Drame/Thriller/Un film intéressant dans le traitement de son sujet au travers du prisme culturel, une bonne découverte !
Réalisé par Kim Seong-hun
Avec Ha Jung-Woo, Doona Bae, Dal-Su Oh...
Long-métrage Sud-coréen
Titre original : Teo-neol
Durée: 02h06mn
Année de production: 2016
Distributeur: Version Originale/Condor
Date de sortie sur les écrans américains : 10 août 2016
Date de sortie sur nos écrans : 3 mai 2017
Résumé : Alors qu’il rentre retrouver sa famille, un homme est accidentellement enseveli sous un tunnel, au volant de sa voiture. Pendant qu’une opération de sauvetage d’envergure nationale se met en place pour l’en sortir, scrutée et commentée par les médias, les politiques et les citoyens, l’homme joue sa survie avec les maigres moyens à sa disposition. Combien de temps tiendra-t-il ?
Bande annonce (VOSTFR)
TUNNEL de KIM Seong-hun - En salles le 03.05.2017 from V.O. on Vimeo.
Ce que j'en ai pensé : TUNNEL s'inspire de la nouvelle éponyme de SO Jae-won. Le réalisateur, KIM Seong-hun, nous invite à assister à une catastrophe immense et à ses conséquences à l'échelle individuelle et nationale.
J'ai trouvé ce traitement intéressant, car il permet d'explorer des points de vue différents. Ce film est très influencé par la culture sud-coréenne. Il n'aurait pas été raconté avec la même sensibilité et les mêmes touches d'humour dans un autre pays. Le réalisateur ne cache pas les faiblesses du système politique et administratif dans son histoire. Les scènes liées à l'effondrement du tunnel sont spectaculaires. Les moments vécus par le protagoniste central, Jung-soo, interprété par Ha Jung-Woo, sont anxiogènes et parfois proche de la claustrophobie. Elles sont crédibles et on ne peut s'empêcher de ressentir de l'empathie pour lui, ainsi que pour sa femme, Se-hyun, interprétée par Doona Bae, qui vit l'événement de l'extérieur. Il n'y a pas de surenchère dans l'émotion et pourtant, elle est intense lors de plusieurs moments clefs.
Entre ces deux protagonistes liés par leur amour, un sauveteur, Dae-kyoung, interprété par Dal-Su Oh, va tout tenter pour sauver Jung-soo. Il apporte le regard des équipes de sauvetage qui doivent gérer leur travail, les journalistes et leur soif de sensationnel, ainsi que les décisions politiques menées par l'argent et les statistiques.
Quelques ressorts scénaristiques sont prévisibles, mais, encore une fois, l'approche culturelle dans la gestion de cette catastrophe apporte à ce long-métrage une originalité bienvenue.
TUNNEL est un film qui traite son sujet de manière efficace et intéressante, tout en se concentrant sur des points de vue qui font avancer l'intrigue. C'est un film à découvrir.
Réalisé par Kim Seong-hun
Avec Ha Jung-Woo, Doona Bae, Dal-Su Oh...
Long-métrage Sud-coréen
Titre original : Teo-neol
Durée: 02h06mn
Année de production: 2016
Distributeur: Version Originale/Condor
Date de sortie sur les écrans américains : 10 août 2016
Date de sortie sur nos écrans : 3 mai 2017
Bande annonce (VOSTFR)
TUNNEL de KIM Seong-hun - En salles le 03.05.2017 from V.O. on Vimeo.
Ce que j'en ai pensé : TUNNEL s'inspire de la nouvelle éponyme de SO Jae-won. Le réalisateur, KIM Seong-hun, nous invite à assister à une catastrophe immense et à ses conséquences à l'échelle individuelle et nationale.
Le réalisteur KIM Seong-hun |
Entre ces deux protagonistes liés par leur amour, un sauveteur, Dae-kyoung, interprété par Dal-Su Oh, va tout tenter pour sauver Jung-soo. Il apporte le regard des équipes de sauvetage qui doivent gérer leur travail, les journalistes et leur soif de sensationnel, ainsi que les décisions politiques menées par l'argent et les statistiques.
Quelques ressorts scénaristiques sont prévisibles, mais, encore une fois, l'approche culturelle dans la gestion de cette catastrophe apporte à ce long-métrage une originalité bienvenue.
TUNNEL est un film qui traite son sujet de manière efficace et intéressante, tout en se concentrant sur des points de vue qui font avancer l'intrigue. C'est un film à découvrir.
