mercredi 19 mars 2014

Back to the future


Au cinéma le 26 mars 2014

J'ai trouvé la bande annonce de ce film très touchante. L'histoire a l'air belle et émouvante.
Il s'agit d'un film de Nils Tavernier avec Jacques Gamblin, Alexandra Lamy et Fabien Héraud.


Résumé : Comme tous les adolescents, Julien rêve d’aventures et de sensations fortes. Mais lorsqu’on vit dans un fauteuil roulant, ces rêves-là sont difficilement réalisables. Pour y parvenir, il met au défi son père de concourir avec lui au triathlon « Ironman » de Nice: une des épreuves sportives les plus difficiles qui soit. Autour d’eux, c’est toute une famille qui va se reconstruire pour tenter d’aller au bout de cet incroyable exploit.

Bande annonce (VF)


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NOTES DE PRODUCTION

Entretien avec NILS TAVER NIER 

Comment est né ce projet ? 

Cela fait vingt ans que je m’intéresse aux enfants et à la maladie, et je venais de passer deux ans à l’hôpital Necker, au service de neurologie, pour les besoins d’un documentaire. J’ai été touché par certains de ces mômes différents des autres. J’avais constaté que dans certaines pathologies lourdes, les enfants pouvaient rayonner d’une énergie de vie incroyable qu’ils transmettaient autour d’eux, à leur famille et aussi à moi. Du coup, je voulais raconter une histoire qui parlait de cela, avec des personnages ni extraordinaires, ni banals, mais des individus qu’on pourrait tous être et qui vont se révéler exceptionnels grâce à l’enfant. Je voulais faire un film dont le protagoniste est certes handicapé, mais dont on oublie rapidement la pathologie : on le regarde et on constate sa différence, mais dès qu’on l’accepte dans sa différence, avec l’énergie qu’il vous renvoie, on ne voit plus le handicap. Je trouve ça magnifique. 

Le film s’inspire-t-il de vos rapports avec votre père ? 

Non, en fait, je me suis davantage nourri de mes rapports avec mon fils pour qui j’ai un amour immense et avec qui j’ai pratiqué beaucoup de sport. Par exemple, pour la scène où Julien est poussé par son père sur son vélo, je me suis souvenu que j’avais fait de la moto avec mon fils quand il avait 5 ans : je revois son sourire dans le rétroviseur, et c’est un souvenir qui a donné lieu à une séquence dans le film !

Ce qui frappe, c’est qu’il s’agit d’un récit d’apprentissage pour Julien, et aussi pour ses proches …

Dans beaucoup de familles qui affrontent le handicap, j’ai vu l’énergie du changement propulsée par l’enfant. Mais ce n’est pas systématique, certains enfants sont dans un état de tristesse permanent à cause de leur état, mais l’histoire de la famille du film, c’est avant tout celle d’un môme qui révèle à ses parents qui ils sont profondément. Grâce à lui, les parents changent les à priori qu’ils ont sur eux‑mêmes, et du coup, se dépassent et se rencontrent sur ce qu’ils ont de plus beau. Je trouve magnifique qu’un jeune de 18 ans puisse changer radicalement le parcours de son père : la construction psychique de ce dernier – la fuite et le rejet – s’infléchit sous l’influence de son enfant. Et Dieu sait que c’est difficile d’évoluer quand on s’est construit en tant qu’adulte avec des préjugés ! C’est ce qui arrive au père dans mon film lorsqu’il arrive à se dire : «ma femme n’est pas exactement celle que je pensais être et mon fils ne correspond pas tout à fait à la représentation que j’en avais». 

C’est avant tout un film solaire et tourné vers la vie… 

Au début du film, on est dans une famille paralysée, entre une mère qui surinvestit son fils, ce qui est fréquent quand on a un enfant différent, et un père trop souvent absent. Très vite, cette structure se débloque : les personnages reprennent goût à la vie avec l’objectif de cette course. Finalement, le moment de tension est assez court et effectivement j’ai voulu le film tout à la fois émouvant et surtout plein d’espoir. 

