mardi 12 juillet 2016

C'EST QUOI CETTE FAMILLE ?!


Comédie/Mignonne et fraîche

Réalisé par Gabriel Julien-Laferrière
Avec Julie Gayet, Thierry Neuvic, Julie Depardieu, Lucien Jean-Baptiste, Claudia Tagbo, Philippe Katerine, Chantal Ladesou, Arié Elmaleh...

Long-métrage Français
Durée: 01h39mn
Année de production: 2015
Distributeur: UGC Distribution

Date de sortie sur nos écrans : 10 août 2016


Résumé : Bastien, 13 ans, est au centre d’une famille recomposée : 6 demi-frères et soeurs, 8 « parents » et autant de maisons. Son emploi du temps familial est bien plus complexe que celui du collège... Trop c’est trop : les enfants décident de faire leur révolution et inversent les règles. Tous ensemble, ils squattent un grand appart’, et ce sera désormais aux parents de se déplacer !

Bande annonce (VF)


Ce que j'en ai penséJ'ai trouvé le film sympathique et même assez marrant par moment. J'ai apprécié que le réalisateur adopte plus le point de vue des enfants sur le sujet de la famille recomposée, cela amène de la fraîcheur et une opinion tranchée sur la question : les (demi[e]s) frères et sœurs, c'est cool; se plier aux plannings des parents en permanence avec changement de maison tout le temps, c'est naze. Le traitement de l'histoire est d'ailleurs plus intéressant, à mon avis, côté enfants que côté parents. En effet, voir les enfants prendre leur vie en main face à des adultes un peu paumés à un côté 'rôles inversés' assez rigolo.


Sans trop tomber dans les caricatures, le réalisateur, Gabriel Julien-Laferrière, ne les évitent pas toutes non plus : par exemple le grand frère livreur de pizza et fumeur de joints n'est pas très original. J'ai aimé la spontanéité des acteurs petits et grands. Chacun apporte une personnalité spécifique à son personnage et l'ensemble fonctionne bien. 
Les répliques sont un peu inégales et celles des enfants sont de temps en temps inaudibles. 
Il y a des moments très drôles avec un comique de situation bien amené. Le réalisateur gère intelligemment la mise en valeur de tous les personnages par de petites scènes permettant à chacun de se faire connaître et reconnaître auprès des spectateurs, tout en déroulant son message principal.
Les enfants sont bien trouvés, ils forment un groupe attachant et complémentaire. Et puis comment ne pas craquer pour la frimousse du petit Gulliver, le bébé de la famille ?



C'EST QUOI CETTE FAMILLE ?! est un film mignon qui fera rire les ados qui se reconnaîtront forcément et sourire les parents qui ne manqueront pas de se retrouver aussi un peu dans ce méli-mélo de personnalités parentales.



NOTES DE PRODUCTION 
(A ne lire qu'après avoir vu le film pour éviter les spoilers !)

INTERVIEW DE GABRIEL JULIEN-LAFERRIERE

Gabriel Julien-Laferrière, quel a été jusqu’ici votre parcours en cinéma ? 

Je travaille depuis le début des années 80, mais je n’ai pas fait mes classes dans la comédie. J’ai longtemps travaillé dans l’univers du cinéma d’auteur, en qualité d’assistant aux côtés de réalisatrices comme Claire Denis, Claire Devers, Chantal Ackerman, ou Nicole Garcia. Pour autant, je n’étais pas fermé à ce genre. Que je finisse par y trouver ma place, a été le fait de rencontres. 

Et parmi ces rencontres, celle du réalisateur-producteur Djamel Bensalah. 

Oui, en 2006 j’ai assuré pour lui la réalisation de la deuxième équipe sur BIG CITY, un western dont les héros étaient déjà des enfants. Puis en 2009 Djamel m’a proposé de réaliser NEUILLY SA MERE! Encore avec des enfants... Et le film a été un succès : 2,5 millions d’entrées. 

Ensuite, la télévision vous a sollicité. Pour diriger des enfants à nouveau. 

J’ai réalisé huit épisodes en deux ans de FAIS PAS CI, FAIS PAS CA où les mômes tiennent un rôle important. Et là encore, cela a très bien fonctionné auprès du public. Depuis, j’ai la réputation d’être bon avec les petits. Surtout, j’adore ça. 

Tout est allé très vite jusqu’à réaliser C’EST QUOI CETTE FAMILLE?! ? 

En effet puisqu’en janvier 2015 nous avons fait une première réunion et puis le tournage a débuté dès la fin août. Entre les deux, j’ai assuré une part de la réécriture du script et lancé le casting des enfants et en parallèle celui de leurs “parents”. 

L’histoire compte dix-neuf personnages. N’était-ce pas une difficulté ? 