NOTES DE PRODUCTION
(A ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers !)
En évitant les écueils habituels, « TUNNEL » rejette les conventions du film
catastrophe.
Contrairement aux films catastrophe qui supposent une accumulation de
désastres plus impressionnants les
uns que les
autres, « TUNNEL » suit
une direction unique. Jung - soo, vendeur de
voitures , est en
route pour son
domicile après une
journée de travail , rapportant un gâteau d'anniversaire pour sa fille lorsqu’il se retrouve emprisonné sous un tunnel.
Le réalisateur KIM Seong-hun précise, « la valeur d'une vie
humaine ne peut pas être mesurée
quantitativement , cela n’a pas de
sens de distinguer un grand ou un petit nombre de victimes. Au contraire, j'ai pensé qu'une personne ayant seule survécu
par elle - même à
une catastrophe terrible doit
ressentir beaucoup plus de solitude et de peur . »
En
outre, dans ce genre
de film , les personnages héroïques feraient n'importe quoi pour protéger leurs proches. Mais dans « TUNNEL », Jung-soo ne peut
rien faire. Juste suivre
les
instructions de l'équipe
de secours et attendre. Sa mission
la plus difficile est celle de survivre, ne pas désespérer et ne pas perdre espoir en attendant d’être secouru.
Les films catastrophe portent souvent une attention particulière aux efforts du héros pour surmonter la catastrophe et s’en sortir vivant. Mais la situation dans «
TUNNEL » est toute autre. Le film dépeint simultanément
les deux situations intérieure et extérieure du tunnel, et la distance qui se développe au fur et à mesure entre Jung-soo et le dehors.
Après l’échec de l’équipe de secours, tout est mis à l’arrêt, et les gens deviennent farouchement
égoïste s . Alors que Jung-soo attend patiemment tant
bien que mal
l’arrivée des sauveteurs, à l’extérieur la fatigue et le désespoir commencent à se faire sentir en l'absence du moindre progrès. Un conflit se fait peu à peu jour autour de l’équipe de secours et des moyens mis en œuvre pour venir en aide à cet homme. Echo de notre société, « TUNNEL » rappelle ainsi à chacun la valeur de la vie
humaine et offre une réflexion sur la réalité de notre ère.
Un casting réunissant de grands
acteurs coréens contemporains.
HA Jung-woo interprète de la manière
la plus réaliste possible Jung-soo, un homme ordinaire qui lutte pour survivre et retourner auprès de sa famille. A fin d'exprimer le choc de se retrouver soudain enterré sous un tunnel,
HA Jung-woo n’a été
soumis à aucune préparation, laissant ainsi place
à un désespoir plus instinctif
Doona BAE, interprète avec détermination Se - yun, la femme qui attend le retour sain et sauf de
son mari. Evitant la démonstration
excessive, Doona BAE s’attache à l’état psychologique de cette femme qui
affronte avec le plus grand calme le danger face auquel se trouve celui qu’elle aime. Oh Dal Su a, quant
à lui, donné corps à
Dae - kyung, chef de
l’équipe de secours qui fait tout ce qu’il peut pour sauver
Jung - soo. Plutôt que de le décrire de façon héroïque comme souvent les secouristes, le personnage joué par Oh Dal Su se distingue par
sa capacité à partager les souffrances de la victime. L’image chaleureuse et amicale de Oh Dal Su
ajoute ainsi beaucoup au rôle.
Les excès du développement de la Corée du Sud.
Le pays est aujourd'hui en tête du
classement des pays de l'OCDE en termes de décès par accident. En effet, le
rapide développement économique du pays de ces trente dernières années, au rythme
du « pali-pali » (« plus vite, plus vite »), fut réalisé à marche forcée au détriment de la sécurité. La collusion entre les chaebols
[conglomérats] et les bureaucrates
reste un problème
structurel de la Corée du Sud
, qui a
contribué à la tragédie du Sewol. Au lendemain de ce naufrage ayant fait 304 victimes en avril 2014, le
développement économique de la Corée du Sud est apparu comme inabouti.
Fondé sur la vitesse et obsédé par la compétitivité, il aura
été trop négligeant
envers les vies humaines,
considérant trop longtemps les règles de sécurité comme des entraves.
Entretien avec KIM Seong-hun
Pourquoi avoir choisi ce sujet pour votre nouveau film ?