On sent une violence contenue chez le personnage du père. Comment s’est-il construit ? 

Au début du film, je voulais qu’il soit dans un étau : il est rentré chez lui à contrecœur parce qu’il est au chômage, il n’a pas envie de passer du temps avec son fils, et son couple – tout comme lui – est au bord de l’explosion. Je me retrouve un peu en lui : il m’arrive d’accumuler une violence contenue qui peut surgir brutalement. Peu à peu, il s’ouvre à sa propre poésie et à sa propre tendresse avec une pudeur infinie. Pour moi, le parcours de Gamblin est celui d’un héros des temps modernes : c’est ce qui donne son ampleur romanesque au film. 

Le film parle aussi de l’équilibre délicat à trouver entre la trop longue absence du père et la présence parfois étouffante de la mère. 

On est d’abord en présence d’une maman qui surinvestit son fils et d’un père qui a fui, puis leur position de parents va s’inverser. C’est difficile pour la mère d’accepter que le père prenne de la place dans la vie de son fils car, en même temps, elle en perd. Elle voit son enfant s’émanciper et participer à un projet avec son père, ce qui bouscule son autorité. Tout en étant heureuse pour lui, elle se sent un peu dépossédée et mise à l’écart. C’est d’ailleurs le cas de beaucoup de mères, y compris dans des familles qui n’affrontent pas le handicap. 

La mère a-t-elle le sentiment de s’être sacrifiée pour son fils ? 

Dans les familles que j’ai rencontrées, beaucoup de mères, dont les enfants ne sont pas autonomes, n’ont pas un instant à elles. Parfois, elles subissent un sentiment de sacrifice, notamment quand l’enfant quitte le domicile familial et s’émancipe : l’espace-temps de la mère qui était ultra-rempli jusque-là, que devient-il ? Comment faire face à ce vide ? Dans le film, le fait que la mère accepte de perdre l’autorité sur son fils et qu’elle le voit s’éclater avec son père, alors qu’elle a fait le «sale boulot» pendant 17 ans, me touche beaucoup. Au départ, c’est injuste pour elle, mais progressivement, elle va changer de point de vue et se laisser émouvoir par ces retrouvailles entre père et fils. En le voyant s’épanouir, elle va retomber amoureuse de son mari et participer à la course avec les deux hommes de sa vie. En un sens, elle entre de nouveau dans leur histoire. 

Pourquoi avez-vous choisi de situer l’histoire à la montagne ? 

J’avais envie de montrer l’enfermement mental de personnages dans un espace ultra ouvert, et le paysage alpin s’y prêtait formidablement. Pour moi, la maison incarne une sorte de prison où l’on étouffe : je l’ai filmée en plans fixes, avec peu de mouvements de caméra. Dès que les parents ou le fils ont besoin de se dire des choses importantes, ils sortent. Je trouvais intéressant de parler de solitude et de confinement dans un espace ouvert, apaisant et aride tout à la fois. Ce parti-pris m’a permis de choisir les décors en fonction de l’état d’esprit des personnages. 

Comment avez-vous eu l’idée de Jacques Gamblin et d’Alexandra Lamy pour les parents ? 

Jacques avait le corps et l’âge du personnage. Il peut avoir une vraie dureté dans le visage, mais dès qu’il sourit, il s’illumine. Je trouve qu’il y a encore beaucoup d’enfance en lui : il a gardé intacts sa capacité à s’émerveiller et son plaisir de la découverte. C’est un acteur qui accepte d’être ému par ses partenaires, ce qui n’est pas si banal. Et j’avais besoin d’un père qui vit ça. J’avais trouvé Alexandra formidable dans LES INFIDÈLES, dans une forme d’intimité et de sincérité extrême : alors qu’on a l’habitude de la voir pétillante, c’était la première fois, à ma connaissance, qu’on l’utilisait autant dans la retenue et dans la vérité. C’est ce qui m’a donné envie de lui proposer le rôle de la mère. 