C’en était une a priori, mais elle a été compensée par le fait que chaque personnage était parfaitement dépeint. Après, tout réside dans l’équilibre. Mais il m’a fallu accepter que tous n’auraient pas la même importance. Pour autant, nous avons procédé à un tricotage savant pour que chacun ait son “solo” : quelque chose de signifiant à jouer. 

Quelle a été votre première perception du groupe formé par les petits ? 

Au départ, j’ai les ai sentis un peu perdus. C’était une sympathique pagaille, comme lorsque vous invitez vos copains pour un déjeuner de famille un dimanche ! Ils étaient à fond dans l’entreprise. Par leur énergie communicative, ils sont vite devenus le « moteur » du film. 

Comment avez-vous procédé ? Quelles ont été les différentes étapes ? 

Je voulais d’abord mettre en boîte les scènes des enfants entre eux. Nous avons fait une première lecture à la table. Elle m’a permis de déceler les “leaders”. Au départ, il y a eu quelques chocs de personnalités. Alors pour y parer, j’ai pris la meilleure décision de réalisateur de ma vie : en accord avec Karin Catala, leur coach, une fille fantastique qui travaille avec eux depuis des années au sein de sa compagnie Les Enfants de la Comédie. Nous avons loué un gîte à la campagne et embarqué tout ce petit monde pour un week-end d’intégration. L’idée n’était pas encore de travailler, mais de nous permettre de faire connaissance. On leur a installé des jets d’eau dans le jardin, on a joué, on a fait la cuisine... Et le soir venu, on les a tous couchés dans le même grand dortoir. Au départ, ils n’étaient pas à l’aise. Et puis ça a discuté toute la nuit. Le lendemain matin, c’était réglé. 

Ils sont arrivés sur le plateau fins prêts ? 

A la fin de cette première journée, les techniciens m’ont dit “mais comment as-tu fait pour que ça fonctionne aussi bien entre eux?” Et c’est vrai que ce week-end d’intégration a eu un effet très positif. Ils ont très rapidement cru qu’ils étaient réellement une famille. 

Quel est le profil de vos petits acteurs ? 

Sur le plan personnel, tous étaient familiers de près ou de loin à la notion de famille recomposée. D’ailleurs, certains des grands ont eu pour les petits des réflexes de protection réels. De fait, beaucoup de ce qui se passait à l’écran était alors “vrai”. 

Sur le plan professionnel, tous aussi, à l’exception du plus jeune (issu d’un casting de rue), avaient déjà eu une expérience d’agence. Certains avaient déjà travaillé avec Karin et possédaient les techniques d’improvisation. Ce qui s’est avéré précieux. Tant qu’ils jouaient, je ne coupais pas. 

Y a-t-il des films qui vous ont servi d’inspiration pour ce que vous vouliez faire ? 

La première partie, je l’ai voulue “aventure” dans l’esprit des GOONIES, produit par Steven Spielberg, un film pour lequel j’ai toujours eu beaucoup de tendresse. Dans C’EST QUOI CETTE FAMILLE ?! c’est la partie où les enfants mettent au point leur plan, avec la découverte de l’immense appartement inoccupé de la grand-mère. Il représente un univers sombre, qui au départ leur fait un peu peur. Sinon, pêle-mêle, j’ai repensé de loin à GÉNIAL, MES PARENTS DIVORCENT! à L’ARGENT DE POCHE et puis à un film qu’on connaît peut-être moins bien qui est LA VRAIE VIE DES PROFS. 

Je me suis également fait plaisir, en faisant un clin d’œil à… LA HORDE SAUVAGE, le temps d’un plan qui montre les gosses marcher en rang, épaule contre épaule, face caméra, l’air très déterminé. 

En découvrant le film, on a l’impression que l’appartement familial est comme un personnage en plus. 

C’était mon souhait. C’est un véritable appartement parisien qui se loue pour des tournages. La surface était enviable : 280 m2 et attenante à deux autres appartements similaires, qui nous ont permis d’accueillir dans le même immeuble les loges des artistes et le matériel. Une configuration idéale en termes de logistique. 

Au départ, il apparaît comme un lieu sombre et vétuste. Inquiétant. Trop vaste. Et par petites touches, au fil du récit, il subit des modifications qui de manière subliminale montrent que les petits prennent la main sur l’endroit. Ils en font une sorte de sympathique squat. Sa métamorphose a réclamé beaucoup de travail au service décoration. 

Quelle a été la durée du tournage ? 

Quarante-et-un jours. Ce qui, dans l’absolu était peu. Mais le cinéma réclame de devoir s’adapter de plus en plus à une réalité économique. Lorsque la production a donné le feu vert, le budget n’était pas encore entièrement bouclé. 