Une
personne ordinaire, n’ayant
commis aucune faute,
se retrouve prise
au piège d’une
catastrophe provoquée par des
erreurs de la société. Un film est un
film, la réalité est la réalité, mais de nos jours de
nombreux incidents ressemblent
davantage à des
films qu’à la réalité.
À vivre dans
une telle société, je me suis naturellement intéressé à
ce genre d’histoire. « TUNNEL » est, à l’origine, un roman. J’étais fasciné par cette histoire qui s’intéresse à la survie d’un homme enseveli sous les
décombres d’un tunnel qui s’est
effondré, mais aussi au travail des équipes de sauvetage et ce qui se passe à l’extérieur,
autour de ce drame. C’est
ce qui m’a vraiment plu
dans ce livre.
Nous nous sommes
rapidement rendu compte
des contraintes techniques
qu’engendrait une telle histoire, mais ce qui m’a motivé était la façon
dont je pouvais adapter un tel matériel à l’écran, en
mélangeant à la fois du suspense, de
l’effroi et de l’émotion. C’est apparu un
peu comme un défi personnel.
Comment avez-vous trouvé votre
tunnel ?
Durant la préproduction, j’ai visité tous les tunnels du pays. L’intrigue du film se passe dans un tunnel récemment
construit. Il était
difficile d’en trouver
un vrai, suffisamment
récent. Nous avions identifié plusieurs possibilités, et finalement notre choix s’est porté sur le tunnel Okcheon qui est condamné.
L’équipe décoration s’est alors attelé à un gros chantier pour créer une nouvelle route, une rambarde et des
fanions pour lui donner l’apparence d’un tunnel flambant neuf. Grâce à leurs efforts, nous avons été capables de créer
l’image exacte du tunnel que j’imaginais.
En réalisant votre film, aviez-vous en tête des exemples de films ? Quels étaient les impératifs et les pièges à éviter ?
Oui
forcément, on pense à tous ces films hollywoodiens à grand spectacle sur des catastrophes gigantesques.
C’est divertissant, mais
c’est très loin
de ce que
je fais. Je ne voulais pas me focaliser sur le dés astre mais sur les conséquences du
désastre.
Votre film n’est pas tant une satire
des institutions, qu’un drame à hauteur d’homme...
Je m’intéressais surtout aux
équipes de sauvetage
et à ce
qui se passe
autour de cette
catastrophe. Imaginez la
situation : des moyens considérables sont mis en œuvre pour sauver un seul
individu. Si vous changez l’équation et vous vous retrouvez avec un groupe de personnes enfouies sous les décombres, les institutions, les politiques ou les sauveteurs se conduiraient sûrement très différemment face à un tel drame. Malheureusement, dans ce film il n’y a qu’un survivant, et la question
se pose sur la nécessité de déployer
tous ces moyens pour le tirer d’affaire.
C’est un cas de conscience passionnant à traiter. Je me suis concentré sur l’humain et ces groupes qui se tuent à la tâche et qui, à mesure que le temps passe dans la mission de sauvetage, perdent espoir et motivation. Je voulais éviter l’approche hollywoodienne, sa débauche de moyens et sa dramaturgie artificielle.
Était-ce une façon pour vous d’aborder la tragédie du ferry Sewol ?
« TUNNEL » fut tourné quand eut lieu cette terrible tragédie. On ne peut nier une certaine influence de ces événements, et je pense que de manière consciente et inconsciente, ils ont trouvé un certain écho dans l’histoire de mon film qui traite de l’importance d’une vie humaine.
À quoi avez-vous prêté le plus attention, pendant le tournage ?
Le rire fait partie de nos vies au même titre que le désespoir, la douleur ou la tristesse. J’ai donc tenu à inclure de la façon la plus naturelle possible de l’humour et des rires dans le film, bien que la survie d’un homme soit en jeu.
Pourquoi avoir choisi une mise en place aussi rapide ?
Il est vrai que dans les films catastrophe, on a tendance à s’attarder sur le développement des personnages qui vont se retrouver au cœur du sinistre avant le climax. Mon choix de montrer la catastrophe au bout des cinq premières minutes d’un film qui dure un peu plus de deux heures était intentionnel. Cela me permettait de me concentrer sur ce qui se passe après et sur l’évolution des personnages à la suite de ce drame.
Pour quelle raison avoir décidé de si peu caractériser votre personnage principal ? Au final, on ne sait rien de lui.