On a le sentiment que ces deux acteurs se sont totalement emparés de leurs personnages … 

Lorsque j’ai proposé le projet à Jacques, je ne savais pas qu’il avait écrit un livre autour d’un père et de son fils réunis grâce au sport : c’était en fait la métaphore de sa relation à son propre père. De même, j’ignorais, en choisissant Alexandra, qu’elle suivait une famille avec un enfant différent depuis longtemps et qu’elle allait réaliser un documentaire pour Envoyé Spécial sur des enfants hospitalisés souffrant de pathologies lourdes et qu’elle était impliquée dans cette cause ! Comme si ces personnages étaient venus les trouver en tant qu’acteur et en tant que personne. 

Comment avez-vous retenu Fabien Héraud pour le rôle de Julien ? 

Avec cinq autres personnes, nous avons sillonné la France pendant près de cinq mois et visité 170 établissements pour trouver un jeune qui avait une différence clinique manifeste. J’avais demandé aux mômes de m’envoyer des images d’eux filmées : Fabien m’a fait parvenir un clip, qu’il avait réalisé avec une bande de copains, où on le voyait déconner avec son fauteuil ! Il avait un sourire désarmant. J’ai fait un essai filmé avec lui extrêmement simple et il dégageait une lumière évidente. Pour moi, Fabien, c’est un soleil. Ensuite, il fallait savoir s’il pouvait jouer des attitudes ou des sentiments qu’il n’éprouvait pas vis-à-vis de ses parents, car les infirmes moteurs cérébraux ont beaucoup plus de mal à feindre des émotions qu’ils ne ressentent pas. Il a donc été coaché pendant quatre mois et on a beaucoup travaillé ensemble sa prononciation et son phrasé. Sur le tournage, Fabien est le seul qui ait fait l’unanimité : il a rallié tout le monde à lui, quel que soit l’âge ou le milieu social de ses partenaires ou des techniciens. 

Quelles étaient vos priorités pour la mise en scène ? 

Pour l’Ironman, je tenais à assumer la dimension « grand spectacle » de cette course, avec une mise en scène à effets et des plans cut, sans être démonstratif pour autant. On filmait un exploit en train de s’accomplir et je voulais donc un feu d’artifice ! En revanche, pour l’intérieur de la maison, je voulais une mise en scène beaucoup plus sobre : alors que le mouvement caractérise les personnages à l’extérieur de la maison, les plans intérieurs sont plus statiques. 

Quel entraînement Jacques Gamblin a-t-il suivi ? 

Jacques s’est énormément entraîné aux trois disciplines du triathlon. Du coup, il n’avait pas besoin de beaucoup de temps de récupération après les prises «sportives», ce qui m’a permis de tourner bien plus de plans que prévu. En revanche, Jacques n’a pas souhaité rencontrer de jeunes infirmes en milieu hospitalier parce qu’il souhaitait que le film dépasse la problématique du handicap. Il voulait avant tout jouer un père et travailler la relation avec Fabien, dont il se sentait responsable. Il fallait d’ailleurs que Fabien ait une confiance aveugle en lui pour tourner les scènes où ils sont tous les deux à vélo, lâchés à 55 km/h dans des virages de montagne ! « J’avais envie de montrer l’enfermement mental de personnages dans un espace ultra ouvert, et le paysage alpin s’y prêtait formidablement » 

Entretien avec PHILIP BOËFFARD PRODUCTEUR 

Comment le projet a-t-il émergé ? 

Nils Tavernier est venu nous présenter une première version de son scénario. Dès nos premiers rendez-vous, ce qui nous a frappés, c’était l’adéquation entre le propos et le parcours de Nils. Son idée consistait à raconter l’histoire d’une famille confrontée à la problématique du handicap et faire en sorte qu’elle parvienne à se reconstruire. À première vue, on pouvait redouter le côté un peu angélique du récit, mais on a senti que Nils était extrêmement sincère, car il a lui-même côtoyé cet univers. D’ailleurs, il désirait clairement que le rôle du protagoniste soit confié à un véritable handicapé. Pour lui, cette histoire devait devenir une vraie fiction, un film de cinéma. Ce qui m’a également beaucoup plu, c’est le côté un peu anglo-saxon du récit qui se traduisait par une volonté très affirmée de raconter une histoire pleine d’humanité, où les sentiments sont forts, puissants et assumés comme tels, sans pour autant verser dans le sentimentalisme. Nils a ressenti dans son parcours ces émotions bouleversantes, et il a vécu des moments forts car il a observé des hommes et des femmes faisant face à l’adversité et se découvrant des ressources insoupçonnées. 

