand.
Pourquoi avoir engagé Nikolaj Coster-Waldau pour le rôle de Marcus
?
Je pensais qu’il formerait avec Juliette un couple très
intéressant. Je voyais Nikolaj sur scène depuis de nombreuses années au théâtre
à Copenhague, et pour moi, c’est un comédien extraordinairement talentueux. Il
fait partie des acteurs au sommet dans son genre, très masculin, pour des rôles
d’hommes forts. Dans le film, il incarne un personnage qui souffre, à l’opposé
de cette image où on l’emploie habituellement. Nous avons travaillé ensemble à
la réduction de cette force masculine et nous avons trouvé, je crois, un bon
équilibre. Il a aussi cette intégrité pour se lier à ce genre de film. J’étais curieux
de voir la réaction de Juliette, comment ils fonctionneraient ensemble, sur un
plan subtil. Cela s’est déroulé à merveille. Ils se sont soutenus mutuellement.
Dans le film, nous suivons le point de vue de Rebecca en permanence, Juliette
est dans tous les plans, cela impliquait pour Nikolaj qu’il n’avait pas de
scènes où il serait au centre de l’action, des scènes dont vous pensez avoir
besoin pour l’histoire en tant qu’acteur. Il est tellement confiant, qu’il a
accepté ce principe.
Comment Larry Mullen Jr, le batteur du groupe U2, est-il arrivé
sur ce projet ?
Quand les producteurs m’ont demandé si l’Irlande et Dublin
pouvaient être le décor d’une partie du film, j’ai trouvé ça intéressant. J’ai voulu
injecter un peu de « culture locale ». Quelque chose qui amènerait une expérience pour moi en
tant que metteur en scène. Je suis un fan du groupe U2 depuis plusieurs
décennies, et Larry est l’un des membres du groupe qui a beaucoup de charisme.
J’étais à Dublin, pour des repérages et, ce qui est étonnant en Irlande c’est
que vous pouvez contacter les gens comme ça, très facilement. Je l’ai appelé,
on s’est rencontrés dans un bar le lendemain, je lui ai expliqué le film. Il a
dit « oui, pourquoi pas, faisons-le ! ». Je trouvais intéressant de rassembler
un casting un peu éclectique. Il s’est totalement dévoué au projet, avait le
trac, mais les autres acteurs l’ont tellement encouragé, qu’il est devenu un
membre de la famille.
Comment s’est élaborée votre approche formelle du film ?
Pour ce genre de film, le style habituel est proche du
documentaire, avec une façon de filmer un peu crue. Je me suis demandé comment
faire pour élever ce standard. J’ai opté pour une esthétique visuelle plus
travaillée. Je voulais aussi expérimenter comment pénétrer par moment dans l’esprit
même de Rebecca ? Comment je pouvais exprimer visuellement le fait qu’elle
meure presque au début du film ? Je voulais aussi établir une polarité dans les
couleurs de la partie irlandaise et dans les autres lieux. Nous avons établi des
règles. Le rouge est interdit en Irlande par exemple, sauf pour les feux
arrière des voitures. Le vert est absent des séquences en Afghanistan ou au
Kenya.
Dans le film, Rebecca suit un commando suicide. Est-ce réaliste qu’un
reporter se trouve dans de pareilles circonstances ?
C’est toute la complexité de ce métier aujourd’hui. Si vous
demandez à un reporter sur le terrain, à Kaboul : «Quelqu’un pourrait-il suivre
la préparation d’un attentat suicide, sans que ce soit une mise en scène pour
les médias ? » On vous dirait : « Oui ! Tôt ou tard quelqu’un
le fera, c’est imminent. » Si
vous demandez à un journaliste en Europe il vous dira : « Non, cela n’arrivera jamais
! » Mais la vérité, c’est que cela va
se produire. Et nous avons déjà vu une partie de cette histoire publiée par Le
New York Times. C’est un reportage intitulé «Talibanistan», remarquablement
réalisé par la photographe Lynsey Addario, qui dévoile le quotidien des
talibans. Ce qu’il y a dans le film est proche de la réalité. Mais c’est un
film de fiction, pas un documentaire. Ce que vous voyez est proche de la
vérité, autant que la fiction puisse le permettre.