Tous les enfants étant scolarisés, on imagine qu’il n’a pas été simple non plus de faire avec cette autre contrainte ? 

C’est absolument vrai. Mais on a pu remercier tous les jours Martin Scorsese ! Depuis qu’il a tourné en France Hugo Cabret, dont le personnage principal était un enfant, la législation en la matière s’est assouplie. C’était en 2011. Avant, les enfants comédiens ne pouvaient pas passer plus de quatre heures par jour sur un tournage. Ils devaient alors quitter le plateau et ne revenir que le lendemain. Aujourd’hui, il est permis de les faire tourner deux fois deux heures dans la journée, avec une interruption, sur place, de trois heures. Cela permet de répartir le plan de travail de manière plus rationnelle. Cette même loi les autorise aussi désormais à travailler durant la moitié des vacances. Nous avons commencé fin août, ils ont fait leur rentrée comme les autres, puis sont revenus terminer les prises de vue jusqu’à la mi-octobre. Certains jours, des professeurs venaient leur faire la classe entre les prises de vue. 

Dans ces premières scènes, ils sont très nombreux dans le champ. Comment avez-vous procédé ? 

Réaliser un film c’est répondre à des questions. Et la première à laquelle j’ai dû réfléchir, c’était effectivement comment mettre en scène jusqu’à sept personnages à la fois ? Où placer la première caméra? La seconde? Les scènes de repas, ou de confrontations collégiales, sont toujours un casse-tête pour un metteur en scène. Impossible de se dire “on verra sur place”. Alors il faut arriver avec une idée très précise. J’ai donc été très directif sur les déplacements. Et puis, surprise, de temps en temps ils avaient une meilleure idée que moi. Une idée en tout cas qui venait compléter ce que j’avais échafaudé. Et là, c’était un plaisir que de se soumettre à leur énergie. Mais il y a toujours un petit moment de doute... 

A quel moment avez-vous été rassuré ? 

J’ai commencé à dormir sur mes deux oreilles lorsqu’au bout d’une semaine j’ai visionné ce que nous avions fait jusque-là. Et ça fonctionnait mieux que je ne l’aurais imaginé. 

Est-ce qu’il vous a fallu aussi construire la bande des adultes ? 

Non, entre eux, ça jouait facile. De surcroît, les enfants leur ont communiqué leur énergie. Pas de frictions, comme chez les petits au début. Rien que je n’aie remarqué en tout cas. Ou alors ils les ont bien cachées (rires)! Thierry Neuvic et Julie Gayet en particulier, ont été moteurs dès le début. 

Claudia Tagbo aussi a mis beaucoup d’entrain au profit du groupe. Avec elle, c’était vanne sur vanne pour chacun. 

Philippe Katerine est merveilleux. Dans un monde idéal, j’aurais eu envie de voir chacun des “parents” plus présents encore, mais Philippe, comme les autres, a accepté de n’être qu’un élément du tableau. Et je le trouve parfait dans ce rôle d’ex-mari mélancolique et un peu chiant, que personne n’écoute, jusqu’au moment où… Mais ne dévoilons pas les secrets de l’histoire ! 

Que dit le film sur la famille recomposée ? 

Entre autres choses, il rappelle d’abord qu’en France un mariage sur deux se termine en divorce. Et que les remariages aboutissent souvent, aussi, à une nouvelle séparation. Le sujet est sensible et je ne voulais pas être manichéen. La famille recomposée n’y est jamais érigée en modèle. Les enfants, même lorsque cela se passe au mieux, pâtissent d’un divorce. De fait, on ne voulait pas glorifier ces parents “adulescents”, qui pour un oui, pour un non, détricotent une famille pour en reconstruire une autre. 

Vous êtes marié ? Père de famille ? 

J’ai 54 ans, je suis en couple depuis trente ans et nos “petits” sont déjà bien grands : j’ai une fille de 27 ans et un fils de 25 ans. Pourtant, au contact des leurs copains de classe, ils ont grandi avec l’idée que les familles recomposées était la norme. Une anecdote m’en a fait prendre conscience. C’était il y a quelques années, lorsque je suis parti travailler en province pendant que mon épouse restait à Paris avec eux. Je rentrai naturellement les week-ends, mais ils se sont faits une parano: la situation ne leur convenait pas. Elle les inquiétait. Ils ont fini par nous avouer qu’ils étaient persuadés que nous étions séparés mais que nous n’osions pas leur dire!

Crédits photos : Jean-Claude Lother © BONNE PIOCHE CINEMAREZO PRODUCTIONS - TF1 DROITS AUDIOVISUELS - UGC IMAGES - M6 FILMS - 2016

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