Dans quel sens avez-vous retravaillé le scénario ? 

Le principe de base – une famille dysfonctionnelle qui se reconstruit autour de la participation à un triathlon avec un enfant IMC (infirme moteur cérébral) – n’a rien d’original. Mais il y a quand même eu environ 9 mois de travail intensif sur le scénario. On voulait avant tout que le handicap ne soit pas le sujet de l’histoire : il fallait faire de Julien un adolescent comme les autres, qui a ses potes, qui a une libido et qui se révolte aussi contre ses parents. Certes, il n’est pas le fils qu’aurait aimé avoir son père, mais on tenait à ramener ses sentiments à ceux d’un ado. Le personnage de Julien devait être le plus actif possible dans le schéma narratif : on a cherché à lui donner une trajectoire, à le faire évoluer à travers ses décisions et à lui donner les moyens de surmonter les obstacles auxquels il était confronté. En résumé, il nous paraissait essentiel d’en faire un personnage à part entière et pas seulement un être passif qui exprime une demande auquel l’environnement tente de répondre. Du coup, on a cherché à injecter de la vie et de la complicité, et à apporter une dose de légèreté par rapport à la version de départ. 

Comment s’est déroulé le casting ? 

On s’y est mis très tôt ! Dès l’écriture, on a travaillé sur le casting, et c’était beaucoup plus compliqué que Nils ne le pensait. C’était une étape passionnante, qui m’a ouvert un monde qui m’était encore inconnu : on a découvert l’univers du handicap en cherchant comment contacter de jeunes IMC. Contrairement à un casting classique, où il suffit de se rendre dans un lycée, nous avons dû nous tourner vers des instituts spécialisés. Ces maisons ne comptent généralement pas plus de 150 enfants, d’âge, de sexe, et de problématiques différents. Du coup, trouver la personne qui soit dans la bonne tranche d’âge n’était pas facile, d’autant que nous devions nous assurer que cet ado était en capacité de jouer. Quelques associations nous ont aidés dans nos recherches. Et sur la base d’images tournées, on a effectué des présélections. Bref, on a eu besoin de 5 mois pour trouver Fabien ! Cette démarche était très positive et constructive car elle a permis à Nils d’enrichir et d’étoffer son protagoniste. Il fallait se poser les bonnes questions : qu’est-ce que ce personnage devait apporter au film ? On était d’accord sur le fait qu’il soit solaire, joyeux et plein de vitalité. Quand on a rencontré Fabien, avec son sourire et son charisme naturel, on a compris qu’on avait avant tout un ado face à nous : si c’était théorique jusque-là dans l’écriture, c’est alors devenu concret. C’est lui qui nous a permis d’aller plus loin dans cette direction avec beaucoup de justesse. 

Parlez-moi du tournage des séquences de l’Ironman. 

Ce qui est plutôt bien tombé, à mon avis, c’est la nécessité de tourner les scènes de l’Ironman dès le début du tournage. Le départ de la course constituait la première scène que Jacques et Fabien partageaient tous les deux. C’était un moment très intense, car ils se sont retrouvés parmi 2700 participants hyper entrainés à 6h du mat ! Je crois que ça leur a permis de nouer un lien très fort. Jacques a nagé près d’1km avec Fabien, puis on est restés sur place jusqu’à la fin de la journée : on a passé plusieurs heures auprès des athlètes, on a observé à la fin des épreuves les familles qui se soudaient autour des sportifs, certains se sont effondrés, d’autres nageaient dans le bonheur… Partager ces cinq heures avec ces athlètes venus du monde entier nous a permis de comprendre à quel point cette course avait un sens, au-delà de l’effort physique. C’est en réalité une magnifique preuve de don de soi et de dépassement de soi, une implication telle que c’est forcément un projet familial. 