Le fait que ce soit des femmes qui se préparent à commettre cet
attentat suicide, est-ce plausible?
Les gens pensent qu’il n’y a pas de femmes qui font cela, mais il
y en a. Et quand nous étions en tournage à Kaboul, le premier matin tandis que
nous nous préparions, le sol a tremblé. J’ai eu un appel de mon responsable de
la sécurité pour me demander si tout allait bien. Il m’a rappelé dix minutes
plus tard pour m’informer qu’il s’agissait d’un kamikaze, non loin de l’endroit
où nous étions, c’était une femme, dans une voiture qui a foncé dans un
véhicule qui transportait du personnel d’une compagnie aérienne européenne.
Seize personnes ont été tuées, par cette femme. Et nous, nous étions entrain de
tourner notre séquence sur une femme kamikaze. Parfois la réalité rejoint tellement
la fiction qu’on peut difficilement le croire.
La fin est à la fois impressionnante et laisse Rebecca dans une
situation étrange, pourquoi ce choix ?
Je voulais une fin ouverte, qui pose la question : « que va-t-elle
faire maintenant ? ». Mais je voulais montrer une situation où l’on n’est plus
en mesure de prendre des photos. Parce que ce à quoi vous assistez est trop
fort et se combine avec ce qui vous a affecté en tant qu’individu. La rencontre
de ces deux mondes fait que vous vous effondrez. C’est une question
fondamentale : comment peut-on être humain sans avoir une réaction face à une atrocité,
sans avoir envie de faire quelque chose, cesser de faire des images et dire : «
arrêtez, ne faites pas ça » ? Ce qui est sûr c’est que Rebecca est devenue une
autre personne à la fin du film. Je trouvais ce point de vue intéressant. Comme
ce film est très personnel, les gens me demandent après les projections : «
êtes-vous encore marié ? » La réponse n’est pas donnée dans le film. C’est
comme dans la vie qui est complexe et nuancée. Pour moi, la tâche d’un artiste
est de poser des questions sans essayer forcément d’y apporter des réponses.
Entretien croisé
Juliette
BINOCHE & Erik POPPE
Comment s’est passée la collaboration entre vous deux ?
Juliette Binoche : Un magnifique cauchemar, pour lui ! (rires)
Erik Poppe : Si on observe le résultat, cela a été génial, en tout
cas c’est mon sentiment. C’est tellement appréciable d’avoir quelqu’un d’ouvert
et de sincère comme Juliette, qui plonge dans le sujet de votre film. Pour
aboutir à un bon scénario qui fonctionne parfaitement vous avez besoin de vous
battre.
Juliette Binoche : J’ai dû te pousser au début !
Erik Poppe : Au début, oui, tu l’as fait !
Juliette Binoche : Après on a vraiment bien fonctionné ensemble.
Erik Poppe : Oui c’est vrai.
Juliette Binoche : Je pense que nous sommes autant passionnés l’un
que l’autre. Et quand vous avez deux passionnés autour du même sujet, vous avez
besoin de confrontation. Parce que je voulais aller plus loin sur certains
aspects. A propos du Congo, Erik m’en a parlé la première fois que nous nous sommes
rencontrés, et il n’y avait rien dans le scénario qui évoquait cet aspect des
choses. Je l’ai convaincu, car ce sujet me paraissait incontournable. Après tu
étais d’accord !
Erik Poppe : Oui c’est vrai, j’étais d’accord.
Il y a une scène où l’éditrice de Rebecca refuse de publier des
clichés sensibles qu’elle a réalisés, que signifie cette situation?
Juliette Binoche : Quand, en risquant votre vie, vous prenez des
photos dont le contenu est sensible, tragique, parfois les directeurs d’édito
refusent de publier vos clichés pour des raisons diverses, souvent politiques,
la hiérarchie dans les médias est complexe, elle implique parfois les
gouvernements ou des gens importants. Mais quand vous avez été sur le terrain,
que vous connaissez la vérité, ce qui s’est réellement passé, et qu’on vous refuse
de rendre votre travail public, vous devez avoir envie de hurler !