C’était voulu, cela me permettait de créer une identification plus facile de la part du spectateur. C’est Monsieur Tout Le Monde ! C’est un homme ordinaire qui se retrouve dans une situation critique. Cela sous - entend qu’une telle chose peut nous arriver à vous comme à moi.
Comment avez-vous fait pour rendre le sentiment de claustrophobie aussi prégnant ?
C’était simple pour moi. Afin de restituer le plus justement ce sentiment à l’écran, il fallait reconstituer la scène de l’accident à l’identique sur le plateau. Nous avions donc cette voiture encastrée sous un monceau de gravats. En raison du manque de place pour installer des caméras, nous avons mis quatre mini caméras dans la voiture, et l’acteur HA Jung-woo était comme son personnage coincé à l’étroit dans la carcasse du véhicule, et il pouvait jouer librement sans équipe technique autour de lui pour le filmer. J’ai prêté attention à placer la caméra de façon à ce que les acteurs ne la voient pas. Je voulais capter les émotions des acteurs. Dès que cela était possible je gardais la caméra hors du champ de vision des acteurs, ils ne voyaient ainsi que le tunnel effondré tout autour d’eux. J’aime à croire que cela les a aidés dans leur jeu. Il n’y avait aucune source lumineuse additionnelle, les scènes étaient éclairées aux moyens des lampes, les voyants de la voiture et la torche électrique du personnage principal. Nous aurions très bien pu en studio avoir des parties amovibles qui nous auraient permis de faire des plans larges et de montrer clairement la situation. Mais j’ai opté pour une approche plus immersive avec des scènes filmées en gros plans.
Le film repose en partie sur les talents de vos trois acteurs principaux. Comment les avez - vous dirigés ?
Pour le personnage principal Jung-soo, j’ai voulu par contraste prendre un acteur qui dégage une énergie très positive, une forme de fraîcheur juvénile. HA Jung-woo est une personne optimiste, très drôle . Il a cette capacité de jeu très minimaliste. Et je pense que dans un contexte de claustrophobie, c’était l’approche idéale. HA Jung-woo est de ces acteurs qui n’ont besoin d’aucune explication. Sa façon de jouer de son charisme naturel est te l l e que même dans les scènes les plus sombres et les plus effraya nt e s, il est capable de provoquer le rire et la sympathie des spectateurs pour son personnage.
Oh Dal-su incarne à la perfection ce chef de l’équipe de secours doté d’un sens aiguisé du devoir, prêt à tout mettre en œuvre pour secourir Jung-soo, et déterminé à sauver une personne qu’il ne connaît pas.
Concernant Se-hyun, le personnage de l’épouse , c ’est peut - être un rôle pour lequel on doit ressentir encore plus de peine que pour le prisonnier des décombres. Je ne voulais pas que cette femme dévoile ouvertement ses sentiments et sa détresse. Je ne voulais pas la montrer en train de pleurer à longueur de journée et se lamenter sur son propre sort. Je souhaitais qu’elle ait une certaine retenue dans ses émotions et qu’elle laisse transparaître malgré elle sa tristesse. Un tel rôle correspondait parfaitement aux talents de Doona BAE . Elle ne joue pas, elle n’essaie pas de montrer des émotions, quand elle interprète un personnage, elle l’incarne. El le ressent ses sentiments. C’est une qualité assez extraordinaire. Je me souviens encore de mon choc en voyant l’angoisse ardente qu’elle a su nous transmettre.
Était-ce intentionnel cette volonté de pudeur des sentiments ?
En effet je ne voulais pas jouer de l’exagération, et surtout pas avancer avant les spectateurs. Je voulais qu’ils ressentent les choses par eux - mêmes, et non pas les forcer. Concernant le couple interprété par HA Jung-woo et Doona BAE , ils sont déjà dans une situation très difficile, voire critique, qui leur fait ressentir de la peine et de la douleur. Je ne voulais pas grossir le trait de manière artificielle pour manipuler les spectateurs. C’était, il me semble, la bonne méthode.
Pour quelles raisons avez - vous mis en scène la presse traditionnelle mais sans évoquer l’utilisation des réseaux sociaux ?