Quelle est cette famille américaine dont s’inspire le film ? 

Nils connaissait plusieurs associations qui passaient par le sport pour permettre aux enfants handicapés de partager des émotions, et des sensations. Ces projets sportifs donnaient aussi un prétexte à ces jeunes pour quitter leur quotidien. Nils s’est vite rendu compte des bienfaits que cela procurait chez les enfants dans plusieurs familles qui adoptaient cette démarche. Il a aussi vu le regard envieux et plein d’inspiration que les jeunes handicapés portaient sur la famille Hoyt, ce père et ce fils américain dont on fait référence et qui ont fait plusieurs triathlons. Il a donc construit ses personnages en s’inspirant des différentes familles qu’il a rencontré lors de ses travaux au sein du monde médical et du handicap et a utilisé le symbole que représentaient les exploits de cette famille américaine. 

Comment se sont déroulés les repérages ? 

Dès le début, Nils souhaitait que la famille vive dans un lieu assez ouvert, qui découpe des volumes, et la région d’Annecy l’a particulièrement attiré. Il voulait mettre en rapport l’immobilité et le handicap avec un monde qui aspire au mouvement et qui engage à aller vers l’espace. C’était un point de vue très intéressant et les repérages se sont faits rapidement. On a essayé de trouver des endroits réalistes pour rendre cette famille crédible. Les paysages de cette région offraient aussi la possibilité d’avoir des scènes d’entraînement qui aient du souffle, et qui correspondent à l’esprit physique et sportif du film. 

Pouvez-vous me parler de votre collaboration avec Nils ? 

C’est un vrai plaisir de travailler avec lui. Nils a, d’un côté, une idée concrète de ce que son film doit être et de l’autre, il sait très bien s’entourer et écouter ceux qui, autour de lui, partagent cette vision du film. Et avec ce projet, on s’engageait sur un terrain extrêmement glissant. À chaque étape, depuis le scénario jusqu’au montage, en passant par le casting, le choix de Fabien pour le rôle principal, ou même de la musique, nous devions assumer l’émotion et réussir à la transmettre au public, sans que le spectateur puisse avoir le sentiment d’être pris en otage. On souhaitait plonger le public dans l’histoire pour qu’il ressente intensément les événements sans être manipulé. C’est dans cet esprit que Nils a su travailler à toutes les étapes de la production.

Entretien avec JACQUES GAMBLIN 

Comment pourriez-vous décrire votre personnage ? 

C’est un père qui a choisi son travail pour s’éloigner de chez lui et fuir son fils handicapé. Petit à petit, il va sentir le besoin de rattraper le temps perdu, c’est pourquoi il va accepter de se laisser embarquer dans l’aventure de l’Ironman avec lui. La détermination et la force d’entrainement du fils vont faire décoller le père. Même si c’est plus que dur, mon personnage sait qu’il n’a pas d’autre choix que d’y aller. Cette rencontre va être alors organique, physique, et ainsi plus puissante que si elle passait par les mots. 

Qu’est-ce qui vous a touché dans cette histoire ? 

Le fait que ces retrouvailles entre père et fils se font grâce au sport. Moi-même, j’ai eu l’impression de «rencontrer» mon propre père à travers l’activité physique, car c’était sur les terrains de sport que je le sentais le plus proche de moi. Le film a donc une résonnance très personnelle. J’ai aussi été ému par la découverte du monde du handicap. Je n’en avais aucune expérience et je me suis senti démuni face à cette ignorance. 

Comment avez vous abordé l’aspect sportif de votre rôle ? 