Erik Poppe : La plupart des photographes de guerre sont intégrés
aux forces armées, ce qui signifie qu’ils ont des relations avec les
militaires, qu’ils les suivent, racontent leur histoire, ce qui est important
aussi. Rebecca fait partie des reporters indépendants, qui s’intéressent aux
civils et aux talibans. Ses reportages doivent être validés à postériori et peuvent
donc être censurés.
Juliette Binoche, pouvez-vous nous parler de votre personnage?
Juliette Binoche : Rebecca est une photographe de guerre, comme si
ces zones dangereuses révélaient son courage, son audace, ses capacités
comme ses limites. Cette situation donne un sens à sa vie, une sorte de
pouvoir, d’avoir l’information directe, de parler de gens dans la détresse. À
la fois la culpabilité de ses absences est grande, car rentrée à la maison elle
doit refaire le lien entre sa famille et elle, son mari et ses enfants. Rebecca
est confrontée aux émotions de son mari mais surtout à la conscience de sa
fille, qui adolescente lui demande des comptes. Sa fille l’aidera à grandir et
à prendre un autre souffle dans son parcours de photographe et de femme.
Entretien avec
Nikolaj
COSTER-WALDAU
Comment êtes-vous arrivé sur le projet de L ‘ÉPREUVE ?
J’avais lu le scénario en norvégien et l’avais trouvé passionnant.
A ce moment-là, le film devait se tourner en Norvège. Cela ne s’est pas fait à
cause des dates, je n’étais pas libre, ce qui me désolait. Le projet est
réapparu plus tard et heureusement, j’étais disponible.
J’avais vu le dernier film d’Erik Poppe : «En Eaux Troubles», que
j’avais beaucoup aimé. Nous nous sommes rencontrés et il m’a appris que le
scénario était inspiré de son histoire personnelle que je ne connaissais pas. J’étais
vraiment content de pouvoir jouer dans ce film, parce qu’en plus d’un très bon
scénario, le rôle était intéressant.
Quel est le personnage que vous interprétez ?
Mon personnage de Marcus, qui est danois, a rencontré une femme
française il y a des années, ils sont tombés follement amoureux et ont décidé
de s’installer à Dublin. Je pense que démarrer une vie ensemble en terrain
neutre est une idée romantique. Marcus est biologiste marin, passionné par son
travail. Pour lui, l’Irlande, est l’endroit idéal. Je le vois comme un homme
responsable, très sérieux, qui a fait des enfants. C’est très important pour
lui d’accomplir cette tâche, de former une famille, et il le fait de bon cœur.
Quelles sont les relations au sein de cette famille ?
Normalement dans ce genre de film, le photographe serait un homme
et la femme resterait à la maison avec les enfants. Mais ici c’est l’inverse,
c’est ça que je trouvais intéressant. On ne porte pas le même regard sur un homme qui va
réaliser ses ambitions que sur une femme qui fait la même chose. On ne va pas
penser d’un père que c’est un mauvais père quand il part travailler. Dans le
scénario de L’ÉPREUVE Marcus n’accuse pas Rebecca d’être une mauvaise mère, il
dit simplement : « je ne supporte pas de vivre sous la pression de ne pas
savoir quand tu reviens ».
Comment le personnage de Marcus vit cette situation ?
Au début du film, Rebecca est gravement blessée par une explosion.
Marcus prend alors conscience qu’il a vécu dans cette peur depuis des années. C’est
presque un soulagement, mais cette révélation est très gênante. Il comprend
qu’il s’est préparé à cet évènement tragique durant toutes ces années. En même
temps, on ne peut pas se préparer à récupérer sa femme déchiquetée en petits
morceaux par une bombe !
Pouvez-vous nous parler de la collaboration avec Juliette Binoche
?
Pour chaque scène, Juliette et moi avons dû beaucoup travailler.
Le tournage fut aussi inspirant que difficile. D’abord, il se passe quelque
chose dans la traduction d’une langue à l’autre, et en même temps il se créée
une dynamique par le fait d’être un homme et une femme, de jouer un couple.
Heureusement, Erik était très ouvert au dialogue et nous avons pu travailler
dans une atmosphère vraiment accueillante pour notre créativité.
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