Je voulais montrer le spectre des médias coréens. Les réseaux sociaux ont en effet une grande importance, mais dans ce que je souhaitais raconter, ce n’était pas primordial. Je pense que l’on pouvait se concentrer sur les médias classiques de la presse et de la télévision. J’avais filmé des scènes sur la réaction du peuple face à cette catastrophe, mais je les ai supprimées au montage. Et puis je les vois plus comme des spectateurs, comme vous, les spectateurs du film, cela me semblait donc plus intéressant de les suggérer par l’entremise de votre point de vue.
Dans le film, il y a cette scène durant laquelle le personnage de Doona BAE reçoit un contrat stipulant l’arrêt des recherches et la reprise de travaux du Tunnel n°2. Et devant ce dilemme, elle interpelle l’officiel en lui demandant ce qu’il faudrait faire si son mari était encore en vie. J’ai eu des retours de spectateurs qui se sont sentis mal à ce moment, et c’est ce que je voulais. Dans la scène précédente, on pouvait lire sur la U ne d’un journal le résultat d’un sondage qui indiquait la volonté de l’opinion publique favorable à 65% à la reprise des travaux. C’est de cette façon que j’ai voulu la représenter dans le film.
Quel est pour vous, le message du film ?
« TUNNEL » est une histoire réaliste sur la vie humaine et le spectacle qu’elle peut offrir. C’est un film sur la vie. Pour moi, la vie humaine, chose la plus importante que nous ayons, est beaucoup trop dévalorisée de nos jours. J’espère qu’à travers le personnage de Jung-soo, piégé sous le tunnel, nous pouvons à nouveau nous interroger sur le sens de la vie humaine.
C’est un cas de conscience passionnant à traiter. Je me suis concentré sur l’humain et ces groupes qui se tuent à la tâche et qui, à mesure que le temps passe dans la mission de sauvetage, perdent espoir et motivation. Je voulais éviter l’approche hollywoodienne, sa débauche de moyens et sa dramaturgie artificielle.
Était-ce une façon pour vous d’aborder la tragédie du ferry Sewol ?
« TUNNEL » fut tourné quand eut lieu cette terrible tragédie. On ne peut nier une certaine influence de ces événements, et je pense que de manière consciente et inconsciente, ils ont trouvé un certain écho dans l’histoire de mon film qui traite de l’importance d’une vie humaine.
À quoi avez-vous prêté le plus attention, pendant le tournage ?
Le rire fait partie de nos vies au même titre que le désespoir, la douleur ou la tristesse. J’ai donc tenu à inclure de la façon la plus naturelle possible de l’humour et des rires dans le film, bien que la survie d’un homme soit en jeu.
Pourquoi avoir choisi une mise en place aussi rapide ?
Il est vrai que dans les films catastrophe, on a tendance à s’attarder sur le développement des personnages qui vont se retrouver au cœur du sinistre avant le climax. Mon choix de montrer la catastrophe au bout des cinq premières minutes d’un film qui dure un peu plus de deux heures était intentionnel. Cela me permettait de me concentrer sur ce qui se passe après et sur l’évolution des personnages à la suite de ce drame.
Pour quelle raison avoir décidé de si peu caractériser votre personnage principal ? Au final, on ne sait rien de lui.
C’était voulu, cela me permettait de créer une identification plus facile de la part du spectateur. C’est Monsieur Tout Le Monde ! C’est un homme ordinaire qui se retrouve dans une situation critique. Cela sous - entend qu’une telle chose peut nous arriver à vous comme à moi.
Comment avez-vous fait pour rendre le sentiment de claustrophobie aussi prégnant ?
C’était simple pour moi. Afin de restituer le plus justement ce sentiment à l’écran, il fallait reconstituer la scène de l’accident à l’identique sur le plateau. Nous avions donc cette voiture encastrée sous un monceau de gravats. En raison du manque de place pour installer des caméras, nous avons mis quatre mini caméras dans la voiture, et l’acteur HA Jung-woo était comme son personnage coincé à l’étroit dans la carcasse du véhicule, et il pouvait jouer librement sans équipe technique autour de lui pour le filmer. J’ai prêté attention à placer la caméra de façon à ce que les acteurs ne la voient pas. Je voulais capter les émotions des acteurs. Dès que cela était possible je gardais la caméra hors du champ de vision des acteurs, ils ne voyaient ainsi que le tunnel effondré tout autour d’eux. J’aime à croire que cela les a aidés dans leur jeu. Il n’y avait aucune source lumineuse additionnelle, les scènes étaient éclairées aux moyens des lampes, les voyants de la voiture et la torche électrique du personnage principal. Nous aurions très bien pu en studio avoir des parties amovibles qui nous auraient permis de faire des plans larges et de montrer clairement la situation. Mais j’ai opté pour une approche plus immersive avec des scènes filmées en gros plans.