Je me suis beaucoup entraîné pour pouvoir relever le défi et être crédible sur le plan technique, le spectateur se devait d’y croire. Bien que plutôt sportif à la base, je me suis donc entrainé avec un coach qui m’a fait progresser par étapes, ainsi je me suis retrouvé à tracter un Zodiac lesté de poids, ou encore à parcourir des kilomètres à vélo avec des sacs de ciment de 25 kg… De plus, il y avait un certain danger notamment quand il fallait descendre à toute vitesse les cols à vélo avec Fabien. Dans ces moments, je devais être tout à la fois raisonnable et très attentif car j’avais la responsabilité de Fabien, et en même temps réellement intrépide, pour qu’on sente le bonheur de la vitesse. Ainsi il nous a fallu travailler tous les deux sans filet, en toute confiance. D’une certaine manière, le film nous est rentré dans le corps à tous points de vue et c’est seulement après coup que nous avons pris la mesure des risques encourus dans le feu de l’action. 

Il y a une charge émotionnelle très forte dans ce film qui se traduit par une réelle pudeur. 

Je crois que ce qui a servi le film, c’est la dimension physique de nos émotions : dans l’entrainement, dans la participation à l’épreuve, et aussi dans la dépendance physique de Fabien, car je devais très régulièrement le porter, le toucher… Les «je t’aime» existent surtout dans l’action, dans cet effort commun, dans l’énergie de la préparation. C’était un ton difficile à trouver, et c’est en étant le plus possible dans le présent, proche de nos sensations physiques, que nous avons réussi à faire surgir la puissance de ces sentiments. Le premier jour de tournage a été le départ de l’Ironman, avec 7 caméras, en direct, au milieu de 2 700 athlètes, cette journée a été fantastique : j’étais très impressionné par ces gens qui décident de faire tous ces efforts pour aller au bout d’eux-mêmes. C’est un moment extrêmement intense de voir tous ces athlètes sortir de l’eau après avoir parcouru 3,8 km de nage. Car on sait qu’ensuite il leur reste des kilomètres de vélo à faire, puis ensuite un marathon ! Ils sont incroyables : ils se sont donnés un objectif, ils se sont préparés, ils foncent, et ils accomplissent une recherche assez mystérieuse, et très personnelle, une vraie rencontre mystique avec soi-même. Nils a réussi à rendre compte de la durée des 16 heures de course et de l’ampleur de l’Ironman dans la dernière partie du film. Ça fonctionne vraiment bien à l’écran : le spectateur est dans l’effort avec les personnages. J’ai l’impression que c’est une des grandes réussites du film. 

Comment avez-vous travaillé la proximité affective avec Fabien Héraud ? 

Plus j’avance dans ce métier et plus j’arrive disponible sur le plateau, prêt à faire confiance à ce qui pourra s’y jouer, à capter l’instant présent… Sur ce film, cette démarche a compté énormément et nous nous sommes nourris des inconnues et des surprises. D’autant plus que c’était aussi le premier film pour Fabien. Celui-ci est merveilleux : il a non seulement une présence qui illumine l’image et ceux qui l’entourent mais il a su effectuer un vrai travail d’acteur. 

L’alchimie a-t-elle été immédiate avec Alexandra Lamy ? 

On a très vite compris, avec Alexandra, qu’on devait être dans une simplicité et une vérité de rapports. On s’est vite trouvés et c’était très agréable de travailler ensemble, d’autant plus qu’on partage le même sens de l’humour !

Entretien avec ALEXANDRA LAMY 

Qu’est-ce qui vous a intéressée et touchée dans le scénario ? 

Cette histoire a particulièrement résonné en moi car je suis impliquée dans une association qui s’occupe d’enfants souffrant de maladies orphelines. Je dois dire que j’ai été très sensible à ce beau récit d’un jeune handicapé qui décide de demander à son père de participer à un triathlon. Il y avait là une formidable occasion d’évoquer le rapport au handicap : pour certains, ce rapport est très violent, comme s’il s’agissait d’une maladie contagieuse. Je suis toujours très surprise de constater ce type d’attitude, et je me suis donc dit que ce film permettrait de porter un autre regard sur le sujet. Par ailleurs, l’histoire insiste sur l’importance des liens familiaux qui, à mon avis, est un thème essentiel dans le contexte actuel. Mais c’est surtout un « feel-good movie » ! Car même si le point de départ est dramatique, l’histoire est belle, touchante, et drôle. On sort de là avec l’envie d’aimer tout le monde ! 

Quelle est votre implication au sein de l’association Rêvons pour nos Pitchounets ? 

Je me suis occupée de femmes qui ont mis entre parenthèses leur vie professionnelle et leur vie de couple pour se consacrer à leurs enfants atteints de maladies très graves. Ce sont des femmes très fortes qui font passer la vie de leur fils ou de leur fille avant tout. Du coup, je me suis largement inspirée de ce que j’avais moi-même partagé de leur vécu pour interpréter mon personnage. J’avais également réalisé un documentaire sur une femme dont l’enfant souffrait d’une maladie orpheline, si bien que je me suis aussi inspirée de ce que cette mère éprouvait. Comment pourriez-vous décrire votre personnage ? Mon personnage ne devait pas être une femme négative et constamment dans l’opposition, car les mères qui se trouvent dans ces situations difficiles témoignent, au contraire, d’un immense courage et d’une vraie combativité. Et si elles sont très protectrices vis-à-vis de leur enfant, c’est plus par peur. 

Comment s’est passé le tournage avec le jeune Fabien Héraud ? 

Fabien, c’est un amour ! C’est toujours compliqué de savoir comment aborder le handicap, si bien qu’on se demande si on peut en parler ou non. En fait, Fabien est très ouvert sur le sujet : il en rit, il s’en moque lui-même et il nous a tout de suite mis à l’aise. Il faut dire que ce n’est pas un rôle facile : c’était même très fatiguant pour lui car, pour commencer à 8h le matin, il devait être debout depuis 5h30 pour se préparer. En arrivant, il était donc déjà un peu fatigué, et puis il s’épuisait assez vite sur le plateau, mais il gardait toujours la pêche tant il était heureux d’être là. Il a joué son rôle de comédien à fond et il a même fait des impros. Certaines scènes avec lui étaient très faciles à jouer : il communiquait ses émotions à travers son regard et ses gestes. Je n’avais qu’à le regarder pour comprendre ce qu’il ressentait. 

On sent qu’il a vécu cette expérience intensément… 

On l’avait bien prévenu que sur un tournage, on est tous très proches les uns des autres, et qu’ensuite on se sépare, on va vers un autre projet et on reforme une nouvelle famille. On ne voulait pas qu’il se sente abandonné après le tournage. Mais, c’est l’inverse qui s’est passé car c’est un être merveilleux qui a donné le meilleur de lui-même et qui offre beaucoup d’amour aux gens. À la fin, on était tous très émus de devoir se séparer.

On croit totalement au couple que vous formez avec Jacques Gamblin. 

Avec Jacques, l’alchimie a été immédiate et je ne saurais pas vraiment l’expliquer. Je crois qu’il y avait Fabien au milieu et que cela nous a rapprochés comme dans une famille : il nous a cimentés. On a eu envie de devenir ses parents et cela nous a reliés l’un à l’autre. Et pourtant, on ne se connaissait pas du tout. 

Qu’avez-vous pensé du film ? 

J’aime le mélange des genres au cinéma. Et, justement, avec ce film, là où on aurait pu être dans le drame, il y a résolument quelque chose de solaire, de positif qui s’en dégage. En découvrant le film, j’ai vraiment été prise par l’émotion, par les grands et beaux sentiments vécus par les personnages alors même que je connaissais le scénario dans le détail. Du coup, je pense qu’il va très certainement toucher beaucoup de gens.

Entretien avec FABIEN HÉRAUD 

Que pensiez vous de ce projet dont le personnage principal est, tout comme vous, un jeune handicapé ? 

Je ne connaissais pas du tout Nils, puisqu’on s’est rencontrés au moment du casting. Mais ce qui m’a vite rassuré, c’est qu’il avait déjà travaillé avec des handicapés et qu’Alexandra Lamy avait réalisé des documentaires sur les difficultés que traversent certaines familles face à la maladie ou au handicap, et qu’elle était donc assez à l’aise avec l’univers du film. Du coup, je me suis immédiatement senti compris. 