Le film repose en partie sur les talents de vos trois acteurs principaux. Comment les avez - vous dirigés ?
Pour le personnage principal Jung-soo, j’ai voulu par contraste prendre un acteur qui dégage une énergie très positive, une forme de fraîcheur juvénile. HA Jung-woo est une personne optimiste, très drôle . Il a cette capacité de jeu très minimaliste. Et je pense que dans un contexte de claustrophobie, c’était l’approche idéale. HA Jung-woo est de ces acteurs qui n’ont besoin d’aucune explication. Sa façon de jouer de son charisme naturel est te l l e que même dans les scènes les plus sombres et les plus effraya nt e s, il est capable de provoquer le rire et la sympathie des spectateurs pour son personnage.
Oh Dal-su incarne à la perfection ce chef de l’équipe de secours doté d’un sens aiguisé du devoir, prêt à tout mettre en œuvre pour secourir Jung-soo, et déterminé à sauver une personne qu’il ne connaît pas.
Concernant Se-hyun, le personnage de l’épouse , c ’est peut - être un rôle pour lequel on doit ressentir encore plus de peine que pour le prisonnier des décombres. Je ne voulais pas que cette femme dévoile ouvertement ses sentiments et sa détresse. Je ne voulais pas la montrer en train de pleurer à longueur de journée et se lamenter sur son propre sort. Je souhaitais qu’elle ait une certaine retenue dans ses émotions et qu’elle laisse transparaître malgré elle sa tristesse. Un tel rôle correspondait parfaitement aux talents de Doona BAE . Elle ne joue pas, elle n’essaie pas de montrer des émotions, quand elle interprète un personnage, elle l’incarne. El le ressent ses sentiments. C’est une qualité assez extraordinaire. Je me souviens encore de mon choc en voyant l’angoisse ardente qu’elle a su nous transmettre.
Était-ce intentionnel cette volonté de pudeur des sentiments ?
En effet je ne voulais pas jouer de l’exagération, et surtout pas avancer avant les spectateurs. Je voulais qu’ils ressentent les choses par eux - mêmes, et non pas les forcer. Concernant le couple interprété par HA Jung-woo et Doona BAE , ils sont déjà dans une situation très difficile, voire critique, qui leur fait ressentir de la peine et de la douleur. Je ne voulais pas grossir le trait de manière artificielle pour manipuler les spectateurs. C’était, il me semble, la bonne méthode.
Pour quelles raisons avez - vous mis en scène la presse traditionnelle mais sans évoquer l’utilisation des réseaux sociaux ?
Je voulais montrer le spectre des médias coréens. Les réseaux sociaux ont en effet une grande importance, mais dans ce que je souhaitais raconter, ce n’était pas primordial. Je pense que l’on pouvait se concentrer sur les médias classiques de la presse et de la télévision. J’avais filmé des scènes sur la réaction du peuple face à cette catastrophe, mais je les ai supprimées au montage. Et puis je les vois plus comme des spectateurs, comme vous, les spectateurs du film, cela me semblait donc plus intéressant de les suggérer par l’entremise de votre point de vue.
Dans le film, il y a cette scène durant laquelle le personnage de Doona BAE reçoit un contrat stipulant l’arrêt des recherches et la reprise de travaux du Tunnel n°2. Et devant ce dilemme, elle interpelle l’officiel en lui demandant ce qu’il faudrait faire si son mari était encore en vie. J’ai eu des retours de spectateurs qui se sont sentis mal à ce moment, et c’est ce que je voulais. Dans la scène précédente, on pouvait lire sur la U ne d’un journal le résultat d’un sondage qui indiquait la volonté de l’opinion publique favorable à 65% à la reprise des travaux. C’est de cette façon que j’ai voulu la représenter dans le film.
Quel est pour vous, le message du film ?
« TUNNEL » est une histoire réaliste sur la vie humaine et le spectacle qu’elle peut offrir. C’est un film sur la vie. Pour moi, la vie humaine, chose la plus importante que nous ayons, est beaucoup trop dévalorisée de nos jours. J’espère qu’à travers le personnage de Jung-soo, piégé sous le tunnel, nous pouvons à nouveau nous interroger sur le sens de la vie humaine.
#Tunnel
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