Qu’avez-vous pensé du scénario ? 

Il m’a beaucoup touché, car certaines situations sont très réalistes et très justes. Cette histoire faisait écho à ma propre vie, et je partage évidemment une certaine proximité avec mon personnage. Et même si je n’ai pas du tout le même caractère que lui, j’avais très envie d’aller passer le casting, en me disant qu’on verrait bien ensuite où cela me mènerait ! 

Justement, comment pourriez-vous décrire Julien ? 

Il a un sacré caractère ! Quand il a décidé quelque chose, il ne revient pas sur sa décision, il va jusqu’au bout et, de ce point de vue, on se ressemble ! Il fait preuve de beaucoup de courage, mais je crois que quand on est handicapé, il en faut. Par ailleurs, il voit très peu son père, et ils ont donc très peu de liens. Il est plus proche de sa mère, qui se consacre quasi exclusivement à lui. D’une certaine manière, il est conscient qu’elle l’étouffe un peu et, en même temps, il sait que ce serait compliqué de se débrouiller sans elle car il n’est pas autonome. Du coup, il ne peut rien dire, d’autant qu’il aurait peur de la blesser. Et sans elle, il n’aurait plus personne sur qui compter. 

Comment s’est déroulé le tournage du départ de l’Ironman à Nice ? 

On avait fait une simple répétition la veille, avec Jacques, pour se mettre dans le bain. Mais quand on est descendu de notre hôtel à 5h00 du matin le dimanche matin, qu’on a vu tous ces athlètes dans la rue déjà concentrés et puis l’ambiance près du site de l’Ironman, on a été à fond dans cette ambiance incroyable. On pouvait ressentir énormément d’émotion, de tension et de pression, on voyait bien que c’était vraiment l’aboutissement d’un gros travail et ça m’a vraiment bouleversé. En plus c’était mon premier jour de tournage ! Du coup, c’était très éprouvant physiquement et mentalement, mais aussi très un souvenir incroyable. 

Comment s’est déroulé le tournage avec Alexandra ? 

On s’est vite rendus compte qu’on était sur la même longueur d’ondes. Et de mon côté, j’appréhendais sa réaction face à mon handicap, mais elle a été très naturelle. Elle était toujours de bonne humeur, et joyeuse. Avant de tourner, on restait un peu silencieux et cela mettait un peu de pression positive pour les scènes. 

Et avec Nils ? 

Nils cherchait avant tout un comédien et pas juste un adolescent handicapé. Pendant le casting, il n’a pas hésité à me pousser dans mes retranchements. Ensuite, sur le tournage, il me mettait toujours en confiance et m’encourageait à aller de l’avant, il était tout à la fois protecteur et exigeant. 

Vous laissait-il parfois improviser ? 

Dans une scène à l’hôpital : Nils voulait que je joue d’une certaine manière, mais ça ne fonctionnait pas vraiment. Après plusieurs prises, il m’a finalement dit «Joue-le comme tu le sens !». Je me suis concentré, je me suis rappelé des événements qui m’avaient énormément marqués, et puis je me suis lancé... Je crois que l’expression de mes sentiments n’était pas mal, parce que l’équipe a été émue. Cette séquence a représenté une sorte de cap pour moi, car à ce moment-là, j’ai compris beaucoup de choses. 

Vous êtes-vous appuyé sur votre propre vécu ? 

Oui, bien sûr. Pour faire naître des émotions très fortes, je suis parti de ma vraie vie et j’en ai repris certains éléments pour façonner mon personnage. Car j’ai une réelle expérience d’absence d’autonomie. Et puis, j’ai pensé à mes copains, qui rencontrent parfois plus de difficultés que moi, et cela m’a aidé pour interpréter mon personnage. J’ai un état d’esprit assez optimiste, et je sais bien que je suis handicapé, mais je me dis sans cesse qu’on n’a qu’une seule vie et qu’on doit en profiter à fond. Il faut se battre et franchir les obstacles ! Je pense que quand on est handicapé, c’est absolument indispensable d’avoir une vraie force mentale.

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